COUR D’APPEL DE BRUXELLES Audience solennelle de rentrée du 1er septembre 2004 •
« LA PROTECTION JURIDIQUE DU SECRET PROFESSIONNEL DES ACTEURS PSYCHOMÉDICO-SOCIAUX INTERVENANT DANS UN CONTEXTE JUDICIAIRE » Exposé de Monsieur l’Avocat général Lucien NOUWYNCK
•
L’ADMINISTRATION DE LA JUSTICE DANS LE RESSORT DE LA COUR D’APPEL DE BRUXELLES Discours prononcé par Monsieur le Procureur général André VAN OUDENHOVE
-------------
HOF VAN BEROEP TE BRUSSEL Plechtige Openingszitting van 1 september 2004 •
“DE JURIDISCHE BESCHERMING VAN HET BEROEPSGEHEIM VAN DE ACTOREN UIT DE PSYCHO-MEDISCHE EN SOCIALE SECTOR DIE OPTREDEN IN EEN GERECHTELIJKE CONTEXT” Uiteenzetting van de heer Advocaat-generaal Lucien NOUWYNCK
•
DE RECHTSBEDELING IN HET RECHTSGEBIED VAN HET HOF VAN BEROEP TE BRUSSEL Rede uitgesproken door de heer Procureur-generaal André VAN OUDENHOVE
Mijnheer de Eerste Voorzitter, Geachte Collega’s, Dames en Heren,
Bij de openingsrede van vorig jaar, had mijn ambt de gelegenheid een der domeinen te belichten die door het koninklijk besluit van 6 mei 1997 specifiek aan de procureur-generaal te Brussel zijn toebedeeld, met name de leefmilieucriminaliteit. Ik zou dit jaar opnieuw willen vertrekken vanuit de specifieke bevoegdheden die aan elke procureur-generaal zijn toevertrouwd met de bedoeling te streven naar een algemeen en beter gecoördineerd crimineel beleid voor het land. Aldus wordt vanuit Brussel ingevolge de wet maar ook in nauw overleg met de andere ressorten aan wie samenhorige sectoren zijn toebedeeld, bijzondere aandacht besteed aan de jeugdbeschermingsproblematiek en het slachtofferbeleid. De nauwkeurige observatie van de ontwikkelingen terzake hebben geleid tot diepgaande overwegingen betreffende de maatschappelijke taak van het openbaar ministerie en tot nieuwe benaderingen voor het uitoefenen van de publieke vordering. Indien destijds de doelstellingen van het strafrecht zich eerder situeerden in het louter opsporen en bestraffen van de daders teneinde te trachten het evenwicht in de gestoorde maatschappelijke orde op die manier te herstellen
wordt vandaag veel meer aandacht
besteed aan toekomstgerichte overwegingen, zoals de aanpak van de persoonlijkheid van dader en slachtoffer en de preventie van de recidive. Om die doelstellingen te verwezenlijken doet justitie uiteraard beroep op de tussenkomst van deskundigen uit de psycho-medische en sociale sector. Deze
evolutie
opent
vanzelfsprekend
nieuwe,
hoopgevende
perspectieven
maar
veronderstelt ook een vernieuwende aanpak van fundamentele principes zoals de bescherming van het beroepsgeheim. * *
*
Depuis fort longtemps Monsieur l’Avocat général Lucien NOUWYNCK s’est montré un observateur vigilant de ces approches nouvelles, d’abord en tant que collaborateur de M. le ministre de la Justice Melchior WATHELET, ensuite en qualité de conseiller général à la politique criminelle et maintenant, depuis plusieurs années, dans le cadre de ses attributions au sein du parquet général de Bruxelles. Il vous livrera aujourd’hui une synthèse de ses réflexions dans un exposé qu’il a intitulé « La protection juridique du secret professionnel des acteurs psycho-médico-sociaux intervenant dans un contexte judiciaire ». Avec votre assentiment, Monsieur le Premier Président, je souhaiterais lui céder la parole. Introduction Pour des raisons qui tiennent sans doute à l’évolution du rôle social de la justice et des attentes placées en elle, les acteurs traditionnels du système judiciaire font de plus en plus appel à des intervenants du secteur psycho-médico-social à des titres divers1. Les questions relatives au secret professionnel de ces intervenants sont au cœur de leurs relations avec les acteurs judiciaires, comme d’ailleurs entre eux-mêmes lorsqu’ils agissent dans des cadres ou avec des mandats différents. Une clarification est donc plus qu’utile. Dans un premier temps, nous verrons comment le secret professionnel peut se comprendre comme outil de travail dans le positionnement professionnel. Si le secret médical est communément admis et généralement reconnu, les psychologues et les travailleurs sociaux sont plus exposés aux doutes, voire aux pressions. Il conviendra de se pencher sur la nature de leurs missions lorsqu’ils interviennent dans un contexte judiciaire. Une attention particulière sera accordée aux diverses missions légales des assistants de justice. La création, en 1999, du Service des maisons de Justice a permis de clarifier le positionnement professionnel de ces travailleurs sociaux qui sont des interlocuteurs
! #$ '
"
!
! & ! (
" % " %&
) privilégiés tant pour les magistrats que pour les justiciables. La structure de ce service, parallèle à celle de l’organisation judiciaire, présente l’important atout de faciliter un dialogue structurel entre responsables identifiés tant au niveau des arrondissements judiciaires que des ressorts de cours d’appel et de permettre ainsi une meilleure compréhension des rôles respectifs. Une seconde partie sera consacrée au statut juridique du secret professionnel. Nous examinerons d’abord les principes légaux et déontologiques qui régissent le secret professionnel des intervenants psycho-médico-sociaux et la divulgation aux autorités d’informations couvertes par ce secret. Les règles relatives au secret partagé seront ensuite évoquées, ainsi que certaines exceptions. Nous serons amenés à nous référer non seulement à la loi et à la jurisprudence, mais aussi à la déontologie des professions concernées. Si, en effet, la loi consacre le principe du secret professionnel et sanctionne sa violation, la déontologie permet d’en comprendre la finalité, l’objet, l’étendue et les modalités qui peuvent dans certains cas entourer sa révélation.
1. Un outil de travail dans le positionnement professionnel 1.1.
Quelle articulation entre les interventions judiciaires et les interventions psycho-médico-sociales ?
Il ne se conçoit plus que l’intervention de la justice pénale se limite à infliger une peine, à mettre l’auteur à l’écart de la société pour un temps plus ou moins long. On se préoccupe à juste titre de l’avenir : l’objectif d’évitement de la récidive est aujourd’hui central. En outre, d’importants efforts ont été consentis pour l’accueil et l’assistance des victimes. De même, dans le secteur de la protection de la jeunesse et dans certains domaines de la justice civile, la prise en considération d’aspects psychosociaux est devenue omniprésente. Le développement du travail en réseau peut être enrichissant en ce qu’il stimule des lieux de rencontre où acteurs judiciaires et psycho-médico-sociaux recherchent des modes d’intervention cohérents dans le respect des objectifs, contraintes et logiques de travail de chacun, légitimes dans leurs différences.
* Un risque de dérive apparaît là où, par manque de connaissance ou de reconnaissance réciproque, un acteur impose sa propre logique et veut utiliser l’autre à ses propres fins, sans tenir compte d’une nécessaire distinction des rôles. La préoccupation dominante de la réduction des risques entraîne alors une irrésistible instrumentalisation des interventions de type psychosocial, voire médical, au service d’un objectif sécuritaire à court terme2. Le recours à des professionnels du travail psychosocial avec les justiciables – suspects, condamnés et victimes – nécessite le développement d’une réflexion sur la déontologie et le sens du travail psychosocial dans le contexte judiciaire. Nous verrons que les maisons de justice privilégient une démarche de responsabilisation du justiciable. Mais le concept de responsabilisation est loin d’être univoque. D’un point de vue judiciaire, assumer ses responsabilités se comprend d’abord en termes d’obligations juridiques. Une certaine conception de la responsabilisation consisterait, par exemple, à confronter l’auteur d’un acte à ses conséquences et à l’obligation de réparer le préjudice éventuel. Cette approche est réductrice. Certains observateurs y voient même la marque d’une régression sociale3. Si la responsabilité implique qu’un justiciable assume les conséquences de ses actes, il ne doit pas être perdu de vue que la démarche de responsabilisation consiste aussi à rendre la responsabilité. Cette démarche s’inscrit dans un processus conduisant à ce que l’intervention judiciaire ne se justifie plus. Il n’y a pas de responsabilité citoyenne sans liberté effective de poser des choix, sans promotion de l’autonomie des personnes. Dans cette perspective, le pur contrôle cède le terrain aux interventions de type psychosocial qui peuvent ainsi retrouver tout leur sens. Tendre à responsabiliser suppose un espace de liberté et de parole permettant à un justiciable de donner un sens propre à sa relation à la réglementation sociale, au départ de + % ,- ' ./0-+1 2 4 55 6* + % - ' ./0-+1 2 7& 8 .4 !" " $ % " # %
3 .1 555
9 1 )5<
: 2
.
; # "
& "
= l’intervention judiciaire. Cela suppose l’accès à une logique de sujet davantage responsable de son destin, ce qui est de nature à modifier son rapport à la loi comme son rapport à l’autre et à la société4. Si nous mettons l’accent sur le secret professionnel comme outil de travail dans le positionnement professionnel, c’est que son respect marque la distinction entre le pôle du contrôle incapacitant et celui du soutien à la mobilisation des ressources de la personne. Grâce à une prise de conscience des enjeux sociaux et au prix d’une clarification de leurs positionnements professionnels respectifs, les acteurs judiciaires et les travailleurs psychosociaux peuvent assumer leurs rôles avec leurs limites, se respecter mutuellement et partager un même souci majeur : respecter les justiciables. Respect des droits de l’homme (référence de base de l’intervention judiciaire) et respect de la personne et de sa liberté (principe déontologique de base du travail psychosocial5) sont des démarches qui se rejoignent.
1.2.
Application du secret professionnel aux intervenants psycho-médico-sociaux
L’article 458 du Code pénal, qui punit la violation du secret professionnel, s’applique à toutes personnes dépositaires par état ou par profession, des secrets qu’on leur confie. Les médecins sont visés explicitement. Les psychologues et les assistants sociaux sont également tenus au secret professionnel, vu la nature de leurs missions. Cette obligation est consacrée par tous les codes de déontologie de ces professions : « Le psychologue est lié par le secret professionnel tel qu’il est mentionné dans le Code pénal belge, toutes les fois où il est fait appel à ses services. »6 « L’assistant social s’impose une
)
2
% " # > 4 /12?@ A (
$ %
' : B C//1D 1 1E # )
(
$
$ %
& +
7
!
2
55
" *6
* #"
+ !
% A : B C//1D 1 1 *
*5E
*
3 =
'
! ! = < " ) !
%& ! 66) ' 3
%& : 66<
: "
F
%, '
!
)
3
" ! !
< %&
!
** " *< 66<
6
*
< grande discrétion en toutes circonstances. Il respecte scrupuleusement et fait respecter le secret professionnel. »7 Lorsque ces professionnels travaillent en leur qualité de médecin, de psychologue ou de travailleur social dans un cadre judiciaire ou « parajudiciaire », ils restent tenus au respect des règles déontologiques propres à leur profession. C’est en cela que nous pouvons affirmer que le secret professionnel caractérise le positionnement professionnel. Le Code de déontologie médicale est à cet égard particulièrement clair8. Ce code, qui contient l’ensemble des principes, des règles et des usages que tout médecin doit observer9, précise, dans un chapitre spécialement consacré aux « médecins-conseils, contrôleurs, experts ou fonctionnaires », que ceux-ci sont soumis aux dispositions du code et que le médecin mandaté pour accomplir une mission dans un tel contexte « doit garder son indépendance professionnelle à l’égard de son mandant, aussi bien qu’à l’égard d’autres parties éventuelles »10. Le Code de déontologie établi par la Fédération belge des psychologues (FBP-BFP)11, qui s’inspire du méta-code proposé par la European Federation of Professional Psychologists Associations (EFPPA), constitue un document de référence pour toute personne exerçant la profession de psychologue en Belgique12 « quels que soient leur pratique et leur cadre professionnel »13. Il précise que « Lorsque ce qui est demandé au psychologue, dans le cadre de sa profession, entre en conflit avec le présent code, il a le devoir d’agir selon les principes du code et, au besoin, d’en référer à la Commission d’éthique »14. Pour les assistants sociaux15, des textes ont été conçus dans un cadre international16. Sur la base de ces références, l’Union des associations francophones d’assistants sociaux (UFAS)
<
'
G
! '
0
& HHH
! ? .
6
' + %'
! !
A'
!
/
! %& ! !
' ) '
CCC '& !
3
!
! 3 3
*
" 6GG ,
6
! !
C+ %& !
G %& %&
6GG C
" )<E
. 66) A'
" A3C/2E
6<=
6 ( 66 A-
! !
! +
)
!
5
=
66< ?
6)* A! HHH
H
, !E
$ " 66< 7 ! 66< )** $ " 3
HHH
:
66)E
6)*E 3C/2
:
"
G a établi un code de déontologie. Les principes consacrés par ce texte s’appliquent « dans n’importe quel secteur du service social et de l’action sociale où [l’assistant social] est amené à exercer une activité professionnelle »17. « La déontologie qui en découle constitue une référence commune permettant à chacun d’apprécier la conduite à adopter dans les situations professionnelles diverses et de trouver l’équilibre entre les obligations envers l’employeur et envers les personnes qui font appel aux assistants sociaux »18. On notera enfin que toute personne qui, à quelque titre que ce soit, apporte son concours à l’application de la loi relative à la protection de la jeunesse ou aux décrets relatifs à l’aide à la jeunesse est tenue au secret professionnel19.
1.3.
La spécificité des missions des assistants de justice
« La connaissance de la méthodologie et de la déontologie du travail social », « le respect de la déontologie du travail » ainsi que les « exigences déontologiques de la profession en ce qui concerne le respect de la vie privée et le secret professionnel » sont mis en évidence dans l’arrêté ministériel du 23 juin 1999 fixant les descriptions et profils de fonction pour le personnel des services extérieurs du Service des maisons de justice du ministère de la Justice20. Ces dispositions consacrent la règle selon laquelle tous les assistants de justice, même titulaires d’un diplôme autre que celui d’assistant social, sont tenus, vu la nature de leurs missions, au respect de la déontologie de cette profession et en particulier au respect du secret professionnel. Une circulaire du 28 juillet 2003 précise les principes déontologiques
$ $! < ' 8 G ' 6
G
!
0
&
66<
!
0
&
66<
6=* <
6G*
' "
"
> 5
6
! (
' ( 666E
" / 0 $!/ ! " $! ) 665 ) I ' *< + % , ! J * 66< ! " 666 CCC
<< I
' (
'
'
J ! !
A-
$ " C+
* +
) " " 66<E A-
66 (
$ "
6 de l’assistant de justice21. Ce texte transpose la déontologie des assistants sociaux au contexte professionnel spécifique des assistants de justice et l’explicite, sans y déroger. Les missions des assistants de justice sont diverses mais relèvent toutes d’une forme de travail social : accueil social de première ligne, accueil des victimes, médiation pénale, étude sociale en matière civile, enquête sociale ou rapport d’information succinct en matière pénale, guidance de justiciables laissés ou remis en liberté moyennant le respect de conditions dans différents cadres légaux et extralégaux, mise en œuvre et suivi de l’exécution des peines de travail22. En matière d’accueil des victimes, et sauf le cas du recueil d’informations auprès des victimes dans le cadre de la procédure de libération conditionnelle, l’assistant de justice est chargé de communiquer des informations à la victime, non de recevoir ses confidences. La relation qui se met en place entre une victime ou un proche d’une victime et un assistant de justice dans un tel contexte peut cependant avoir pour conséquence que cet assistant de justice recevra des informations qu’il n’a pas sollicitées. Les ayant reçues en tant que travailleur social, il devra gérer ces informations selon sa déontologie et orienter la victime vers le magistrat ou la police si cette victime souhaite qu’il en soit tenu compte dans le cadre de la procédure en cours. Dans le cadre d’une médiation, il incombe à l’assistant de justice, au départ d’une position tierce, de tenter d’instaurer un dialogue de manière à ce que les deux personnes concernées puissent se reconnaître dans leurs vécus par rapport aux faits, leurs aspirations et leurs contraintes, et puissent dégager elles-mêmes une solution acceptable, ce qui suppose un espace de parole libre dont la confidentialité est garantie23. Lorsqu’un assistant de justice réalise une enquête sociale ou un rapport d’information succinct en matière pénale24, ou encore une étude sociale en matière civile25, il se trouve .
"
!
273
G
55
2 !
2 <
*
$ "
666 666E C %
6 '
$ K. A66E 6 $
2
$ $ " 5
%
<
55
. )
!
( A-
$
% <
" "
!
' CC %,
1 (
%
<
'
1
555
!
(
$
A-
555E <<
G +
6=*
"
F 1 +
+ +
5 dans une position comparable à celle d’un expert, sa mission se situant au stade de l’information en vue d’une prise de décision par une autorité judiciaire. Sa position est plus délicate lorsqu’il intervient au stade du suivi de l’exécution d’une décision, dans le cadre d’une guidance sociale. Ce type de mission présente un caractère hybride, aux confins de l’aide et du contrôle. L’assistant de justice ne s’y trouve en effet ni dans la position d’un policier, ni dans celle d’un thérapeute26. Il convient donc d’examiner plus particulièrement la nature des missions des assistants de justice chargés de la guidance des justiciables tenus au respect de conditions. La création, en 1999, du Service des maisons de justice du ministère de la Justice a entre autres permis, outre la mise en place d’une structure d’encadrement et de formation, le développement d’une réflexion approfondie sur le positionnement professionnel des membres de ce service, chargés de missions diverses, mais ayant en commun le fait d’accomplir un travail social dans le contexte particulier d’un mandat judiciaire. Cela se traduit par la définition de méthodologies, d’une déontologie et d’un cadre de référence axés sur une démarche de responsabilisation27. Lorsqu’un justiciable est placé en liberté sous conditions, que ce soit dans le cadre d’une alternative à la détention préventive, d’une probation ou d’une libération conditionnelle, provisoire ou à l’essai, des conditions d’obligation d’ordre psychosocial peuvent assortir la peine ou la mesure28. Ces conditions impliquent une forme d’investissement personnel du justiciable, qui est de nature à soutenir un changement en vue d’éviter la récidive. Les assistants de justice sont chargés de la guidance sociale des justiciables tenus au respect de conditions d’obligation de ce type et rendent compte à l’autorité mandante de leur respect et éventuellement de leur pertinence afin de permettre à cette autorité de les adapter.
2 $ % = L F % 7 N @@1' ./ 4 1 7 4 555 < + % #1+?2 9 " : :@ = 55 0' @ ! & <" 5 G # ! ( O 5 665
M C.?@ . =
6 +,
*
345
.
!
+
; @ &$
! !
F*
!
!
A+ % "
E
7
G
L’assistant de justice est ainsi investi d’une mission relevant du travail social. A ce titre, il est « un agent d’aide personnelle visant à permettre à l’homme de mieux se réaliser par une meilleure utilisation de ses propres ressources et de celles de la société et de favoriser ainsi l’épanouissement de ses potentialités, une plus grande autonomie et une prise en charge responsable »29. Dans le cadre du travail social sous mandat, le travailleur psychosocial devra faire le point sur les ressources et les potentialités du justiciable et de son entourage. Il lui incombera aussi de soutenir le justiciable dans la mobilisation de ses ressources et dans sa volonté de s’investir dans un processus de changement30. L’assistant de justice doit donc développer, à travers une méthodologie propre31, un positionnement professionnel dans la recherche d’une articulation, forcément délicate, entre l’aide et le contrôle, sans trahir son identité de travailleur social. Ce qui fait la spécificité de sa fonction dans le cadre du suivi d’un justiciable en liberté sous conditions, c’est l’aide qu’il apporte à ce justiciable par rapport à ces conditions, vues comme leviers dans un processus de responsabilisation. Il s’agit, dans le cadre strict du mandat et des conditions, de partir du sens que la personne donne à son comportement et de s’appuyer sur ses compétences pour soutenir un processus
changement32.
de
L’objectif
est
l’évitement
de
la
récidive
grâce
au
développement, par le justiciable, d’un mode d’adaptation qui ne le mette plus en conflit avec la loi33. 6
' 66* 5 8
!
0
&
#" 1 3.C1#41.> *
% A8 '.?DC1. 6G
) E & ! 8
&
!
2 &C
.
7 &
J 7
55 55
A :
&
A+ % =6 # : "
! $
E 1 E %
& ' 9
$ ,
8
1
!
$
+
7
$
9
$
2
& 2 *
! 273
! E8 (
A'
$ B C//1D 1 1 *
$ & # +7
-
' 0 :;
:
Dans ce travail, l’outil de l’assistant de justice est la relation qu’il peut mettre en place avec le justiciable. Celle-ci suppose la clarté – par le rappel du cadre légal et du mandat – mais aussi l’établissement d’une relation de confiance garantie par le secret professionnel, sous la seule réserve des rapports adressés à l’autorité mandante dans le cadre strict du mandat34. Il apparaît ainsi que le justiciable n’est pas réduit à l’état de prédateur qui devrait être seulement surveillé et limité dans sa liberté pour l’empêcher de commettre de nouveaux méfaits. Il est reconnu comme personne autonome capable d’évoluer et de poser des choix. La société consent un investissement pour le soutenir dans cette démarche qui doit d’ailleurs conduire à terme à ce que l’intervention de la Justice devienne inutile. C’est là toute l’originalité et la richesse d’une prévention de la récidive fondée sur une composante d’aide et pas uniquement sur le contrôle.
2. La protection légale du secret professionnel 2.1.
Fondement, nature et étendue du secret professionnel
L’expression courante évoquant celui qui se retranche derrière son secret professionnel risque d’accréditer l’idée selon laquelle garder le secret ne serait qu’un droit que certains professionnels pourraient invoquer. Or, pour ceux qui y sont tenus, garder le secret est un devoir, dont la violation, sous réserve des exceptions prévues par la loi ou admises par la jurisprudence, est sanctionnée par l’article 458 du Code pénal. L’objectif de cette obligation ne se limite pas à la protection des personnes directement concernées, mais tend également à protéger la confiance que le citoyen doit nécessairement avoir envers certaines professions. Cette valeur est considérée comme supérieure à la
+
: % A3 P?0.C 2P-:41 ! 665 "
)
$
<
+
C .#
$ "
F 1 %
7 G O
C
1
< 66*
E 5
répression des crimes et délits : il est admis qu’un criminel a le droit d’être soigné par un médecin sans crainte d’être dénoncé par celui-ci35. C’est notamment en tant que condition nécessaire à l’exercice de certaines missions touchant au droit à la santé, à la liberté de conscience et au respect de la vie privée que le secret professionnel est protégé par la loi36. Pour les travailleurs sociaux comme pour les professionnels de la santé mentale et les médecins, le secret professionnel est un outil de travail nécessaire à l’établissement d’une relation de confiance. Le secret professionnel est d’ordre public <. Il en découle plusieurs conséquences majeures. Celui qui est lié par le secret professionnel n’est pas libre d’apprécier selon ses propres critères dans quels cas il garde le secret ou parle, sauf lorsqu’il est appelé à témoigner en Justice ou devant une commission d’enquête parlementaire, ou face à la situation très exceptionnelle de l’état de nécessité. Ensuite, l’autorisation de la personne concernée ne suffit pas à autoriser le détenteur du secret à le révéler38. Il ne pourra le faire que dans la mesure autorisée par sa déontologie. Le secret est en effet fondé sur la préservation d’intérêts généraux, lesquels dépassent les intérêts individuels39. De ce caractère d’ordre public du secret professionnel découle également une conséquence sur le plan des poursuites pénales : des poursuites uniquement fondées sur des éléments de preuve recueillis en violation du secret professionnel sont viciées40.
*
.
, =
#" 66 C
$ 65E
3
G
% A'
2 +4
<
# +
"
'
@ ! 66 ,
G
8 41./ 9 ;* * $" % A' * $" % A' 66* CCC) E
6G* * %& ! 66 C 6 ) #
66< (
F' F + K* 4
! 0
!
4 %
(
** # + %7 ! 55) " $
=) E < &
6
! )GE
66
% ,7 8 41./ * * ' !
+ %, !
=
!
=
A'
5
! 6
: " 6<6 C
) Si l’article 458 du Code pénal ne vise explicitement que les secrets confiés, il est admis que l’obligation de secret s’étend aux faits constatés ou même surpris chez la personne concernée, quoiqu’ils n’aient pas fait l’objet d’une confidence41. L’obligation du secret couvre donc également tout ce que le professionnel aurait appris dans le cadre ou à l’occasion de l’accomplissement de sa mission (situation judiciaire, administrative, professionnelle, familiale du justiciable ; informations relatives à son entourage, son état de santé, son mode de vie, sa vie affective et sexuelle…)42. Le secret s’étend aussi à tous les documents portant sur des questions couvertes par lui43. C’est ainsi que le dossier relatif à la personne concernée et la correspondance échangée entre cette dernière et son confident sont protégés44. A ce titre, les cabinets et dossiers médicaux bénéficient d’une protection particulière : perquisitions et saisies ne peuvent être opérées que par le juge d’instruction en personne, ou le procureur du Roi en cas de flagrant délit, en présence d’un représentant du conseil de l’Ordre45. La saisie de pièces médicales est admise lorsque ces pièces concernent des infractions qui sont mises à charge du médecin46. « Lorsque le malade est seul inculpé, la recherche de documents médicaux ou d’autres pièces relatives aux soins qui lui ont été donnés est exclue par le secret professionnel. »47 Les psychologues et assistants sociaux ne bénéficient pas de la même protection, mais il est admis que la protection spéciale du secret médical s’étend à l’ensemble d’un service ayant une activité médicale et placé sous la responsabilité d’un médecin. )5
'
) ! +
)
6=* ,
5 (
$ A+ % 5 !
4 )
6=* C
+ %'
N0-4.1'N/2 9 N 66G > 6GG:G6 *= F *
"
# +
+
!& : * K<
$ &
Q
;
GE $
%
+
%
*< F
) *
+
% )
C
!
6<6 C " ))
)G I'
6
! A7
'
!
: 66 , + 66 C
8 41./ * "
= " +4 '
' !
G @
A' 66
6G*
6
+ %, ! $
== A'
)5 E
5 ,
J "
< ) )* ' )= C 66 C
'
66
,
*
Au demeurant, le Code de déontologie médicale ne fait à cet égard qu’expliciter les conséquences logiques du principe légal du secret professionnel, lequel s’applique aux autres professions du secteur psycho-médico-social. On peut donc soutenir qu’une perquisition, une saisie ou une remise de pièces, qui ne tiendrait pas compte du secret professionnel d’un psychologue ou d’un assistant social, porterait atteinte à un principe d’ordre public, avec les conséquences que cela implique sur le plan de la légalité des preuves qui seraient éventuellement recueillies d’une telle manière. Au-delà des conséquences sur le plan de la régularité de la procédure, il y va d’un enjeu plus fondamental : le respect dû à ces professions et à leur fonction sociale. De ce point de vue, il est étonnant que les responsables des maisons de justice se voient parfois confrontés à des demandes émanant de policiers ou de magistrats autres que l’autorité judiciaire mandante tendant à obtenir des informations contenues dans les dossiers des assistants de justice. Si, comme nous l’avons vu, le principe est clair lorsqu’il s’agit de faits pouvant donner lieu à des poursuites pénales à charge du patient, ou, plus largement, de la personne concernée par l’intervention psychosociale, la question est plus délicate s’il s’agit de révéler des faits dont cette personne serait la victime. Dans un arrêt du 9 février 1988, la Cour de cassation a estimé que, le secret médical visant la protection du patient, le seul fait que des poursuites étaient fondées sur des révélations faites par un membre du personnel ou un chirurgien de l’hôpital où était soignée la victime, n’entraînait pas l’irrecevabilité de l’action publique48. On ne saurait cependant en déduire qu’une révélation, ou une saisie de pièces, faite dans l’intérêt de la victime devrait, sans autres nuances, être considérée comme ne violant pas l’obligation de respect du secret professionnel consacrée par l’article 458 du Code pénal. On observera tout d’abord que l’infraction de violation du secret professionnel n’exige pas qu’il y ait une intention de nuire49. Autrement dit, sauf le cas très exceptionnel de l’état de nécessité, le mobile de l’auteur d’une violation du secret professionnel – par exemple, la conviction d’agir pour le bien d’une personne – est sans incidence sur l’existence de l’infraction.
)< )G )6
' '
! 6 6GG , #1@ 0B =
== 6GG C == +4
2 %:2
6G<
6
= Ensuite, mis à part la victime elle-même, qui pourrait s’ériger en juge de son intérêt ? Ne risque-t-on pas, au nom de l’intérêt supposé d’une victime, de faire en réalité prévaloir l’intérêt de la répression ? Pourquoi, alors que la loi garantit au criminel le droit de se faire soigner sans crainte d’être dénoncé, la victime n’aurait-elle pas de même le droit de consulter un médecin, ou un intervenant psychosocial, sans crainte de voir les faits dénoncés à la Justice alors qu’elle ne le souhaite peut-être pas ? Ceci irait à l’encontre de la tendance à prendre en considération le point de vue de la victime dans le système pénal, qui s’est développée au cours des dix dernières années. Cela rendrait également aléatoire tout travail psychosocial tendant à aider une victime à se forger une décision quant à l’attitude qu’elle souhaite prendre, notamment déposer plainte ou gérer sa situation en dehors de tout contexte judiciaire. Il paraît donc devoir être admis que si, en elle-même, la révélation de faits relatifs à une victime ne constitue pas une violation du secret professionnel, comme l’a décidé la Cour de cassation dans son arrêt précité du 9 février 1988, encore faut-il que cette révélation ait été faite d’une manière qui soit conforme à la déontologie de l’intervenant. En vertu de la règle déontologique de base du respect de la personne, la décision de révéler les faits ne peut être prise sans l’impliquer. Le respect de l’autonomie de la personne, tout comme la démarche de responsabilisation et le principe de non-substitution qui animeront le travailleur psychosocial, conduiront ce dernier à interpeller la personne concernée quant à ses propres responsabilités et les possibilités dont cette dernière dispose pour alerter ellemême les autorités compétentes. Le Code de déontologie médicale, tel que modifié le 16 novembre 2002, va dans le même sens50 : si les capacités de discernement du patient le permettent, le médecin l’incitera à prendre lui-même les initiatives nécessaires. Si la discussion avec le patient est impossible, le médecin traitant peut se concerter avec un confrère à propos de la suite à apporter à la situation. Ce n’est toutefois que dans une situation d’état de nécessité qu’il prendra l’initiative d’informer le procureur du Roi. Nous reviendrons sur ce concept et sa consécration récente dans le cas particulier de la maltraitance des enfants par l’article 458bis du Code pénal. Même s’il s’agit d’un enfant, le médecin doit lui parler de ses intentions avant de prendre toute initiative, si les capacités de discernement de l’enfant le permettent. Tous les efforts développés dans les milieux médicaux et psychosociaux pour respecter l’autonomie des personnes, en particulier des victimes, risqueraient d’être mis à mal si des
< saisies de pièces ou des perquisitions étaient entreprises sans considération pour le secret professionnel, au nom de l’intérêt des victimes interprété malgré elles. Il serait déplorable que l’on en arrive à ce que des victimes hésitent à se faire soigner ou à demander de l’aide de crainte que leur démarche ait des conséquences judiciaires qu’elles ne souhaitent pas nécessairement. En ce qui concerne l’étendue de l’obligation au respect du secret professionnel, il convient également d’observer que le statut sous lequel le professionnel concerné est engagé est sans incidence sur cette obligation. Lorsqu’un fonctionnaire intervient en tant que médecin, psychologue ou travailleur social, il est, comme nous l’avons vu, tenu au respect de la déontologie de ces professions et donc au secret professionnel. Tel est le cas, en particulier, des membres du Service psychosocial de la Direction générale de l’exécution des peines et mesures et des membres du Service des maisons de justice du département de la Justice. L’article 29 du Code d’instruction criminelle, qui prévoit que tout fonctionnaire qui acquiert la connaissance d’une infraction dans l’exercice de ses fonctions doit en informer le procureur du Roi, ne trouve pas à s’appliquer lorsqu’il y a une obligation, liée à la nature de la fonction, de garder un secret51. La Cour de cassation a considéré qu’à supposer que, par une application erronée de l’article 29 du Code d’instruction criminelle, des autorités donnent avis au ministère public de crimes ou délits dont elles auraient acquis la connaissance dans l’exercice de leurs fonctions, alors qu’elles sont tenues par le secret professionnel, cette dénonciation n’aurait d’autre effet que de contraindre le ministère public à partager un secret dont il ne pourrait en aucun cas faire état dans des poursuites pénales, lesquelles, fondées sur la violation d’une règle d’ordre public, seraient entachées de nullité52. Chaque fois qu’un fonctionnaire, chargé d’une mission d’ordre psycho-médico-social, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit, il sera donc tenu au secret lorsque le fait lui est révélé dans le cadre d’une relation où son intervention s’effectue dans l’exercice de ses fonctions de psychologue, médecin ou travailleur social. Cette attitude ne le dispensera bien évidemment pas de ses autres obligations professionnelles vis-à-vis de la personne qui lui a fait des confidences, notamment en termes de responsabilisation et d’orientation vers les instances compétentes, en particulier à l’égard *5 *
'
! @?0B -@'P 9
= %& : ;
: "
55
G d’une victime. En outre, s’il intervient dans le cadre de l’accomplissement d’un travail psycho-médico-social sous mandat, il lui appartiendra, le cas échéant, ainsi que nous le verrons ci-après, de faire rapport à son autorité mandante. Cette démarche ne se confond cependant pas avec la dénonciation au procureur du Roi en application de l’article 29 du Code d’instruction criminelle. On observera également que l’état de nécessité peut justifier une entorse au principe du secret professionnel. Mais il s’agit dans ce cas de faire face à un péril grave et imminent. L’état de nécessité s’apprécie par rapport au futur alors que la dénonciation concerne un fait déjà commis. Nous y reviendrons.
2.2.
Le travail sous mandat et l’expertise
Si les assistants de justice chargés d’une enquête sociale ou de la guidance d’un justiciable sont, comme nous l’avons vu, tenus à une obligation de secret professionnel, ils agissent néanmoins dans le cadre d’un mandat qui implique qu’ils rendent compte de leur mission à l’autorité mandante. Il en va de même des experts, y compris les membres du Service psychosocial pénitentiaire ou d’autres équipes chargés de donner des avis, notamment en tant que service spécialisé au sens des textes relatifs au traitement et à la guidance des auteurs d’infractions à caractère sexuel53. Dans ce cas de figure, l’obligation de secret subsiste, mais n’existe pas à l’endroit de l’autorité mandante dans les limites de la mission confiée. Il ne s’agit pas véritablement d’une exception au secret professionnel, mais plutôt d’une modalité relative aux personnes ou instances à l’égard desquelles cette obligation existe. Pour le justiciable, l’intervenant n’a pas pu être un confident par rapport à l’autorité mandante, puisqu’il sait – l’intervenant doit jouer franc-jeu avec lui – que son interlocuteur intervient dans un tel cadre et fera rapport à cette autorité.
*
'
6 *
*
"
6G= , 66G
! 6=) 6
5
C 6G= "
6) & *
1 6G=
7 O )KI 6
6=)
8 41./ 6 6 5
6
Le Code de déontologie médicale est d’ailleurs particulièrement clair à cet égard : « Le médecin mandaté pour accomplir une [mission d’expertise] doit préalablement faire connaître à l’intéressé en quelle qualité il agit et lui faire connaître sa mission. L’expert judiciaire, en particulier, l’avertira qu’il est tenu de communiquer à l’autorité requérante tout ce qu’il lui confiera au sujet de sa mission »54. Il s’agit là d’une règle d’or que les assistants sociaux, assistants de justice et psychologues intervenant sous mandat ou en qualité d’expert se doivent également de respecter scrupuleusement55. Le secret reste bien évidemment de rigueur à l’endroit de toute autre personne ou instance que l’autorité mandante. Cette règle interdit, par exemple, à un expert tenu au secret professionnel de faire des déclarations à la presse venant confirmer, compléter ou simplement commenter son rapport ou les déclarations qu’il aurait faites à l’audience. De plus, même à l’égard de l’autorité mandante, l’obligation de secret persiste pour tout élément dont la révélation n’est pas strictement nécessaire à l’accomplissement de la mission confiée par cette autorité56. Ces principes sont consacrés au niveau européen :
les règles européennes sur les
sanctions appliquées dans la communauté, qui constituent pour nous une référence de base dans le cadre de la mise en œuvre de mesures pénales impliquant la mise en liberté d’un justiciable sous conditions, disposent notamment que « Les informations figurant dans le dossier individuel ne seront divulguées qu’aux personnes ayant le droit d’y accéder. Les
*) **
' ; $
! + *
&
<
"
$" % A'
*=
%& .
! "
66<
!
3
!
E +
?
+ 66<
% A' GE
!
'
+@ % A'
!
& 3
0
&
" A !
%&
!
66<
E *
@
A % A'
!
* O* E
*
$
&
= % A'
2 !
G O E
5 informations ainsi divulguées se limiteront à ce qui est nécessaire à l’autorité qui les demande pour s’acquitter de sa tâche »57. Nous avons ainsi tracé les contours du secret professionnel qui s’impose aux intervenants ou experts mandatés par une autorité judiciaire. Mais cette réflexion doit aussi nous conduire à nous interroger sur l’usage des rapports adressés à l’autorité mandante58. Le parquet est un lieu de rassemblement d’une multitude d’informations obtenues dans le cadre de procédures distinctes. Il en est ainsi en raison de sa présence auprès de diverses juridictions, tant civiles que pénales ou protectionnelles, comme auprès de commissions telles que les commissions de défense sociale, de libération conditionnelle ou encore de probation, par l’accès à divers types de dossiers dont il dispose, et du fait de la possibilité d’échanges internes d’informations découlant du principe d’unité du ministère public. Ceci constitue une richesse permettant au ministère public d’apporter à différentes instances un complément d’informations qui peut s’avérer extrêmement précieux, y compris en matière civile. Mais tout pouvoir appelle des limites et plus un pouvoir est grand, plus il doit en être fait usage avec circonspection. Même lorsqu’ils travaillent sous mandat judiciaire, les intervenants psycho-médico-sociaux sont tenus à des règles rigoureuses de nature à préserver le secret professionnel. Il ne serait pas acceptable que le ministère public puisse, quant à lui, faire un usage illimité de leurs rapports. En se comportant ainsi, il ferait en effet céder toutes les cloisons soigneusement posées par la loi et la déontologie pour protéger, notamment, la relation de confiance comme outil de travail et la vie privée des personnes concernées59.
*<
. $! *G 7
@K.A6 E =
'
1
' $!
% , @?0B -@'P 9 (
!
; "
*6
1 K=)
55
= *
C
! ( ! "
F ! ! "
"
"
!
&
!
&
!
" ! (
R S
! 2
$ !
! "
G $
$ G
$
6=*
! " $
"
C’est ainsi que la Cour de cassation a souligné que les études sociales et les examens médico-psychologiques réalisés en application de l’article 50 de la loi du 8 avril 1965 relative à la protection de la jeunesse ne peuvent être utilisés à d’autres fins que celles prévues par cette loi, c’est-à-dire déterminer, dans l’intérêt du mineur, les modalités de l’administration de sa personne ou les moyens appropriés à son éducation ou à son traitement60. La Cour de cassation ne fonde pas sa décision sur une disposition explicite de la loi relative à la protection de la jeunesse61, mais bien sur « l’économie générale de ladite loi, et spécialement la finalité […] de ces investigations, qui justifie et garantit l’ingérence dans la vie privée et familiale qu’elles exigent »62. Dans un même ordre d’idées, l’économie générale de certaines lois fixant le cadre de l’intervention des assistants de justice dans la guidance de personnes laissées ou mises en liberté sous conditions n’implique-t-elle pas que les rapports établis par ces assistants de justice ne soient pas utilisés à des fins qui s’en écartent ? L’économie générale de la loi du 29 juin 1964 concernant la suspension, le sursis et la probation tend à éviter les conséquences sociales d’une condamnation ou d’un emprisonnement et à promouvoir la réinsertion du justiciable, tout en permettant, le cas échéant, un suivi de nature à prévenir le risque de récidive. Il en va de même pour la loi du 5 mars 1998 relative à la libération conditionnelle. L’utilisation des rapports de guidance dans un cadre différent de ceux dans lesquels ils ont été établis pourrait être incompatible avec ces objectifs. Elle pourrait en outre avoir comme conséquences, d’une part, que le justiciable verrait sa liberté de parole limitée face à " ( =5 '
! 666 ,
"
! . 666 C G5 + % , ! $ " << A, 6G6 C (
( G
G
6G6 "
6=* G=E 7
" =
A 1
6GG
(
G
"
! !
#
** C
<
% =
'
S
6GG ' ( $
== E
! @B A
" "
" & ! ! 6=*
G
'
(
! "
l’assistant de justice, rendant ainsi la relation de confiance impossible et, d’autre part, que l’assistant de justice serait contraint à faire preuve d’une extrême réserve dans la rédaction de ses rapports, sachant qu’ils pourraient recevoir un usage autre qu’informer la commission compétente, au risque de nuire à la qualité de son information63. D’une manière générale, ne doit-on pas admettre que l’utilisation, à d’autres fins, d’une information d’ordre psycho-médico-social recueillie pour une finalité spécifique porte atteinte à l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi qu’à l’article 22 de la Constitution qui garantissent le droit au respect de la vie privée et familiale64 ? En effet, toute mesure d’expertise, d’étude ou d’enquête, toute rédaction de rapport dans le domaine psycho-médico-social implique un certain degré d’intrusion dans la vie privée des personnes concernées. Dans certains cas, cette intrusion peut concerner des personnes qui ne sont pas partie à la cause. Cette atteinte à la vie privée n’est justifiée et n’est acceptée par les personnes concernées – qui ne peuvent jamais être contraintes d’y collaborer – qu’en fonction d’une finalité définie, et cela dans un cadre légal précisant l’autorité destinataire du rapport et les modalités d’accès au dossier. Utiliser le rapport dans un autre cadre ferait fi du contexte dans lequel la mesure a été prescrite, la collaboration a été acceptée, des confidences ont été faites, le rapport a été rédigé. Cette initiative pourrait en outre conduire au dévoilement du rapport à d’autres personnes que celles qui pouvaient y accéder dans le cadre initial65. Le critère de finalité forme la pierre angulaire de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard des traitements de données à caractère personnel66. Il
$ G5 =
'
" ! #
%& : ! ! "
: 2
!
"
$ =)
1 =* 2
F4 !
==
1
G .
66
??7 ) O "
" 55
' G $ !
" 66 !
=== %, C
!
66 "
" $ (
273 "
( $
!
nous paraît devoir être également admis comme principal repère dans la matière qui nous occupe67.
2.3.
Le secret professionnel partagé
Dans certaines circonstances, le secret peut être partagé avec d’autres intervenants psychomédico-sociaux liés, eux aussi, par une obligation de secret. Le principe du secret professionnel partagé est admis par le Code de déontologie médicale moyennant des limites strictes. Dans le cadre d’un travail en équipe, seules les personnes elles-mêmes liées par le secret professionnel et appelées à soigner la personne concernée ont accès à l’information. Vis-à-vis des médecins experts judiciaires, seules les données objectives absolument indispensables à la réalisation de leur mission et en relation directe avec le but de l’expertise peuvent être communiquées, moyennant l’accord du patient, et à l’exclusion des confidences68. Cette matière est également réglée par les codes de déontologie des assistants sociaux69 et des psychologues70. Le partage du secret ne peut se faire que dans l’intérêt du client et avec son accord – ou, en cas de partage du secret au sein d’une même équipe de travailleurs sociaux, moyennant son information préalable, – et ne peut s’opérer qu’à l’égard d’une personne elle-même tenue au secret professionnel et dont la fonction poursuit les mêmes objectifs. Cette communication ne peut concerner que des faits et non des confidences faites intuitu personae et doit se limiter aux informations strictement utiles. Les accords de coopération concernant la guidance et le traitement d’auteurs d’infractions à caractère sexuel consacrent la possibilité d’un échange d’informations entre professionnels psycho-médico-sociaux du ministère de la Justice et intervenants externes dans le cadre de
! =<
'
2 1 A #@E !
% + %' = A =6 ' ! =) < "<* <5 ' ! =G
$ '
%
! ! 1
%,
K.A6 E % <$
)5A
$!
E *6 A
K E
E 0 3
& !
%&
!
66< 66<
= "
) la préparation d’une libération, devant déboucher sur la mise en place d’un suivi externe71. L’échange d’informations et la communication de documents sont cependant limités à ce qui est nécessaire à la réalisation de la guidance ou du traitement, et sont subordonnés à l’accord de la personne concernée72.
2.4.
Les exceptions légales au secret professionnel des thérapeutes
Des dispositions récentes dérogent à l’obligation de secret à laquelle sont tenus les thérapeutes intervenant dans le cadre du suivi de justiciables laissés ou remis en liberté moyennant le respect de conditions. La loi du 28 novembre 2000 relative à la protection pénale des mineurs a introduit des dispositions nouvelles dans plusieurs lois, de manière à instaurer un régime commun relatif à la mise en œuvre de la guidance ou du traitement de personnes comme condition assortissant leur maintien ou leur mise en liberté, qu’il s’agisse ou non d’auteurs d’infractions à caractère sexuel, en y transposant l’obligation d’établir et de communiquer des rapports de suivi déjà prévue par les accords de coopération relatifs aux auteurs de ce type d’infractions73. Le champ d’application de cette loi est, à cet égard, plus large que ne le porte à penser son intitulé. Ses dispositions ont, en effet, une portée générale, et concernent aussi le suivi d’auteurs d’infractions sans rapport avec la protection pénale des mineurs74.
<
' ! 555 -
$ "
=
A 555E C %&
2 M
666 $ "
666
$ ! :
!
<
! )
<
66G 666 -
)
"
$
) G
<)
555 )
"
) " )G / + @ 7 .-2
666
$
! A1 % $ ! 2 +1.N1.2/. 1/1@ / + @ 7 .-2A
'& ) '&
K 65
* Des dispositions similaires sont d’application en matière de libération conditionnelle, de libération à l’essai d’internés, de libération de délinquants sexuels mis à la disposition du gouvernement, de probation et d’alternative à la détention préventive. Elles prévoient que si la mesure est assortie de la condition de suivre une guidance ou un traitement, la personne ou le service qui accepte la mission doit établir, dans les délais fixés par les textes et chaque fois que cette personne ou ce service l’estime utile ou encore à la demande de l’autorité compétente, un rapport de suivi sur la guidance ou le traitement75. Ce rapport ne porte que sur les présences effectives de l’intéressé aux consultations proposées, les absences injustifiées, la cessation unilatérale de la guidance ou du traitement par la personne concernée, les difficultés survenues dans la mise en œuvre de ceux-ci et les situations comportant un risque sérieux pour les tiers. Le service ou la personne en question est également tenu d’informer l’autorité de l’interruption de la guidance ou du traitement. Il ressort des travaux préparatoires que les éléments devant ou pouvant ainsi faire l’objet de rapports sont extérieurs à la relation thérapeutique76, hors le cas exceptionnel de l’état de nécessité auquel renvoie le législateur en évoquant les situations comportant un risque sérieux pour les tiers77. Les exceptions au secret professionnel des thérapeutes sont strictement circonscrites et préservent la confidentialité de ce que les personnes concernées leur confient, sans quoi toute thérapie serait d’ailleurs impossible78. En outre, l’autorité ayant décidé la mesure et les assistants de justice sont les seuls destinataires des rapports de suivi. <*
"
6 !
6=)
6
6=) 5 66G " 3 1.#8 @ ;A '&
* <=
2 9 & 8 !
& 5
*I
665 <
<<
6 5
"
* O=
K*55=6*T556 M
;
=5E ! ; !
' A.
/ DE*;1' ;E
$ 6G E
$
%
'
6 1
6
9 555: 55
9 !
A
I
.!
' <
1
H
' " ;
$" + "
G* E
$ $ < $
!
%A
'& 6
+ : 66G: 666 K 65
=
2.5.
Le témoignage en justice ou devant une commission parlementaire
Il s’agit d’une exception explicitement visée par l’article 458 du Code pénal79, qui ne concerne que le témoignage au sens strict, c’est-à-dire la déposition faite, après convocation, sous serment, devant un juge d’instruction80, une cour, un tribunal, ou une commission d’enquête parlementaire. Ces situations ne sont pas à confondre avec l’interrogatoire de police ni avec la révélation spontanée, même si elle est faite à la Justice81. Ce n’est que dans le cas du témoignage au sens strict que l’obligation de se taire est levée. On notera que la pratique qui consisterait, pour un juge d’instruction, à mandater la police pour interroger une personne tenue au secret professionnel, par exemple un assistant de justice, en vue d’obtenir des informations au sujet d’un justiciable, méconnaîtrait la protection légale de ce secret. Dans le cas du témoignage, tel que défini ci-dessus, le détenteur du secret est autorisé à parler mais il n’y est pas obligé. Ce n’est qu’une faculté. Il lui appartient d’apprécier s’il doit, pour chaque question qui lui est posée, répondre ou se retrancher derrière le secret professionnel82. C’est une appréciation qu’il doit porter lui-même83 : il n’a pas besoin de l’autorisation de la personne concernée et même en cas d’autorisation, il doit se taire s’il estime devoir respecter le secret84. En tout cas, il ne peut révéler que les éléments strictement nécessaires pour répondre à la question qui lui est posée.
1
.!
H
%
" <6 G5
+ % ! '
A' G ' G * G
'
G
(
' !
!
"
! !
)*G
" % A'
+ $! )
* $"
GG5
! " 6<= , + 6<= C 655E 6== , C 6=< G6 !
" G)
% !
=
*
"
"
+
! $ " ' < $
= E J % $
% A'
!
=) E
'
< Le juge peut vérifier que le témoin ne détourne pas le secret de son but85. Ce contrôle doit cependant s’exercer avec prudence, ne pouvant aboutir à la révélation de ce que le secret était précisément destiné à protéger86. On observera, enfin, que le droit, pour la personne tenue au secret professionnel, de refuser de répondre à tout ou partie des questions posées, n’emporte pas pour autant le droit de refuser de se présenter et de prêter serment lorsqu’elle est convoquée comme témoin87. On ne peut donc pas se retrancher globalement derrière le secret professionnel pour refuser de comparaître88.
2.6.
La révélation d’un secret professionnel justifiée par l’état de nécessité
L’état de nécessité est une cause de justification reconnue tant par la doctrine que par la jurisprudence89. Elle a été consacrée récemment par le législateur dans le cas particulier de la maltraitance des mineurs visé par le nouvel article 458bis du Code pénal90. L’état de nécessité renvoie à un conflit de valeurs : respecter la loi, donc se taire, ou la transgresser pour sauvegarder un intérêt plus impérieux. L’application de ce principe, qui doit toujours se faire avec la plus grande prudence et si possible après concertation et évaluation avec d’autres professionnels, suppose la prise en compte des critères de proportionnalité et de subsidiarité. D’une part, le détenteur du secret ne peut le violer qu’après avoir apprécié les valeurs en présence, face à un péril grave et imminent. Ceci suppose l’existence d’un risque qui soit identifié de manière précise. D’autre part, l’état de nécessité n’autorise à violer le secret que si le péril dont son dépositaire a connaissance ne peut pas être évité autrement qu’en le révélant. Le dépositaire du secret doit envisager toute autre possibilité d’éviter le péril en G* G=
' 7
G<
6G= , + 6G< C G6 8 41./ * 4 5 665 "
** GG ?
6
@ ) 55
6G* '
=
= G5 *<
"
$
! < ) G6 65
(
' U
F
'
(
6G<
" 9
6G<
G*=
; )*G
1
S !
G question, possibilité dont il dispose lui-même ou par le recours, dans le secret partagé, à d’autres intervenants psycho-médico-sociaux91. On observera également que l’état de nécessité s’apprécie par rapport à un péril imminent, c’est-à-dire futur. De ce point de vue, une constatation ou une confidence relative à des faits qui ont eu lieu, même dans un passé récent, n’est pertinente qu’en tant qu’indication qu’il existerait un péril futur, c’est-à-dire que de nouveaux faits graves pourraient se produire. Il n’y a donc pas lieu de se départir du secret professionnel si les circonstances sont telles que ce péril est écarté. A défaut, il y aurait confusion entre la révélation justifiée par l’état de nécessité et la délation. Lorsque les conditions que nous avons évoquées sont réunies, c’est d’une faculté d’informer l’autorité judiciaire qu’il s’agit et non d’une obligation légale92. En outre, seules les informations qu’il est nécessaire de communiquer pour protéger une personne peuvent l’être93.
Conclusion
% A 6
)*G . <
'
$
666: 555 K*55=6*T55= F
E " +
% = O &
'& $!
! !
'
2
! =
55
" F
; ""
?
+
$
$
+
"
+ ?
"
$ " "
*
+
" ;
"
&
&
"
+
*
2 <
8
+
$ 2
6
'
( :
:7
" 27 .
:": !
.
4
6
A 666: 555 K*55=6*T55=
E
C
% % ) ' 6=* )*G E %& : : 555 3 1.#8 @
A+ %
8 .'N
'&
6 La nature des missions d’étude, d’enquête, d’expertise ou de guidance d’ordre psychomédico-social, de même que des missions d’accueil, d’assistance, d’aide ou de médiation, leurs finalités spécifiques et l’intrusion qu’elles impliquent dans la vie privée des personnes imposent une prudence particulière. Il en est a fortiori ainsi en cas d’intervention dans un cadre thérapeutique. Certains échanges d’informations sont possibles dans le respect des règles déontologiques et le cadre légal a récemment évolué. Une limite ne peut être franchie sans mettre en péril la possibilité même de remplir certaines fonctions sociales : le respect du rôle de chacun, balisé par le cadre légal de son mandat ou la nature même de sa mission. Une tendance à la recherche d’une certaine efficacité à court terme dans une perspective sécuritaire risque de faire perdre de vue l’importance du respect du secret dans une relation pouvant soutenir un cheminement vers une autonomie responsable94. L’effritement du secret aurait en outre comme conséquences que des confidences ne se feraient plus, que des personnes resteraient sans aide. Au-delà de considérations juridiques, l’enjeu relève d’un choix de société. Notre système fait le pari de considérer le justiciable comme une personne autonome porteuse d’un potentiel d’évolution. La mise en place d’un dispositif de soutien de cette évolution, dans une perspective de responsabilisation, est à porter au crédit d’une société respectueuse des droits de l’homme. La mise à mal de ce modèle par une focalisation sur le contrôle et la surveillance, au détriment de l’aide et du traitement, traduirait une conception du justiciable réduit au statut de prédateur qu’il faut empêcher de nuire. Ce pourrait bien être le signe d’une société privilégiant l’individualisme au détriment de la solidarité. « Il est de l’intérêt de tous de passer d’une stratégie défensive, axée sur la dangerosité et sur l’exclusion, à une stratégie offensive, axée sur la réhabilitation du délinquant, sur tous les plans, qui nous paraît offrir davantage de garanties quant au risque de récidive. » Ainsi 6)
+ %' G
&
;
66G
5 s’exprimait la Commission nationale contre l’exploitation sexuelle des enfants dès le 23 octobre 199795. * *
*
Mijnheer de Eerste Voorzitter, ik herneem het woord om het Hof kennis te geven van enkele statistische gegevens maar ik zal u niet overstelpen met een massa cijfers die trouwens zoals altijd, in bijlage aan de openingsrede zullen worden gevoegd. Ik overloop dus slechts in grote lijnen de voornaamste bewegingen. De vredegerechten binnen de arrondissementen Brussel en Nijvel kenden het voorbije jaar een daling van het aantal nieuwe zaken in vergelijking met het jaar 2002, in Leuven stelde men voor het vierde jaar op rij een stijgende instroom vast. In Brussel en Leuven werden er in 2003 meer definitieve vonnissen uitgesproken dan het jaar voordien terwijl er in Nijvel een lichte daling was. In elk van de drie arrondissementen was er in 2003 een aanzienlijke toename van het aantal zaken dat op de politieparketten belandde. Een deel van de verklaring schuilt in het toenemend gebruik van de onbemande camera’s, deze laten de politiediensten toe om met een minimum aan geïnvesteerde werkuren een maximum aan snelheidsovertredingen te verbaliseren. De opmerkelijke stijging van het aantal minnelijke schikkingen is hiervan een logisch gevolg. In het arrondissement Leuven stelde het politieparket bijvoorbeeld 37% méér minnelijke schikkingen voor dan het jaar voordien. De politierechtbanken binnen de arrondissementen Brussel en Leuven spraken het voorbije jaar meer definitieve vonnissen uit dan in 2002, in Nijvel kende men een lichte daling. De rechtbanken van koophandel te Brussel en Nijvel ontvingen meer nieuwe zaken terwijl men er in Leuven minder kreeg. Het aantal vonnissen dat deze rechtbanken velden, steeg licht in Nijvel en sterk in Leuven terwijl men in Brussel een kleine daling kende. Bij de rechtbanken van eerste aanleg registreerden de burgerlijke kamers in Leuven een lichte en in Nijvel een sterke daling van het aantal nieuwe zaken. In Brussel stelde men een stijging van 12,7% vast in vergelijking met het voorgaande kalenderjaar. In Leuven en Nijvel was er echter een toename van het aantal vonnissen terwijl dit in Brussel afnam.
6*
'
<
Het aantal nieuwe correctionele zaken daalde in de parketten van Brussel en Nijvel, dit nadat wij vorig jaar reeds wezen op de ‘recordhoogte’ die beide parketten in 2002 bereikten. In Leuven was er vorig jaar een stijging van het aantal binnengekomen zaken. Het aantal zaken dat in gerechtelijk onderzoek gesteld werd, bleef in Brussel en Nijvel op hetzelfde peil als het jaar ervoor. In Leuven was er een daling. Het aantal minnelijke schikkingen dat voorgesteld werd, steeg met maar liefst 75% in de parketten van Brussel en Leuven terwijl er in Nijvel een lichte daling was. Het aantal rechtstreekse dagvaardingen bleef stabiel in Leuven, in Nijvel en Brussel was er een stijging. Het hof van beroep kreeg in 2003 een even groot aantal burgerlijke, handels- en fiscale zaken binnen als het voorgaande jaar. Er werden echter wel 10% meer arresten geveld door de bevoegde kamers.
Het parket-generaal schreef het voorbije jaar minder nieuwe
strafzaken in terwijl het hof eveneens iets minder arresten in strafzaken velde. De hoven van assisen behandelden 18 zaken in 2003 tegenover 17 in elk van de twee voorgaande kalenderjaren. Voor het derde jaar op rij hebben de statistisch analisten verbonden aan het parket-generaal een document opgesteld dat ook nu in de bijlage aan de openingsrede gevoegd wordt. Het geeft - voor de zaken die geregistreerd werden in het computersysteem van de correctionele parketten binnen ons rechtsgebied - een overzicht van de vooruitgangsstaten per jaar van binnenkomst. Door elk jaar op eenzelfde datum een analyse te doen van de vooruitgangsstaat die elk van de zaken kende, wordt het mogelijk om een beter zicht te krijgen op hetgeen er op lange termijn gebeurt met de duizende dossiers die deze parketten te verwerken krijgen. Ik verwijs bij deze naar de bewuste bijlage waarin de geïnteresseerde lezer de gedetailleerde gegevens kan raadplegen. In het kort kan ik hier bijvoorbeeld wel vermelden dat van de zaken die binnengekomen zijn in het jaar 2001 er zich eind maart 2004 – afhankelijk van het parket – slechts 1 à 2% nog in vooronderzoek bevinden; bij de extractie die twee jaar geleden gebeurde, bekwamen we een percentage van 6 à 11%. Het relatieve aantal zaken binnengekomen in 2001 dat eind maart 2002 reeds gevonnist was, bedroeg tussen de 0,3 en 1,3%. Deze percentages waren eind maart 2004 al opgelopen tot 1,2 en 3,2%. Dankzij het ter beschikking stellen van extra technische middelen aan de statistisch analisten zijn deze laatsten nu echter ook in staat om een dergelijke longitudinale analyse te verrichten zonder
dat
zij
hiervoor
telkenmale
beroep
moeten
doen
op
de
verschillende
systeembeheerders die elk op hun beurt een bevraging van de lokale gegevensbank
dienden te verrichten. Het resultaat hiervan is terug te vinden in de publicatie van de ‘jaarstatistiek van het openbaar ministerie’ die het College van procureurs-generaal op 11 februari jongstleden voorlegde aan het Parlement. Het unieke aan deze jaarstatistiek schuilt in het feit dat er voor het eerst op basis van een uniforme en geëxpliciteerde methodologie tabellen opgesteld werden met betrekking tot de in- en uitstroom van strafzaken op het niveau van de correctionele parketten bij de rechtbanken van eerste aanleg. De publicatie is het resultaat van een jarenlange investering door de statistisch analisten verbonden aan de parketten-generaal en aan het College van procureurs-generaal. Om iedereen een snelle toegang tot deze statistieken te verlenen, werd de publicatie op een gebruiksvriendelijke CDROM geperst en heeft de Federale Overheidsdienst Justitie het geheel op haar website geplaatst. Vorig jaar lichtte ik in mijn openingsrede reeds de twee gehanteerde analysemodellen toe. De transversale analyse laat toe om zowel de in- als de uitstroom binnen één kalenderjaar weer te geven. In de eerste reeds verschenen publicatie betrof dit het kalenderjaar 2002. Men krijgt er vooreerst een overzicht van enerzijds het aantal ‘hangende’ zaken op 1 januari en anderzijds van het aantal binnenkomende of heropende zaken tijdens het jaar. Vervolgens worden voor die dossiergroepen details verstrekt met betrekking tot de aard van de zaak, bijvoorbeeld ‘is er een verdachte geïdentificeerd of niet ?’, ‘welke inbreuk lag er aan de basis van de zaak ?’, en dergelijke meer. Dit gebeurt eveneens voor de zaken die in hetzelfde jaar ‘uitstroomden’ door middel van de ‘afsluitende beslissingen’ die op niveau van het parket genomen kunnen worden. Naast die zogenaamde transversale analyse omvat de publicatie eveneens een longitudinale analyse. Deze laatste is vergelijkbaar met de bijdrage die de statistisch analisten van het Brusselse parket-generaal de voorbije jaren voegden aan de bijlage bij de openingsrede. Dankzij de uitgebreide mogelijkheden kan men in de nationale publicatie echter meer details terugvinden, details die de Brusselse analisten de voorbije jaren niet konden verkrijgen aangezien zijzelf geen rechtstreekse toegang tot de gegevensbanken hadden. Ik verwijs bijvoorbeeld
naar
de
stroomdiagrammen
die
een
overzicht
geven
van
de
‘beslissingstrajecten’ die de geïdentificeerde verdachten door de jaren heen kregen. De longitudinale analyse gebeurde in de eerste publicatie voor de zaken die binnenkwamen gedurende het kalenderjaar 1998. Omdat een beperkt aantal van die zaken op het moment van de gegevensextractie nog in vooronderzoek of gerechtelijk onderzoek stond, zal men in de volgende publicaties een ‘update’ van deze dossiergroep verstrekken. Op termijn zal het mogelijk worden om over de jaren heen te vergelijken welke beslissingen de in het computersysteem geregistreerde zaken toegewezen kregen. Tevens zullen de magistraten
in de toekomst meer en meer de expertise van de statistisch analisten kunnen aanwenden om bijvoorbeeld specifieke analyses te maken betreffende de beslissingen die genomen worden binnen de zaken die betrekking hebben op een welbepaalde categorie van inbreuken. De werking van de parketten is een complex gegeven. In de eerste publicatie van de ‘jaarstatistiek van het openbaar ministerie’ werd daarom duidelijk de aandacht gevestigd op verschillende factoren die de statistieken beïnvloeden. Met deze contextgegevens dient men rekening te houden indien men zich waagt aan bepaalde conclusies op basis van de naakte cijfers. De zonet toegelichte publicatie werd het voorbije gerechtelijk jaar door de statistisch analisten gepresenteerd aan de verschillende procureurs des Konings en hun korpsen. Daarnaast verzorgde men onder andere ook presentaties aan de professoren van alle universiteiten die beschikken over een departement criminologie. Bij elk van deze presentaties werd expliciet gehengeld naar feedback die moet toelaten om het instrument nog verder te optimaliseren. Aldus kunnen de statistisch analisten, steeds in samenspraak met het bevoegde expertisenetwerk van magistraten, in de toekomst het nodige doen om tegemoet te komen aan de wensen van diegenen die professioneel begaan zijn met deze materie. Het College van procureurs-generaal zal op zijn beurt initiatieven nemen om de verschilpunten in de mate van het mogelijke te minimaliseren. Men dient er zich echter wel bewust van te zijn dat het tijd vergt vooraleer iedereen binnen alle geledingen op dezelfde lijn zal zitten. De voorbije jaren had ik het telkens kort over het grootschalige Phenix-project. Ook deze keer druk ik mijn hoop uit dat men bij de ontwikkeling van dit overkoepelende informaticasysteem voldoende oog zal hebben voor alle verwikkelingen die kunnen opduiken bij de administratieve verwerking van de gerechtelijke dossiers. Daarnaast pleit ik ervoor dat men bij de installatie van het Phenix-systeem voorziet dat elke korpsoverste van de beschikbare technologie gebruik kan maken om zijn eigen organisatie op permanente basis te evalueren in het kader van een voortdurend streven naar verbetering. * * Monsieur le Premier Président, Mes chers Collègues, Mesdames et Messieurs,
*
) La famille judiciaire a été durement éprouvée cette année par la disparition de plusieurs collègues que nous aimions beaucoup et dont le souvenir mérite notre plus profond respect. La cour et notre parquet général ont été particulièrement touchés. • Le lendemain du discours de rentrée de l’an dernier, le 2 septembre 2003, est décédé à l’âge de 82 ans, Monsieur le Président Yves THIRY. Promu docteur en droit en 1944 à l’issue d’études courageuses effectuées au cours des années troubles du conflit mondial, Monsieur THIRY sera avocat au barreau de Bruxelles jusqu’en 1958. Nommé juge au tribunal de première instance de Bruxelles par arrêté royal du 25 avril 1958, il sera notamment juge d’instruction et juge des saisies. Travailleur infatigable, il obtint, malgré ses lourdes charges au tribunal avec grande distinction une licence en droit social à l’Université Libre de Bruxelles, ainsi que le certificat de la connaissance de la seconde langue. La cour accueillera Monsieur THIRY comme conseiller en 1976 et comme président de chambre le 18 septembre 1984. Il exercera ses fonctions jusqu’au 28 février 1990. Grand spécialiste du droit civil, du droit social mais également de la déontologie médicale, notre cher défunt était l’auteur de nombreuses études, assuma plusieurs tâches d’enseignement et rendit de grands services aux Ordres des médecins et des pharmaciens. Nous garderons de Monsieur Thiry le souvenir d’un magistrat doté d’une force de travail peu commune et d’un grand serviteur de la Justice. La cour s’incline devant sa mémoire et présente à la famille THIRY l’expression de ses très sincères condoléances. • Déférant au souhait de discrétion exprimé par sa famille, je ne mentionnerai que par respect de son souvenir le décès de Monsieur le Président émérite Ramon RUTTIENS, survenu le 14 février 2004.
*
Monsieur RUTTIENS avait été conseiller à notre cour et président de chambre pendant plus de vingt ans. Ceux qui l’ont connu, l’estimaient profondément. * *
*
In nauwelijks vier maanden tijd verloor ons parket-generaal drie geliefde collega’s. • Onze goede vriend Leo DERYNCK ontviel ons op 27 oktober 2003. Op 29 februari 2000 was hij op zijn verzoek, vervroegd in ruste gesteld ingevolge een wankele gezondheidstoestand. Niets liet evenwel vermoeden dat wij zijn warme vriendschap zo vlug zouden moeten ontberen. Integendeel, gedreven door een grote gehechtheid aan zijn functies en door zijn fijngevoelige collegialiteit, was hij steeds aanwezig in goede of kwade dagen ter gelegenheid van plechtigheden in ons hof of gezellige bijeenkomsten onder vrienden. Telkens zag hij er goed uit en gelukkig en toch heeft het niet langer mogen zijn. Leo was geboren te Oostende op 30 november 1937. Hij promoveerde tot doctor in de rechten met grote onderscheiding in juni 1961. Na ingeschreven te zijn geweest aan de balie te Brussel werd hij op 30 oktober 1968 benoemd tot substituut-procureur des Konings in dat goede oude parket te Brussel alwaar ikzelf toen nog een jonge snaak was en hem dus meteen leerde kennen en waarderen. Hij vervulde met een uitzonderlijke toewijding en een lofwaardig plichtsbesef de bijzonder belangrijke en zware opdrachten die hem werden toevertrouwd, onder meer in de sector van de toen ontluikende en almaar groeiende zware criminaliteit. Aangewezen tot eerste substituut vanaf 1978 werd de heer DERYNCK op 18 mei 1984 benoemd tot substituut-procureur-generaal en op 5 september 1988 gepromoveerd tot advocaat-generaal.
In deze hoedanigheden bevestigde hij tenvolle de persoonlijke en
beroepshoedanigheden die hem reeds in eerste aanleg kenmerkten. Wij nemen afscheid van een goede vriend met een gouden hart die grote eerbied opbracht voor de instellingen van ons land.
=
Zoals ik het reeds kon zeggen bij de uitvaart van Leo te Kraainem op 31 oktober jongstleden, koesterde hij ook met tederheid de familiale waarden, zijn lieve echtgenote, zijn twee zonen en de familie aan wie het hof vandaag opnieuw zijn innige gevoelens betuigt. • J’ai revu une dernière fois Jean-Pierre JASPAR quelque part en juillet de l’an dernier alors qu’il se promenait avec son épouse aux environs de la Porte Louise. Nous avons évoqué brièvement quelques vieux souvenirs mais, en se quittant, Mme JASPAR m’avait pris discrètement à part et me glissa rapidement : « Jean-Pierre ne va pas bien ». Cette perspective inquiétante, certes, me troubla, mais lorsque le 9 décembre 2003, Me Jean-Louis Jaspar m’annonça la mort de son père j’en suis resté de longs moments silencieux. La Justice venait de perdre un grand monsieur. Issu d’une famille au nom prestigieux qui avait donné au pays de nombreux grands serviteurs dans les milieux du barreau, de la magistrature, du monde politique et diplomatique, Jean-Pierre JASPAR était né à Saint-Gilles le 3 décembre 1920. L’exemple de ces grands hommes a marqué notre cher collègue dans sa jeunesse et a posé les fondements de son courage et de son indéfectible respect de nos institutions. Monsieur JASPAR n’avait pas 18 ans lorsqu’il entama à l’Université Libre de Bruxelles ses études de droit qui furent malheureusement troublées par les événements de 1939-1940. Il participa à la campagne de 1940 avant d’obtenir devant le jury central le doctorat en droit en 1942. Stagiaire au barreau de Bruxelles, il supporta très mal le régime oppressant de l’envahisseur. Requis par l’occupant pour le travail obligatoire, il rejoindra l’Armée secrète en Ardenne et fit preuve d’un comportement exemplaire dans la Résistance. Au lendemain de la guerre, Monsieur JASPAR jettera les bases d’une brillante carrière au sein du ministère public. Substitut de l’auditeur militaire en campagne en 1945, il fera son entrée
< au parquet de Bruxelles le 3 juillet 1946, sera premier substitut en 1969, substitut du procureur général en 1979 et avocat général en 1983. Son action judiciaire au service de la société portera l’empreinte de l’auteur de nombreuses études juridiques, du dirigeant averti d’une section financière naissante, d’une éloquence hors du commun et d’un seigneur de la cour d’assises. Sous des apparences parfois sévères se cachait une grande gentillesse que le cher défunt manifestait plus particulièrement envers ses jeunes collègues qu’il encourageait à s’investir dans la si belle mission du ministère public. Monsieur JASPAR avait un grand cœur et une véritable joie de vivre. J’ai été très impressionné par les mots choisis par lesquels ses proches ont annoncé son décès survenu, écrivaient-ils, « après une longue et heureuse vie ». Pour ma part, le connaissant un peu, c’est Jean-Pierre lui-même qui doit avoir inspiré ces belles paroles. Son départ a également endeuillé le barreau de Bruxelles, Me Monique Fruy, sa chère épouse, et Me Jean-Louis Jaspar, son fils que la cour salue avec amitié et auxquels nous réitérons l’expression de toute la peine que nous avons éprouvée en perdant ce grand magistrat et ce fidèle ami. • Nooit is het leed zo groot dan wanneer men afscheid moet nemen van een jonge collega die nog in functie is en die men twee dagen voordien nog heeft ontmoet om een zaak te bespreken. Deze pijnlijke gebeurtenis overviel ons, toen op maandagmorgen, 2 februari 2004, bij mijn aankomst op het paleis een vriend van hem mij opwachtte om mij te melden “Raymond BOSSUYT is overleden”. De eerste reactie is ongeloof, de tweede verbijstering, de derde diepe droefheid. Geboren in het voormalige Belgisch Congo op 16 oktober 1945, behaalde de heer Bossuyt het diploma van doctor in de rechten in 1971. Hij was korte tijd advocaat vooraleer, na de gerechtelijke stage, benoemd te worden tot substituut-procureur des Konings bij koninklijk
G besluit van 9 juli 1975. Hij werd aangewezen als eerste substituut in 1986 en vervoegde ons parket-generaal in 1997. Zowel in eerste aanleg als bij het hof werd onze betreurde collega ingezet in de meest diverse sectoren : de basissecties in het parket te Brussel, de economische en sociale afdeling,
de
contacten
met
de
pers,
het
groot
banditisme,
de
kamer
van
inbeschuldigingstelling, de veiligheidsproblematiek, het sociaal verweer, het milieurecht. Overigens perfect tweetalig gaf hij telkens blijk van dezelfde toewijding en het onmisbare gezond verstand. Raymond BOSSUYT was een goede vriend van elkeen die, hoewel zeer individualistisch van aard, zeer scherp had ingezien dat de ploeggeest het openbaar ministerie fundamenteel moet kenmerken. Ik zou hem willen omschrijven met de woorden van zijn stagemeester bij de balie, Mr. Grégoire : “Hij is een zeer rechtschapen en rechtvaardig mens, ten zeerste nauwgezet, zeer vlijtig en van een uitzonderlijke goede wil. Zijn oordeel is gematigd en bedacht, zijn karakter minzaam, zijn werkbekwaamheid groot.
Hij is daarenboven zeer menselijk en zeer
begrijpelijk”. Zelden werd de persoonlijkheid van iemand zo indringend en realistisch beschreven. Nous réitérons à Anne, son épouse, à Audrey, sa fille, et à Stéphane, son fils, tous les sentiments que nous avons exprimés au cours de la poignante cérémonie d’adieu du 6 février dernier. Au revoir, Raymond. * *
*
Ook de rechtbank van eerste aanleg te Brussel rouwt om het vroegtijdig overlijden van een nog jonge ondervoorzitter in functie. • De heer Marc DE MALEINGREAU D’HEMBISE, eveneens geboren in onze vroegere kolonie op 10 november 1944, behaalde het diploma van doctor in de rechten in 1970 en was
6 gedurende meer dan vijftien jaar een gewaardeerd advocaat bij de Brusselse balie, geprezen om zijn minzaamheid, zijn menselijke kwaliteiten en zijn juridische aanleg. Hij was ook jarenlang plaatsvervangend vrederechter in het eerste kanton Brussel en zijn diepe wens was ooit vrederechter te worden. Het lot besliste er anders over vermits hij in 1987 benoemd werd tot rechter in de rechtbank van eerste aanleg te Brussel alwaar hij achtereenvolgens de functies vervulde van onderzoeksrechter, voorzitter van een correctionele kamer en beslagrechter. Hij werd ondervoorzitter in 1998 en groeide geleidelijk uit tot een onmisbare rechtstreekse medewerker van zijn voorzitter in de leiding van de rechtbank. Hieraan kwam een abrupt einde ingevolge ernstige gezondheidsproblemen. De heer DE MALEINGREAU D’HEMBISE is overleden op 20 oktober 2003. Hij was een aristocraat in de edelste betekenis van het woord, niet alleen door het prestige van zijn naam maar ook door zijn waardige houding als mens en dienaar van onze justitie. La cour partage la peine du tribunal et exprime ses sentiments de réconfort à la baronne de Maleingreau d’Hembise, ses deux fils et l’honorable famille de notre collègue. • Nous avons également appris le décès, à l’âge de 91 ans, de Monsieur le Juge honoraire Xavier HORION. Monsieur HORION avait rejoint le tribunal de première instance de Bruxelles en 1971 après une brillante carrière de magistrat dans notre ancienne colonie qu’il termina comme conseiller et président faisant fonction de la cour d’appel d’Elisabethville. Ceux qui l’ont encore connu se souviendront des grands services qu’il rendit au tribunal dans les chambres civiles et en tant que juge de la jeunesse et juge des saisies. La cour assure la famille Horion de ses sentiments déférents et affectueux. * *
*
)5 De kantongerechten bleven evenmin gespaard. • Op 28 september 2003 overleed in de leeftijd van 74 jaar, mevrouw Elza VERBOVEN, erevrederechter van het negende kanton Brussel. Als beginnend stagiair heb ik haar nog eventjes gekend op het parket te Brussel alwaar zij substituut was van 1960 tot 1966, als een van de vier dames die het parket toen rijk was. Toen zij rechter werd, werd ik trouwens aangewezen om het beheer van haar kabinet over te nemen en mijn stagemeesters wezen er mij terecht op dat het voor mij een zeer moeilijke opdracht zou worden, gelet op de uitzonderlijke bekwaamheid en nauwkeurigheid waarmede zij haar dossiers behandelde. Ook de menselijke hoedanigheden van mevrouw VERBOVEN waren uitmuntend en kwamen tot volle ontplooiing als jeugdrechter tot 1970 en nadien tijdens een twintigjarige loopbaan als vrederechter. Elza VERBOVEN was ook een uitermate moedige vrouw die gedurende vele jaren een zware fysische handicap met een ijzeren wil heeft gedragen. Wij voelen ons met eerbied verbonden met het leed van haar nabestaanden. • Uit Leuven kwam het droeve bericht van het overlijden van vrederechter Alfons DANIELS, nauwelijks vijfenvijftig. Hij was jarenlang advocaat te Leuven en ook een tijdlang plaatsvervangend rechter in de arbeidsrechtbank. Hij werd vrederechter van het eerste kanton in 1989. Deze plichtbewuste en loyale medewerker van het gerecht overleed op 27 januari 2004, na een pijnlijke ziekte. Op zijn overlijdensbericht stond een indrukwekkende tekst die hem kenmerkte : “Denk aan mij terug maar niet in de dagen van pijn en verdriet. Denk aan mij terug in de stralende zon, hoe ik was toen ik nog alles kon”.
)
Het hof wil zijn herinnering in ere houden en deelt ook in de droefheid van de dierbare moeder van vrederechter Alfons DANIELS. • Wij hebben ook het overlijden vernomen, op 8 juni 2004, van mevrouw Anne-Marie JENNE¸advocaat bij de Leuvense balie en plaatsvervangend vrederechter in het tweede kanton Leuven en in het kanton Tienen. Geboren te Sint-Truiden op 13 juli 1944 was zij de dochter van wijlen stafhouder Jenne. Zij heeft de familiale traditie met veel eergevoel verder gezet en bewees geprezen diensten aan de justitie. Wij betuigen onze oprechte gevoelens van deelneming aan mevr. de stafhouder Van Casteren en aan beide vrederechters die de medewerking van mevrouw JENNE zullen ontberen. * *
*
Mme le président du tribunal de commerce de Bruxelles nous fait part du décès de deux juges consulaires, Messieurs Louis PISANE et Yves PETIT. Het is steeds met veel dankbaarheid dat wij de nagedachtenis eren van deze trouwe en onmisbare medewerkers van de justitie. * *
*
L’Ordre français du barreau de Bruxelles a perdu, avec tristesse, plusieurs de ses membres : :
Maître Genevière MOYAERTS
:
Maître Pierre HAVELANGE
:
Maître Francine VANDEVELDE
:
Maître Jean CAKELBERGH
:
Maître Alan HAMBURGER
:
Maître André DE BLUTS
:
Maître André CAUVIN
) :
Maître Pol GIGON
:
Maître Pierre DE CONINCK
:
Maître Janine VANDER MOUSEN
:
Maître Bernard BLONDIAU
Mesdames et Messieurs les Avocats honoraires Yves THIRY, Kathy DEBOECK, Joseph PERLBERGER, Wivine BOURGAUX-HIRSCH et Charles DE JONGHE D’ARDOYE. Nous partageons la peine des familles endeuillées et présentons à M. le bâtonnier nos sincères condoléances. De h. stafhouder van de Nederlandse Orde meldt ons het overlijden van : :
Meester Antoon ROOSENS
:
Meester Johan VERHULST
:
Ere-Advocaat Willem VEROUGSTRAETE, later kamervoorzitter in ons arbeidshof.
Wij betuigen onze steun aan de getroffen nabestaanden en verzekeren de h. stafhouder van onze welgemeende gevoelens. Le barreau de Nivelles déplore avec nous tous, le décès de Monsieur le Ministre d’Etat Arthur GILSON qui était aussi Maître GILSON. J’ai eu l’occasion de le rencontrer peu de temps avant son décès et il me confia qu’au-delà de tout ce qu’il avait pu réaliser au service du pays, il était fier de son appartenance au barreau et plus spécialement celui de Nivelles. Nous souhaitons partager ce beau message avec M. le bâtonnier Vanham et tous ses confrères et leur dire combien la cour tient à exprimer sa sympathie au barreau de Nivelles. * *
*
) Monsieur le Premier Président, Mes chers Collègues, Mesdames et Messieurs, Puisse, à l’aube de l’année judiciaire nouvelle, l’évocation du souvenir de nos collègues disparus, ne pas susciter que des sentiments de tristesse. Puisse, en effet, l’exemple qu’ils nous ont donné, nous aider et nous encourager à affronter les tâches ardues qui nous attendent. Ik weet dat de noodlottige gebeurtenissen die wij enkele jaren geleden gekend hebben, vandaag nog altijd enigszins de stempel drukken op het imago van de gerechtelijke instelling en op de manier waarop ons statuut wordt benaderd. Ik roep echter eenieder op om eendrachtig, gelijktijdig discreet en doortastend verder te bouwen aan het herstel van het vertrouwen in onze instelling. Ook vanuit het College van procureurs-generaal zullen wij, in nauw overleg met al onze medewerkers en met de minister van Justitie, alles in het werk stellen om er voor te zorgen dat Justitie in onze maatschappij opnieuw de plaats bekleedt die zij verdient. * *
*
Voor de Koning vorderen wij dat het het hof moge behagen zijn werkzaamheden voort te zetten in het kader van het gerechtelijk jaar dat heden begint. Au nom du Roi, nous requérons qu’il plaise à la cour de poursuivre ses travaux dans le cadre de l’année judiciaire qui commence.