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Insécurité juridique: un armateur peut-il voir son navire saisi pour la dette d’un affréteur, bien après la re-délivraison du navire? Cette question importante n’est toujours pas tranchée en France, malgré de récentes décisions qui se sont prononcées en défaveur des propriétaires de navire. Pourtant, la Convention de Bruxelles du 10 mai 1952, qui concerne les mesures de saisie conservatoire des navires de mer, ne contient aucune disposition ayant pour objet de rendre le propriétaire du navire saisi personnellement débiteur du créancier saisissant sur la seule allégation d’une créance maritime relative au navire saisi, sauf si la créance alléguée est privilégiée sur le navire1. La Convention ne devait créer aucun droit nouveau, ou, en d’autres termes, n’organiser aucun droit à une action qui n’existerait pas d’après la loi à appliquer par le tribunal saisi du litige2. C’est d’ailleurs la règle expressément affirmée par la nouvelle Convention de 19993, dans son article 3, qui limite le droit de saisir un navire qui n’est pas la propriété du débiteur (cas du navire affrété saisi pour une dette de l’affréteur) aux cas où, selon la loi du for, un jugement rendu en vertu de la créance qui fonde la saisie «peut être exécutée contre ce navire par une vente judiciaire ou forcée de ce navire» – chose qui n’est possible, en droit français, que sur le fondement d’une créance privilégiée.
1. Que dit la doctrine? Dans leur Traité de Droit Maritime, les professeurs Bonassies et Scapel exposent qu’en l’absence d’un privilège, «le droit de saisir le navire ne doit pas être reconnu au créancier de l’affréteur à temps». Ils exposent également que si la saisie postérieure à l’affrètement est possible, c’est sur le fondement du seul privilège du créancier sur le navire.
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En effet, aux termes de l’art. 9 de la Convention de 1952: “Rien dans cette Convention ne doit être considéré comme créant un droit à une action qui, en dehors des stipulations de cette Convention, n’existerait pas d’après la loi à appliquer par le Tribunal saisi du litige. La présente Convention ne confère aux Demandeurs aucun droit de suite, autre que celui accordé par cette dernière loi ou par la Convention Internationale pour l’unification de certaines règles relatives aux privilèges et hypothèques maritimes si celle-ci est applicable”. Travaux préparatoires de la Convention – également F. BERLINGIERI, Arrest of ships, No. I.514 et s. Non entrée en vigueur.
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Insécurité juridique: un armateur peut-il voir son navire saisi pour la dette d’un affréteur?
Dans son ouvrage consacré à la saisie des navires, le professeur Berlingieri, considéré comme l’un des pères de la Convention de 1952, reprend, sur cette question, la position que la France avait formulée lors des travaux préparatoires de la Convention: «(…) dans le cas d’affrètement à temps, il est généralement admis qu’un créancier de l’affréteur ne peut saisir le navire affrété que s’il bénéficie d’un privilège maritime. En l’absence de privilège, la saisie n’est pas possible» Le Professeur Delbecque a rappelé récemment: «Les auteurs sont eux-mêmes hésitants, mais, pour la plupart, appuient cette dernière solution, en observant en substance que le propriétaire du navire n’a pas à répondre des dettes de l’affréteur, en dehors de l’hypothèse où le navire est régulièrement grevé d’une charge, c’est-à-dire en dehors de l’hypothèse où le créancier peut faire état d’un droit de suite. En effet, l’article 9 de la Convention de 1952 peut être compris comme laissant entendre que les privilèges reconnus par la loi applicable ou la Convention de 1926 sont pertinents pour fonder la saisie. C’est du reste la solution expressément reconnue par la nouvelle Convention de 1999 sur la saisie conservatoire des navires. Inutile de dire, dans la mesure où les textes ne sont pas particulièrement clairs, que cette doctrine est convaincante»4
2. L’état de la jurisprudence La Cour d’appel de Saint-Denis, dans un arrêt du 9 août 2012, adhère à la doctrine dominante: «la Convention de 1952 ne permet pas de pratiquer une saisie conservatoire sur un navire n’appartenant pas au débiteur de l’obligation après redélivraison sur la seule allégation d’une créance maritime relative audit navire, son article 9 prévoyant en son alinéa 1 qu’elle ne crée aucun droit à une action qui, en dehors de ces stipulations, n’existerait pas d’après la loi appliquée par le tribunal saisi du litige, et en son article 2, qu’elle ne confère aux demandeurs aucun droit de suite autre que celui accordé par ladite loi ou par la convention internationale sur les privilèges et hypothèques maritimes, si elle était applicable… une telle saisie ne peut être autorisée que si le saisissant peut justifier d’une créance privilégiée au sens de la loi applicable». Malheureusement, la Cour d’appel de Rennes a adopté une position diamétralement opposée5 «l’article 3.4 de la Convention de 1952 permet la saisie d’un navire affrété avec remise de la gestion nautique pour sûreté d’une créance sur 4 5
DMF 2013 – n° 746. CA Rennes 25 septembre 2012, Navire Pioneer, DMF 2013, 333.
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l’affréteur tout en posant comme limite à cette mesure son application exclusive au navire concerné par la fourniture; il n’importe dans cette hypothèse que l’affrètement ait cessé lors de la saisie; en effet, le droit de suite exclu à l’art. 9 concerne uniquement l’aliénation du navire et la faculté de saisir entre les mains de l’acquéreur, alors qu’en l’espèce la société X (le fréteur) était propriétaire du navire lors du remplissage des soutes et l’était toujours lors de la saisie» Elle a été rejointe dans son analyse par la Cour d’appel de Bordeaux, laquelle a jugé le 4 décembre 2013: «L’article 3.4 de la convention de 1952 permet en conséquence au titulaire d’une créance maritime de saisir le bateau de l’armateur lorsque la créance est relative au navire de l’intéressé auquel les soutes ont été servies. Contrairement à l’article 3-1 cet article ne renvoie pas en effet à l’article 10 (en réalité 9) et la saisie n’est donc pas soumise aux conditions de ce dernier dés lors qu’il s’agit d’une créance de soutes. L’article 3-4 ne fait en outre aucune distinction selon que l’affrètement est en cours ou est terminé. Il interdit seulement la saisie d’autres navires appartenant au propriétaire. La saisie demeure donc possible après la redélivrance du navire à la fin de l’affrètement à temps». La Cour de Cassation n’a pas encore tranché. Si des pourvois ont pu être déposés, des accords financiers ont entraîné leur retrait, à la satisfaction des saisissants qui n’ont toujours pas été censurés par la Cour Suprême.
3. L’épineuse question de la lettre de garantie Dans toutes ces affaires, le navire n’est pas resté saisi tout au long des procédures, mais a été libéré moyennant la délivrance d’une lettre de garantie. Mais les saisissants ont exigé que la lettre de garantie permette de libérer les fonds déposés par le propriétaire du navire sur la seule production d’une décision condamnant l’affréteur, sans même que le propriétaire ait été condamné en tant que débiteur ou garant des sommes dues par l’affréteur. Les juges ont admis ce libellé. Or, une telle solution est parfaitement injustifiée. Nul ne peut être tenu d’exécuter une décision sur ses biens sans avoir été partie à un procès au fond et avoir personnellement été condamné. Le droit français exige en effet que le titre exécutoire permettant la délivrance de la somme consignée ait été obtenu à l’encontre de la personne dont on cherche à obtenir exécution6. 6
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Notamment Civ 2, 19 mai 1998, pourvois nos 96-13.268 et 96-12.944.
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Face à cette jurisprudence qui entraîne des conséquences financières injustes pour les propriétaires de navires, il reste à espérer que la Cour de Cassation ait l’occasion de trancher dans l’esprit des rédacteurs de la Convention de 1952, ou que la nouvelle Convention de 1999 prenne enfin ses effets. FRANCK DOLLFUS Avocat au barreau de Paris
Noot
Scheepsbeslag voor een vordering op de bevrachter, na beëindiging van de bevrachting In bovenstaande noot bespreekt de auteur de vraag of, naar Frans recht, bewarend beslag kan worden gelegd op een schip wegens een schuld van een bevrachter, nadat de bevrachtingsovereenkomst reeds ten einde is gekomen. In België staat sinds het zgn. Omala-arrest7 vast dat beslag kan worden gelegd op het schip waarop de zeevordering betrekking heeft, ongeacht of de eigenaar van dit schip dan wel een andere persoon instaat voor de zeevordering. Het Hof van Cassatie heeft zijn standpunt terzake in zijn latere rechtspraak nog diverse malen bevestigd8. Het feit dat de zeeschuld door de bevrachter werd aangegaan, belet derhalve niet dat bewarend beslag wordt gelegd op het schip. Het schip waarop de zeevordering betrekking heeft wordt daarmee als het ware een ‘separatistisch onderpand’ voor de maritieme schuldeiser9. Indien die opvatting consequent doorgetrokken wordt, valt te verdedigen dat een maritieme schuldeiser zelfs na een verkoop van het schip waarop zijn vordering betrekking heeft bewarend beslag kan leggen op dit schip10. Het feit dat de (nieuwe) eigenaar van het schip zelf niet instaat voor de zeevordering belet krachtens de Omala rechtspraak immers niet dat er toch beslag wordt gelegd op het schip. 7 8
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Cass. 10 mei 1976, Arr.Cass. 1976, 1008, ETL 1983, 768. Cass. 1 oktober 1993, Arr.Cass. 1993, 788, ETL 1994, 24, RW 1993-1994, 357, conclusie adv.-gen. G. D’Hoore, RHA 1994, 132, TBH 1994, 540, noot G. VAN HAEGENBORGH; Cass. 27 maart 2003 (A.R. C.02.0100.N), Arr.Cass. 2003, 812, ETL 2003, 326, Pas. 2003, 681, RHA 2003, 6, RW 200304, 900, TBH 2003, 848; Cass. 23 mei 2003 (A.R. C.01.0163.N), Arr.Cass. 2003, 1253, ETL 2003, 466, Pas. 2003, 1061. In die zin Gent 7e Kamer 13 april 2015, n.g., A.R. 2014/AR/3043 en 2014/AR/3147. Vgl. E. DIRIX, “Bewarend beslag op zeeschepen” in De Bank & De Zee, Cahiers AEDBF/EVBFR 6, Brussel, Bruylant, 1998, (43), 52.
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Een deel van de rechtspraak liet de schuldeiser inderdaad toe om zelfs na een vervreemding van het schip nog steeds beslag te leggen11. Het Hof van Cassatie is echter niet zover willen gaan, en oordeelde in 2003 dat na vervreemding van het schip geen bewarend beslag meer gelegd kan worden, tenzij de schuldeiser over een volgrecht beschikt12. Daarbij is uiteraard wel vereist dat de overdracht van het schip tegenstelbaar is aan de schuldeiser13. Over de specifieke vraag of een schuldeiser voor een schuld die werd aangegaan door een bevrachter van het schip nog steeds beslag kan leggen nadat de bevrachtingsovereenkomst werd beëindigd en het schip teruggeleverd werd aan de eigenaar werd in België nog niet expliciet geoordeeld. Gelet op de cassatierechtspraak lijkt het antwoord echter positief te zijn. Enkel een (tegenstelbare) vervreemding maakt het schip immuun voor beslagen m.b.t. zeevorderingen die op dit schip betrekking hebben, maar ontstonden vóór de vervreemding. FRANK STEVENS Advocaat te Antwerpen Docent Erasmus Universiteit Rotterdam
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Brussel 8e Kamer 21 september 2001, RHA 2001, 147; Beslagr. Gent 18 juni 2002, RHA 2002, 160. Contra: Beslagr. Antwerpen 17 december 1996, RW 1997-98, 578. Cass. 27 maart 2003 (A.R. C.02.0100.N), Arr.Cass. 2003, 812, ETL 2003, 326, Pas. 2003, 681, RHA 2003, 6, RW 2003-04, 900, TBH 2003, 848; Cass. 23 mei 2003 (A.R. C.01.0163.N), Arr.Cass. 2003, 1253, ETL 2003, 466, Pas. 2003, 1061; Cass. 9 februari 2012 (A.R. C.11.0486.N), E.T.L. 2012, 296. Gent 14e Kamer 8 februari 2011, (A.R. 2008/AR/1965), TBH 2011, 498.
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