LES LIMITATIONS AU DROIT A LA SECURITE SOCIALE DES DETENUS : UNE DOUBLE PEINE ? Actes du colloque du 28 novembre 2008 à la Maison des Parlementaires
BEPERKING VAN HET RECHT OP SOCIALE ZEKERHEID VAN GEDETINEERDEN : EEN DUBBELE STRAF ? Colloquium op 28 november 2008 in het Huis van de Parlementairen
LES LIMITATIONS AU DROIT A LA SECURITE SOCIALE DES DETENUS : UNE DOUBLE PEINE ? sous la direction de Véronique VAN DER PLANCKE Chercheuse au Centre Droits fondamentaux et Lien social (FUNDP) Chercheuse associée au Centre de Philosophie du droit (UCL) Avocate au Barreau de Bruxelles et Guido VAN LIMBERGHEN Professeur à la VUB Vakgroep Sociaal Recht
Xavier DIJON Directeur du Centre Droits fondamentaux et Lien social (FUNDP Namur) Wouter VANDENHOLE Docent mensenrechten, houder UNICEF-leerstoel kinderrechten, Faculteit Rechten, Universiteit Antwerpen (UA) Roland RASSON et Anneli VERSTRAETE Inspecteurs Maatschappelijk Werk Thierry MOREAU Professeur à la Faculté de droit de l’UCL Président de l’Ecole de criminologie de l’UCL Avocat au Barreau de Nivelles Prof. dr. Gijsbert VONK Hoogleraar socialezekerheidsrecht Rijksuniversiteit Groningen en Vrije Universiteit Amsterdam Philippe AUVERGNON Directeur de recherche au CNRS, Comptrasec UMR CNRS 5114, Université Montesquieu-Bordeaux IV Hugues-Olivier HUBERT Maître de conférences aux FUNDP et à l’ULB Membre du Centre Droits fondamentaux et Lien social (FUNDP) Chercheur à la Fédération des Centres de Service Social Sonja SNACKEN Professeur à la VUB Vakgroep Criminologie
2010
Comment la justice est rendue chez un peuple appelé les « Negritos »? Lorsqu’un membre de la communauté provoque des dégâts chez un autre membre de la communauté, la personne est placée au centre d’un cercle formé par toutes les personnes qu’il/elle connait. L’assemblée dure un jour entier. Chacun à son tour, les personnes du cercle raconte à celui qui se trouve au centre toutes les bonnes choses que ce dernier a faites par le passé, et qui ont contribué à enrichir leur vie. Cette pratique « judiciaire » est fondée sur une conception de l’Humanité très particulière, notre nature humaine est ainsi faite que, lorsque nous sommes en contact avec notre être profond, notre force intérieure, notre plus grand plaisir dans la vie est de contribuer au bien-être de nos semblables. Le but du système « judiciaire » des Negritos est ainsi de reconnecter à nouveau l’homme avec cette force. Annick NÖLLE, Collapsing the field of energy
REMERCIEMENTS
Les remerciements que nous devons à la Revue de Droit Pénal et de Criminologie qui nous ouvre ses dossiers vont également à Mme la Sénatrice Clotilde NYSSENS qui a accueilli notre initiative, ainsi qu’aux Membres de la Chambre des Représentants qui ont accepté de parrainer ce colloque : M. le Vice-président Herman DE CROO, Mme Karine LALIEUX et M. Peter VANVELTHOVEN. Notre gratitude va ensuite à la Fondation Roi Baudouin, à la Loterie Nationale, à la VUB et aux FUNDP pour avoir permis, par leur financement notamment, la réalisation de la journée d’étude et la publication des actes. Sans l’excellent travail de mise en page et d’harmonisation des différentes contributions réalisé par Mme Christiane DELVIGNE, secrétaire au Centre « Droits fondamentaux & Lien social », le présent recueil n’aurait pu voir le jour. Qu’elle en soit très vivement remerciée. Enfin, nous adressons un merci tout particulier au Professeur Xavier DIJON, pour sa relecture approfondie des textes et son essentiel accompagnement de tous les instants.
PRESENTATION
par Xavier DIJON Directeur du Centre Droits fondamentaux et Lien social (FUNDP Namur)
PRESENTATION Ce dossier de la Revue de droit pénal et de criminologie rassemble les contributions exposées au colloque tenu le 28 novembre 2008 à la Maison des Parlementaires de Bruxelles sur ‘les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?’ organisé conjointement par le Vakgroep Sociaal Recht de la Vrije Universiteit Brussel et le Centre Droits fondamentaux et Lien social des Facultés universitaires Notre-Dame de la Paix à Namur, cette rencontre faisait suite à une recherche menée par les deux institutions universitaires prénommées, avec l’appui de la Fondation Roi Baudouin, à la requête de l’asbl Réseau Détention et Alternatives, bientôt suivie par sa consœur néerlandophone Netwerk Samenleving en Detentie. Dans le présent recueil, Véronique van der Plancke et Guido van Limberghen formulent des questionnements et propositions de réforme en prolongement de l’étude entreprise en 2007, dans une perspective principalement de droit positif belge1. Mais nous voulions aller plus loin. Au colloque (et donc aussi en ce dossier), nous avons amplifié la recherche en trois directions : il s’agissait d’abord de s’affranchir de la technicité des analyses menées dans l’ouvrage à propos de l’application aux détenus des diverses branches de la sécurité sociale (chômage, pensions, allocations familiales, etc.) ou de l’assistance sociale, ainsi que du travail pénitentiaire, d’où les réflexions de fond de Wouter Vandenhole, Véronique van der Plancke, Hugues-Olivier Hubert et Sonja Snacken sur les liens à nouer entre peine et protection sociale ; (…) ; il s’agissait ensuite de descendre sur le terrain en exposant à la fois le vécu des détenus (Thierry Moreau) et l’expérience quotidienne des services psycho-sociaux des établissements pénitentiaires (Anneli Verstraete et Roland Rasson) sur le sujet qui nous occupe ; il s’agissait enfin d’élargir le champ de la réflexion en allant voir ce qui se passe chez nos voisins sur les mêmes sujets, en l’occurrence la protection sociale aux Pays-Bas (Gijsbert Vonk) et le travail pénitentiaire en France (Philippe Auvergnon). Pourquoi un tel approfondissement ? Dans le but de mieux articuler, d’une part, la reconnaissance des droits sociaux dont on dit qu’ils sont inhérents à tout être humain (si du moins on en croit les instruments internationaux et nationaux relatifs à la matière), d’autre part, la privation de liberté que prévoit la loi pénale à l’encontre des auteurs des infractions les plus graves.
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Cette recherche, coordonnée par Mme Myriam BODART (DF & LS, Namur), est publiée en français dans V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, La sécurité sociale des (ex-)détenus et de leurs proches, Bruxelles, La Charte, coll. Droit en mouvement, 2008, 517 p. et en néerlandais dans G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, De sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brussel, Die Keure, reeks Recht en sociale zekerheid, 2008, 437 p.
SOCIAL ET PENAL C’est que les deux objectifs, – du droit social et du droit pénal – semblent contradictoires. Il faut donc beaucoup de temps et de réflexion pour ajuster leur équilibre lorsque ces deux branches du droit se rencontrent sur la même personne, le détenu. L’une et l’autre logique, il est vrai, visent la sécurité. Mais alors que, grossièrement dit, la logique pénale cherche à protéger la société du mal, la logique sociale poursuit le même objectif à l’encontre du malheur. Apparemment, la différence entre ces deux risques provient donc de la liberté individuelle. Le « malheur », en effet, n’est pas voulu : perte du travail, accident, maladie, vieillesse, pauvreté ou misère s’imposent à un sujet qui préférerait ne pas connaître de telles contrariétés, tandis que le « mal » relève, semble-t-il, de l’engagement de la volonté de ce même sujet comme le disent d’ailleurs les pénalistes lorsqu’ils mettent en évidence l’élément moral de l’infraction. Il ne faut donc pas confondre, dit-on, ces deux risques que sont le mal et le malheur : pauvreté n’est pas vice. Devant le malheur d’un de ses membres, la société manifeste une réaction d’inclusion placée sous le signe de la justice distributive ; devant le mal, elle réagit d’une tout autre manière, par l’exclusion invoquant la justice rétributive. Dans le premier cas, les liens se resserrent : en prenant une image médicale, on dirait que le corps (social) se solidarise avec son membre malade, comme pour lui apporter une poche de sang ou une réserve d’oxygène. Le bien commun, constitué soit par les régimes contributifs propres à la sécurité sociale, soit par les contributions générales qui alimentent les régimes d’assistance sociale, sera en effet affecté aux sujets qui doivent affronter l’infortune. Dans le second cas, au contraire, l’image de l’amputation se présente pour conjurer le mal : ne convient-il pas, de fait, de couper le lien avec cette partie gangreneuse du corps social ou, au moins, de faire comprendre au délinquant combien il ne mérite plus de profiter de cette liberté dont il a si mal usé, ni donc des faveurs de la société dont il a trompé la confiance ? L’opposition des deux dynamiques semble donc insurmontable. Pourtant, la Loi de principes du 12 janvier 2005 concernant l’administration pénitentiaire ainsi que le statut juridique des détenus laisse entendre une conciliation plus humaine des deux logiques. Certes la peine reste incontournable dans la mesure où le sujet doit être ramené, d’une façon ou d’une autre, au bon usage de sa liberté. Mais dans la mesure où cette peine consiste en une privation de liberté, la loi de principes exige, comme on sait, de limiter la peine à cette seule privation, sans porter atteinte aux autres droits du détenu. Le propos vaut donc aussi pour les droits sociaux de la personne emprisonnée, comme le montrent les exposés réunis en ce dossier. En ces contributions, en particulier celle que Wouter Vandenhole consacre au droit fondamental à la sécurité sociale, on entend en effet tous les efforts consentis par les juristes pour donner aux droits sociaux une effectivité toujours plus grande. Les grands axes sont tracés devant les pouvoirs publics par les trois verbes récurrents : 12
respecter les droits, les protéger, les réaliser. On insiste sur la juridicité de tels droits en toute leur extension : même en matière d’assistance sociale, l’octroi discrétionnaire des aides n’appartient-il pas à un passé révolu ? Des constructions jurisprudentielles hardies ne situent-elles pas désormais le droit aux allocations dans l’orbite de la protection du suprême droit de propriété ? Quant au travail pénitentiaire, abordé dans la contribution de Philippe Auvergnon, le moment semble venu de le faire entrer dans l’orbite du droit en accordant au détenu mis au travail les protections garanties à l’ensemble des travailleurs. Mais comment comprendre cette préférence donnée par la Loi de principes et par tous les défenseurs des droits des détenus à la logique d’inclusion de la justice distributive sur la logique d’exclusion de la justice rétributive ? Derrière ces réflexions élaborées pour solidifier le statut juridique des détenus se profile peut-être une double logique : celle des droits de l’homme d’abord, car si la dignité est incompressible pour tous, on ne peut la rogner au détriment des êtres les plus fragiles, mais peut-être aussi celle d’un correctif à apporter au principe même de la peine.
UN REGARD POSITIF Les droits de l’homme, entend-on plusieurs fois en ce dossier, en écho d’ailleurs à la jurisprudence de Strasbourg, ne s’arrêtent pas à la porte de la prison. Qu’est-ce à dire sinon qu’une société doit sans cesse se rappeler que l’enfermement ne peut pas tuer l’espoir. Sans doute, à l’entrée de l’enfer que décrit Dante est-il écrit : « Vous qui entrez ici, laissez toute espérance ! »2, mais même si elle y ressemble à certains égards, la prison ne peut devenir (ou rester) cet enfer.3 Sans doute encore, la peine, – son nom même l’indique -, ne peut-elle que faire mal, puisqu’il s’agit de réagir au mal qu’a commis le délinquant, mais la punition n’est pas absolue : elle vise un être humain qui reste un être humain et qui, à ce titre, mérite que lui soient reconnus ses droits humains. Dès lors que la rétribution entend faire comprendre aux parties en présence, c’est-à-dire au délinquant mais aussi au reste de la société, que le lien social ne peut pas être impunément entamé par la commission d’une infraction grave, n’est-ce pas ce lien social qu’il faut mettre en évidence ? Autrement dit, puisque c’est le lien social qui rappelle, par le moyen de la peine, son ordre de justice, ne doit-il pas maintenir dans la peine elle-même toute la force de ce lien ? 2 3
Dante ALIGHIERI, La divine comédie, L’Enfer, chant III. Pour un témoignage saisissant sur la réalité de l’enfermement et ses effets dévastateurs, v. Ph. LANDENNE, Peines en prison, l’addition cachée, Bruxelles, Larcier, coll. Crimen, 2008, préface de Fr. TULKENS, postface de D. KAMINSKI. A la fin de l’ouvrage, l’auteur évoque un dernier visage : « Je connais bien Enzo. Il m’a confié régulièrement ses tourments à chaque étape de son parcours derrière les murs. Je sais qu’il n’exagère pas lorsqu’il évoque le déchaînement infernal des conséquences dramatiques de son incarcération pour les siens et pour lui. Comme la majorité des détenus, il est convaincu que personne ne veut comprendre la profondeur de ses peines éprouvées en prison et il se perçoit méprisé dans son humanité. » (p. 222).
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La doctrine pénale évoque souvent le paradoxe pénitentiaire (exclure pour inclure) ou encore les tensions repérables entre les différentes fonctions (rétribution, prévention générale, prévention spéciale) de la peine. Mais pour entrer dans une intelligence plus profonde, ne faut-il pas insérer le caractère négatif (pénible) de cette peine dans la dynamique positive du lien social lui-même ? En d’autres termes encore, si la peine se comprend comme la réaction du corps social à l’injustice qui affecte son propre lien interne, il faut donc prendre la justice de ce lien (en gros, le respect de l’intégrité physique, morale et patrimoniale d’autrui) non seulement comme le point de départ à partir duquel doit s’énoncer, par contraste, l’incrimination du comportement déviant, mais également comme le point d’arrivée de la peine qui frappe un tel comportement. Parce qu’elle est une exigence du droit inhérent au lien social, la peine doit se dérouler entièrement sous l’empire de ce droit, et en vue de la réintégration du délinquant dans ce lien social. Le respect des droits de l’homme à l’intérieur de la prison ne manifeste-t-il pas au mieux cette dynamique positive ? Portée par l’espoir, cette perspective développée par la Loi de principes permettrait en tout cas à la prison d’élargir son heureuse différence par rapport à l’enfer.4
UN DEBUT DE REPARATION Mais si la préférence donnée ainsi à la logique d’inclusion (ici, par la reconnaissance des droits sociaux) sur la logique d’exclusion inhérente à la prison s’explique d’abord par le regard positif que la société continue à porter sur le détenu qui reste titulaire de tous ses droits fondamentaux (autres, du moins, que sa liberté de circulation), elle pourrait s’expliquer aussi, réciproquement en quelque sorte, par le regard plus sévère que, cette fois, le détenu porterait sur le reste de la société. Car avant de se retrouver coupé du lien social par son enfermement, le délinquant était peut-être déjà, à l’air libre, poussé aux marges de la société. L’exposé d’HuguesOlivier Hubert et Véronique van der Plancke montre bien cette dynamique de la rupture sociale précédant déjà la relégation pénale : le sort le moins enviable (de la less eligibility) se trouve vécu, avant la prison, dans le décrochage du sujet par rapport au reste de la société. S’il en va ainsi, où donc se trouve le mal que l’on prétend enfermer ? Le code pénal donne sans doute sa réponse : le mal se trouve chez les personnes qui se sont 4
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Vingt-cinq ans déjà avant le vote de la Loi Dupont, Lode VAN OUTRIVE écrivait : « En creusant la question des droits des détenus on peut se demander si ceux-ci ne doivent pas conserver tous les droits des autres citoyens, sauf celui de circuler dans la communauté ? Ni la dissuasion, ni l’intimidation, ni la rétribution, ni même la réhabilitation ne sont des justifications valables pour priver un détenu de ses droits fondamentaux. Il ne faut rien ajouter à la réclusion : il est très douteux qu’on ait le droit de disposer encore plus de la personne. » (L. VAN OUTRIVE, « Le système pénitentiaire en Belgique : un système bloqué », Revue interdisciplinaire d’études juridiques, 1979. 3, p. 23).
rendues coupables des infractions incriminées par le texte. Or, avant d’émerger dans les articles du code et les passages à l’acte du délinquant, le mal n’a-t-il pas déjà couvé dans la façon d’organiser le lien social lui-même ? Nous l’avons rappelé plus haut : pauvreté n’est pas vice ; dans le chef de la personne qui subit cette pauvreté, certes, mais qu’en est-il dans la conscience de la société qui tolère cette pauvreté et même, qui la produit ? Bien sûr, nous ne voulons pas dire par là que la mauvaise distribution des richesses formerait la seule cause de la délinquance ; le dol réprimé par la loi pénale se cache en effet en toutes les couches de la société, mais nous devons tout de même reconnaître que la population qui remplit les prisons se trouve largement constituée de sujets qui n’ont pas eu accès, à égalité avec les autres, aux biens sociaux de l’emploi, du logement, de la formation, … Comme le relève Sonja Snacken dans les conclusions du colloque, ce n’est peut-être pas la politique sociale qui met les gens en prison mais la fragilité sociale augmente les risques de criminalité et de privation de liberté. Lors donc qu’elle enferme la pauvreté derrière les barreaux, la société ne devrait-elle pas parfois se poser la question de savoir si elle n’y enferme pas en même temps son propre vice ? Dans ces conditions, l’établissement ou le maintien d’une protection sociale au bénéfice des détenus jouerait en quelque sorte, à leur égard, le rôle d’une justice ‘réparatrice’. La Loi de principes du 12 janvier 2005 a consacré, en Belgique, un renversement radical dans la manière de considérer le détenu, dont la situation doit être rapprochée désormais le plus possible de celle que connaît tout autre sujet de droit habitant le Royaume. Les exposés qui constituent le présent dossier montrent les conséquences d’une telle option sur le plan de la protection sociale et du travail pénitentiaire. Mais d’où vient que, de plusieurs côtés, on pressent que ce changement de perspective prendra beaucoup de temps avant de devenir réalité effective ?5 Probablement parce que, si la prison sert à changer la mentalité du détenu, la nouvelle législation exige, elle, un changement de mentalité de la société elle-même. La parole est donc au politique.
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Dans son livre-témoignage évoqué plus haut, Ph. LANDENNE écrit : « Dès les premiers jours qui suivent l’annonce de ce nouveau texte de loi, des détenus s’énervent et me disent leur impatience parce qu’ils ne voient aucune différence dans leurs conditions de vie alors que ‘la télévision a pourtant dit que ça allait changer’. Les propos amers ne tardent pas : ‘on nous a encore fait de fausses promesses qui ne seront pas tenues avec cette loi alors qu’on galère toujours de la même manière’… Difficile d’expliquer qu’il faudra des années avant que le premier impact de cette nouvelle législation se fasse progressivement sentir » (op.cit., p. 171).
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HET MENSENRECHT OP SOCIALE ZEKERHEID VOOR GEDETINEERDEN: SPROKKELS EN PRINCIPES
door Wouter VANDENHOLE Docent mensenrechten, houder UNICEF-leerstoel kinderrechten, Faculteit Rechten, Universiteit Antwerpen
UNICEF eerbiedigt de academische vrijheid van de houder van de leerstoel. De door de houder ingenomen standpunten verbinden geenszins UNICEF.
Sociale zekerheid is een mensenrecht. Het wordt onder meer gewaarborgd in artikel 23, derde lid, 2° van de Belgische grondwet. Het is eveneens zeer in het algemeen geformuleerd in artikel 9 van het Internationaal Verdrag inzake Economische, Sociale en Culturele Rechten (IVESCR). Binnen de Raad van Europa bevat artikel 12 (Herzien) Europees Sociaal Handvest ((H)ESH) meer specifieke waarborgen inzake het recht op sociale zekerheid. Artikel 13 (H)ESH garandeert het recht op sociale bijstand. Het is opvallend hoe weinig expliciete of specifieke aandacht besteed wordt aan de groep van gedetineerden vanuit het perspectief van het mensenrecht op sociale zekerheid.1 Het uitgangspunt moet zijn dat ook gedetineerden het recht op sociale zekerheid genieten. Dat recht kan onderworpen worden aan beperkingen, maar enkel indien aan de voorwaarden voor het opleggen van beperkingen voldaan is. Een gedetineerde verliest zijn mensenrechten immers niet aan de gevangenispoort. Daarnaast lijkt er een tendens te bestaan om (voormalige) gedetineerden als een kwetsbare groep te beschouwen, die bijzondere bescherming verdient. In wat volgt wordt het mensenrecht op sociale zekerheid eerst nader toegelicht. De inhoud van het recht, de verplichtingen voor staten, en de mogelijke beperkingen op het recht worden nader onderzocht. Vervolgens wordt toegelicht in welke mate aandacht besteed is aan het recht op sociale zekerheid van gevangenen in het bijzonder. Gezien de uiterst beperkte en versnipperde aandacht wordt in de derde plaats op zoek gegaan naar algemene mensenrechtelijke principes inzake gedetineerden. In het licht van dat normatief kader wordt ten slotte de huidige regel van de schorsing van socialezekerheidsrechten van gedetineerden onder de loep genomen.
I. HET RECHT OP SOCIALE ZEKERHEID De terminologie inzake het recht op sociale zekerheid is niet eenduidig. In het IVESCR lijkt het gebruikt te worden als omvattende term voor zowel het recht op sociale zekerheid sensu stricto als het recht op sociale bijstand. In het (H)ESH wordt het onderscheid tussen sociale zekerheid en sociale bijstand expliciet gemaakt (art. 12 respectievelijk art. 13), al is het vaak moeilijk vol te houden in de praktijk. Elders hebben we voorgesteld om als algemene term het recht op sociale bescherming te gebruiken, waarvan het recht op sociale zekerheid en het recht op sociale bijstand
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Zie onze gelijkaardige vaststelling in verband met het recht op onderwijs en arbeid van gedetineerden, in W. VANDENHOLE, “Recht op onderwijs, beroepsopleiding en arbeid voor gedetineerden” in E. BREMS, S. SOTTIAUX, P. VANDEN HEEDE en W. VANDENHOLE (eds.), Vrijheden en vrijheidsbeneming. Mensenrechten van gedetineerden, Antwerpen, Intersentia, 2005, (221) 223.
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
deel van uitmaken.2 In deze publicatie is er voor geopteerd om de term sociale zekerheid als generieke term te gebruiken, en wordt bij die keuze pragmatisch aangesloten. Het recht op sociale zekerheid wordt gerekend tot de zogenaamde categorie van economische, sociale en culturele mensenrechten. Die categorie van mensenrechten heeft traditioneel minder aandacht genoten dan de categorie van burgerlijke en politieke rechten, de zogenaamde vrijheidsrechten. Niettegenstaande de herbevestiging van de ondeelbaarheid en onderlinge afhankelijkheid van alle mensenrechten sinds de vroege jaren ’90, en de groeiende aandacht voor economische, sociale en culturele rechten op internationaal vlak, blijft deze laatste categorie van mensenrechten juridisch vaak stiefmoederlijk behandeld. Dat is a fortiori zo voor het recht op sociale zekerheid, dat binnen de categorie van economische, sociale en culturele rechten bijzonder weinig aandacht geniet. De onderschikking van economische, sociale en culturele rechten komt niet enkel tot uiting in de beperkte academische aandacht, maar ook in het zwakkere internationale en Europese toezicht op de naleving – niet door hoven maar door comités – en in het quasi-automatisme waarmee aan verdragsbepalingen inzake economische, sociale en culturele rechten directe werking wordt ontzegd in de Belgische rechtspraak.3
A. RECHTSBRONNEN Het recht op sociale zekerheid wordt zeer in het algemeen gewaarborgd in artikel 23, derde lid, 2° van de Belgische grondwet en in artikel 9 IVESCR. Artikel 12 (H)ESH bevat meer specifieke waarborgen inzake het recht op sociale zekerheid sensu stricto. Artikel 13 (H)ESH waarborgt het recht op sociale bijstand en art. 14 (H)ESH bevat het recht op het genot van sociale diensten. Daarnaast vinden we het recht ook terug in mensenrechtenverdragen voor specifieke groepen. Artikel 26 van het Verdrag over de Rechten van het Kind waarborgt elk kind het recht om te genieten van het recht op sociale zekerheid. Meestal wordt het recht op gelijke behandeling inzake sociale zekerheid beklemtoond. In art. 5 van het Verdrag tot uitbanning van alle vormen van rassendiscriminatie verbinden staten zich ertoe om rassendiscriminatie uit te bannen en gelijkheid voor de wet te 2
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W. VANDENHOLE, “Article 26: The Right to Benefit From Social Security” in A. ALEN, J. VANDE LANOTTE, E. VERHELLEN e.a. (eds.), A Commentary on the United Nations Convention on the Rights of the Child, Leiden/Boston, Martinus Nijhoff, 2007, 22-25. Een mogelijke kentering in het quasi-automatisch ontzeggen van directe werking aan bepalingen over economische, sociale en culturele rechten wordt mogelijk ingeluid door een arrest van de Raad van State, waarin erkend wordt dat de negatieve verplichting vervat in art. 4.4 Europees Sociaal Handvest directe werking heeft. Voor een bespreking, zie W. VANDENHOLE, “Het leerstuk van de directe werking van verdragsbepalingen inzake sociaal-economische mensenrechten in beweging” (noot onder RvS 28 april 2008, nr. 182.454), RW 2008-09, 1000-1002.
Het mensenrecht op sociale zekerheid voor gedetineerden: sprokkels en principes
waarborgen inzake het genot van het recht op sociale zekerheid. De gelijke rechten van vrouwen op sociale zekerheid, in het bijzonder in geval van pensioen, werkloosheid, invaliditeit en andere onmogelijkheden om te werken, worden gewaarborgd in art. 11, lid 1 van het Verdrag tot uitbanning van alle vormen van vrouwendiscriminatie. Gelijke behandeling inzake het recht op sociale zekerheid staat ook ingeschreven in art. 27 van het Verdrag inzake de Rechten van Migrerende Werknemers.4 Daarnaast is het belangrijk te verwijzen naar een aantal verdragen van de Internationale Arbeidsorganisatie (IAO) inzake sociale zekerheid, waaronder het Verdrag Nr. 102 inzake sociale zekerheid (minimumnormen),5 en naar het Europees wetboek sociale zekerheid.6 Ze bevatten precieze bepalingen inzake de te bieden waarborgen in elk van de takken van de sociale zekerheid, en geven een meer specifieke invulling aan het recht op sociale zekerheid. Alhoewel ze strikt genomen geen mensenrechtenverdragen zijn, spelen ze toch een belangrijke rol, met name bij de concrete invulling en het vastleggen van een minimumnorm voor het mensenrecht op sociale zekerheid: art. 12 ESH verwijst expliciet naar het IAOverdrag Nr. 102, en art. 12 HESH naar het Europees wetboek.
B. INTERNATIONAALRECHTELIJKE BETEKENIS 1. Internationaal Verdrag inzake economische, sociale en culturele rechten De inhoud van het recht op sociale zekerheid, zoals gewaarborgd door artikel 9 IVESCR, is verduidelijkt door het Comité voor Economische, Sociale en Culturele Rechten (CESCR) in een algemene commentaar van 2008. Het recht op sociale zekerheid wordt geacht instrumenteel te zijn voor de realisatie van een menswaardig leven, en meer in het bijzonder van het recht op bescherming van het gezin (art. 10 IVESCR), het recht op een behoorlijke levensstandaard (art. 11 IVESCR) en het recht op toegang tot gezondheidszorg (art. 12 IVESCR).7 Het recht op sociale zekerheid kan zowel gerealiseerd worden door stelsels gebaseerd op bijdragen (sociale verzekering) als door universele stelsels (sociale bijstand). Sociale bijstand lijkt voor het Comité in de meeste gevallen onontbeerlijk, omdat sociale 4
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Artikel 54 waarborgt gelijke behandeling inzake werkloosheidsuitkering voor migrerende werknemers met papieren. Dit is het enige van de vermelde verdragen dat nog niet is ondertekend noch geratificeerd door België. Geratificeerd door België op 26 november 1959, goedgekeurd bij wet 11 september 1959 houdende goedkeuring van het Internationaal Verdrag (nr 102), betreffende de minimumnormen der sociale zekerheid, aangenomen op 28 juni 1952 te Genève, door de Algemene Conferentie van de Internationale Arbeidsorganisatie, tijdens haar vijf en dertigste zitting, BS 9 december 1959. Geratificeerd door België op 13 augustus 1969, in België in werking getreden op 14 augustus 1970. CESCR, General Comment No. 19, The Right to Social Security (article 9), VN Doc. E/C.12/GC/19, 4 februari 2008, §§ 1, 2, 11 en 12.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
verzekeringen alleen er zelden zullen in slagen iedereen op voldoende wijze te beschermen.8 Onderling verbonden en essentiële elementen van het recht op sociale zekerheid zijn beschikbaarheid, behoorlijkheid en toegankelijkheid (availability, adequacy, accessibility). Beschikbaarheid heeft betrekking op het bestaan van een duurzaam systeem van sociale zekerheid, in het bijzonder voor inkomenszekerheid, toegang tot gezondheidszorg en gezinssteun. Uitkeringen moeten behoorlijk zijn qua bedrag en duur. Toegankelijkheid vereist dat iedereen gedekt is door het sociale zekerheidssysteem, de bijdragen veroorloofbaar zijn, informatie beschikbaar is en participatie in het beheer van het systeem mogelijk is.9 In overeenstemming met art. 2, § 1 IVESCR moeten verdragsstaten het recht op sociale zekerheid geleidelijk realiseren, in functie van de maximaal beschikbare middelen. Op dit algemene principe van geleidelijke realisatie maakt het Comité systematisch twee uitzonderingen. Onmiddellijke verplichtingen gelden om het recht op sociale zekerheid te waarborgen zonder discriminatie, en om bewuste, concrete en gerichte stappen te zetten in de richting van volledige realisatie.10 Er geldt een sterk vermoeden dat regressieve maatregelen verboden zijn. Het VN-Comité stelt een zesvoudig criterium voor om de geoorloofdheid van retrogressieve maatregelen inzake het recht op sociale zekerheid te beoordelen: of alternatieven grondig onderzocht zijn; of echte participatie door de getroffen groepen in het onderzoeken van de voorgestelde maatregelen en de alternatieven plaatsgevonden heeft; of de maatregelen niet direct of indirect discriminerend zijn; of de maatregelen een duurzame invloed zullen hebben op de realisatie van het recht op sociale zekerheid; of het individu beroofd wordt van toegang tot het minimale basisniveau (“minimum essential level”) van sociale zekerheid, tenzij alle beschikbare middelen gebruikt zijn; en of toezichtsprocedures op nationaal vlak de hervormingen onderzocht hebben.11 Verplichtingen voor verdragsstaten onder het IVZSCR worden opgedeeld in verplichtingen tot eerbiedigen, beschermen en vervullen. Zo ook voor het recht op sociale zekerheid. De verplichting tot eerbiedigen houdt onder meer in dat staten zich moeten onthouden van inmenging in privé-initiatieven om sociale zekerheid te verschaffen.12 De verplichting tot bescherming vereist een regulerend optreden van de staat indien sociale zekerheidsstelsels beheerd worden door derden.13 De verplichting tot vervullen-faciliteren houdt onder meer in dat staten wettelijke erkenning aan het recht moeten geven, een sociale zekerheidsstrategie moeten ontwikkelen en een actieplan aannemen om het recht te realiseren. Het opzetten van 8 9 10 11 12 13
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Ibid., § 3. Ibid., § 11. Ibid., § 30. Ibid., § 31. Ibid., § 33. Ibid., § 35.
Het mensenrecht op sociale zekerheid voor gedetineerden: sprokkels en principes
een stelsel gebaseerd op bijdragen valt onder deze (sub)verplichting.14 De verplichting tot vervullen-verschaffen houdt in dat een staat sociale bijstand of andere stelsels die niet op bijdragen gebaseerd zijn, zal moeten opzetten.15 Op staten rust tevens de kernverplichting om minimaal de vervulling te verzekeren van het essentiële basisniveau van het recht. Voor het recht op sociale zekerheid gaat het om volgende vijf componenten: (1) toegang verzekeren tot het essentiële basisniveau van sociale zekerheid dat noodzakelijk is om water en sanitatie, voedsel, fundamentele basisgezondheidszorg, basishuisvesting en de meest fundamentele vormen van onderwijs te verwerven; (2) het recht op toegang tot sociale zekerheidsstelsels verzekeren op nietdiscriminatoire basis, in het bijzonder voor achtergestelde of gemarginaliseerde groepen; (3) een nationale sociale zekerheidsstrategie en actieplan opstellen en uitvoeren voor de hele bevolking; het ontwerp en de periodieke evaluatie ervan moet plaatsvinden in het kader van een participatief en transparant proces; de strategie moet ook informatie bevatten over indicatoren en streefdoelen, zodat vooruitgang kan beoordeeld worden; (4) de mate waarin het recht op sociale zekerheid gerealiseerd wordt, opvolgen (monitoring); en (5) sociale bijstands- of andere programma’s opzetten om de achtergestelde en gemarginaliseerde individuen en groepen te beschermen.16 Deze kernverplichtingen gelden onmiddellijk; het algemeen principe van geleidelijke realisatie is niet van toepassing. Wel wordt rekening gehouden met de financiële beperkingen van een land, voor zover elke inspanning geleverd is om alle beschikbare middelen aan te wenden voor de prioritaire voldoening van de kernverplichtingen.17 Regressieve maatregelen in strijd met de kernverplichtingen vormen een schending van het IVESCR.18 Het Comité gaat in de Algemene Commentaar ook in op enkele specifieke takken van de sociale zekerheid. Werkloosheidsuitkeringen moeten toegekend worden om inkomensverlies te dekken wegens de onmogelijkheid om gepast werk te vinden. Uitkeringen moeten gedurende een behoorlijke periode betaald worden, en nadat die periode verstreken is, vervangen worden door andere vormen van bescherming. De toekenningsvoorwaarden moeten redelijk en proportioneel zijn. De intrekking, vermindering of schorsing van werkloosheidsuitkeringen moet nauwkeurig bepaald
14 15 16 17 18
Ibid., § 37. Ibid., § 38. Ibid., § 49. Ibid., § 50. Ibid., § 54.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
zijn, op basis van redelijke en proportionele gronden, en voorzien bij wet. Bovendien moeten er rechtsmiddelen openstaan tegen een dergelijke beslissing.19 Staten moeten tevens een stelsel opzetten om de financiële toegankelijkheid tot het gezondheidssysteem mogelijk te maken. De ziekteverzekering moet voor iedereen betaalbaar zijn, en elke levensbedreigende toestand, zwangerschap en bevalling, algemene gezondheidszorg en hospitalisatie moeten gedekt worden.20 Staten moeten ervoor zorgen dat individuen het recht op sociale zekerheid zonder discriminatie genieten. Bijzondere aandacht moet gaan naar individuen en groepen die het traditioneel moeilijk hebben om dit recht uit te oefenen.21 Wat de gelijkheid tussen mannen en vrouwen betreft, moet onder meer de verplichte pensioenleeftijd gelijk geschakeld worden; moeten vrouwen gelijke voordelen genieten in de pensioenstelsels; en moet behoorlijk moederschapsverlof voor vrouwen, vaderschapsverlof voor mannen, en ouderschapsverlof voor mannen en vrouwen gewaarborgd worden.22 2. (Herzien) Europees Sociaal Handvest Het (H)ESC bevat twee algemene bepalingen inzake het recht op sociale bescherming, met name art. 12 over het recht op sociale zekerheid en art. 13 over het recht op sociale bijstand. Sociale zekerheidsuitkeringen hebben betrekking op zekere risico’s, zoals ziekte, handicap, moederschap, gezin, werkloosheid, ouderdom, overlijden, weduwnaarschap, en beroepsongevallen of -ziekten. Onder het toepassingsgebied van sociale bijstand in art. 13 vallen uitkeringen waarvoor men in aanmerking komt op grond van individuele nood, zonder enige vereiste van verbondenheid met een sociale zekerheidsstelsel, beroepsactiviteit of de betaling van bijdragen.23 Beide artikels worden tot de kernbepalingen van het (H)ESH gerekend.24 Het (H)ESH hanteert een à la carte-benadering: verdragsstaten kunnen binnen bepaalde krijtlijnen zelf kiezen door welke bepalingen ze zich gebonden achten. Ze moeten zichzelf niettemin verbinden tot een aantal kernartikels (vijf van de zeven in het ESH, zes van de negen onder het HESH), en tevens tot een minimaal aantal andere artikelen of genummerde paragrafen (10 artikelen of 45 genummerde paragrafen onder het ESH, zestien artikelen of 63 genummerde paragrafen onder het HESH).25 19 20 21 22 23 24 25
24
Ibid., § 18. Ibid., § 40. Ibid., §§ 13-15. Ibid., § 16. ECSR, “Statement of Interpretation on Articles 12 and 13”, Conclusions XIII-4, 34-36. ECSR, “General consideration on certain areas covered by the Charter: social protection, General Introduction”, Conclusions XIII-4, 35. Artikel 20 ESC; Artikel A, Deel III HESH.
Het mensenrecht op sociale zekerheid voor gedetineerden: sprokkels en principes
a) Recht op sociale zekerheid (art. 12 (H)ESH) Artikel 12 HESH bevat vier paragrafen, en evenveel regels.26 De eerste paragraaf waarborgt de organisatie of het behoud van een sociaal zekerheidsstelsel. In de tweede paragraaf wordt een minimumniveau vastgelegd. Paragraaf drie voorziet in een progressieve verhoging van het beschermingsniveau. De vierde paragraaf moedigt maatregelen aan om een gelijke behandeling tussen de eigen onderdanen en de onderdanen van andere verdragsstaten te verzekeren, en regelt ook de toekenning, het behoud en de hervatting van sociale zekerheidsrechten.27 De eerste paragraaf over de organisatie of het behoud van een sociaal zekerheidsstelsel is zeer algemeen geformuleerd. Het Europees Comité voor Sociale Rechten (ECSR), dat toezicht houdt op de naleving van het (H)ESH, verwacht dat een sociaal zekerheidssysteem de belangrijkste risico’s dekt, zoals gezondheidszorg, ziekte, werkloosheid, ouderdom, arbeidsongelukken, gezin en moederschap,28 zonder dat noodzakelijk alle domeinen van de sociale zekerheid erin begrepen moeten zijn.29 Bovendien moet het stelsel een aanzienlijk deel van de bevolking dekken, behoorlijke vergoedingen op diverse domeinen bieden,30 en collectief gefinancierd worden, namelijk door bijdragen van werknemers, werkgevers en het staatsbudget.31 Een belangrijk criterium om het bestaan van een sociaal zekerheidssysteem te beoordelen is de toereikendheid van uitkeringen. Inkomensvervangende uitkeringen moeten in redelijke verhouding tot het eerdere inkomen staan, en mogen nooit onder de armoedegrens gaan.32 De armoedegrens wordt gedefinieerd als 50% van het mediaan geëquivaleerd inkomen van een huishouden (median equivalised household income), berekend op basis van de Eurostat drempelwaarde voor armoederisico (atrisk-of-poverty threshold value).33 Sinds 2004 toetst het ECSR uitkeringen systematisch aan deze armoedegrens. Het ECSR heeft dusver tweemaal een gebrek aan conformiteit met art. 12, lid 1 vastgesteld wat werkloosheidsuitkeringen betreft.34
26 27 28 29 30 31 32 33 34
België acht zich gebonden door artikel 12 HESH. ECSR, Conclusions I, 62. ECSR, Conclusions XIII-4, 37. L. SAMUEL, Fundamental Social Rights – Case Law of the European Social Charter, Straatsburg, Council of Europe Publishing, 2002, 286. ECSR, Conclusies XIII-4, 37. Zie bv. ECSR, Conclusions XVIII-1 (Nederland), 2006. Ibid. GOVERNMENTAL COMMITTEE OF THE EUROPEAN SOCIAL CHARTER, Report Concerning Conclusions 2004, 2005, Doc. T-SG (2004) 26, § 210. ECSR, Conclusions 2004 (Letland); ECSR, Conclusions XVIII-1 (Oostenrijk), 12.
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De tweede paragraaf van artikel 12 ESH vereist dat een sociaal zekerheidsstelsel minstens op gelijke hoogte staat als wat vereist is voor de ratificatie van het IAOverdrag Nr. 102 inzake sociale zekerheid (minimumregels). Staten moeten onder het IAO-verdrag minstens drie van de negen delen, die elk een tak van de sociale zekerheid behandelen, aanvaarden.35 Bovendien moet minstens één van die drie betrekking hebben op werkloosheid, pensioen, arbeidsongeval of -ziekte, invaliditeit of een uitkering voor de langstlevende. De tweede paragraaf van artikel 12 Herzien ESH, waardoor België nu gebonden is, verwijst naar het Europees wetboek sociale zekerheid. Onder dit wetboek zijn de vereisten voor ratificatie hoger: minstens zes van de negen delen moeten aanvaard worden. Het Europees Comité voor Sociale Rechten oefent voor de meeste verdragsstaten, waaronder België, slechts een indirect toezicht uit op de naleving van het tweede lid van art. 12 (H)ESH. Het baseert zich met name op de bevindingen van het IAOExpertencomité voor de toepassing van verdragen en aanbevelingen, dat zowel toezicht houdt op de naleving van het IAO-verdrag Nr. 102 als van het Europees wetboek sociale zekerheid.36 Het volstaat niet dat de ratificatievereiste gehaald wordt, het IAO-Expertencomité moet bovendien ook oordelen dat de staat het betreffende verdrag effectief naleeft.37 Een uitzondering hierop vormt de situatie waarin een staat een groter aantal delen aanvaard heeft dan het vereiste minimum; in dat geval kan, in geval van implementatieproblemen, nog steeds voldaan zijn aan de vereiste van art. 12, lid 2 (H)ESH.38 De derde paragraaf verplicht verdragsstaten tot een geleidelijke verhoging van het beschermingsniveau. Staten moeten een voortdurende inspanning leveren om hun sociaal zekerheidsstelsel geleidelijk te verbeteren.39 Niet-naleving van het minimumniveau betekent automatisch ook een gebrek aan naleving van deze verplichting.40 Het Comité moet dus bij verdragspartijen bij het ESH verbeteringen kunnen waarnemen ten opzichte van de vroegere situatie, waarbij het stelsel uitstijgt boven het vereiste minimumniveau van het IAO-verdrag nr. 102.41 Een bovengrens voor de geleidelijke verbetering ligt onder het ESH bij het bereiken van de
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36 37 38 39 40 41
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Die negen delen zijn: gezondheidszorg; ziekteuitkering; werkloosheidsuitkering; pensioen; arbeidsongevaluitkering; kinderbijslag; moederschapsuitkering; invaliditeitsuitkering en uitkering voor de langstlevende. L. SAMUEL, Fundamental Social Rights – Case Law of the European Social Charter, Straatsburg, Council of Europe Publishing, 2002, 288-289. ECSR, Conclusions I, 62 ; Conclusions VIII, 153. ECSR, Conclusions I, 62. Ibid., 62 en 200. Zie bijv. ECSR, Conclusions IV (Oostenrijk), 82. ECSR, Conclusions III, 63.
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ratificatievereisten voor het Europees wetboek van sociale zekerheid.42 De bovengrens onder het Herzien ESH zou het herziene Europees wetboek van sociale zekerheid (1990) worden.43 Dat laatste is door 14 staten ondertekend, waaronder België, maar nog door geen enkele staat geratificeerd. Of er vooruitgang geboekt is wordt door het ECSR niet individueel, maar in zijn algemeenheid beoordeeld onder de rapporteringsprocedure. Zo oordeelde het Comité dat een toename in het aandeel in de kosten van de patiënt bij de consultatie van een arts niettemin in overeenstemming was met het ESH, omdat rekening gehouden werd met de mogelijkheden van de achtergestelde groepen, en omdat er een aanzienlijke afname was in de gemiddelde bijdrage van de patiënten in de kosten.44 Een verplichting tot geleidelijke vooruitgang lijkt regressieve maatregelen uit te sluiten. Het ECSR oordeelt echter eerder pragmatisch over regressieve maatregelen met toepassing van het criterium van de objectieve en redelijke verantwoording. Er moet met andere woorden een legitiem doel nagestreefd worden, de genomen maatregelen moeten kunnen leiden tot de nagestreefde doelstelling, en ze moeten in verhouding staan tot die doelstelling. Beperkende maatregelen moeten in de eerste plaats noodzakelijk lijken om het behoud van een bestaand sociaal zekerheidsstelsel te garanderen.45 Aan deze doelstelling is door het Comité een ruime invulling gegeven: het kan bijvoorbeeld gaan om de consolidatie van de openbare financiën zodat groeiende tekorten en interesten op schulden vermeden worden,46 om maatregelen die inspelen op de demografische evolutie, of om sociale bescherming meer te oriënteren naar tewerkstellingskansen.47 Er is echter ook een dubbele benedengrens voor beperkende maatregelen: ze mogen niemand beroven van het genot van effectieve bescherming tegen sociale en economische risico’s, en het sociale zekerheidssysteem mag niet geleidelijk degenereren tot een stelsel van minimale steun.48 Ten tweede wordt ook nagegaan of de genomen maatregelen verantwoord zijn, namelijk geschikt zijn om de beoogde doelstelling te realiseren.49 De last van de hervormingen mag bijvoorbeeld niet vooral afgewenteld worden op de economisch meest kwetsbare huishoudens.50 Dat maatregelen genomen zijn om de tekortkomingen van het sociale welvaartsysteem ten gevolge van beperkende 42
43 44 45 46 47 48 49 50
ECSR, Conclusionss X-1 (Nederland), 113; ECSR, Conclusions XI-2 (Duitsland), 113. Dit plafond werd voorgesteld door het Comité van Ministers, en aanvaard door het ECSR, met verwijzing naar o.m. de voorbereidende werken (ECSR, Conclusions XII-1 (Nederland), 183-184. Verklarend rapport bij het HESH, § 59. Zie ook D. HARRIS en J. DARCY, The European Social Charter, New York, Transnational Publishers, 2001, 265. ECSR, Conclusions XV-1, vol. 1 (België). ECSR, “Statement of Interpretation on Articles 12 and 13”, Conclusions XIII-4, 143. ECSR, Conclusions XIV-1 (Oostenrijk). ECSR, Conclusions XIV-1 (Finland). ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 41-42. ECSR, Conclusions XVI-1, vol. 2, 542 (Polen). ECSR, Conclusions XIV-1 (Finland).
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maatregelen te corrigeren, heeft geen invloed op de beslissing of de maatregelen in overeenstemming zijn met artikel 12, § 3 (H)ESH.51 b) Recht op sociale en medische bijstand Artikel 13 (H)ESH waarborgt het recht op sociale en medische bijstand. Zoals hoger aangegeven is het criterium voor bijstand individuele nood. Artikel 12 en artikel 13 (H)ESH zijn nauw met elkaar verbonden. Meer dan eens wordt de overeenstemming van een regeling of situatie met art. 12 onderzocht in samenhang met art. 13. Ook in de tekst van het verdrag wordt dat verband expliciet gelegd: bijstand is enkel verzekerd voor zover iemand onvoldoende middelen heeft en niet in staat is die middelen door eigen inspanningen of van elders, in het bijzonder sociale zekerheidsuitkeringen, te verwerven (art. 13, § 1 (H)ESH). Door een recht op sociale en medische bijstand in het leven te roepen vormt het Handvest duidelijk een breuk met de sfeer van liefdadigheid waarin sociale bijstand vroeger plaatsvond.52 Artikel 13 (H)ESH roept een subjectief recht op sociale en medische bijstand in het leven, dat afdwingbaar is voor de rechter.53 Bijgevolg mag sociale bijstand niet onderworpen zijn aan een discretionaire toekenning. Er moet een rechtsmiddel bij een onafhankelijke instantie openstaan. In hoger beroep moet de zaak ten gronde bekeken worden, met behulp van objectief vastgelegde criteria, en moet rechtshulp beschikbaar zijn.54 Wat Griekenland betreft, heeft het ECSR herhaaldelijk tot niet-overeenstemming met het Handvest besloten omwille van het gebrek aan precieze wettelijke definitie van wie geacht werd over onvoldoende middelen te beschikken, en de discretionaire bevoegdheid van de overheden.55 De verplichting van de overheid onder het recht op sociale bijstand is veel ruimer dan louter een overlevingsuitkering te verschaffen. Een sociaal bijstandssysteem moet een geïntegreerde strategie van armoedebestrijding en empowerment van individuen bevatten, zodat die individuen hun plaats als volwaardige leden van de samenleving kunnen heropnemen. Vaak zullen tewerkstellingsmogelijkheden, samen met beroepsopleiding, het kernelement vormen van dergelijke strategie.56 Op die manier wordt uitkeringsafhankelijkheid vermeden. Art. 13, § 1 wordt
51 52 53 54 55
56
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ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 41-42. ECSR, Conclusions I, 64. Zie ook ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 54. Ibid. Zie ook Conclusions XV-1, 532 (Spanje). ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 56. Zie ECSR, Conclusions XIII-2, 127 (Griekenland); Comité van Ministers, Recommendation R ChS (93) 1 van 9 september 1993; ECSR, Conclusions XIV-1, 359360 (Griekenland); ECSR, Conclusions XV-1, 301-303 (Griekenland). ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIV-1, 52.
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vervolledigd door § 3, waarin het verstrekken van diensten voor behoeftigen wordt opgelegd.57 Artikel 13 is een progressieve bepaling in de zin dat staten ervoor moeten zorgen dat sociale en medische bijstand geleidelijk overbodig wordt. In die zin is bijstand tijdelijk van aard.58 Bijstand kan in natura of cash verstrekt worden. Ongeacht de aard moet bijstand verleend worden zolang de nood duurt, om de betrokkene te helpen verder een behoorlijk leven te kunnen leiden.59 Om de effectiviteit van bijstand te beoordelen toetst het Comité de hoogte van de bijstand aan de grens van 50% van het mediaan geëquivaleerd inkomen.60 Het houdt hierbij rekening met het feit of de betrokkene ook in aanmerking komt voor andere vormen van bijstand.61 De verplichting tot het verschaffen van medische bijstand heeft geen betrekking op het aanbieden van gezondheidszorg, maar van financiële hulp of gratis gezondheidszorg. Ook hier moet een beroep openstaan bij een onafhankelijk orgaan.62 Beperkingen of voorwaarden voor sociale bijstand zijn voor het merendeel onverzoenbaar met het Handvest, zoals bijvoorbeeld de vereiste van zes maanden verblijf63 of de gewoonlijke verblijfplaats;64 of een minimumleeftijd.65 De koppeling aan de bereidheid tot werken of tot het volgen van een beroepsopleiding66 kan enkel indien de voorwaarde redelijk is, de lange-termijndoelstelling is om een duurzame oplossing te vinden voor de deprivatieproblemen van de betrokkene, en een recht van hoger beroep openstaat.67 De benadering is dus restrictiever dan wat het recht op sociale zekerheid sensu stricto betreft. Sociale bijstand is dan ook het laatste vangnet van sociale bescherming. 57 58 59 60 61 62 63 64
65 66 67
ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIV-1, 52; ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 59. ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 55. Ibid., 56. ECSR, Conclusions XVII-1 (Belgïe). ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 56. ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 57. ECSR, Conclusions XV-1, 344 (Ijsland). ECSR, Conclusions XIV-1, 429-431 (Ierland); L. SAMUEL, Fundamental Social Rights – Case Law of the European Social Charter, Straatsburg, Council of Europe Publishing, 2002, 309. ECSR, Conclusions XIV-1, 504 (Luxemburg); ECSR, Conclusions XV-1, 270-271 (Frankrijk). D. HARRIS en J. DARCY, The European Social Charter, New York, Transnational Publishers, 2001, 169. ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 52. Voor het belang van het recht op hoger beroep, zie ECSR, Conclusions XV-1, 376-380 (Italië); ECSR, Conclusions XVIII-1, 29 (Italië).
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Artikel 13, § 2 (H)ESH verbiedt politieke of sociale discriminatie jegens personen die bijstand genieten.68 Gedacht wordt met name aan het ontzeggen van kiesrecht of werken bij de overheid.69 Enkel uitdrukkelijke bepalingen, zoals wetteksten, worden getoetst aan dit verbod.70 Artikel 13, § 3 voorziet in advies en persoonlijke hulp om persoonlijke of familiale nood te voorkomen, te verwijderen of te verlichten. Aan de verplichting tot “voorkomen” is het progressief karakter van artikel 13 ontleend. Dit derde lid is complementair met § 1:71 art. 13 vereist een systeem van sociale bijstand, waarin een gïntegreerde benadering van armoedebestrijding centraal staat.72 Het Comité verifieert de naleving van deze bepaling onder meer in het licht van de bestaffing (aantal, kwalificatie, taken) en het beschikbare budget.73 De verhouding met art. 14, dat het recht op het genot van sociale welvaartsdiensten waarborgt, is door het Comité gepreciseerd in zijn eerste conclusies. Artikel 13 heeft enkel betrekking op diensten voor mensen met onvoldoende middelen of die het risico lopen over onvoldoende middelen te beschikken. De verplichting voor staten onder artikel 13, § 3 is bijgevolg veel preciezer en beperkter dan die onder art. 14 (H)ESH.74 Dit betekent echter niet dat aparte, specifieke diensten vereist zijn; het volstaat dat specifieke zorg besteed wordt aan mensen met onvoldoende middelen of die het risico lopen over onvoldoende middelen te beschikken.75 Bovendien moeten sociale diensten toegankelijk zijn voor de gebruikers, onder andere door een goede geografische verspreiding.76 c) Recht op het genot van sociale welvaartsdiensten Artikel 14 (H)ESH waarborgt het recht op het genot van sociale welvaartsdiensten. Zoals gezegd is hier een zekere overlapping met artikel 13, § 3 (H)ESH. Artikel 14 beoogt echter een veel ruimere groep van begunstigden, en biedt ook veel ruimere waarborgen, namelijk elk initiatief om de ontwikkeling en aanpassing van individuen aan de samenleving te vergemakkelijken. Ook deze bepaling wordt door het ECSR als dynamisch of progressief beschouwd, omdat vanaf een bepaald niveau van sociale ontwikkeling, niet zozeer het verstrekken van materiële bijstand, maar
68 69 70 71 72 73 74 75 76
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ECSR, Conclusions I, 64. L. SAMUEL, Fundamental Social Rights – Case Law of the European Social Charter, Straatsburg, Council of Europe Publishing, 2002, 319. ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 58; ECSR, Conclusions 1, 67. ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 59. ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIV-1, 52. ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 59. ECSR, Conclusies I, 64-65; ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 59. ECSR, “General Introduction”, Conclusions XIII-4, 59. Ibid., 60.
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diensten die advies en individuele hulp verschaffen moeten georganiseerd worden.77 Een verdragsstaat moet voortdurend zijn sociale welvaartsdiensten pogen te verbeteren.78 Het recht op het genot van sociale welvaartdiensten vereist van verdragsstaten dat ze een netwerk van sociale diensten opzetten om mensen te helpen om welzijn te bereiken of te behouden, en sociale aanpassingsproblemen te overstijgen. Ter aflijning van andere bepalingen onderzoekt het Comité onder art. 14, § 1 de algemene organisatie en functioneren van sociale diensten. Sociale diensten hebben betrekking op counseling, advies, rehabilitatie en andere vormen van steun door sociale werkers, thuiszorgdiensten, residentiële zorg en noodzorg (opvangtehuizen). Criteria betreffen effectieve en gelijke toegang, de kwaliteit van de aangeboden diensten, en de rechten en participatie van cliënten. Een individueel recht op toegang tot counseling en advies moet gewaarborgd worden aan iedereen die er mogelijk nood aan heeft; toegang tot andere diensten kan onderworpen worden aan voorwaarden, voor zover die niet te beperkend zijn en in elk geval zorg verzekeren in geval van dringende nood. De rechten van cliënten moeten beschermd worden: beslissingen moeten in overleg genomen worden, rechtsmiddelen moeten beschikbaar zijn, en een recht van hoger beroep moet openstaan in geval van beweringen van discriminatie en schendingen van de menselijke waardigheid. Het recht op privacy moet geëerbiedigd worden. Indien sociale diensten verstrekt worden tegen betaling, mogen de kosten niet zo hoog zijn dat ze de effectieve toegang tot die diensten verhinderen. Individuen zonder voldoende financiële middelen moeten gratis toegang krijgen. Sociale diensten moeten geografisch voldoende verspreid zijn. Ze moeten tevens middelen krijgen die overeenstemmen met hun verantwoordelijkheden en de noden van de gebruikers. Daarom moet er voldoende en gekwalificeerd personeel zijn, moet de besluitvorming zo dicht mogelijk bij de gebruikers staan, en moeten er mechanismen bestaan om de toereikendheid van de diensten te overzien.79 Artikel 14, § 1 creëert een subjectief recht op diensten die, door gebruik te maken van methodes van sociaal werk, bijdragen tot de welvaart en ontwikkeling van individuen en groepen in de samenleving, en tot hun aanpassing aan de sociale omgeving.80 3. Internationaal verdrag inzake burgerlijke en politieke rechten Met toepassing van het gelijkheidsbeginsel heeft het Mensenrechtencomité zich uitgesproken over het recht op sociale zekerheid. Staten zijn onder het Internationaal Verdrag inzake Burgerlijke en Politieke Rechten (IVBPR) niet verplicht een sociale 77 78 79 80
ECSR, Conclusions I, 69. D. HARRIS en J. DARCY, The European Social Charter, New York, Transnational Publishers, 2001, 177. Zie bijvoorbeeld ECSR, Conclusions XVII-2 (België). ECSR, Conclusions I, 70.
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zekerheidsstelsel te organiseren, maar als ze dat doen, moeten ze ervoor zorgen dat dat niet in strijd is met het non-discriminatie- en gelijkheidsbeginsel.81 4. EVRM Het EVRM waarborgt geen recht op sociale zekerheid. Het Europees Hof voor de rechten van de mens heeft het recht op sociale zekerheid niettemin onrechtstreeks getoetst via het recht op een eerlijk proces, het recht op gelijke behandeling en het recht op eigendom. Als uitgangspunt geldt dat staten een ruime appreciatiemarge genieten voor algemene economische of sociale maatregelen. Staten kennen immers beter hun samenleving en de noden van de samenleving. Bovendien is de verdere realisatie van economische en sociale rechten voornamelijk afhankelijk van de financiële situatie. Het Hof respecteert daarom in principe socio-economische beleidskeuzes, tenzij die manifest een redelijke grondslag ontberen.82 In 2005 vond een harmonisatie van de rechtspraak plaats, waarbij zowel voor de toepasselijkheid van het recht op een eerlijk proces als het recht op eigendom het niet langer uitmaakt of de sociale zekerheidsuitkeringen gebaseerd zijn op bijdragen of niet. Voor de toepasselijkheid van artikel 6, lid 1 EVRM is een geschil over een burgerlijk recht vereist, wat op zijn beurt een economisch recht veronderstelt. Sinds 1993 aanvaardt het Hof dat ook in het geval van betwistingen over uitkeringen waarvoor geen bijdragen betaald zijn, artikel 6, § 1 EVRM van toepassing is.83 Een grote kamer van het Hof in Straatsburg heeft in een ontvankelijkheidsbeslissing van 6 juli 2005 elk recht op sociale uitkering onder de bescherming van het eigendomsrecht gebracht, ongeacht de vraag of zo een recht al dan niet op bijdragen gebaseerd was. Het recht op eigendom doet wel geen recht ontstaan om eigendom te verwerven. Staten zijn met andere woorden vrij om al dan niet een sociaal zekerheidssysteem uit te bouwen, of om te beslissen welke soort of omvang van uitkeringen geboden wordt. Indien er echter wetgeving van kracht is die in een wettelijk recht op een uitkering voorziet, dan doet die wetgeving een eigendomsbelang ontstaan dat de bescherming geniet van artikel 1 Eerste Protocol.84 In een zaak tegen Ijsland, waar een wetswijziging ertoe geleid had dat een klein groep mensen hun recht op invaliditeitspensioen verloren, oordeelde het Hof dat de 81
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Voor een overzicht van de rechtspraak van het Mensenrechtencomité over het recht op sociale zekerheid in het licht van het gelijkheidsbeginsel, zie W. VANDENHOLE, Nondiscrimination and Equality in the View of the UN Human Rights Treaty Bodies, Antwerpen, Intersentia, 2005, 14-17 en 45-56. Zie bv. EHRM 6 juli 2005 (ontv.), Stec e.a. t. Verenigd Koninkrijk, § 52. EHRM 26 februari 1993, Salesi t. Italië; EHRM 24 juni 1993, Schuler-Zgraggen t. Zwitserland. EHRM 6 juli 2005 (ontv.), Stec e.a. t. Verenigd Koninkrijk.
Het mensenrecht op sociale zekerheid voor gedetineerden: sprokkels en principes
klager een uitzonderlijke en excessieve last moest dragen die niet te verantwoorden was door het algemeen belang. De wetswijziging werd verantwoord met verwijzing naar de financiële moeilijkheden van het pensioenfonds. Alhoewel erkend werd dat dit een terechte bekommernis was, was de werkelijkheid er moeilijk mee te rijmen: de grote meerderheid van gerechtigden bleef immers het zelfde pensioen genieten, terwijl een kleine minderheid de meest drastische maatregel had moeten ondergaan, namelijk het verlies van alle pensioenaanspraken.85 Een verstoring van het evenwicht werd ook vastgesteld ten gevolge van de herziening van een in kracht van gewijsde gegane beslissing waarin een ouderdomspensioen werd toegekend, en waardoor het bedrag verlaagd werd.86 Een geheel ontoereikend bedrag van sociale zekerheidsuitkeringen kan in principe vallen onder het toepassingsgebied van art. 3 EVRM.87 5. Samenvatting Samengevat bevat het mensenrecht op sociale zekerheid dus vier vereisten: beschikbaarheid (het bestaan van een stelsel van sociale zekerheid); de geleidelijke verbetering van dat stelsel; toegankelijkheid, met inbegrip van non-discriminatie en de betaalbaarheid van bijdragen; en kwaliteit. Kwaliteit blijkt onder meer uit de toereikendheid van uitkeringen; de gedekte risico’s; en het personeel toepassingsgebied, namelijk wie er gedekt wordt.
C. BETEKENIS IN DE BELGISCHE RECHTSORDE De vraag of artikel 9 IVESCR, artikels 12-13 (H)ESH en art. 23, derde lid, 2° directe werking hebben in de Belgische rechtsorde is tot dusver niet beslecht. Wel is expliciet door de Raad van State aangenomen dat art. 10 IVESCR inzake moederschapsbescherming geen directe werking heeft, evenmin als het IAO-verdrag over arbeids- en tewekstellingsdiscriminiatie.88 Het Grondwettelijk Hof heeft erkend dat art. 23 GW. inzake het recht op sociale bijstand een standstill uitwerking heeft: wetgevers mogen de bescherming die wetgeving die van toepassing was op de dag dat artikel 23 in werking is getreden, bood, niet aanzienlijk verminderen.89 Volgens het Grondwettelijk Hof is het recht op sociale zekerheid een van de rechten die individuen in staat stelt, in combinatie met andere economische, sociale en culturele rechten, om het recht om een menswaardig leven te leiden, te realiseren. 85 86 87 88 89
EHRM 12 oktober 2004, Kjartan Ásmundsson t. Ijsland, § 45. EHRM 18 november 2004, Pravednaya t. Rusland, § 41. EHRM 23 april 2002 (ontv.), Larioshina t. Rusland. RvS 30 december 1993, nr. 45552, Soc. Kron. 1994, (244), 246. Arbitragehof 27 nov. 2002, nr. 169/2002, B.6.4 en B.6.5; GwH 1 september 2008, nr. 132/2008, B.9.
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Om het recht op sociale zekerheid te waarborgen wordt aan de wetgever een ruime beoordelingsvrijheid toegekend: enkel kennelijk onredelijke wettelijke maatregelen kunnen afgekeurd worden. Volgens het Hof berust wetgeving waarbij de toekenning van verhoogde kinderbijslag voor gehandicapte kinderen afhankelijk gesteld wordt van een lichamelijke of geestelijke ongeschiktheid van minimaal 66 procent niet op een kennelijk onredelijk oordeel, met name omdat het recht op sociale zekerheid ook gewaarborgd wordt door andere wetgevingen.90 Het heeft tevens benadrukt dat inzake het recht op kinderbijslag kinderen in rechte de begunstigden zijn van de bijslag. Bijgevolg zijn die voorwaarden die voor werklozen het recht openen op werkloosheidsuitkeringen niet relevant om het bedrag van de kinderbijslag te bepalen (meer in het bijzonder of er al dan niet recht is op verhoogde bijslag).91 Het Hof heeft in de regeling waarbij aan kinderen van niet-uitkeringsgerechtigde volledig werklozen geen verhoogde kinderbijslag wordt toegekend zoals aan de uitkeringsgerechtigde, bovendien een schending van het nondiscriminatiebeginsel in het Verdrag over de Rechten van het Kind (art. 2) vastgesteld, dat immers “verbiedt dat het kind wordt gediscrimineerd op basis van de status van de ouders, wettige voogden of familieleden van het kind.”92
II. HET RECHT OP SOCIALE ZEKERHEID VOOR GEDETINEERDEN Algemeen valt op dat aan gedetineerden zelden specifieke aandacht besteed wordt in het licht van het recht op sociale zekerheid. In wat volgt worden de weinige verwijzingen naar het recht op sociale zekerheid van gedetineerden en exgedetineerden gesprokkeld. Vervolgens worden enkele algemene principes geformuleerd, die voornamelijk ontleend kunnen worden aan de rechtspraak inzake mensenrechten van gevangenen in het algemeen.
A. SPECIFIEKE BEPALINGEN 1. Verenigde Naties a) Internationaal Verdrag inzake Economische, Sociale en Culturele Rechten In art. 9 IVESCR wordt niet expliciet verwezen naar gedetineerden. In zijn algemene commentaar over het recht op sociale zekerheid (2007) vraagt het CESCR op grond van het non-discriminatie- en gelijkheidsbeginsel speciale aandacht van verdragsstaten voor die individuen en groepen die traditioneel moeilijkheden
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Arbitragehof 26 april 2007, nr. 66/2007, B10.3-B10.6. GwH 30 oktober 2008, nr. 145/2008, B.5 en B.7.1. GwH 30 oktober 2008, nr. 145/2008, B.7.2.
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ondervinden om hun recht op sociale zekerheid uit te oefenen. Daarbij maakt het expliciet melding van gedetineerden (zowel gehechten als gevangenen).93 b) IAO-verdragen In het IAO-verdrag inzake dwangarbeid (Nr. 29) wordt geen melding gemaakt van sociale zekerheid. Het IAO-Comité heeft in een algemene opmerking van 2002 over dit verdrag, die handelde over de privatisering van gevangenissen en gevangenisarbeid, verduidelijkt dat privatisering van gevangenisarbeid enkel kan voor zover er geen dwangarbeid mee gemoeid is. Uit het beginsel van vrije toestemming leidt het Comité ook af dat de arbeidsvoorwaarden die van toepassing zijn op gevangenen die voor de privésector arbeid verrichten, die van een vrije arbeidsverhouding moeten benaderen, bijvoorbeeld inzake het bestaan van een arbeidscontract, loonniveau, sociale zekerheid en veiligheid en gezondheid.94 Het IAO-verdrag over minimumstandaarden inzake sociale zekerheid (Nr. 102) laat de schorsing van socialezekerheidsuitkeringen toe gedurende de periode dat een persoon door de overheid onderhouden wordt. op Voor zover de uitkering hoger is dan de waarde van het onderhoud, moet dat verschil wel aan de verwanten van de uitkeringsgerechtigde gegeven worden (art. 69(b)). Een gelijkaardige bepaling is terug te vinden in de verdragen over arbeidsongevallenvergoedingen (art. 21, § 1, b, Nr. 121), invaliditeits-, pensioen en uitkeringen voor de langstlevende (art. 32, § 1, b Nr. 128), en ziekteverzekering (art. 28 § 1, g, Nr. 130). Onder het IAO-verdrag nr. 168 over de bevordering van tewerkstelling en bescherming tegen werkloosheid van 1988, waar België geen verdragspartij bij is, kan een werkloosheidsuitkering opgeschort worden in geval van een tijdelijke schorsing van tewerkstelling zonder een breuk in de tewerkstellingsverhouding zolang als de uitkeringsgerechtigde een andere inkomensvervangende uitkering geniet, maar met uitzondering van kinderbijslag, en op voorwaarde dat de opgeschorte uitkering niet hoger is dan de andere uitkering. c) Standaard minimumregels voor de behandeling van gevangenen De standaard minimumregels voor de behandeling van gevangenen van de Verenigde Naties, aangenomen in 1955, bevatten twee specifieke bepalingen over sociale zekerheidsrechten van veroordeelde gedetineerden. Een richtinggevend principe is dat de behandeling van gedetineerden niet hun uitsluiting uit de samenleving, maar hun blijvend behoren tot de samenleving moet accentueren. In het licht daarvan moeten stappen gezet worden om socialezekerheidsrechten en andere sociale uitkeringen van gevangenen zo veel mogelijk als het recht en de straf het toelaten, veilig te stellen (§ 61). Specifiek wat gevangenisarbeid betreft, moet 93 94
CESCR, General Comment No. 19, The Right to Social Security (article 9), VN Doc. E/C.12/GC/19, 4 februari 2008, § 31. ILO Committee of Experts on the Application of Conventions and Recommendations, General Observation concerning Convention No. 29, 2002, § 10.
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voorzien worden in een vergoeding voor beroepsziekten en arbeidsongevallen die niet minder gunstig is dan voor werknemers buiten de muren (§ 74(2)).95 2. Raad van Europa a) (Herzien) Europees Sociaal Handvest Artikels 12-14 (H)ESH verwijzen niet expliciet naar gedetineerden. Bij de toetsing van art. 12, § 2 ESH in de jaren ’70 heeft het Europees Comité voor Sociale Rechten zich bezorgd getoond over de situatie in Oostenrijk, waarbij de personen ten laste van een verzekerde die in de gevangenis verbleef, onder bepaalde voorwaarden, uitkeringen ontzegd konden worden.96 Uiteindelijk lijkt het Comité het thema niet langer aangekaart te hebben omdat het IAO-Comité er geen graten in zag. In de jaren ’90 nam het Comité onder art. 12, § 3 kennis van de mogelijkheid in Denemarken om kinderbijslag te betalen aan de echtgenote van gevangenen.97 Het Comité heeft ex-gedetineerden gekwalificeerd als een kwetsbare groep wat het gebruik van sociale diensten betreft (art. 14 ESH).98 Meer specifieke mensenrechtenbepalingen kunnen gevonden worden voor gevangenisarbeid. Het ECSR vereist net als het IAO-Comité een strikte regulering van gevangenisarbeid, o.m. wat sociale zekerheid betreft, in het bijzonder indien gevangenen voor privé-bedrijven werken.99 In het kader van het toezicht op art. 12, § 3 nam het Comité midden de jaren ’90 kennis van de uitbreiding in Frankrijk van ziekte- en pensioenuitkeringen tot gedetineerden die buiten de gevangenis tewerkgesteld werden.100 b) (Herzien) Europees Wetboek voor Sociale Zekerheid Het (Herzien) Europees Wetboek voor Sociale Zekerheid bevat een enkele verwijzing naar ex-gedetineerden. Wat werkloosheidsvergoedingen betreft, moeten verdragsstaten naast een verplichte groep van verzekerden ook minstens twee categorieën van personen uit een lijst van acht kiezen, die eveneens recht kunnen
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Standard Minimum Rules for the Treatment of Prisoners, adopted by the First United Nations Congress on the Prevention of Crime and the Treatment of Offenders, held at Geneva in 1955, and approved by the Economic and Social Council by its resolution 663C (XXIV) of 31 July 1957 and 2076 (LXII) of 13 may 1977. ECSR, Conclusions VI (Oostenrijk), 82. ECSR, Conclusions XIII-4 (Denemarken), 146. ECSR, “Statement of Interpretation on Article 14, § 1”, Conclusions 2005. ECSR, Conclusions XVI-1 (Duitsland), 242-243. ECSR, Conclusions XIII-2 (Frankrijk), 110.
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hebben op werkloosheidsvergoeding. Ex-gedetineerden behoort tot die lijst van acht categorieën.101 Schorsing van uitkeringen is mogelijk zolang een rechthebbende onderhouden wordt door de staat (art. 68 Europees Wetboek; art. 74, § 1, g Herzien Europees Wetboek). Het Comité van Ministers heeft in zijn resolutie over Estland van mei 2008 een vraag gesteld aan Estland over de schorsing van het pensioen gedurende de periode van detentie.102 Die vraag kwam er op aangeven van het IAO-comité, dat toezicht houdt op de naleving van het Europees Wetboek voor Sociale Zekerheid. De Raad van Ministers wil meer in het bijzonder vernemen of in overeenstemming met de bepaling van art. 68(b), het gedeelte van het pensioen dat de waarde van het onderhoud in hechtenis of gevangenschap overstijgt, doorbetaald wordt aan zij die ten laste zijn van de uitkeringsgerechtigde.103 Voor zover we hebben kunnen nagaan, is het de eerste keer dat de schorsing van pensioenrechten voor gevangenen aandacht gekregen heeft van de Raad van Ministers. c) Europese gevangenisregels De Europese gevangenisregels van 2006, aangehecht aan een aanbeveling van het Comité van Ministers van de Raad van Europa, vermelden het recht op sociale zekerheid van gedetineerden enkel in de context van arbeid. Ze bepalen dat werkende gevangenen zoveel mogelijk opgenomen moeten worden in het nationaal socialezekerheidssysteem (§ 26.17). Minimaal moet er een regeling zijn voor arbeidsongevallen en -ziekten, die niet minder gunstig mag zijn dan die voor vrije werknemers (§ 26.14).104 De Europese gevangenisregels echoën zo in grote mate de minimum standaardregels van de Verenigde Naties. d) Europese Regels voor minderjarige overtreders die aan sancties of maatregelen onderworpen worden Op 5 november 2008 werden in lijn met de Europese gevangenisregels specifieke regels aangenomen voor minderjarigen. Die regels bevelen aan dat minderjarigen passende sociale zekerheidsdekking ontvangen vergelijkbaar met die verstrekt in de vrije samenleving.105 De achterliggende bekommernis is om ongerechtvaardigde
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Art. 20, § 3, g Herzien Europees Wetboek van Sociale Zekerheid. Met dank aan Tineke Dijkhoff voor het signaleren van deze resolutie. Comité van Ministers, Resolution CM/ResCSS(2008)5 on the application of the European Code of Social Security by Estonia (Period from 1 July 2006 to 30 June 2007), 21 mei 2008. Comité van Ministers, Recommendation Rec(2006)2, 11 januari 2006. Comité van Ministers, Recommendation CM/Rec(2008)11, 5 november 2008, Appendix, regel 82.4.
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nadelen (ook in het latere leven) te vermijden door de uitsluting van nationale sociale zekerheidsstelsels.106 e) Commissaris voor de mensenrechten De commissaris voor de mensenrechten van de Raad van Europa, Thomas Hammarberg, besteedt geen systematische aandacht aan de thematiek. Toch is het belangwekkend dat hij in een recent memorandum over detentie in Frankrijk beklemtoond heeft dat de toegankelijkheid van socialezekerheidsuitkeringen voor gevangenen niet mag verwaarloosd worden in de herziening van de wetgeving inzake het gevangeniswezen.107 Samengevat is vanuit strikt mensenrechtenperspectief de aandacht die aan gedetineerden besteed wordt uitsluitend te kaderen in de aandacht die in het licht van het non-discriminatie- en gelijkheidsbeginsel gaat naar zwakke of kwetsbare groepen. Vanuit internationale socialezekerheidsverdragen geldt de vereiste dat bij schorsing van uitkeringen, omdat de staat de gerechtigde onderhoudt, het verschil tussen de uitkering en onderhoud naar de personen ten laste moet gaan. Minimumregels voor de behandeling van gevangenen beklemtonen het sterkst het principe dat (werkende) gedetineerden zoveel als mogelijk sociale zekerheidsrechten moeten blijven genieten met het oog op hun reïntegratie. Specifiek wat gevangenisarbeid betreft, wordt zowel door de IAO-Comité als het Europees Comité voor Sociale Rechten voor gedetineerden die werken voor de privésector aangedrongen op een sociaal zekerheidsregime als voor vrije werknemers. Bovendien wordt een regeling voor beroepsziekten en arbeidsongevallen verwacht conform aan die van toepassing op vrije werknemers.
B. ALGEMENE PRINCIPES Naast deze zeer beperkte en niet-systematische aandacht voor het recht op sociale zekerheid van gedetineerden, kunnen ook zes algemene principes geïdentificeerd worden, die richtinggevend kunnen zijn in het beantwoorden van de vraag of en in welke mate gedetineerden een mensenrecht op sociale zekerheid genieten. Een eerste belangrijk principe is dat iemand geenszins zijn mensenrechten verliest wanneer hij van zijn vrijheid beroofd wordt na een veroordeling (en a fortiori indien 106
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European Committee on Crime Problems, Draft commentary to the European Rules for juvenile offenders subject to sanctions or measures, CM(2008)128 addendum 1, 2 september 2008. Memorandum by Thomas Hammarberg following his visit to France, CommDH2008(34), 20 november 2008, § 23: « The Commissioner considers that issues such as the maintenance of family ties and contact, access to social benefits under ordinary law, the right to vote in prison, fairly paid work and a significant reduction in the length of time spent in the disciplinary block or in solitary confinement must not be neglected. »
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hij van zijn vrijheid beroofd wordt in afwachting van een proces). Het is vaste rechtspraak van het Europees Hof voor de Rechten van de Mens dat gedetineerden in het algemeen alle fundamentele rechten en vrijheden die gewaarborgd worden door het EVRM verder blijven genieten (met uitzondering van het recht op vrijheid).108 Dit principe met betrekking tot de rechten die gewaarborgd worden door het EVRM kan zonder meer uitgebreid worden tot alle mensenrechten, met inbegrip van het recht op sociale zekerheid. De meeste beperkingen op het recht op sociale zekerheid kunnen niet geassocieerd worden met de noodzakelijke en onvermijdelijke gevolgen van opsluiting. Voor de werkloosheidsvergoeding kan wel geargumenteerd worden dat gedetineerden doorgaans niet langer beschikbaar zijn voor de arbeidsmarkt als noodzakelijk en onvermijdelijk gevolg van vrijheidsberoving. Uitzonderingen zijn niettemin mogelijk, bijvoorbeeld indien er een sterk uitgebouwd systeem van gevangenisarbeid in opdracht van de privésector bestaat, of indien de betrokkene onwille van familiale of sociale redenen een vrijstelling van beschikbaarheid voor de arbeidsmarkt genoot. Net zoals een gevangenisstraf voor misdrijven die geen verband houden met iemands tewerkstelling niet zonder meer een geldige reden vormen voor ontslag, maar enkel voor zover de duur van de gevangenisstraf de betrokkene verhindert zijn werk uit de voeren,109 zo ook hoeft een gevangenisstraf niet noodzakelijk te leiden tot het schorsen van de werkloosheidsvergoeding. Het Europees Hof voor de Rechten van de Mens hanteert ten tweede ook het beginsel van de minste schade, namelijk dat de wijze van uitvoering van een vrijheidsberovende straf niet meer dan het onvermijdelijke leed inherent aan een vrijheidsberovende straf mag toebrengen in het licht van art. 3 EVRM, en dat de gezondheid en het welzijn van gedetineerden moet verzekerd worden.110 Artikel 3 EVRM verbiedt foltering, onmenselijke en vernederende behandeling en bestraffing. Dit principe kan uitgebreid worden tot alle mensenrechten. Ten derde is door het Hof in Straatsburg en door andere toezichthoudende organen inzake mensenrechten erkend dat bestraffing weliswaar een van de doelstellingen van detentie is, maar er toch een toenemend relatief belang wordt gehecht aan de rehabiliterende doelstelling van detentie.111 In lijn hiermee heeft het ECSR 108 109 110
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Zie bijvoorbeeld EHRM 6 oktober 2005, Hirst t. Verenigd Koninkrijk (No. 2), §§ 69-70; EHRM 4 december 2007, Dickson t. Verenigd Koninkrijk, §§ 67 en 75. ECSR, Conclusions 2005 (Estland), 205-210. Zie bijvoorbeeld EHRM 4 juli 2006, Ramirez Sanchez t. Frankrijk, § 119: “Article 3 requires the State to ensure that prisoners are detained in conditions that are compatible with respect for their human dignity, that the manner and method of the execution of the measure do not subject them to distress or hardship of an intensity exceeding the unavoidable level of suffering inherent in detention and that, given the practical demands of imprisonment, their health and well-being are adequately secured.” Zie bijvoorbeeld EHRM 4 december 2007, Dickson t. Verenigd Koninkrijk, § 74: “However, and while accepting that punishment remains one of the aims of
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maatregelen van arbeidsbegeleiding en training voor gevangenen verwelkomd, in het licht van toekomstige reïntegratie.112 Vanuit de reïntegratiegedachte bepalen de VN-Minimumregels voor de behandeling van gevangenen van 1955 dat stappen gezet moeten worden om zoveel mogelijk socialezekerheidsrechten te vrijwaren.113 Ten vierde geldt, in het verlengde van het principe dat een gedetineerde zijn mensenrechten behoudt, dat beperkingen op rechten verantwoord moeten worden in elk individueel geval. Die verantwoording kan te maken hebben met de noodzakelijke en onvermijdelijke gevolgen van opsluiting, of met een voldoende verband tussen de beperking en de omstandigheden van een specifieke gevangene. Een verantwoording kan niet louter gebaseerd zijn op wat beweerdelijk door de publieke opinie als beledigend ervaren zou kunnen worden.114 Bijgevolg en meer specifiek moeten de voorwaarden voor de toelaatbaarheid van een beperking op het recht op sociale zekerheid geëerbiedigd worden. Beperkingen op het recht op sociale zekerheid van gedetineerden zijn overeenkomstig art. 4 IVESCR enkel toelaatbaar voor zover ze voorzien zijn bij wet, verzoenbaar zijn met de aard van economische, sociale en culturele rechten en enkel plaatsvinden om het algemeen welzijn in een democratische samenleving te bevorderen. Het VN-Comité inzake Economische, Sociale en Culturele Rechten heeft daaraan toegevoegd (wat het recht op de hoogst mogelijke gezondheidsstandaard betreft) dat beperkingen in het licht van art. 5, § 1 IVESCR proportioneel moeten zijn, namelijk dat het minst beperkende alternatief gekozen moet worden. Bovendien moeten beperkingen van beperkte duur zijn en getoetst worden (‘subject to review’).115 Het is onduidelijk of die interpretatie beperkt blijft tot het recht op de hoogst mogelijke gezondheidsstandaard, dan wel ook van toepassing geacht wordt door het Comité op andere rechten, zoals het recht op sociale zekerheid. In zijn algemene commentaar over het recht op sociale zekerheid heeft het Comité gesteld dat het intrekken, verminderen of schorsen van uitkeringen beperkt moet zijn, op redelijke gronden gebaseerd moet zijn, onderworpen aan due process, en voorzien bij wet. Onder het (H)ESH zijn beperkingen mogelijk voor zover ze voorzien zijn bij wet, en noodzakelijk zijn in een democratische samenleving om de eerbiediging van de rechten en vrijheden van anderen te eerbiedigen, of om de openbare orde, de nationale veiligheid, de openbare gezondheid of de goede zeden te beschermen (art. 31 ESH; art. G HESH). Het ECSR heeft hieraan toegevoegd dat beperkingen
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imprisonment, the Court would also underline the evolution in European penal policy towards the increasing relative importance of the rehabilitative aim of imprisonment, particularly towards the end of a long prison sentence.” ECSR, Conclusions XIV-2 (Malta). § 61. Zie bijvoorbeeld EHRM 6 oktober 2005, Hirst t. Verenigd Koninkrijk (No. 2), §§ 69-70; EHRM 4 december 2007, Dickson t. Verenigd Koninkrijk, §§ 67 en 75. CESCR, General Comment No. 14, The Right to the highest attainable standard of health, VN Doc. E/C.12/2000/4, 11 augustus 2000, § 28.
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restrictief geïnterpreteerd moeten worden, zodat het wezen zelf van het recht bewaard wordt.116 De proportionaliteitsvereiste houdt in dat bij een conflict van belangen en rechten naar een evenwicht gezocht moet worden, in dit geval tussen het individuele belang van een gedetineerde en het algemeen belang.117 Te verwachten valt dat staten door het EHRM een ruime appreciatiemarge zou gegund worden bij die afweging, gezien het gebrek aan Europese consensus over het behoud van socialezekerheidsrechten door gedetineerden. Dit principe geldt des te meer indien complexe sociale vragen aan de orde zijn. Enkel indien een beleidskeuze manifest onredelijk is, zal het Hof die niet volgen.118 Daarbij moet opgemerkt worden dat een algemene en automatische beperking op (belangrijke) rechten zonder afweging van belangen en zonder een beoordeling van de proportionaliteit geacht wordt buiten de appreciatiemarge te vallen, hoe wijd die ook is. Het EHRM heeft met toepassing van deze regel zowel het ontzeggen van kiesrecht als het ontzeggen van kunstmatige inseminatie aan gedetineerden als schendingen beschouwd van respectievelijk art. 3 Prot. 1 en art. 8 EVRM.119 Het ECSR erkent een appreciatiemarge voor staten in bepaalde materies, in het bijzonder in het kader van de artikels 2, § 4, 3, § 3, 15, 16, 25 en 31 (H)ESH. Specifiek voor de afweging van belangen tussen een bepaalde groep en het algemeen belang en de keuzes inzake prioriteiten en middelen, wat positieve verplichtingen betreft, heeft het onder het recht op huisvesting een appreciatiemarge erkend voor staten.120 Een ruime appreciatiemarge is tot dusver enkel erkend inzake ruimtelijke ordening.121 Het lijkt dus zeker niet vanzelfsprekend dat het ECSR zonder meer een ruime appreciatiemarge voor het recht op sociale zekerheid zou erkennen. Het CESCR heeft het concept van de nationale appreciatiemarge expliciet gebruikt in een verklaring over de verplichting om stappen te zetten ten belope van de maximaal beschikbare middelen, in het licht van een individueel klachtrecht. Het geeft daarin aan dat het de appreciatiemarge van staten eerbiedigt om stappen te zetten en maatregelen te nemen die het meest aangepast zijn aan hun specifieke omstandigheden, en om het optimaal gebruik van middelen te bepalen, om een nationaal beleid uit te stippelen en om aan sommige aanspraken op middelen
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ECSR 3 november 2004, International Federation for Human Rights (IFHR) t. Frankrijk, nr. 14/2003, §§ 29-32. EHRM 4 december 2007, Dickson t. Verenigd Koninkrijk, § 71. Ibid., § 78. Zie EHRM 6 oktober 2005, Hirst t. Verenigd Koninkrijk (No. 2), § 82; EHRM 4 december 2007, Dickson t. Verenigd Koninkrijk, §§ 79-85. ECSR 18 oktober 2006, European Roma Rights Center (ERRC) t. Bulgarije, nr. 31/2005, § 35. Ibid., § 54.
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voorrang te verlenen.122 In zijn algemene commentaar over het recht op sociale zekerheid erkende het Comité dat elke staat over een beleidsvrijheid (margin of discretion) beschikt in de keuze van de middelen, maar dat elke verdragspartij niettemin de verplichting heeft om alle stappen te zetten die nodig zijn om ervoor te zorgen dat iedereen zo snel mogelijk het recht op sociale zekerheid geniet.123 Elders hebben we bijkomende criteria gesuggereerd in geval van conflicten tussen economische, sociale en culturele rechten die grote implicaties inzake financiële middelen hebben (een zogenaamde proportionality plus test). Elementen van deze test zijn een dubbele prioriteitstelling, namelijk van de kernverplichtingen en van de meest kwetsbare groepen.124 Ten vijfde geldt dat kwetsbare groepen bijzondere bescherming verdienen. Het VNComité voor economische, sociale en culturele rechten geeft systematisch voorrang aan de bescherming van de meest kwetsbare groepen.125 Ook bij het definiëren van de kernverplichtingen onder een bepaald recht wordt bijzondere aandacht besteed voor de meest kwetsbare groepen. Een zelfde voorrang voor kwetsbare groepen blijkt uit de ‘rechtspraak’ van het ECSR: « States Parties must be particularly mindful of the impact that their choices will have for groups with heightned vulnerabilities as well as for other persons affected including, especially, their families […]. »126 Ook (voormalige) gevangenen worden als een kwetsbare groep beschouwd, die bijzondere bescherming verdient. Het VN-Comité voor economische, sociale en culturele rechten, dat toezicht houdt op het IVESCR, heeft in zijn algemene commentaar over het recht op sociale zekerheid gevangenen als een groep gekwalificeerd die traditioneel moeilijkheden ondervindt in de uitoefening van dit recht, en daarom bijzondere aandacht verdient vanuit het gelijkheidsbeginsel. Volgens dat Comité vereist het element van toegankelijkheid van het recht op sociale zekerheid dat iedereen gedekt is door het sociale zekerheidssysteem, en dat 122
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CESCR, Statement by the Committee: An evaluation of the obligation to take steps to the “maximum of available resources” under an optional protocol to the Covenant, VN Doc. E/C.12/2007/1, 10 mei 2007, §§ 11 en 12. CESCR, General Comment No. 19, The Right to Social Security (article 9), VN Doc. E/C.12/GC/19, 4 februari 2008, § 66. W. VANDENHOLE, “Conflicting Economic and Social Rights: The Proportionality Plus Test” in E. BREMS (ed.), Conflicts Between Fundamental Rights, Antwerpen, Intersentia, 2008, 559-589. Zie bijvoorbeeld CESCR, Concluding Observations (Nederland), VN Doc. E/C.12/1/Add.25, 1998, § 25: “urges the Government to ensure that the reduction of budgetary allocations for social welfare programmes does not adversely affect the economic, social and cultural rights of the most vulnerable groups in the Netherlands.”; CESCR, General Comment No. 15, The Right to Water (Arts. 11 and 12 of the International Covenant on Economic, Social and Cultural Rights), VN Doc. E/C.12/2002/11, 20 januari 2003, § 13. ECSR 7 november 2003, Autism Europe t. Frankrijk, nr. 13/2002, § 53.
Het mensenrecht op sociale zekerheid voor gedetineerden: sprokkels en principes
het recht op toegang tot sociale zekerheidsstelsels gewaarborgd wordt op nietdiscriminatoire basis, in het bijzonder voor achtergestelde of gemarginaliseerde groepen. Het Europees Comité voor Sociale Rechten beschouwt ex-gedetineerden als een kwetsbare groep wat de toegankelijkheid van sociale diensten betreft. De aandacht voor de rechten van de zwaksten en armen is ook merkbaar in de rechtspraak van het EHRM.127 Een zesde principe is dat van de progressieve realisatie en het vermoeden van ontoelaatbaarheid van retrogressieve maatregelen. Geleidelijke verwezenlijking ten belopen van de maximaal beschikbare middelen staat expliciet ingeschreven in art. 2, § 1 IVESCR. In logische samenhang hiermee mogen staten in principe geen regressieve maatregelen nemen. Het ECSR aanvaardt eveneens dat wanneer de realisatie van een bepaald recht uitzonderlijk complex is en bijzonder duur, een staat maatregelen moet nemen om het recht te realiseren binnen een redelijke termijn, met meetbare vooruitgang en in verhouding tot de maximaal beschikbare middelen.128 Beide beginselen zijn ook expliciet toegepast op het recht op sociale zekerheid (zie hoger). Er kan geargumenteerd worden dat progressieve realisatie ook betekent dat groepen die voorheen uitgesloten werden van het genot van een recht, zoals gedetineerden, ook onder de toepassing van dat recht gebracht moeten worden. Op die manier zou de toegankelijkheid van het recht, in de zin van de dekkingsgraad, verhoogd worden.129 Daarnaast zou geargumenteerd kunnen worden dat individuen het recht op sociale zekerheid genieten voor ze de gevangenis ingaan, en de beperking of schorsing van hun sociale zekerheidsrechten een regressieve maatregel vormt. Een mogelijk probleem is hier echter dat de toezichthoudende instanties bij mensenrechtenverdragen eerder kiezen voor een algemene of structurele beoordeling dan voor een individuele beoordeling van regressieve maatregelen. Het ECSR benadert de beoordeling van vooruitgang in het algemeen: het gaat voornamelijk na of er globaal gezien meer vooruitgang dan achteruitgang is in de realisatie van het recht op sociale zekerheid. De toename van het remgeld voor doktersconsultaties in België werd bijvoorbeeld niet strijdig bevonden met het ESH, omdat de financiële capaciteit van achtergestelde groepen in rekening gebracht was, en omdat er een beduidende afname was in de gemiddelde bijdrage van patiënten.130 Ook het Inter127
128 129
130
A.G. GOMEZ, Social Security as a Human Right – The Protection Afforded by the European Convention on Human Rights, Straatsburg, Council of Europe Publishing, 2007, 22. ECSR 7 november 2003, Autism Europe t. Frankrijk, nr. 13/2002, § 53. CESCR, General Comment No. 19, The Right to Social Security (article 9), VN Doc. E/C.12/GC/19, 4 februari 2008, § 23. Het Comité benadrukt hier het belang van het insluiten van de meest kwetsbare en gemarginaliseerde groepen. ECSR, Conclusions XV-1 (België), vol. 1, art. 12.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
Amerikaans Hof voor de Mensenrechten meent dat de progressieve realisatie betrekking heeft op de collectieve dimensie van economische, sociale en culturele rechten, en individuele gevallen niet beoordeeld kunnen worden in het licht van de verplichting tot progressieve realisatie.131
III. ELEMENTEN
VAN TOETSING VAN DE BELGISCHE SITUATIE AAN HET MENSENRECHT OP SOCIALE ZEKERHEID
Gedetineerden vallen voor hun bestaanszekerheid vooral ten laste van de FOD Justitie. Hun socialezekerheidsrechten worden in de meeste gevallen geschorst tijdens de detentie.132 Toetsing van de huidige uiteenlopende regelingen per sector van de sociale zekerheid aan de algemene beginselen van het socialezekerheidsrecht en het strafrecht, in het bijzonder de basiswet over het gevangeniswezen en de rechtspositie van gedetineerden van 2005, doet besluiten tot een aantal inconsistenties en spanningen.133 Hier wordt verkennend onderzocht wat een toetsing van de schorsing oplevert aan het mensenrecht op sociale zekerheid en internationaalrechtelijke mensenrechtelijke principes. In een systematische schendingenbenadering zou vanzelfsprekend veel fijnmaziger en grondiger moeten nagegaan worden of bepaalde regelingen of toepassingen in de praktijk in strijd zijn met het mensenrecht op sociale zekerheid. Als uitgangspunt geldt dat een gedetineerde het mensenrecht op sociale zekerheid blijft genieten bij vrijheidsberoving. Het verlies of de schorsing van het mensenrecht op sociale zekerheid, is niet als een onvermijdelijk gevolg van de vrijheidsberoving te beschouwen (met mogelijke uitzondering in limitatieve gevallen, zo bijvoorbeeld wat de werkloosheidsvergoeding betreft, supra nr. 0). De schorsing van sociale zekerheidsuitkeringen aan gedetineerden is bijgevolg als een beperking op het mensenrecht op sociale zekerheid te beschouwen. Elke beperking op het recht moet voldoen aan de voorwaarden die meer in het algemeen gelden voor beperkingen op economische, sociale en culturele rechten, met name: 1.
er moet een wettelijke grondslag zijn.
131
IAHMR 28 februari 2003, Five pensioners t. Peru, Series C no. 98, § 147. Twee rechters waren het oneens met de meerderheid op dit punt, zie H.F. LEDESMA, “The Validity of Economic, Social and Cultural Rights in the Inter-American System” in M. WINDFÜHR (ed.), Beyond the Nation State – Human Rights in Times of Globalization, 2005, Uppsala, Global Publications Foundation, (192) 207. Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE (eds.), Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten in Recht en Sociale Zekerheid, 14, Brugge, die Keure, 384. Ibid., algemeen en 399-413.
132
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Het mensenrecht op sociale zekerheid voor gedetineerden: sprokkels en principes
De vereiste van een wettelijke grondslag houdt niet in dat een regeling bij formele wet vereist is, wel dat de regeling aan kwaliteitsvereisten van toegankelijkheid en voorzienbaarheid van de gevolgen moet voldoen; 2.
de beperking moet een legitiem doel nastreven, zoals het algemeen welzijn, of de rechten en vrijheden van anderen. Aangezien deze voorwaarde soepel wordt toegepast, en nog nooit een beperking ontoelaatbaar geacht is wegens het ontbreken van een legitiem doel, lijkt het vermijden van een dubbele tenlasteneming door de staat de schorsing van sociale zekerheidsuitkeringen in dit opzicht te kunnen verantwoorden;
3.
er moet een redelijke verhouding zijn tussen het nagestreefde doel en de aangewende beperkingsmaatregelen (proportionaliteit). Zoals hoger aangegeven valt te verwachten dat een staat over een ruime appreciatiemarge beschikt in het beoordelen van de proportionaliteit. Niettemin kan geargumenteerd worden dat een algemene en automatische beperking op het mensenrecht op sociale zekerheid van gedetineerden niet verantwoordbaar zou zijn met verwijzing naar de nationale appreciatiemarge. Deze argumentatie spruit echter voort uit de rechtspraak van het Europees Hof voor de Rechten van de Mens, dat in principe toeziet op de naleving van burgerlijke en politieke rechten, en zich terughoudend opzet bij de toetsing van complexe sociale vragen. Het ECSR en het CESCR hebben zich (nog) niet echt uitgesproken over criteria voor een variërende nationale appreciatiemarge, maar lijken alleszins niet geneigd te zijn om te gewagen van een ruime appreciatiemarge. Met toepassing van de dubbele prioriteitstelling die we zelf bepleit hebben in de toetsing van de proportionaliteit van beperkingen op economische, sociale en culturele rechten, namelijk voorrangsverlening aan kwetsbare groepen en kernverplichtingen, zou geargumenteerd kunnen worden dat met betrekking tot gedetineerden, die een als dusdanig erkende kwetsbare groep vormen, in redelijkheid voor het minst beperkende alternatief gekozen moet worden. Het door Van Limberghen en van der Plancke geformuleerde alternatief om de sociale zekerheidsuitkeringen van gedetineerden niet te schorsen, maar een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf te heffen,134 verdient in dit verband de nodige aandacht. Voor zover kan aangetoond worden dat dergelijke heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf het minst beperkende alternatief vormt, is de huidige regeling van schorsing aanvechtbaar op grond van het proportionaliteitsvereiste.
In het licht van de verplichting tot progressieve realisatie en het vermoeden van ontoelaatbaarheid van regressieve maatregelen zou opgeworpen kunnen worden dat staten verplicht zijn om progressief ook gedetineerden onder de dekking van hun sociale zekerheidsstelsel te houden, en, voor zover personen vóór ze van hun vrijheid beroofd werden, onder het sociale zekerheidsstelsel vielen, de schorsing van 134
Ibid., 385-388 en 397-399.
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hun sociale zekerheidsrechten tijdens detentie een niet-toelaatbare regressieve maatregel is. Dergelijke argumentatie lijkt meer kans op slagen te hebben met betrekking tot de categorie van gevangenen, dan met betrekking tot individuele gevangenen. Bovendien lijkt de argumentatie meer kans te hebben in de meer maximalistische verplichtingenbenadering – waarbij meer op basis van algemene beginselen gewerkt wordt, dan in de striktere en meer minimalistische schendingenbenadering. Binnen een schendingenbenadering, waarbij aangetoond moet kunnen worden dat er sprake is van een schending, is onzeker of en in welke mate toezichtsmechanismen bereid gevonden zouden kunnen worden om aan deze relatief algemene principes te toetsen en een eventuele strijdigheid vast te stellen.
IV. BESLUIT Het mensenrecht op sociale zekerheid is internationaalrechtelijk behoorlijk stiefmoederlijk behandeld. Toch is onmiddellijk duidelijk wat de belangrijkste elementen en verplichtingen zijn, vooral dankzij het interpretatief werk van de toezichthoudende comités. Nog problematischer is het mensenrecht op sociale zekerheid van de specifieke groep van gedetineerden. Naast enkele sprokkels van verdragsrechtelijke of interpretatieve aanknopingspunten berust deze bijdrage vooral op algemene principes inzake mensenrechten van gedetineerden enerzijds, en inzake economische, sociale en culturele rechten (van kwetsbare groepen, waartoe gedetineerden gerekend kunnen worden), anderzijds. De huidige Belgische algemene regeling van de schorsing van sociale zekerheidsrechten tijdens detentie kan niet zonder meer als strijdig met het mensenrecht op sociale zekerheid gekwalificeerd worden. Wel kunnen kritische vragen gesteld worden. Met name in het licht van het proportionaliteitsvereiste rijst de vraag of de schorsing wel het minst beperkende alternatief is, en of het voorgestelde behoud van rechten met heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf niet te verkiezen valt.
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« LA JUSTICE SOCIALE NE SAURAIT S’ARRETER A LA PORTE DES PRISONS » LE (NON) DROIT DES DETENUS A LA SECURITE SOCIALE EN BELGIQUE
par Véronique VAN DER PLANCKE Chercheuse au Centre Droits fondamentaux et Lien social (FUNDP), Chercheuse associée au Centre de Philosophie du droit (UCL), Avocate au Barreau de Bruxelles et Guido VAN LIMBERGHEN Professeur à la VUB Vakgroep Sociaal Recht
« La confusion des pouvoirs à un bout, et à l’autre la profusion de personnes qui n’ont rien à perdre et tout à gagner ; entre les deux un marais inquiet et privé de repères : un tel contexte est propice au retour de la violence. Non pas la violence organisée et réfléchie des luttes ouvrières, mais la violence individuelle, comme ultime forme d’expression ou de redistribution (…). Le droit pénal serait alors l’avenir du droit social (les Etats-Unis montrent ici la voie), comme il a été son passé »1.
I. INTRODUCTION2 1.
En 1984, la Cour européenne des droits de l’Homme déclara, dans son arrêt phare Campbell et Fell, que « la justice ne saurait s’arrêter à la porte des prisons », avant de reconnaître aux requérants, détenus, le plein bénéfice des droits civils et politiques dans le cadre de la répression disciplinaire dont ils faisaient l’objet3. Si à l’époque cette affirmation avait des airs de conquête, l’adage est depuis lors systématiquement rappelé comme une exigence, sinon atteinte, du moins indiscutable. Un quart de siècle plus tard, il nous appartient, pour paraphraser la Cour, de travailler à ce que l’aspiration à la justice sociale franchisse le seuil des établissements pénitentiaires ; et d’interroger, en conséquence, tant la légalité que la légitimité des limitations infligées, pendant la détention, au droit fondamental à la sécurité sociale. Cette tâche devient incontournable. Si la question sociale se pose avec acuité dans la prison, c’est parce qu’elle compte 1 2
3
A. SUPIOT, « L’avenir d’un vieux couple : travail et Sécurité sociale », Dr. Soc., 1995, p. 829. Cet article prend sa source dans l’étude menée en 2007 sur la protection sociale des détenus, ayant conduit à la publication de l’ouvrage intitulé : V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, La sécurité sociale des (ex-)détenus et de leurs proches, Bruxelles, La Charte, coll. Droit en mouvement, 2008, 517 p. et en néerlandais : G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, De sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brussel, Die Keure, reeks Recht en sociale zekerheid, 2008, 437 p. Cette étude put voir le jour grâce à l’impulsion de l’asbl Réseau Détention et Alternatives (REDA), la collaboration du Netwerk Samenleving en Detentie et le soutien de la Fondation Roi Baudouin. Par cette contribution, les auteurs tendent à améliorer, voire dépasser, les conclusions de leur recherche précédente qui contient une série de propositions de modifications législatives pour chaque branche de sécurité sociale. En ce qu’elle se réfère systématiquement à l’ouvrage précité, la présente analyse ne détaille pas l’impact de la détention sur chaque assurance sociale ou secteur d’assistance sociale et, quant à la jurisprudence citée, se limite généralement à celle que n’a pas recensée ledit ouvrage. Cour eur. D.H., arrêt Campbell et Fell c. Royaume-Uni du 28 juin 1984, Série A n° 80, § 69.
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
traditionnellement une surreprésentation de personnes issues de milieux économiquement défavorisés. Le Rapport 2008 de la Section belge de l’Observatoire International des Prisons confirme la désaffiliation massive, sur les plans économique et social, des personnes incarcérées, leurs trajectoires de vie se traduisant par une grande difficulté à s’insérer dans les structures sociétales traditionnelles d’intégration sociale, telles la famille et l’emploi4. Le Rapport constate également un processus de paupérisation au sein de la population pénitentiaire5 : l’incarcération, loin de résoudre la situation sociale des détenus, aggrave leur marginalisation par la mise en péril des relations familiales, l’impossibilité répandue pour le détenu de conserver son logement s’il vit seul (en raison du fait qu’il n’est plus en mesure de payer de loyer) et, s’il avait un emploi, son licenciement quasi systématique au moment de sa libération. Pour conclure que « l’inscription sociale, familiale et professionnelle constituant les trois clés de voûte d’une insertion réussie, l’incarcération apparaît comme un des premiers facteurs de désocialisation… »6. 2.
Malgré ce diagnostic d’extrême vulnérabilité sociale de la population carcérale, on constate en Belgique une exclusion significative des détenus du système de sécurité sociale, de nombreuses législations en la matière prévoyant la suspension du paiement des allocations en cas de détention de l’allocataire. Cette exclusion entraîne des répercussions dommageables sur la famille du détenu et prolonge souvent ses effets au-delà de la libération de ce dernier. Il est en outre généralement admis que le travail pénitentiaire n’est pas presté en exécution d’un contrat de travail et n’ouvre dès lors pas de droit à la sécurité sociale au bénéfice des détenus. Or, il convient de rappeler ici que les auteurs du Rapport final de la Commission Dupont7 avaient clairement décrété que cette exorbitance du droit social que constitue l’exclusion des détenus du système institutionnel de solidarité collective « contribue à la désocialisation plutôt qu’à la réinsertion, surtout par le fait que les détenus n’ont pratiquement plus les moyens d’assurer, sur la base de responsabilités qu’ils ont eux-mêmes assumées, le soutien des membres de leur famille qui, pour autant qu’ils bénéficient déjà d’un soutien, ‘obtiennent’ ce dernier indépendamment des engagements du détenu ». Le Rapport précise encore : « le circuit financier qui entoure les détenus et leurs proches se met en place sans que le détenu ait la possibilité d’y contribuer de façon constructive (…). Par conséquent, la prison en tant qu’institution totale8 ne se cantonne pas derrière les murs mêmes de la prison, 4 5 6 7 8
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Observatoire International des Prisons (Section belge), Notice 2008 – De l’état du système carcéral belge, Bruxelles, 15 octobre 2008, p. 27. Dans le même sens, voy. Ph. COMBESSIE, Sociologie de la prison, Ed. La Découverte, Paris, 2009, pp. 14 et 35-39. Observatoire International des Prisons (Section belge), Notice 2008 – De l’état du système carcéral belge, Bruxelles, 15 octobre 2008, p. 27. La Commission chargée de la rédaction de la Loi de principes fut baptisée « Commission Dupont » du nom du Professeur Lieven DUPONT qui l’a présidée. C’est nous qui soulignons. La prison comme institution totale signifie que tous les
La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons
puisqu’elle s’infiltre aussi dans l’un des piliers les plus solides de l’État de droit social, à savoir la sécurité sociale (…). L’exclusion (partielle) du système de la sécurité sociale constitue en quelque sorte un supplément de peine (non voulu), est source d’un effet préjudiciable évitable de la détention, est contraire au principe de normalisation. »9. Pour conclure en exigeant une « réforme fondamentale du statut des détenus à l’égard de la sécurité sociale », dans l’esprit de ce dernier principe10/11. 3.
Qu’est-il advenu de ces préoccupations convergentes ? Depuis quelques récentes années, le législateur a substantiellement modifié le statut des détenus par l’adoption de trois lois fondamentales successives : la loi du 12 janvier 2005 concernant l’administration pénitentiaire ainsi que le statut juridique des détenus, la loi du 17 mai 2006 concernant le statut juridique externe des personnes condamnées à une peine privative de liberté et aux droits reconnus à la victime dans le cadre des modalités d’exécution de la peine, et la loi du 21 avril 2007 relative à l’internement des personnes atteintes d’un trouble mental. Les lois du 17 mai 2006 et du 21 avril 2007 ont trait respectivement aux statuts juridiques externes des personnes condamnées ou internées. Ces législations déterminent les mesures d’exécution des peines extra muros ou celles de l’internement, et les règles de droit qui s’appliquent à chacune de ces mesures12. Quant à la loi de principes du 12 janvier 2005, elle n’autorise dorénavant pas d’autres restrictions aux droits des détenus, parmi lesquels les droits sociaux, que celles qui découlent de la condamnation pénale ou de la mesure privative de liberté, celles qui sont indissociablement reliées à cette dernière et celles qui sont
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aspects de la vie quotidienne sont vécus dans un même espace clos, que tout dépend d’elle : elle punit, elle éduque, elle gère l’argent du détenu ou l’en prive. Voy. : S. SNACKEN, « Normalisation » dans les prisons : concepts et défis. L’exemple de l’Avant-projet de loi pénitentiaire belge », in D. KAMINSKI et O. DE SCHUTTER (dir.), L’institution du droit pénitentiaire – Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Bruylant, L.G.D.J., 2002, p. 137. Rapport final de la commission sur la Loi de principes concernant l’administration pénitentiaire et le statut juridique des détenus, Doc. parl., Ch. repr., 2000-2001, Doc 50 n° 1076/001, p. 148-149. Rapport final, op. cit., p. 154. On trouve des revendications identiques dans d’autres Etats, notamment en France où des auteurs relèvent que le droit social est pour l’essentiel inapplicable aux détenus et que les réformes en ce domaine constituent une urgence tant juridique que sociale. Voy. notamment M. HERZOG-EVANS, « La révolution pénitentiaire française » in D. KAMINSKI et O. DE SCHUTTER (dir.), L’institution du droit pénitentiaire – Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Bruylant, L.G.D.J., 2002, p. 30 ; Ph. AUVERGNON et C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question : une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, 195 p. Pour un aperçu des statuts juridiques externes des personnes condamnées et internées, voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op. cit., pp. 65-80.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
déterminées par ou en vertu de la loi13. Si la loi de principes n’a pas pour objet ou vocation de codifier le droit des détenus à des prestations de sécurité sociale – afférentes ou non au travail pénitentiaire -, les principes fondamentaux de son Titre II, déjà entrés en vigueur, conduisent à l’adoption de certaines réformes en ce domaine. A la lumière du principe de protection juridique, toute loi privant les détenus de prestation de sécurité sociale devrait dorénavant être soumise à un test de justification et invalidée si la prise en charge des prisonniers par le SPF Justice ne leur garantit pas une protection sociale équivalente. Ce raisonnement est conforme aux Règles pénitentiaires européennes 2006 qui rappellent que « les restrictions imposées aux personnes privées de liberté doivent être réduites au strict nécessaire et proportionnelles aux objectifs légitimes pour lesquelles elles ont été imposes »14. L’application des principes de « responsabilisation » et de « limitation des effets préjudiciables de la détention » consacrés dans la loi du 12 janvier 2005 excluent notamment, pour leur part, que la famille du détenu souffre de privations qui découleraient de la détention d’un de ses proches. Le principe de « limitation du préjudice » est mis en œuvre par le « principe de normalisation » – non textuellement repris dans la loi mais abondamment cité par la Commission Dupont –, selon lequel la vie en prison doit correspondre autant que possible à celle du monde extérieur15.
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Art. 6 § 1er, L. de principes du 12 janvier 2005 concernant l’administration pénitentiaire ainsi que le statut juridique des détenus (ci-après, Loi de principes). Pour une analyse de l’impact des principes de la loi du 12 janvier 2005 sur le droit à la sécurité sociale des détenus, voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op. cit., pp. 41-63. Art. 3 des Règles pénitentiaires européennes (voy. Recommandation Rec (2006) du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe aux Etats membres sur les Règles pénitentiaires européennes). Ces règles pénitentiaires qui ambitionnent de définir une véritable politique pénitentiaire sont, certes, non contraignantes. Pour quelques commentaires à leur sujet, voy. notamment J.-M. LARRALDE, « Les règles pénitentiaires européennes, instrument d’humanisation et de modernisation des politiques carcérales », Rev. trim. dr. h., 72/2007, pp. 993-1015 ; M. EUDES, « La révision des règles pénitentiaires européennes – Les limites d’un droit commun des conditions de détention », Droits fondamentaux, n° 6, janvier – décembre 2006, 17 p., www.droitsfondamentaux.org. Rapport final, op. cit., p. 8. Wolfgang LESTING a défini la notion de normalisation comme le rapprochement égalitaire des conditions de la détention avec les standards de la société libre, tant dans leur dimension sociale que juridique. Voy. W. LESTING, Normalisierung im Strafvollzug : Potential und Grenzen, Pfaffenweiler, Centaurus Verlag, 1988, p. 6, cite par E. SHEA, « Les paradoxes de la normalisation du travail pénitentiaire en France et en Allemagne », Déviance et Société, 2005/3, Volume 29, p. 349-365.
La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons
La normalisation des conditions de détention est devenue depuis les années 1980 la doctrine officielle, et donc la maxime fondamentale de l’exécution des peines. Elle est d’inspiration européenne16. L’objectif recherché par ce nouveau principe ne revient pas à formater disciplinairement des comportements, mais bien, comme le disait S. Snacken, à créer des « conditions pour que les libérés puissent se maintenir dans la société sans nouvelles confrontations avec le système pénal »17. Le principe de normalisation est donc finalisé ; il ambitionne de dire à la fois quelque chose sur l’étendue de la peine – quelles sont les privations admissibles ? – et sur la fonction du traitement pénitentiaire. Le principe de normalisation est désormais considéré comme une condition essentielle à la réalisation des autres fonctions de la peine d’emprisonnement que celle de la punition : la réinsertion, la réparation et la réhabilitation18. Il est postulé que ce n’est que si la prison prend distance avec le modèle de l’institution totale que les chances d’une réintégration réussie peuvent être réelles. Le curseur sur l’échelle des objectifs de la peine « punition/réinsertion » est – en théorie du moins – quelque peu déplacé : du châtiment retrospectif (backward-looking) vers l’investissement prospectif (forward-looking), du besoin d’exclure vers la nécessité d’inclure. Selon S. Snacken, ce principe de normalisation signifie dès lors au niveau individuel que le détenu doit être reconnu « dans la diversité de ses rôles sociaux », grâce à l’établissement d’un statut juridique. Et au niveau collectif, que l’offre de services en prison doit être équivalente à l’offre existant hors prison, notamment au niveau du travail pénitentiaire et des soins de santé. Dans le système actuel, l’équivalence de la qualité et de la fréquence des soins par exemple, telle qu’exigée par le principe de normalisation, serait plus facile à atteindre si les détenus participaient au système de sécurité sociale existant dans la société libre19. 16
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Voy. notamment les articles 64 et 65 des Règles pénitentiaires européennes du Conseil de l’Europe (1987). Dans ces Règles sont affirmés des principes tels que le respect des droits des détenus, et en particulier de la légalité de l’exécution des peines, la privation de liberté comme punition en soi qui ne doit pas être aggravée par des souffrances inutiles, l’organisation de régimes respectueux de la dignité humaine et contrant les effets néfastes de l’enfermement, notamment par les contacts avec l’extérieur, ou encore la responsabilisation des détenus. Ces Règles ont servi de référence à la loi belge du 12 janvier 2005. Les Règles pénitentiaires européennes ont été actualisées en 2006 (voy. supra). Les dispositions 5, 6 et 102 concernent le principe de normalisation. S. SNACKEN, « Normalisation » dans les prisons : concepts et défis. L’exemple de l’Avant-projet de loi pénitentiaire belge », in D. KAMINSKI et O. DE SCHUTTER (dir.), L’institution du droit pénitentiaire – Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Bruylant, L.G.D.J., 2002, p. 134. Ph. MARY, F. BATHOLEYNS, J. BEGHIN, « La prison en Belgique : de l’institution totale aux droits des détenus ? », Déviance et Société, 2006, vol. 30, n°3, p. 397. S. SNACKEN, op cit., p. 151. L’auteur n’aura pas manqué de signaler que la portée exacte du principe de normalisation peut s’avérer problématique. En effet, il soulève la double
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
4.
Le législateur doit désormais réinterroger, à la lumière des nouveaux statuts interne et externes des détenus et des internés, la suspension traditionnelle des allocations sociales (II.) et le refus de considérer le travail pénitentiaire comme source de droit à la sécurité sociale (III.). Il devra remédier aux nombreuses lacunes criblant le dispositif actuel. La présente étude espère le guider dans ce chantier.
II. SUSPENSION DES ALLOCATIONS DE SECURITE SOCIALE 5.
En Belgique, le SPF Justice reçoit la mission d’assurer la protection sociale des détenus avec pour conséquence la suspension, par le législateur, du versement de la plupart des prestations de sécurité sociale en cas de détention de l’ayant droit. Il nous appartient de poser les questions critiques de ce choix politique (A.), d’analyser la manière dont ce choix est mis en oeuvre (B.) et d’examiner plus en détail si le maintien total du paiement des allocations, conjugué au prélèvement d’une contribution dans les frais d’hébergement et d’entretien formerait une meilleure option (C.).
A. QUESTION CRITIQUE QUANT AU CHOIX POLITIQUE 6.
Des normes internationales et nationales consacrent le droit fondamental à la protection sociale20, y compris pour les détenus, sans préciser par quel moyen il doit être réalisé21. Il appartient dès lors aux législateurs nationaux de déterminer
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question de savoir ce qui doit être considéré comme normal en dehors de la prison, et par conséquent répercuté dans la prison (peut-on, par exemple, légitimement y reproduire les inégalités sociales présentes à l’extérieur ou faut-il tendre vers un « niveau de vie moyen » et si oui celui-ci doit-il être déterminé ?), et quelles sont les restrictions qui doivent être considérées comme nécessairement liées à la prison ? La réponse n’est pas ici figée une fois pour toutes : cela dépend des circonstances économiques et sociales évolutives d’une société. Ce qui vaudra à S. SNACKEN de préciser que l’objectif de normalisation est un exercice constant de flexibilité et de réflexivité sur ce qui a semblé à un moment donné des restrictions consubstantielles à la privation de liberté et donc inaltérables. Voy. S. SNACKEN, op cit., p. 136 et 145. Il importe de poser d’emblée que, dans le cadre de cette étude, le terme générique de « protection sociale » désigne l’intervention aussi bien du système de sécurité sociale que d’autres mécanismes de protection sociale comme les dispositifs de compensation dans le giron du SPF Justice. On recourt dès lors au concept instrumental de « sécurité sociale » pour nommer l’ensemble des assurances sociales (chômage, pensions, indemnités d’incapacité de travail, …) et des réglementations d’assistance sociale (revenu d’intégration, GRAPA, allocations de remplacement de revenus pour personnes handicapées, …). Cette précision terminologique est nécessaire dès lors que certains auteurs réservent le terme de « sécurité sociale » comme nom collectif pour couvrir les assurances sociales uniquement, recourant alors au terme de « protection sociale » pour l’ensemble des mécanismes d’assurances sociales et d’assistance sociale. Quant à la portée du droit fondamental à la sécurité sociale, voy. la contribution de W. VANDENHOLE dans le présent recueil. L’auteur recense les différents instruments à
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l’instrument le plus approprié en la matière. Dans le cadre d’une démocratie parlementaire, le législateur dispose en ce domaine d’une large liberté d’appréciation et peut dès lors réaliser cette mission soit par le biais du système de sécurité sociale, soit via un autre mécanisme de protection22. En Belgique, c’est le SPF Justice qui prend en charge la protection sociale des détenus. L’intervention du SPF Justice comme mécanisme alternatif de protection sociale conduit à suspendre, à l’égard de l’allocataire détenu, le paiement de la plupart – mais pas de toutes et parfois partiellement seulement – des allocations sociales. A l’instar du dispositif prévu par le législateur néerlandais23, le système de sécurité sociale belge est par conséquent déchargé, selon les cas, en tout ou en partie, des obligations qui continuent à s’imposer à lui au bénéfice des autres citoyens ; cette option contribuerait à ce que l’allocataire privé de liberté ne soit avantagé ni vis-à-
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l’œuvre à l’échelle tant des Nations Unies que du Conseil de l’Europe, et la place réservée le cas échéant au détenu. On rappellera notamment ici que l’article 9 d’une Résolution du Conseil de l’Europe du 1er février 1962 relative aux droits électoraux, civils et sociaux du détenu prévoit notamment que « le seul fait de la détention n’altère pas les droits aux prestations de sécurité sociale acquis par le détenu avant son incarcération ». L’article 10 de la même résolution ajoute que « les mesures nécessaires seront prises afin que, pendant son séjour en prison, le détenu conserve, dans la mesure du possible, ses droits aux dites prestations ». Voy. Résolution du Conseil de l’Europe du 1er février 1962 – RES(62)2 relative aux droits électoraux, civils et sociaux du détenu. Vingt-cinq ans plus tard, l’article 68-1 des Règles pénitentiaires européennes de 1987 stipulait que « la préparation des détenus à leur libération devrait commencer le plus tôt possible après leur arrivée dans un établissement pénitentiaire. On doit se garder de faire sentir aux détenus qu’ils sont exclus de la société, mais bien au contraire leur donner à penser qu’ils continuent à en faire partie. Dans cette optique, il serait bon de faire appel dans toute la mesure du possible à des organismes et à reclasser les détenus et, en particulier, à entretenir et à améliorer les relations du détenu avec sa famille, avec d’autres personnes et avec les organismes sociaux. Des mesures doivent être prises aux fins de sauvegarder, dans toute la mesure compatible avec la loi et la peine infligée, les droits civils, les droits en matière de sécurité sociale et autres avantages sociaux des détenus ». Voy. « Recommandation n° R (87) 3 – Règles pénitentiaires européennes – Version européenne révisée de l’Ensemble des règles minima pour le traitement des détenus », adoptée par le Comité des Ministres le 12 février 1987, lors de la 404ème réunion des Délégués des Ministres ». Il faut regretter que, dans le cadre de leur révision en 2006 (voy. supra), les Règles pénitentiaires européennes n’aient pas repris la disposition précitée. Ainsi, la Cour constitutionnelle a jugé raisonnablement justifiée la suspension partielle de l’allocation d’intégration octroyée aux personnes handicapées admises dans une institution de soins à charge des pouvoirs publics dès lors que, dans ces institutions, un service compense la limitation de l’autonomie des personnes concernées. Voy. Cour Const., 22 novembre 2007, n°145/2007. Pour un exposé de la situation néerlandaise, voy. dans le présent recueil, la contribution de G. VONK, « De gevangenis als alternatief voor de sociale zekerheid – Berichten uit de Noordelijke Nederlanden ».
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vis des allocataires « libres », ni vis-à-vis des détenus qui ne jouissaient pas d’allocations sociales avant leur détention24. 7.
Les allocataires non détenus ne peuvent en effet pas faire appel à un mécanisme alternatif de protection sociale, telle la prise en charge par le SPF Justice en Belgique. Pour préserver l’égalité entre les détenus et les allocataires « libres », le législateur a donc souhaité interrompre l’intervention du système de sécurité sociale pendant la détention, y compris dans le cas où le risque socialement assuré ne cesse pas durant cette période, ou encore lorsque les frais de subsistance et de logement de la famille du prisonnier perdurent entièrement ou partiellement au cours de la privation de liberté25. La suspension de l’allocation sociale risque pourtant d’ouvrir une brèche dans la protection sociale précédemment octroyée, dès lors que le législateur ne garantirait pas l’équivalence de couverture offerte entre la prise en charge par le SPF Justice et l’allocation suspendue.
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Par l’option de suspension, le législateur belge souhaitait également intégrer la réalité des détenus exposés au risque de perdre leurs revenus du travail en conséquence de leur détention, sans pouvoir prétendre à des allocations de remplacement. Le souhait de ne pas avantager les allocataires sociaux détenus vis-à-vis de ces personnes soulève toutefois la question de savoir si à l’inégalité – entre les revenus du travail et ceux de remplacement – qui existe dans le monde extérieur, doit se substituer une égalité absolue dans l’enceinte de la prison.
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Pour cette raison, le Conseil de recours central néerlandais (Nederlandse Centrale Raad van Beroep), par exemple, est d’avis que la suspension de l’intervention de la sécurité sociale est conciliable tant avec le principe d’égalité qu’avec l’interdiction d’atteinte illégitime aux droits de propriété. Le Conseil a précisé que, dans le cadre des relations de droit constitutionnel néerlandaises, le juge ne peut annuler le choix du législateur que s’il ne repose pas sur des fondements raisonnables et objectifs. Qu’une autre option soit imaginable ou, selon le juge, préférable même, ne suffit pas pour juger inacceptable le choix posé par le législateur. Centrale Raad van Beroep (Nederland) LJN AP4680, 18 juin 2004, http://zoeken.rechtspraak.nl/ResultPage.aspx. Par analogie, il est intéressant de mentionner ici que pour justifier la suspension généralisée du versement des allocations sociales, le législateur néerlandais a déclaré vouloir éviter que le détenu profite de la détention pour « se constituer un butin ». Il a par ailleurs ajouté, suivant une logique critiquable, que la perte de revenus professionnels du détenu n’était plus liée à la survenance d’un risque social, mais bien à la privation de liberté, et que si le mécanisme de sécurité sociale doit répondre à la première hypothèse, il ne lui appartient en revanche pas de pallier la seconde. Voy. dans le présent recueil, la contribution de G. VONK, op cit.
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Bien plus déterminant encore : on constate que l’inégalité dénoncée peut aussi être autrement rétablie, en autorisant non seulement les allocataires détenus, mais aussi les salariés, les fonctionnaires et les indépendants incarcérés à revendiquer, vu la perte de leurs revenus professionnels, le bénéfice des allocations dont ils sont actuellement privés par le législateur. Le système de sécurité sociale contribuerait ainsi beaucoup mieux à la protection sociale des détenus dépossédés des revenus de leur travail, mais aussi aux détenus allocataires sociaux qui, pendant leur privation de liberté, demeurent confrontés à certains frais d’entretien et d’hébergement pour eux-mêmes (loyer qui continue à courir, …) et/ou pour leur famille. 9.
La suspension actuellement en vigueur des prestations de sécurité sociale se heurte à des objections de principe ; le législateur doit donc prendre sérieusement en considération l’option contraire du maintien de leur versement. En effet, la suspension complète des allocations sociales affecte les bénéficiaires dans une mesure très inégale compte tenu des différences de nature et de niveau de ces allocations. Il n’y aurait pas d’objection à cette disparité si le mécanisme de prise en charge subsidiaire fournissait en toutes circonstances une protection sociale plus élevée (que celle garantie par l’allocation sociale de tout type précédemment versée) ou dans l’hypothèse où la part demandée aux détenus dans le financement de ce mécanisme subsidiaire dépassait le montant de leurs allocations sociales. En dehors de ces cas bien peu fréquents – inexistants ? – à cette heure, le caractère déraisonnable de la suspension d’une allocation sociale s’accroît au fur et à mesure que le montant de l’allocation suspendue dépasse les frais d’entretien et d’hébergement du détenu ou sa contribution attendue au financement de ceux-ci.
B. CRITIQUE DE LA MISE EN ŒUVRE DU CHOIX POLITIQUE 10. Il appartient au législateur de soupeser les avantages et les inconvénients des différentes options politiques. Mais quelle que soit la voie qu’il privilégie, le choix opéré doit, en tout état de cause, se réaliser conformément aux règles prescrites (1.) et être établi à travers des dispositions légales, cohérentes entre elles (2.). Comme il sera montré ultérieurement, le législateur devrait, en l’espèce, mieux conformer ces dispositions aux statuts externe (3.) et interne (4.) des détenus, ainsi qu’aux garanties essentielles du droit pénal (5.). 1. Nécessité d’une meilleure réglementation 11. L’article 23 de la Constitution exige que le législateur, et non le pouvoir exécutif, opère les choix politiques en matière de protection sociale et adopte les dispositions légales nécessaires à cette fin. Pour autant que le législateur souhaite déléguer (une partie de) sa compétence, il devrait au minimum arrêter lui-même, à destination du
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Roi, les choix politiques et les lignes directrices essentiels, en tenant compte des avis de la section de législation du Conseil d’Etat en la matière26. Nous constatons pourtant qu’un certain nombre de « pratiques habituelles » en matière de protection sociale des détenus ne reposent sur aucun fondement légal. Si le législateur décide de la maintenir à charge du SPF Justice, il doit, en tout état de cause, mettre un terme à la pratique consistant à n’établir l’intervention du SPF Justice qu’à travers des circulaires administratives, moins accessibles que la législation formelle et les arrêtés d’exécution27, n’offrant dès lors pas la même sécurité et protection juridiques aux détenus que des règlements dotés d’un fondement légal28. 12. Par son choix de confier la sécurité d’existence des détenus au SPF Justice, le législateur belge décharge, en grande partie, nous l’avons dit, le système de sécurité sociale d’une intervention en leur faveur. Il n’accomplit toutefois pas cette opération par le biais d’une loi arrêtant de manière générale le partage des responsabilités entre le SPF Justice et le système de sécurité sociale29 : il limite l’intervention de la sécurité sociale pendant les périodes de détention par des dispositions légales spécifiques dans chacun des secteurs de sécurité sociale concernés. Regrouper ces dispositions éparses dans un texte légal unique, consacré spécialement à la sécurité sociale des détenus et de leur famille, conduirait à une meilleure clarté et accessibilité des règles30 et inciterait vraisemblablement aussi à une plus grande cohérence en la matière.
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L’article 86, § 3, de la Loi de principes accordant au Roi le pouvoir de fixer les règles pour la réparation d’accidents en cas de travail pénitentiaire, sans que les lignes directrices ne soient édictées par le législateur, devrait être amélioré en ce sens. Seules quelques circulaires sont publiées dans le Moniteur belge, d’autres sont uniquement disponibles sur le site Web du SPF Justice – qui n’est pas toujours facilement accessible – et d’autres encore, comme celles qui concernent les personnes sans-abri sont en contradiction les unes avec les autres. Cette critique vaut par exemple à l’égard du régime d’indemnités administratives concernant les accidents du travail et les maladies professionnelles causés par l’exécution d’un travail pénitentiaire (l’article 86, § 3, de la Loi de principes et l’arrêté d’exécution encore à prendre constitueront un pas en avant dans cette direction), et de l’intervention du SPF Justice en remplacement du revenu d’intégration pour les détenus placés sous surveillance électronique, respectivement traités par simples circulaires ministérielles. La Loi de principes n’apporte pas de changements sur ce point : si elle stipule que les détenus ont droit aux soins de santé, à l’aide sociale et à la réparation d’accidents imputables au travail pénitentiaire, elle ne comporte toutefois aucune disposition sur le rôle que devrait jouer le système de sécurité sociale en la matière. Dans le même sens, voy. Ph. AUVERGNON et C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question : une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, p. 34.
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Les travailleurs sociaux des prisons mentionnent les difficultés auxquelles ils sont exposés chaque fois qu’ils accomplissent une démarche pour un détenu auprès d’une institution extérieure de sécurité sociale, telle une mutuelle, un CPAS, l’ONEm, …31 Il leur manque un instrument qui non seulement clarifie les droits des détenus à la sécurité sociale, mais en outre désigne le texte légal qui les fonde. La maîtrise complexe de l’ensemble de réglementations dispersées est certes déjà partiellement rencontrée par l’élaboration de sites intranet au niveau des Services psycho-sociaux (SPS) centraux de l’administration pénitentiaire. Mais la mise à jour permanente de ces sites doit impérativement être envisagée. Des « personnes-relais » devraient spontanément transmettre aux SPS centraux toute nouvelle législation affectant la protection sociale des détenus, et être reconnus comme interlocuteurs privilégiés de l’administration pénitentiaire. La question se pose d’ailleurs de savoir s’il ne faudrait-il pas envisager, avec sérieux, les chances de succès d’une structuration officielle d’un réseau efficace reliant les administrations responsables des divers secteurs de la sécurité sociale, pour valider et actualiser les informations diffusées sur les sites. 2. Nécessité de cohérence 13. Il faut encore souligner que les nombreuses dispositions introduisant la suspension de l’allocation sociale en cas de détention divergent largement entre elles. Ainsi, en cas de privation de liberté, l’intervention d’un secteur de sécurité sociale est suspendue souvent entièrement, parfois partiellement, voire même pas du tout. La suspension s’applique tantôt à l’égard des détenus au sens large (incluant dès lors les personnes bénéficiant d’une mesure d’exécution de la peine extra muros), tantôt à l’égard des allocataires « détenus dans la prison »32. Si une allocation de sécurité sociale est suspendue, cette suspension entre en vigueur souvent instantanément, parfois de façon différée. La suspension de l’allocation reste rarement cantonnée au cas du détenu déjà condamné, mais s’étend généralement à l’inculpé en détention préventive. Sporadiquement, la suspension est levée avec effet rétroactif s’il s’avère que la privation de liberté subie doit être qualifiée de détention inopérante. 14. Le législateur n’expose pas toujours explicitement les motifs qui le guident dans la fixation de ces règles. Lorsqu’elle est énoncée, la justification à la suspension du
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En ce sens, voy. notamment la contribution, dans le présent recueil, de Roland RASSON en Anneli VERSTRAETE : « Dagelijkse ervaringen van de psychosociale diensten van de strafinrichtingen met sociale zekerheid/sociale bijstand ». Cette expression – retenue notamment pour les allocations au bénéfice des personnes handicapées – a parfois soulevé des controverses sur la question de savoir si elle s’appliquait aux personnes en détention limitée, dès lors qu’elles sortent plus de 12 heures par jour de l’enceinte carcérale. Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op. cit., pp. 267 et s.
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paiement d’une allocation de sécurité sociale réside, à une exception près33, dans le fait que la personne concernée, compte tenu de sa prise en charge par le SPF Justice, ne doit pas être mise une seconde fois à la charge de l’autorité publique34. Ce motif, d’ailleurs valable comme principe général de droit dans les matières de protection sociale, n’explique toutefois absolument pas les nombreuses différences, esquissées ci-dessus, parmi les règles suspensives relevées dans les secteurs divers de la sécurité sociale. Pour cette raison, nous examinons d’abord si les différences parmi les règles de suspension « coïncident » avec les dispositions de non cumul par lesquelles la plupart des secteurs de la sécurité sociale empêchent que des mêmes dommages ou besoins soient couverts deux fois (a). Nous vérifions ensuite si les divergences entre les règles de suspension concordent avec la distinction classique entre les régimes d’assistance sociale (b) et d’assurance sociale (c). a) Règles de suspension et dispositions interdisant le cumul 15. Les secteurs de la sécurité sociale comprennent pratiquement tous des dispositions interdisant le cumul afin de prévenir une double couverture pour les mêmes dommages ou besoins humains. Au cas où semblable disposition existe et que l’intervention du SPF Justice serait susceptible de mener à son application, le législateur peut suspendre le versement d’une allocation sociale pendant la détention. On peut tirer exemple de l’assurance soins de santé et indemnités. Les prestations sociales qu’elle prévoit sont refusées si la personne concernée est, pour les dommages qui résultent de la maladie, de lésions, de dysfonctionnements fonctionnels ou d’un décès, réellement indemnisée en vertu d’une autre législation35. Concorde avec la logique de cette règle le fait que l’assurance pour les soins de santé n’accorde aucune prestation pour autant que le SPF Justice prenne en charge, avec une qualité équivalente, les frais relatifs aux soins médicaux des détenus. Le législateur peut opter pour la fixation de cette règle dans une disposition séparée et tel fut son choix en l’espèce36. L’intervention du SPF ne couvre en revanche pas,
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La suspension du droit aux allocations de chômage est, pour sa part, justifiée par la non disponibilité du détenu sur le marché général du travail. Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op. cit., pp. 136 et s. Cette justification est également invoquée en France. Voy. Ph. AUVERGNON et C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question : une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, pp. 105 et s. Art. 136, § 2, Loi relative à l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités coordonnée le 14 juillet 1994, ci-après désignée « L.C. du 14 juillet 1994 ». Art. 5, Règlement du 28 juillet 2003 portant exécution de l’article 22, 11° de la L.C. du 14 juillet 1994.
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comme telle, les dommages résultant de l’incapacité de travail37, de sorte que l’existence de la règle du non cumul rappelée plus haut ne peut justifier en soi la suspension des indemnités d’incapacité de travail pendant la détention. Dans l’état actuel de la législation sociale, le détenu sans personnes à charge demeure pourtant privé de la moitié de cette indemnité38. 16. Même au cas où la suspension d’une allocation sociale est présentée comme le corollaire d’une disposition anti-cumul existante, le secteur de sécurité sociale concerné ne pourra toutefois être déchargé de son intervention au bénéfice des détenus que dans la mesure où la protection offerte par le SPF Justice atteint un niveau au moins aussi élevé. En pratique, il n’est pas fréquent que cette exigence soit véritablement atteinte. Ainsi, il apparaît clairement que l’intervention du SPF Justice en matière de soins médicaux aux détenus n’égale pas la protection de l’assurance soins de santé39. 17. Il faut donc constater que les dispositions anti-cumul dans les divers secteurs de sécurité sociale ne permettent pas d’expliquer toutes les différences parmi les règles de suspension. b) Règles de suspension et prestations sociales assistancielles 18. Nous nous posons ici la question de savoir si la suspension des prestations sociales assistancielles ne peut se justifier par les caractéristiques propres du régime d’assistance sociale. Les secteurs d’assistance sociale ont en commun de réserver leur intervention, appelée résiduaire, aux bénéficiaires qui ne jouissent d’aucun autre moyen d’existence suffisant. Une gamme de dispositions légales détermine, pour chaque allocation assistancielle, les moyens d’existence qui doivent être pris en considération et la manière dont peut être précisément fixé ce montant. Aussi longtemps que le montant imputable des moyens d’existence est inférieur au
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A ce stade, nous ne prenons pas encore en considération le cas de l’incapacité de travail consécutive à un accident du travail pénitentiaire. Art. 105, L.C. du 14 juillet 1994 ; art. 233, A.R. du 3 juillet 1996 portant exécution de la loi relative à l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités coordonnée le 14 juillet 1994, ci-après désigné « A.R. du 3 juillet 1996 » ; art. 32 A.R. du 20 juillet 1971 instituant une assurance indemnités et une assurance maternité en faveur des travailleurs indépendants et des conjoints aidants, ci-après désigné « A.R. du 20 juillet 1971 ». Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, La sécurité sociale des (ex-)détenus et de leurs proches, Bruxelles, La Charte, coll. Droit en mouvement, 2008, pp. 218 et s. Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 239-260.
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montant légal de la prestation sociale de type assistanciel concernée, le bénéficiaire perçoit une allocation à concurrence de la différence entre les deux40. Il serait conforme à la logique de ces régimes d’assistance sociale que le législateur considère désormais l’intervention du SPF Justice comme un moyen d’existence dont le montant doit être déterminé par le législateur et déduise dès lors celui-ci de la prestation sociale de type assistanciel à laquelle un détenu peut prétendre. Les secteurs d’assistance sociale ne fonctionnent toutefois pas de cette façon puisqu’en cas de détention de l’« ayant droit », ils suspendent intégralement le paiement de leurs allocations, à l’exception notable de l’aide sociale41 et des prestations familiales garanties42. Perdent ainsi leurs revenus de remplacement, les détenus bénéficiaires du revenu d’intégration43, de la garantie de revenus aux personnes âgées (GRAPA) ou encore des allocations aux personnes handicapées. 40
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Seule la réglementation en matière des prestations familiales garanties prévoit que l’indemnitaire perçoit l’allocation complète ou au contraire aucune allocation, selon que ses moyens de subsistance dépassent ou non la frontière légale (art. 3, L. sur les prestations familiales garanties). La législation en matière d’aide sociale ne comporte certes pas de règle selon laquelle l’aide sociale accordée est suspendue en cas de détention. De facto, c’est pourtant souvent le cas. Comme il a été exposé plus haut, le caractère résiduaire de l’aide sociale empêche l’intervention du CPAS, pour autant que la prise en charge du détenu par le SPF Justice lui permette de mener une vie conforme à la dignité humaine. Une éventuelle intervention du CPAS devient justifiée dans la mesure où l’intervention du SPF Justice n’est pas aussi « protectrice » que l’aide sociale offerte par les CPAS. La loi ne prévoit pas la suspension des prestations familiales garanties en cas de détention. La détention de la personne physique responsable de l’enfant bénéficiaire, de même que la privation de liberté de l’enfant bénéficiaire ou de l’allocataire peut, néanmoins, mener dans certaines situations à la perte ou à une diminution de l’allocation familiale garantie parce qu’il n’est plus satisfait aux conditions générales d’octroi de cette allocation (majorée). Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 307-313. Seul le paiement du revenu d’intégration est suspendu, mais non le droit à l’intégration sociale (DIS) qui peut aussi se réaliser par l’octroi d’un emploi (pouvant consister en un engagement par contrat de travail dans le cadre de l’article 60 § 7 de la loi organique du 8 juillet 1976, par exemple). Ces principes ont été récemment rappelés par le Tribunal du travail de Nivelles annulant une décision du C.P.A.S. de Wavre : ce dernier avait décidé, à tort, de suspendre le droit à l’intégration sociale sous la forme d’un contrat de travail du requérant, en ce qu’il était détenu (« extra muros »), et ce durant toute la période de surveillance électronique. Voy. Trib. travail de Nivelles, 30 octobre 2009, R.G. 09/1044/A. Notons encore que, pendant la période d’interruption de peine octroyée par le directeur de l’établissement pénitentiaire pour une période nécessaire à l’examen de l’opportunité de l’octroi d’une mesure de surveillance électronique, le détenu ne subit pas sa peine et recouvre donc pleinement son droit au paiement du revenu d’intégration ou de l’aide sociale au taux équivalent. Voy. Trib. Trav. (Liège), 17 mars 2009, R.G. n° 376.263 ; Trib. Trav. (Liège), 12 mai 2009, R.G. n° 372.175 – 374.719 ; Trib. Trav. (Liège), 29 septembre 2009, R.G. n° 371.292 – 371.968.
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Dans tous ces cas de figure, la suspension est traditionnellement justifiée par le fait que le détenu serait déjà à charge de l’autorité publique. Les régimes assistanciels ne sont, il est vrai, pas alimentés par des cotisations des bénéficiaires, mais par les deniers publics44 ; sous cet angle, le motif invoqué pour justifier les dispositions suspensives des régimes assistanciels est cohérent dès lors qu’il est en lien avec la nature et le financement de ces régimes45. 19. La démonstration ne se clôt toutefois pas ici. Nous avons déjà rappelé que l’article 23 de la Constitution consacre le droit pour tous – et donc également pour le détenu – à une vie conforme à la dignité humaine, et confie au législateur l’obligation de garantir le droit à l’aide sociale. La suspension intégrale des allocations assistancielles n’est ainsi pleinement justifiée que si l’intervention du SPF Justice garantit une protection sociale équivalente à celle qu’offre l’allocation suspendue. On ne peut estimer trop légèrement que cette exigence soit concrètement rencontrée. Ainsi, le législateur n’accorde le droit à l’intégration sociale qu’aux personnes qui ne disposent pas des moyens de subsistance suffisants et ne sont en aucune mesure capables d’en acquérir par eux-mêmes46. Les moyens de subsistance des personnes concernées sont, par conséquent, déduits du montant du revenu d’intégration qui peut, le cas échéant, leur être attribué. Cette règle pourrait justifier la suspension intégrale du paiement du revenu d’intégration si l’intervention du SPF Justice atteignait le même niveau de protection sociale que ce dernier. Il faut bien admettre qu’en pratique, cet objectif n’est actuellement pas satisfait47.
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Cette règle de principe comporte toutefois une exception. La charge financière des allocations familiales garanties est supportée par l’ONAFTS (Art. 5, L. du 20 juillet 1971 instituant des prestations familiales garanties), lequel ne bénéficie toutefois pas d’une intervention de l’Etat, de sorte que ces prestations sociales sont financées de facto par des cotisations patronales. Le défaut de règle de suspension concorde par conséquent avec le financement particulier de ce secteur d’assistance sociale. L’octroi des prestations familiales garanties en cas de détention se justifie en outre par le fait que le SPF Justice prend en charge uniquement la sécurité d’existence du détenu et non celle de ses enfants : l’intervention de ce secteur de sécurité sociale ne heurte dès lors pas celle d’un mécanisme différent de protection du sujet lui-même. Comme nous l’exposerons par ailleurs, les allocations familiales du régime assurantiel constituent également une exception à la règle de suspension des prestations sociales assurantielles. Cette corrélation n’exclut pas nécessairement des différences au sein des règles de suspension, par exemple en cas de détention inopérante. Art. 3, 4 et 14, L. du 26 mai 2002 concernant le droit à l’intégration sociale. Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 365 et s. En France également, il est constaté que la prise en charge des détenus par un autre mécanisme de protection ne les préserve pas de la pauvreté. Voy. Ph. AUVERGNON et C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question : une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, pp. 105-106.
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Ce doute vaut d’autant plus pour le droit à l’aide sociale. En effet, pour garantir ce droit à tout un chacun, les centres publics d’action sociale (CPAS) sont chargés d’une aide individualisée et diversifiée. Or le caractère résiduaire48 du droit à l’aide sociale ne constitue pas un motif suffisant, dans le chef du CPAS, pour refuser une forme concrète d’aide sociale nécessaire au détenu pour mener une vie décente bien que non fournie par le SPF Justice49. Dès lors, l’objet de la discussion n’est ici pas tant le principe de la suspension des allocations assistancielles, mais plutôt la clarification de la délimitation des tâches qui continue à incomber au système de la sécurité sociale50, compte tenu à la fois de l’importance de l’intervention du SPF Justice et des missions des CPAS51. 20. Nous ne recommandons pas au législateur le maintien de la suspension des prestations assistancielles en cas de détention. Un tel point de vue reviendrait en effet à ce que les personnes titulaires de telles allocations, disposant donc de moyens propres les moins importants, souffriraient le plus financièrement de leur privation
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Selon la jurisprudence, l’aide sociale ne doit en effet pas être octroyée à celui qui peut mener une vie conforme à la dignité humaine sans devoir faire appel aux pouvoirs publics (C.E., 15 février 1990, n°34.059). Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 365 et s. Il est important que ce partage des responsabilités aille de pair avec une répartition parallèle des moyens publics mis à disposition. Sur ce point, voy. notamment V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 58 et s. Il ne faut pas sous-estimer que la Loi de principes explicite les droits des détenus et renforce le caractère contraignant du respect de ceux-ci. Or, afin que leurs droits soient pleinement effectifs, on peut augurer que les détenus feront un appel croissant à l’intervention de la caisse sociale des détenus, à l’aide sociale des Communautés et des Régions, ainsi qu’à l’aide sociale des centres publics d’action sociale, d’autant plus lorsque la Loi de principes mentionne que les coûts engendrés par l’exercice de certains droits ne sont pas à la charge du SPF Justice mais sont abandonnés aux détenus (tel le droit de téléphoner quotidiennement). Il faudra certes que le SPF Justice assume fidèlement la charge qui, le cas échéant, pèse légalement sur lui (telle la livraison en quantité suffisante de produits d’hygiène, …). Il importera aussi, à l’avenir, de clarifier définitivement les rapports de subsidiarité entre la caisse sociale des détenus et l’intervention du CPAS. Nous sommes peu favorables à la tendance, de certaines juridictions, privilégiant l’intervention prioritaire de la caisse sociale des détenus par rapport à l’aide sociale organisée par les CPAS. En effet, les détenus contribuent à la caisse sociale proportionnellement à leurs achats et non à leurs capacités financières. Les détenus les plus démunis investissent parfois le fruit de leur travail pénitentiaire sous-rémunéré dans de nombreuses emplettes – à prix en outre plus élevés que dans la société libre – car ils n’ont rien à disposition alors que d’autres détenus n’achèteront que sporadiquement, leur famille plus aisée leur fournissant des biens divers. Les principes de fonctionnement de cette caisse ne remplissent dès lors pas les garanties d’équitabilité qui doivent guider un système de solidarité collective de redistribution (comme celui de la sécurité sociale). Sur cette question, voy. encore : V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 399-402.
La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons
de liberté. Cette conséquence semble difficilement compatible avec l’idée de solidarité qui pénètre l’ensemble de notre système de sécurité sociale. La suspension des prestations assistancielles empêche en outre que les détenus, qui n’avaient auparavant pas été touchés par un risque social et qui perdent leur revenu professionnel suite à leur détention, ne puissent désormais dépendre d’une allocation assistancielle pour compenser leur absence de ressources financières. c) Règles de suspension et prestations sociales assurantielles 21. Le législateur suspend également la plupart des prestations sociales assurantielles en cas de détention de l’ayant droit. Cette règle suscite plus d’étonnement encore que la suspension des allocations assistantielles. L’argument généralement invoqué selon lequel le détenu ne doit pas être pris une deuxième fois en charge par l’autorité publique perd pourtant sa pertinence puisque les allocations assurancielles sont financées en grande partie par des cotisations des assurés sociaux52. En outre, l’octroi des allocations assurancielles n’est pas conditionné par l’insuffisance des moyens de subsistance de l’ayant droit. L’intervention du SPF Justice ne peut dès lors pas être considérée comme une forme de moyens d’existence qui viendrait en déduction de ces dernières, et la suspension des assurances sociales ne peut constituer une alternative à cet effet. Les allocations d’assurance sociale visent non seulement à préserver les bénéficiaires de la pauvreté, mais aussi à garantir à la personne concernée un niveau de vie comparable à celui qui précédait la survenance du risque social assuré. Cet objectif est étranger à l’intervention du SPF Justice qui, dans de nombreux cas, n’atteint pas le niveau de protection garanti par les prestations d’assurances sociales. La prise en charge du détenu par le SPF Justice ne peut dès lors, à elle seule, certainement pas justifier la suspension complète de telles prestations. 22. La suspension d’une allocation assurancielle se justifiera si la situation de l’assuré social ne répond pas (plus), en raison de la détention, à la définition du risque social assuré. Sur cette base, on juge généralement légitime la suspension de l’assurance chômage : les détenus sont réputés ne plus être disponibles sur le marché général du 52
Dans le même sens, l’argument selon lequel l’Etat belge ne doit pas participer au financement de bénéficiaires de pensions demeurant à l’étranger n’empêche pas, par exemple, que des pensions de mineurs restent payables jusqu’à concurrence de quatrevingt pour cent de leur montant (art. 27, A.R. n°50 du 24 octobre 1967 relatif à la pension de retraite et de survie des travailleurs salariés, modifié par l’article 10 de l’A.R. n° 50 du 16 juillet 1986).
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travail et dès lors ne plus se trouver dans la situation de chômage involontaire, telle que décrite et requise par l’assurance-chômage53. Cet argument apparaît en revanche incapable de justifier la suspension des allocations tant à l’égard des chômeurs dispensés, au moment de leur privation de liberté, de la condition de disponibilité sur le marché général du travail54, qu’à l’égard des détenus qui bénéficient de certaines mesures d’exécution de la peine leur permettant de se rendre disponibles sur ce même marché55. Outre l’hypothèse de l’assurance-chômage, il faut bien admettre que, dans la plupart des cas, le législateur suspend les prestations d’assurance sociale de l’allocataire détenu malgré la persistance du risque social assuré. Ainsi, la détention ne dissipe pas l’incapacité du travail mais le détenu sans personne à charge est pourtant privé de la moitié de son indemnité56/57. 53
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La détention provoque souvent, et parfois à tort, le licenciement pour motif grave et conduit, en cela, au constat que ce n’est pas involontairement que l’intéressé est désormais sans emploi. En cas de chômage volontaire, un chômeur peut être exclu temporairement du droit aux allocations, mais le paiement de celles-ci reprend à l’issue de l’exclusion temporaire pour autant que l’intéressé demeure alors disponible sur le marché du travail général et ne refuse aucun emploi convenable. Dans le même sens, voy. Ch. VANDERLINDEN, « Travail pénitentiaire et sécurité sociale du détenu », Rev. dr. pén. crim., 2003, p. 647. Ainsi, il faut regretter que, contrairement aux détenus sous surveillance électronique, les détenus en détention limitée ne se voient pas garantir un droit à des allocations de chômage lorsque les conditions d’admissibilité et d’octroi sont réunies. En effet, l’ONEm considère traditionnellement qu’une personne à la charge de l’établissement pénitentiaire dans lequel elle est détenue en régime de semi-liberté ne peut bénéficier en outre d’un revenu de remplacement sous la forme d’une allocation. Certains tribunaux du travail ont certes jugé en sens contraire, mais la dernière décision à notre connaissance publiée en la matière confirme la position de l’ONEm. Voy. Cour Trav. Liège (6e ch.), 23 décembre 2005, R.G. n° 32.892/04. Dès lors que la personne en détention limitée est disponible sur le marché du travail, la posture de l’ONEm n’est pourtant pas justifiée, et une intervention normative serait utile en ce domaine. Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 139-144. Voy. supra. Dans un jugement du 13 octobre 2008, le Tribunal du Travail de Liège a justifié, « classiquement », la réduction de moitié des indemnités d’incapacité de travail pour le détenu sans charge de famille par le fait qu’il « bénéficie d’une alimentation et d’un hébergement à charge de l’Etat (…) alors que le travailleur se trouvant à l’extérieur d’un lieu de détention doit pourvoir lui-même à son entretien et à son logement, chauffage, électricité etc., … ». Voy. Trib. Trav. Liège, 13 octobre 2008, R.G. n°332950. Si la détention n’est certes en soi pas de nature à mettre fin à l’incapacité frappant le détenu avant son incarcération, la question se pose néanmoins de savoir si les activités productives incriminées ayant justifié la condamnation pénale à une peine d’emprisonnement – trafic de véhicules ou de stupéfiants, vols, … – n’ont pas mis fin à l’incapacité du détenu pour reprise d’activité non autorisée par le médecin-conseil. La Cour du travail de Mons a récemment répondu affirmativement, confirmant ainsi que les justiciables détenus concernés devaient être privés de la totalité de leurs indemnités
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La même observation vaut pour les diverses pensions accordées par les assurances pension, suspendues pendant la privation de liberté, alors que celle-ci n’a d’incidence ni sur l’âge du détenu, ni sur le décès de son conjoint. 23. Le législateur ne suspend certes pas toutes les allocations assurantielles. On ne peut toutefois en déduire une volonté – même timidement affichée – de réviser progressivement son choix de suspension des pensions de retraite, des allocations de chômage et des indemnités d’incapacité de travail. En effet, les motifs empêchant la suspension de certaines assurances sociales sont si spécifiques qu’ils ne peuvent être transposés aux autres secteurs de la sécurité sociale. Ainsi, la non suspension des indemnités d’accident du travail et de maladie professionnelle perçues par le détenu s’explique largement par l’historique de ces assurances sociales nées comme assurances de la « responsabilité risque » des autorités employeuses. Selon la logique propre de ces régimes de responsabilité, les indemnités à octroyer ne peuvent être diminuées que si la victime obtient, du fait de son accident du travail ou de sa maladie professionnelle, une autre réparation en couverture du même dommage58. Or, on ne peut considérer la prise en charge des détenus par le SPF Justice comme une telle réparation. L’assurance-faillite des travailleurs indépendants n’est pas non plus sujette à suspension en cas de détention. Il est vrai que les indemnités de faillite étaient initialement accordées à des conditions si restrictives et pour une période de deux mois uniquement, de sorte qu’il était sans doute purement hypothétique de bénéficier simultanément d’une intervention du SPF Justice et de cette assurance. Il faut également souligner qu’en cas de condamnation en vertu des articles 489, 489bis et 489ter du Code pénal, l’intéressé ne peut du reste pas revendiquer l’allocation de faillite ; et peut-être le législateur n’a-t-il tout simplement pas eu à l’esprit, l’hypothèse de détention du titulaire coupable d’une infraction sans lien avec la faillite. En outre, le législateur a davantage imaginé l’assurance-faillite comme une prestation sociale de « soudure » destinée à permettre au travailleur indépendant de se réorganiser. Le législateur n’avait dès lors pas jugé nécessaire de déterminer si le bénéficiaire fournissait des efforts de réinsertion professionnnelle durant la courte période pendant laquelle il bénéficiait de la prestation sociale. Il ne formula pas non plus, contrairement à ce qui est stipulé dans le cadre de l’assurancechômage, l’exigence que la personne concernée soit disponible sur le marché
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d’incapacité de travail. Voy. Cour trav. Mons, 14 mai 2009, R.N. n°19.839. Cet arrêt a toutefois fait l’objet d’un pourvoi en cassation le 7 août dernier. Voy. également, dans le même sens : Cour trav. Mons, 3 septembre 2009, R.N. n°21.033. Voy. art. 47, L. du 10 avril 1971 sur les accidents du travail ; art. 14-14bis, L. du 3 juillet 1967 sur la prévention ou la réparation des dommages résultant des accidents du travail, des accidents survenus sur le chemin du travail et des maladies professionnelles dans le secteur public ; art. 51, L.C. du 3 juin 1970 relatives à la réparation des dommages résultant des maladies professionnelles.
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général du travail. Ces postulats de départ n’ont jamais été modifiés ultérieurement, alors que la période pour laquelle l’intéressé peut jouir des prestations sociales en cas de faillite a entre-temps été prolongée jusqu’à un an. Ces caractéristiques très singulières de l’assurance faillite ont indiscutablement pour conséquence qu’on ne peut déduire de l’absence d’une règle suspensive en l’espèce, une volonté du législateur de renoncer, plus généralement, au mécanisme de suspension. On constate enfin que le paiement des allocations familiales n’est pas non plus suspendu. Le législateur fixe au contraire des règles expresses pour garantir, dans la mesure du possible, la poursuite du versement de ces dernières. Pour ce faire, il s’appuie en partie sur des motifs pratiques. On observe en effet qu’en cas de détention de l’attributaire, on identifiera, dans la plupart des cas, pour le même enfant, un autre attributaire de telle sorte que les allocations familiales demeureront assurées et dues. Lever la règle de suspension permet, en tout état de cause, d’obtenir un résultat similaire avec moins de tracasseries administratives au meilleur bénéfice des enfants concernés59. Il a vraisemblablement été considéré en sus que l’intervention du SPF Justice ne constituait pas non plus un motif suffisant de suspension, que l’on qualifie les allocations familiales de droit de l’enfant ou d’un avantage pour l’adulte qui a l’enfant bénéficiaire à sa charge. Le SPF Justice prend, en effet, uniquement en charge le détenu et non la famille qui est la sienne. 24. De ce qui a été exposé préalablement, on peut conclure que la suspension d’une allocation assurancielle est insuffisamment justifiée par le motif le cas échéant invoqué selon lequel l’intéressé est déjà à la charge de l’autorité publique. La suspension est d’autant plus exposée à la critique que le montant de l’allocation suspendue dépasse le coût de l’intervention du SPF Justice et même dans le domaine du principe de la suspension, les diverses assurances sociales sont régies par des règles peu cohérentes. 3. Nécessité d’une meilleure harmonisation avec le statut juridique externe des détenus 25. Le législateur n’utilise pas toujours les mêmes termes pour désigner les personnes auxquelles s’applique la suspension des allocations de sécurité sociale. Les dispositions qui prévoient une suspension de ces dernières ne sont, en outre, pas encore adaptées aux nouvelles modalités d’exécution de la peine actuellement prévues dans le statut juridique externe des détenus et des internés60. Les réponses des ministres compétents aux questions posées au Parlement apportent souvent quelques éclaircissements. Le législateur pourrait néanmoins éviter des difficultés d’interprétation et l’insécurité juridique y liée en faisant expressément 59 60
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Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 289-313. Ce constat se dégage par exemple clairement de la façon de désigner les bénéficiaires de diverses mesures d’aides à l’emploi. Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 157-172.
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référence, dans les diverses dispositions suspensives et mesures d’aides à l’emploi, aux modalités d’exécution des peines auxquelles elles se rapportent. 26. Le législateur ne doit pas uniquement veiller à plus de clarté terminologique, il doit également réfléchir à la question de savoir si les détenus extra muros peuvent se voir appliquer la règle de la suspension. Ainsi, il faut vérifier si le SPF Justice prend également en charge les détenus extra muros, motif traditionnellement avancé pour légitimer la règle suspensive. La suspension totale de l’allocation sociale constituera une sanction additionnelle illégale lorsque l’intervention du SPF Justice fournit une protection moins élevée que celle du système de sécurité sociale. Ainsi, par exemple, si le législateur souhaitait maintenir l’allocation spéciale du SPF Justice à l’égard des détenus en surveillance électronique, celle-ci devrait toujours être d’un montant pleinement équivalent à celui du revenu d’intégration, et s’aligner sur son indexation. A défaut de quoi, cette intervention au bénéfice des détenus en surveillance électronique boitera continuellement et illégalement derrière la protection offerte par le revenu d’intégration61. Le législateur doit veiller en outre à l’égalité de traitement des détenus bénéficiant de modalités comparables d’exécution des peines. Il est préférable, à notre estime, que le législateur adopte, comme critère pour fonder un traitement différent, le séjour effectif dans la prison plutôt que l’inscription au rôle d’un établissement pénitentiaire. Le législateur doit en outre se pencher tout particulièrement sur la question de savoir si les différences de régime entre la surveillance électronique et la détention limitée constituent une justification suffisante pour le traitement actuellement fort inégal des deux catégories de détenus. En effet, le détenu placé sous surveillance électronique conserve ou retrouve en principe le paiement de toute allocation sociale (sauf pour le revenu d’intégration) alors que, pour les détenus en détention limitée, la suspension complète des prestations demeure la règle62. 4. Nécessité d’une meilleure harmonisation avec le statut juridique « interne » des détenus 27. La suspension intégrale des prestations de sécurité sociale provoque un déficit de protection sociale et peut être considérée comme une sanction additionnelle ou une forme de dommage évitable de la détention, lorsque l’intervention du SPF Justice n’équivaut pas à la protection offerte par l’allocation sociale suspendue (a). Il faut en 61 62
Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 377-385. Une conséquence parmi d’autres de cette disparité de traitement : le détenu bénéficiant d’une mesure de surveillance électronique a droit à une allocation de chômage alors que le détenu en détention limitée en est privé. Tous deux sont pourtant disponibles pour le marché général du travail.
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outre éviter que l’impact de la détention sur le versement de l’allocation se maintienne après la libération de l’intéressé (b), et qu’il affecte, outre le détenu, les membres de sa famille (c). a) Plus de respect pour les droits sociaux fondamentaux des détenus 28. L’article 23 de la Constitution accorde à tout un chacun, et donc aussi aux détenus, le droit fondamental à la sécurité sociale. Or, conformément à l’article 6, § 1er de la Loi de principes, le détenu ne peut subir d’autres restrictions de ses droits sociaux que celles qui résultent de la privation de liberté ou qui lui sont indissociablement liées, et celles qui sont déterminées par ou en vertu de la loi. Les détenus ne peuvent dès lors être privés de leur droit à la sécurité sociale qu’à la condition que le mécanisme alternatif qui les prend, le cas échéant, en charge offre effectivement une protection équivalente. Or, la prise en charge par le SPF Justice n’a, dans la plupart des cas, pas la même qualité d’intervention que les régimes d’assistance sociale et d’assurances sociales, et ne peuvent dès lors être considérés comme une « protection équivalente ». Par conséquent, si le législateur reste attaché à la règle de la suspension de prestations de sécurité sociale, il doit, chaque fois, au besoin, soit permettre l’octroi « d’un surplus » par le système de sécurité sociale, soit relever le niveau de l’intervention du SPF Justice. Dans le premier cas, il doit avoir à l’esprit une délimitation claire des responsabilités respectives entre le SPF Justice et les institutions de sécurité sociale, surtout en ce qui concerne les droits à l’intégration sociale et à l’aide sociale, pour accorder ainsi une allocation concordante des moyens. Dans le deuxième cas de figure, le législateur doit aligner, par une adaptation automatique, l’intervention garantie par le SPF justice sur le niveau des prestations de sécurité sociale, leurs indexations et augmentations, afin d’éviter que la protection sociale des détenus pèche sans cesse par l’étroitesse de sa couverture. b) Plus d’attention pour les droits des détenus à leur libération 29. Soustraire les détenus au système de la sécurité sociale au terme de la détention est une exclusion plus radicale encore de la société que celle résultant de l’exécution de la peine privative de liberté63. Cette exclusion s’apparente à une sanction additionnelle inacceptable au sens de l’article 6 § 1er de la Loi de principes. L’application de la législation en matière de sécurité sociale implique pourtant, dans un certain nombre de cas, la perte de droits à la sécurité sociale après la libération de 63
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Dans ce cas, l’intervention de l’autre mécanisme de protection sociale s’arrête en effet.
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la personne concernée. Ainsi, l’existence d’un délai d’attente ou de périodes de référence au cours desquelles l’assuré social doit justifier d’un passé professionnel déterminé ou d’un certain nombre de versements de cotisations l’empêche de satisfaire aux conditions d’octroi de la prestation sociale en raison d’une détention antérieure. La prolongation de telles périodes de référence64, comme la réduction des délais d’attente par rapport à la durée de la détention65 permettent d’éviter pareilles privations. La possibilité accrue de bénéficier d’une assurance continuée aiderait également le détenu à conserver la qualité d’assuré social ou à continuer de constituer ses droits à la sécurité sociale pendant sa privation de liberté. Le législateur pourrait examiner si cet avantage peut être accordé, sans paiement de cotisations, à des détenus qui effectuent un travail pénitentiaire66. 30. La perte des droits à la pension de retraite pour les fonctionnaires mérite, à notre estime, la plus grande réprobation. La condamnation d’un fonctionnaire à une peine criminelle a toujours pour conséquence la déchéance de ses droits de retraite futurs en sa qualité de fonctionnaire. Les droits de retraite dans l’assurance-pension pour salarié qu’il obtient en échange ne compensent pas cette perte en suffisance. En outre, la condamnation à une peine criminelle mène à la perte d’une pension de retraite de fonctionnaire déjà accordée. Or cette déchéance n’est pas non plus entièrement compensée par l’octroi d’une pension de travailleur salarié. Cette mesure touche plus durement le fonctionnaire au fur et à mesure de la durée de son engagement professionnel au service de l’Etat et du taux élevé de la pension de retraite qu’il a dès lors pu constituer. Cette double déchéance entraîne aussi des conséquences après la libération de l’intéressé, de telle sorte que cette règle revêt le caractère de sanction additionnelle et, malgré la possibilité de réhabilitation ou de grâce, méconnaît le principe de proportionnalité consacré par la Loi de principes. Le législateur améliorerait par conséquent considérablement la législation existante en mettant un terme à la déchéance des droits de retraite futurs, de même qu’en transformant, à tout le moins, la déchéance de la pension de fonctionnaire déjà accordée en une suspension, dans 64
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L’assurance-faillite des travailleurs indépendants pourrait s’inspirer sur ce point de l’assurance-chômage. Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., p. 150 et s. De cette manière, on peut par exemple éviter la perte de pensions de retraite anticipées ou de pensions minimums. Il semble toutefois peu probable que le principe constitutionnel d’égalité oblige le législateur d’agir en ce sens (voy. aussi M. COUSINS, « Overview of recent Cases before the European Court of Human Rigths and the European Court of Justice (octoberdecember 2007) », European Journal of Social Security 2007, pp. 371-372).
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l’hypothèse où il ne souhaiterait pas renoncer à la règle suspensive générale valant en matière de pension de retraite. c) Plus d’attention pour la situation familiale des détenus 31. Les règles de suspension actuellement en vigueur dans les divers régimes de sécurité sociale ne prennent pas toutes en considération l’existence des membres du ménage du détenu et souffrent, sur ce plan également, d’un manque de cohérence entre elles. Cette carence vaut en cas de détention tant de l’allocataire que de la personne à sa charge. 1° Détention de l’allocataire social 32. Les règles de suspension divergent largement entre elles en cas de détention de l’allocataire ayant famille à charge. Nous l’avons vu, le revenu d’intégration, les allocations de chômage, les allocations aux personnes handicapées et la garantie de revenus aux personnes âgées sont entièrement suspendus en cas de détention. Or, le montant de ces allocations étant augmenté selon la charge de famille de l’allocataire, la suspension complète de la prestation frappe d’autant plus lourdement que l’augmentation de cette dernière atteint un niveau plus élevé (du fait d’une famille plus nombreuse)67. La situation est meilleure pour les détenus pensionnés salariés et indépendants, ainsi que leur conjoint à charge. La détention est en effet traitée comme une séparation de fait de telle façon que le conjoint non détenu continue à percevoir la moitié de la pension de ménage. Un régime plus favorable encore est adopté pour les bénéficiaires d’indemnités d’incapacité de travail avec une personne à charge : la suspension de leur prestation leur est entièrement épargnée. 33. Le motif général justifiant la suspension des allocations sociales réside, comme déjà exposé, dans la prise en charge du détenu par le SPF justice. Or, le SPF Justice « couvre » seulement les besoins de la personne du détenu et non, à l’évidence, ceux de son entourage familial. Par conséquent, la suspension totale d’une allocation sociale qui, en dehors du cas de détention, est augmentée pour cause des charges de famille de l’allocataire, est tant une forme d’effet préjudiciable évitable – et donc à éviter – de la détention qu’une atteinte au principe de
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Seule la suspension de la garantie de revenus aux personnes âgées reste, à cet égard, exempte de critique. En effet, le montant de cette prestation n’est jamais majoré en raison des charges de famille du bénéficiaire.
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normalisation68. Une telle suspension viole, sans aucun doute, les principes sur lesquels repose la Loi du 12 janvier 2005. Une suspension partielle de l’allocation qui tiendrait compte de l’étendue dans laquelle le SPF Justice assure la subsistance de l’allocataire détenu, semblerait en revanche concorder avec la Loi de principes. Le législateur devrait à cet effet bien veiller à rétablir la cohérence des règles de suspension dans les divers secteurs de sécurité sociale. 34. Ces révisions législatives que nous appelons de nos vœux ne constituent toutefois pas une mission légère. Nous pourrions proposer qu’en cas de détention de l’allocataire ayant droit à une prestation majorée pour cause de charge de famille, seul le montant de base soit suspendu, tout en maintenant le versement de la quote-part de l’allocation majorée pour charge de famille. Les droits dérivés des personnes à charge de l’allocataire détenu demeureraient ainsi intacts. A cette proposition se heurtent toutefois des objections, surtout dans le cadre des assurances sociales. L’augmentation d’une prestation de sécurité sociale pour cause de charge de famille, représente en effet, dans pratiquement toutes les assurances sociales où elle intervient, une très faible portion de l’allocation totale à laquelle prétendait l’allocataire avant sa détention. La personne à charge non détenue recevrait alors une partie si congrue de l’allocation assurancielle jadis accordée au détenu qu’elle serait, dans les faits, renvoyée vers des régimes d’assistance sociale. Tous les dommages évitables de la détention ne sont donc pas contournés de la sorte. Les règles actuelles de suspension appliquées dans les assurances-pensions pour travailleurs salariés et indépendants semblent offrir un meilleur modèle pour une solution potentielle. Dans ce secteur en effet, la détention de l’allocataire a seulement pour conséquence la suspension de la moitié de la pension au montant ménage, de telle manière que la personne à charge demeurant en liberté conserve l’autre moitié69. Cette règle pourrait être introduite dans les régimes d’assistance
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Ce constat apparaît très clairement pour les cas dans lesquels la suspension de la prestation sociale place le détenu dans l’impossibilité réelle de payer la contribution alimentaire dont il est redevable. Une réglementation comparable existe en ce qui concerne la garantie de revenus aux personnes âgées. Chaque membre de la famille a en effet un droit individuel à la GRAPA dès que l’intéressé remplit les conditions pour l’octroi ; mais le montant de cette allocation n’est en outre pas augmenté pour cause de charge de famille. La détention d’un des intéressés n’apporte en soi pas de changement. Si la détention devait conduire à une résidence principale séparée pour le détenu, le changement dans le montant accordé pourrait toutefois intervenir. Voy. G. VAN LIMBERGHEN et V. VAN DER PLANCKE, op cit., pp. 359-361.
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sociale. En effet, la majorité des allocations assistancielles voient leur montant doubler au bénéfice des allocataires avec personnes à charge70. L’exportation de la règle du secteur des pensions vers d’autres assurances sociales semble, en revanche, réellement plus difficile. Dans l’assurance chômage, la séparation de fait mène à une baisse du montant de l’allocation (dès lors que le chômeur transite de la catégorie « ayant charge de famille » vers celle d’« isolé »), excepté si le chômeur paye une contribution alimentaire en vertu d’une décision judiciaire ou d’un acte notarié, ou si son conjoint a été autorisé à percevoir des sommes dues par des tiers. En dehors de cette dernière hypothèse, l’incorporation de la règle suspensive prévalant dans les assurances pensions exigerait donc que le législateur prévoie d’abord qu’en cas de séparation réelle, l’allocation de chômage soit maintenue au « montant ménage » et qu’ensuite seule la moitié, à savoir la partie du chômeur détenu, soit suspendue. La question se pose de savoir si le législateur serait disposé à agir en ce sens. Dans l’assurance indemnité pour incapacité de travail, l’introduction de la règle de suspension en vigueur pour les assurances-pensions signerait un recul pour les intéressés, dès lors qu’actuellement le détenu conserve intégralement son indemnité d’incapacité de travail – et non uniquement la moitié – au cas où celle-ci a été majorée pour cause de charge de famille. Encore faut-il ajouter ici que la moitié d’une pension au taux ménage n’atteint pas toujours le niveau des prestations assistancielles pour isolés, de telle manière que la personne à charge non détenue n’est généralement pas préservée d’une baisse sérieuse de son niveau de vie (ceci vaut également pour les cas de séparation réelle dans laquelle aucun des deux partenaires n’a été détenu). La transposition de cette règle vers d’autres assurances sociales produirait sans aucun doute le même effet. La véritable pertinence des développements qui précèdent doit donc être appréciée avec circonspection. 2° Détention de la personne à charge de l’allocataire social 35. En second lieu, il faut relever que la détention de la personne à charge de l’allocataire a également, selon le secteur de sécurité sociale dont elle relève, des conséquences divergentes sur sa prestation sociale. Dans l’assurance chômage, est instaurée, pour une durée déterminée de douze mois71, la présomption selon laquelle le chômeur et le détenu à charge continuent à former une famille. Le législateur tient ainsi compte du fait que, malgré la détention 70
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Cette argumentation vaut pour le revenu d’intégration et l’allocation de remplacement de revenus pour la personne handicapée. Pour autant que la personne non incarcérée puisse elle-même revendiquer une allocation assistancielle, elle obtient en fait d’ores et déjà une moitié d’allocation au taux famille à charge. Art. 59, al. 2, 2°, A.M. du 26 novembre 1991 portant les modalités d’application de la réglementation du chômage.
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de la personne à charge, le chômeur en liberté est souvent confronté aux mêmes frais (logement, …) qu’avant la détention de son conjoint ou partenaire, et qu’il doit en outre supporter les coûts de déplacement pour les visites au sein de l’établissement pénitentiaire ou de défense sociale. Dans l’assurance indemnité pour incapacité ou invalidité, l’allocataire conserve vraisemblablement, à défaut d’une règle explicite dans un sens ou l’autre, la qualité de titulaire ayant personne à charge, si le détenu demeure effectivement à charge et donc aussi longtemps que l’allocataire lui paye par exemple une somme d’argent mensuelle. Dans les assurances pensions pour salariés et indépendants, la règle de la réduction de moitié de la pension au taux famille est également appliquée si la personne à charge de l’allocataire est détenue. 36. Cette dernière réglementation n’est certes pas un modèle pour une solution uniforme. Pour autant qu’on accepterait que, par l’intervention du SPF Justice, le détenu ne puisse plus être considéré à charge de l’allocataire demeuré libre, ce dernier devrait désormais recevoir au moins le montant pour une personne isolée. En outre, le législateur devrait admettre, pour toutes les prestations sociales, que les dépenses de l’allocataire demeuré libre ne diminuent pas immédiatement après la détention de la personne à sa charge (même loyer, par exemple, ne fût-ce que pour un temps). Il serait ainsi justifié de maintenir, en tout état de cause, pendant une période déterminée, la prestation sociale au montant ménage. Plus encore, le législateur devrait également stabiliser, au-delà de cette période fixe, l’octroi du montant ménage, dans le cas où l’allocataire peut démontrer, dans une certaine mesure, assurer la subsistance de la personne détenue à sa charge. 5) Nécessité d’une meilleure harmonisation avec les garanties essentielles du droit pénal 37. La suspension de la prestation sociale frappe le plus souvent les détenus avant même leur condamnation. Le législateur applique, en réalité, la règle suspensive comme conséquence automatique de la détention, même préventive. a) La présomption d’innocence 38. Il faut premièrement interroger la compatibilité de la suspension des prestations sociales du détenu avec le principe de la présomption d’innocence. Dans presque tous les cas, le motif de la suspension du paiement des allocations sociales ne réside
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
pas tant dans la condamnation, que dans la détention du bénéficiaire, puisqu’à une exception près, la suspension se produit dès l’incarcération72. Dans tous les autres cas de figure, les allocataires mis en détention préventive sont par conséquent touchés par les règles de suspension, tout autant que les allocataires condamnés. 39. Les divers secteurs de sécurité sociale connaissent par ailleurs des règles disparates pour le cas où il s’avère par la suite que l’allocataire a subi une détention préventive inopérante puisqu’il a bénéficié, à l’issue de l’instruction, d’un non lieu voire d’un acquittement73. Ainsi, l’assurance-chômage et l’assurance soins de santé et indemnités ne comportent pas de règles spécifiques en la matière, et ne prévoient dès lors pas de paiement différé des allocations suspendues. L’allocataire mis à tort en détention peut seulement tenter d’obtenir une indemnisation de l’Etat belge sur la base de la loi du 13 mars 1973 relative à l’indemnité en cas de détention préventive inopérante. Le revenu d’intégration est récupéré après coup, sauf si la personne concernée obtient pareille indemnisation de l’Etat belge, tout cumul étant prohibé74. Les allocations aux personnes handicapées, les pensions et la garantie de revenus aux personnes âgées sont également reversées par la suite, peu importe si la personne concernée prétend simultanément à cette indemnisation étatique. Sur ce point également, les diverses indiscutablement de cohérence entre elles.
règles
de
suspension
manquent
40. Peut-on soutenir que ce n’est pas la condamnation, mais bien la détention qui légitime la suspension des prestations sociales, dès lors que le motif du législateur réside dans le fait que les intéressés ne doivent pas être pris en charge deux fois par le gouvernement ? Devrait-on alors en déduire que les règles de suspension ne sont nullement en tension avec la présomption d’innocence ? Faudrait-il également en tirer comme conséquence que l’intéressé ne peut revendiquer le paiement ultérieur de la prestation suspendue, sous peine de saper la logique de la règle suspensive puisqu’il est demeuré à charge du SPF Justice pendant sa détention préventive inopérante ? 72
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76
Seules les assurances pensions pour travailleurs salariés et indépendants reportent la suspension du paiement de la pension jusqu’à ce que la privation de liberté atteigne une certaine durée (un an). Et ici encore, il n’est pas exclu que la suspension se produise avant même que l’intéressé soit condamné. Pour les allocations qui ne sont pas suspendues, il n’est naturellement pas prévu de règles en cas de détention inopérante. Sur le manque de lisibilité de ce dispositif, voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 385-386.
La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons
A suivre ce raisonnement, le détenu ne devrait récupérer, sous la forme d’un dédommagement, que la différence entre sa prestation retenue et la prise en charge par le SPF Justice. Cette option n’offre toutefois pas pleine satisfaction : elle signifierait, indirectement, qu’on impose à la personne concernée de contribuer aux frais d’entretien et d’hébergement d’un séjour carcéral illégal. En cela, la restitution intégrale de la prestation sociale demeurerait préférable. En outre, le bénéficiaire obtient ainsi plus facilement le montant dont il fut privé à tort. En effet, ne devront être entreprises aucune analyse quant à l’étendue de ce montant, ni aucune procédure particulière. Nous ne pouvons pas non plus perdre de vue que la jouissance d’une prestation de sécurité sociale va de pair avec d’autres avantages qui ne sont pas liés à une indemnisation75, de sorte qu’un dédommagement alternatif ne rétablit pas entièrement le bénéficiaire, mis à tort en détention, dans la situation antérieure. La restitution intégrale de l’allocation assistancielle ne devrait toutefois être admise qu’en l’absence d’indemnisation étatique effective pour détention préventive inopérante. Les dommages et intérêts le cas échéant alloués sur cette base viendraient alors en déduction de la prestation sociale assistancielle, pour autant qu’ils ne compensent pas purement les dommages moraux de l’intéressé. 41. Une telle méthode serait en outre plus compatible avec la présomption d’innocence en matière pénale. Cette présomption serait d’ailleurs mieux respectée encore si la suspension même partielle d’une prestation de sécurité sociale ne prenait cours qu’au moment où le détenu est condamné, ce qui écarterait par ailleurs tout risque de détention préventive inopérante. La présomption d’innocence exige en effet d’éviter au maximum, à l’égard de détenus non condamnés, toute forme de dommages consécutifs à la détention sans être inéluctablement liés à la privation de liberté. La loi de principes prévoit ainsi que les inculpés doivent bénéficier de toutes les facilités compatibles avec l’ordre et la sécurité et dès lors de certaines adaptations du régime de l’exécution de la mesure privative de liberté, de telle sorte qu’ils n’aient aucunement l’impression que celle-ci présente un caractère punitif76. Nous pouvons néanmoins admettre que le report de la suspension pendant une période à déterminer, combiné avec la restitution de prestations retenues lors de la détention préventive inopérante, revient dans une large mesure au même résultat77. Si le législateur devait maintenir l’option de la suspension de l’allocation sociale, il améliorerait, en tout état de cause, par le report de cette démarche, le respect du principe de proportionnalité. Le législateur accorderait ainsi aux personnes concernées, qui ont peu de prise sur les événements en cas de détention, une période de transition, tout en évitant que la suspension comme mesure d’intérêt général n’impose une charge disproportionnée à des bénéficiaires individuels. En d’autres 75 76 77
Ainsi, le bénéficiaire conserve la qualité d’assuré social dans d’autres secteurs de la sécurité sociale. Art. 10-13, L. de principes. Cette combinaison est déjà en vigueur dans l’assurance pension pour salariés et indépendants.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
termes, même si le report de la suspension de l’allocation peut entraîner certaines incohérences (le détenu continuerait à percevoir son allocation pendant le début de son incarcération, et aurait donc un sort plus favorable que le citoyen libre), il présenterait toutefois un important avantage pratique supplémentaire : un report « institutionnalisé » diminuerait les mesures de « récupération de l’indû » par les organismes de sécurité sociale qui ignorent souvent pour un temps l’incarcération de l’allocataire. Un tel report respecterait aussi mieux le droit à la protection de la vie privée des détenus ; une attention particulière devra être réservée à cette dernière lors du développement d’un échange adéquat d’information entre les établissements pénitentiaires et les administrations communales, d’une part, entre le SPF Justice et le système de sécurité sociale, d’autre part78. b) Conséquence automatique de la peine 42. Sans l’analyser rigoureusement sous l’angle du principe non bis in idem79, il faut encore relever que le dispositif actuel de suspension de prestations sociales des détenus peut apparaître comme un mécanisme automatique accessoire à la sanction pénale sinon à la culpabilité80. Or, la Cour constitutionnelle a déjà jugé anticonstitutionnelles des interdictions professionnelles, accessoires d’une condamnation principale, en raison tant de leur automaticité que de l’impossibilité pour le condamné d’en discuter le bien fondé81. Même si la justification affichée de la règle suspensive réside plutôt dans la détention que dans la condamnation de l’allocataire, la question demeure de savoir si la suspension de l’allocation sociale ne devrait pas être considérée comme une conséquence automatique de la peine ou de la culpabilité, vu le manque fréquent de connexion entre les règles de suspension et le motif invoqué par le législateur à ce sujet.
C. CONTRIBUTION
DANS LES FRAIS D’ENTRETIEN ET D’HEBERGEMENT COMME ALTERNATIVE A LA SUSPENSION
43. Comme exposé précédemment, on peut questionner le choix politique du législateur de confier la protection sociale des détenus au SPF Justice et dès lors de suspendre entièrement ou partiellement le versement de nombreuses allocations sociales. La 78 79
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Sur cette problématique, voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 413-435. Rappelons, par analogie, que ce principe a été invoqué dans l’arrêt de la Cour constitutionnelle relatif à la limitation légale au droit de vote des détenus. Voy. Cour Const., arrêt n° 187/2005 du 14 décembre 2005. Pour une explicitation de la portée du principe non bis in idem, voy. notamment Cour Const., arrêt n°91/2008 du 18 juin 2008 ; Cour Const., arrêt n°67/2007 du 26 avril 2007. En ce sens, Ch. VANDERLINDEN, « Travail pénitentiaire et sécurité sociale du détenu », Rev. dr. pén. crim., 2003, p. 668. Voy. entre autres : Cour Const., arrêt n°57/98 du 27 mai 1998 ; Cour Const., arrêt n°87/98 du 15 juillet 1998 ; Cour Const., arrêt n°38/2000 du 29 mars 2000 ; Cour Const., arrêt n°40/2000 du 6 avril 2000 ; Cour Const., arrêt n°77/2000 du 27 juin 2000.
La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons
manière dont ce choix politique est ensuite mis en œuvre doit par ailleurs être sérieusement critiquée. Nous l’avons dénoncé à maintes reprises : les dispositions suspensives manquent de cohérence et, parfois, de légitimité. Elles souffrent en outre d’une piètre harmonisation avec les principes sur lesquels repose le statut juridique interne des détenus, les modalités d’exécution de la peine que fournit le statut juridique externe et certaines garanties pénales essentielles. Comme nous le développons ci-après, le prélèvement d’une contribution dans les frais d’entretien et d’hébergement pourrait tenir compte de ces points névralgiques. Le principe serait désormais le maintien intégral du paiement des allocations sociales au détenu, avec le tempérament suivant : une ponction à la source en vue de financer l’entretien au sens large (nourriture, toit, …) dans l’établissement pénitentiaire82. Il serait par ailleurs totalement injustifié que le détenu participe aux frais de fonctionnement de l’infrastructure, aux frais de personnel, aux corps de sécurité, … dès lors qu’en tant qu’administration publique, l’institution carcérale est financée par les deniers de l’Etat83. Il ne s’agit certes pas non plus de faire « payer au détenu » ce qui auparavant aurait été gratuit. En effet, la règle suspensive actuelle équivaut indirectement à une contribution, excessive et inégalement différenciée selon le statut social des détenus, aux frais engendrés par leur incarcération. D’autres préliminaires doivent impérativement être posés. Le prélèvement éventuel d’une contribution dans les frais d’entretien et d’hébergement doit s’inscrire dans une perspective large de respect de la Loi de principes qui impose des conditions de vie dignes et un minimum de surface habitable dans la prison, une alimentation et des soins de santé de qualité, une rémunération décente pour le travail pénitentiaire accompli,…84 On ne pourrait admettre qu’un détenu contribue à financer des conditions carcérales déplorables qui lui sont infligées. 82
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Selon les données budgétaires de la Direction générale des Établissements Pénitentiaires, la nourriture et l’entretien des détenus a coûté, en 2007, en moyenne 4,12 € par détenu par jour. Voy. Données budgétaires – Direction générale des Établissements Pénitentiaires DG EPI, rapport annuel 2007, p. 34. Selon l’O.I.P., les prisons disposent d’approximativement 3 € par détenu et par jour, somme qui n’a pas été indexée depuis 15 ans. Voy. Observatoire International des Prisons (Section belge), Notice 2008 – De l’état du système carcéral belge, Bruxelles, 15 octobre 2008, p. 92. Telle est la position de la Commission Dupont dans son Rapport final alors qu’elle débattait de la légitimité de prélever des sommes sur les revenus du détenu exécutant un travail pénitentiaire : « L’actuel article 66 du Règlement général des établissements pénitentiaires prévoit que l’État prélève en sa faveur 40 % des revenus du travail en prison à titre de frais de gestion. Etant donné que l’administration pénitentiaire, comme beaucoup d’autres institutions publiques, est financée par les moyens généraux, on peut difficilement trouver un argument justifiant le prélèvement d’une part du revenu des détenus en vue de financer spécifiquement les frais de fonctionnement de l’infrastructure pénitentiaire ». Voy. Rapport final, 2 février 2001, Doc. Parl., Ch., 2000-2001, n°1076/1, pp. 160-161. Voy. article 41 et suivants de la Loi de principes.
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En outre, nous n’envisageons le prélèvement qu’à la condition sine qua non que le détenu jouisse de ressources financières équitables, puisque ce dispositif supposerait, préalablement, que la privation de liberté ne conduise dorénavant plus à la suspension du versement des allocations sociales. En cela, notre proposition répond aux observations de la Commission Dupont amenée à se prononcer, en 2001, sur l’article 84 de l’avant-projet de la Loi de principes. Cette disposition – écartée dans la mouture finale de la loi – accordait au Roi la «possibilité» de déterminer qu’une partie des revenus du travail des condamnés soit prélevée en faveur de l’État à titre de contribution à leur séjour dans la prison. Selon les membres de la Commission toutefois, seuls les condamnés disposant d’un revenu normal ou de substitution auraient pu se voir imposer le paiement d’une quote-part de leurs propres frais d’entretien85/86. La Commission ajoutait par ailleurs souscrire à la position de G. De Jonge selon laquelle la présomption d’innocence s’opposait à ce que les inculpés y soient contraints également87. L’article 84 en projet n’a, au final, pas été retenu dans le texte définitif, faute de réunir les conditions à la légitimité d’un tel système88. 44. Substituer à la suspension des allocations sociales le maintien de celles-ci doublée d’une contribution, dans les limites circonscrites à l’instant, tiendrait compte, à notre estime, d’un nombre d’objections principielles opposées à la norme suspensive. Pareille contribution rendrait par ailleurs beaucoup plus cohérentes les règles énoncées en matière de protection sociale des détenus, et les réconcilieraient avec les garanties fondamentales de droit pénal. 45. La population a le droit d’attendre du législateur qu’il réfléchisse un choix posé précédemment. La problématique de la protection sociale des (ex-)détenus et de leur famille présente un grand intérêt pour la société dans son ensemble en ce qu’elle contribue incontestablement à améliorer les perspectives de réinsertion, le respect de la dignité de chacun et la prévention de la récidive. En effet, la doctrine démontre fréquemment qu’il n’y a aucune corrélation entre le taux d’incarcération et le taux de criminalité, ou en d’autres termes, que la prison s’avère très peu dissuasive ; en revanche, le taux d’incarcération et la précarité – voire même le taux de chômage
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Voy. Rapport final, 2 février 2001, Doc. Parl., Ch., 2000-2001, n°1076/1, pp. 160-161. Dans le même esprit, voy. G. DE JONGE, Strafwerk, Over de arbeidsverhouding tussen gedetineerden en Justitie, Breda, Papieren Tijger, 1994, pp. 162-164. G. DE JONGE, op.cit., p. 163. Pour une vision critique du système de prélèvement exprès de sommes sur les revenus du travail pénitentiaire à titre de contribution du détenu à ses frais d’entretien, voy. Ph. AUVERGNON et C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question : une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, p. 121. Ce système fut d’ailleurs abrogé en France par la loi n°2002-1138 du 9 septembre 2002. Dans sa contribution au présent recueil, Ph. AUVERGNON précise d’ailleurs que si en Italie, les détenus doivent, sur le produit de leur travail, participer à leurs frais d’hébergement, ceci n’est pas ou plus le cas en Allemagne, en Angleterre, en Espagne et en France.
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d’une population – présentent généralement un rapport étroit.89. Garantir la sécurité d’existence à un individu prémunit la société contre la tentation d’un de ses membres de rompre (à nouveau) le lien social. 1. L’option du prélèvement d’une contribution dans les coûts d’entretien et de séjour en meilleure conformité avec les droits sociaux fondamentaux des détenus 46. La suspension d’allocations sociales en cas de détention est confrontée à une critique fondamentale. En effet, le droit fondamental à l’assurance sociale et à l’assistance sociale est, entre autres sur la base de l’article 23 de la Constitution, garanti aux personnes privées de liberté. Il est rare que la détention empêche ou élimine le risque couvert par une assurance sociale ou de la situation de besoin combattue par un régime d’assistance sociale. La privation de liberté peut même parfois mener à ce que surgisse l’état de besoin lui-même. Aussi longtemps que cette situation perdure, le législateur doit donc prévoir l’octroi et le déboursement de la prestation de sécurité sociale concordante, même si l’ayant droit à pareille prestation est détenu90. La suspension intégrale des allocations sociales engendre en outre des inégalités, parce que le montant des allocations suspendues diverge fortement. Le montant des allocations assistancielles est d’autant plus élevé que les moyens de subsistance de l’allocataire sont faibles de telle façon que leur suspension intégrale frappe plus durement les plus nécessiteux. La suspension des allocations assurancielles désavantage d’autant plus les allocataires qu’ils ont presté pendant de nombreuses années un emploi, joui d’un revenu professionnel substantiel et, par conséquent, contribué plus amplement au financement des assurances sociales. La suspension est motivée par le fait que l’allocataire est déjà à la charge de l’autorité publique. Si ce motif peut justifier une correspondance entre l’ampleur de la prise en charge par le SPF Justice et celle de la suspension opérée, elle ne peut en revanche légitimer que les plus nécessiteux, ni même les plus « contribuants », soient touchés plus durement.
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G. RUSCHE et O. KIRCHHEIMER, Peine et structure sociale, trad. fr. Paris, éd. du Cerf, 1994. Voy. également : Ph. MARY, F. BATHOLEYNS et J. BEGHIN, « La prison en Belgique : de l’institution totale aux droits des détenus ? », Déviance et Société, 2006, vol. 30, n°3, pp. 389-404 ; G. CHANTRAINE, « Prison, désaffiliation, stigmates. L’engrenage carcéral de l’« inutile au monde » contemporain », Déviance et société, 2003 Vol. 27, n°4, pp. 363-387 ; G. CHANTRAINE, Par-delà les murs. Expériences et trajectoires en maison d’arrêt, 2004, Paris, PUF/Le Monde. Voy. également les conclusions des présents actes par S. SNACKEN. En guise d’illustration, mentionnons la suspension discriminante de l’allocation de chômage du détenu qui, au moment de son incarcération, était dispensé de l’impératif de disponibilité sur le marché de l’emploi.
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47. A l’appui de la suspension des allocations sociales est fréquemment invoqué l’argument selon lequel le maintien du versement avantagerait le détenu par rapport aux allocataires non détenus ne jouissant pas de l’intervention du SPF Justice, mais aussi vis-à-vis des détenus qui perdent leur revenu professionnel suite à leur détention. Dans les deux cas, la discrimination crainte est actuellement prévenue par une diminution considérable de la protection sociale des détenus : le paiement de la plupart des prestations sociales auparavant accordé est suspendu pendant la période de détention, et la règle suspensive empêche que les détenus désormais privés de leurs revenus professionnels puissent revendiquer l’octroi et le paiement de certaines allocations sociales. Le législateur peut pourtant tout aussi bien poursuivre l’égalité de traitement en ne suspendant pas les allocations sociales des détenus, mais en prélevant une contribution – déterminée éventuellement forfaitairement – pour les frais d’entretien et d’hébergement dans l’établissement pénitentiaire. Le législateur éviterait ainsi en premier lieu que les allocataires détenus soient avantagés vis-à-vis des non détenus. La conservation de l’intégralité de l’allocation sociale au bénéfice des détenus intra muros sans personne à charge placerait en effet ces derniers dans une situation plus favorable que le citoyen libre (étant donné que certains besoins du détenu sont pris en charge par le SPF Justice). Ce dispositif de « conservation intégrale » serait, à son tour, en conflit avec la Loi de principes, alors qu’il faut « conscientiser » le détenu quant au nécessaire maintien de la viabilité du système de la protection sociale91. Le prélèvement d’une contribution dans les frais d’entretien et d’hébergement admet en outre que les détenus qui perdent leurs revenus de travail suite à leur privation de liberté puissent, à partir et tout au long de celle-ci, revendiquer certaines allocations sociales que le législateur leur refuse aujourd’hui. Mieux qu’une suspension « aveugle », le prélèvement d’une contribution « effective » sur l’allocation du détenu permet d’éviter des charges disproportionnées que le législateur, pour des raisons budgétaires, fait actuellement peser sur les justiciables individuels. 48. Une contribution des détenus à leurs frais d’entretien et d’hébergement est moins illusoire qu’on l’imagine peut-être. Sur le plan des faits, nous citerons deux illustrations actuelles de ce phénomène, non exemptes de critiques toutefois. Ainsi, avant l’abolition de ce système aux alentours de 2005-2006, les détenus en détention limitée supportaient une partie de ce coût à certaines conditions92. Par ailleurs, la faiblesse de la rémunération du travail 91
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Ce dernier propos – celui de la conscientisation – ne vaut que si le détenu demeure intégré, grâce à une protection sociale de qualité, dans un tissu social aux mailles étroites. Voy. Circ. min. du 9 février 1973 ((1172/I) relative à la « Retenue pour frais d’entretien sur le salaire des détenus admis au régime de « semi-liberté » ou de « semi-détention ».
La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons
pénitentiaire est parfois directement légitimée – à tort selon nous – par l’argument selon lequel le « manque à gagner » constituerait la contrepartie à l’hébergement dans la prison93. Sur le plan du droit, il faut rappeler en outre que la législation belge connaît déjà, en d’autres domaines que la prison, des cas de figure dans lesquels une contribution – forfaitaire ou tributaire de certains paramètres – au financement d’un autre système de protection sociale couvrant des personnes ayant droit à des prestations de sécurité sociale, est mise à charge de ces dernières. Ainsi en est-il du paiement d’une partie – deux tiers – des allocations familiales à une institution dans laquelle un enfant est placé par l’intermédiaire ou à charge d’une autorité publique94 et de la possibilité offerte aux centres publics d’action sociale de réclamer aux bénéficiaires une contribution aux frais des services sociaux95. La même règle vaut pour la suspension partielle – 28 % – de l’allocation d’intégration de la personne handicapée qui séjourne dans une institution totalement ou partiellement à charge des pouvoirs publics ou de la sécurité sociale96. La comparaison de l’objectif, de la nature et de l’étendue de l’intervention de ces mécanismes, avec l’objectif, la nature et l’étendue de la prise en charge par le SPF Justice peut contribuer à une meilleure compréhension de la forme que devrait, le cas échéant, revêtir la quote-part des allocataires détenus dans les frais d’entretien et de séjour.
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Il ressortait toutefois de cette circulaire que les détenus en « semi-liberté » ne devaient contribuer aux frais de détention que s’ils percevaient un salaire. Dans les faits, le montant journalier à payer par le détenu différait d’une prison à l’autre : il avoisinait les 2,5 euros. De la même façon, la rémunération payée par l’employeur à l’interné en semi-liberté est remise au directeur de l’établissement qui conserve 30% pour la participation dans les frais d’entretien de l’interné. Voy. Directives Et/XVIII du 7 mars 1966 concernant le régime de semi-liberté – Loi de défense sociale du 1er juillet 1964, Administration des Etablissements pénitentiaires et de Défense sociale. Les directives ajoutent que 20 % de la rémunération constituent la quotité disponible destinée notamment aux achats de cantine, frais de route, aide à la famille. Quant aux 50% restants, ils forment la quotité réservée, utilisée par le Directeur pour l’achat de vêtements ou d’outils de travail de l’interné, ainsi que pour une aide à la famille de ce dernier. Voy. Ph. AUVERGNON et C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question : une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, p. 121. Si on devait suivre ce raisonnement, on aboutirait à la conclusion selon laquelle certains détenus supportent deux fois le coût de leur détention. Ainsi en irait-il de l’allocataire réalisant un travail pénitentiaire : il contribuerait dès lors aux frais d’entretien et d’hébergement aussi bien par la suspension de sa prestation sociale, que par l’insuffisance de sa rémunération. Art. 70, L.C. du 19 décembre 1939 relatives aux allocations familiales pour travailleurs salariés. Art. 98, L. du 8 juillet 1976 organique des centres publics d’action sociale. Art. 12 § 1er, L. du 27 février 1987 relative aux allocations aux personnes handicapées.
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2. Cohérence avec la législation sociale 49. La prise en charge du détenu par le SPF Justice conduit naturellement à ce qu’il soit déjà considéré, dans une certaine proportion, à la charge de l’autorité publique. Les objectifs singuliers gouvernant les divers secteurs de sécurité sociale et les dispositions anti-cumul que comprennent leurs réglementations97 ne peuvent pourtant valablement fonder les nombreuses différences repérées entre les règles de suspension. En revanche, un lien cohérent existerait, à notre estime, entre la prise en charge des détenus par le SPF Justice et le prélèvement d’une contribution dans les frais d’entretien et d’hébergement dans l’établissement pénitentiaire. Substituer aux règles de suspension actuelles un tel dispositif de prélèvement rétablirait en outre la cohérence de la législation en matière de sécurité sociale, ce dernier étant compatible avec les caractéristiques et la logique de financement des allocations tant assurancielles qu’assistancielles. Les deux types d’allocations connaissent des dispositions anti-cumul qui empêchent qu’un même besoin soit rencontré plus d’une fois ; en outre, comme exposé à l’instant, notre législation sociale connaît d’autres hypothèses pour lesquelles une contribution sur une allocation assistancielle ou assurancielle d’un bénéficiaire est prélevée en ce qu’ils jouissent de l’intervention d’un autre système de protection sociale. Pour autant que la prise en charge par le SPF Justice contribue à l’hébergement et à l’entretien du détenu allocataire, cette intervention justifie une participation du détenu dans ces frais, par un prélèvement sur toute prestation de sécurité sociale qui remplace le revenu de travail manquant ou qui lui octroie, pour la même raison, un revenu minimum. Cette prise en charge par le SPF Justice ne peut en revanche fonder aucun prélèvement sur les prestations de sécurité sociale qui complètent les revenus du travail, les revenus de remplacements, ou le revenu minimum en vue de faire face à des dépenses particulières, relatives par exemple aux soins de santé, à la perte d’autonomie (telle l’allocation d’intégration pour les personnes handicapées) ou à l’éducation des enfants. Pour autant que le détenu allocataire soit confronté à ces dépenses particulières et qu’aucun autre mécanisme de protection ne les prenne en charge d’une manière équivalente, ni la suspension de la prestation de sécurité sociale, ni le prélèvement sur ces sommes d’une contribution dans les frais d’entretien et de séjour ne seront ici justifiés. 50. Une contribution dans les frais d’entretien et du séjour dans la prison serait cohérente avec le motif invoqué à l’appui de celle-ci. Elle peut d’ailleurs être 97
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Ainsi, on peut accepter que l’assurance soins de santé n’accorde pas de prestations au détenu, pour autant que le SPF Justice prenne déjà en charge ses frais médicaux. Dans le même sens, nous pouvons admettre que l’intervention du SPF Justice soit considérée comme un moyen d’existence à déduire de la prestation assistancielle due.
La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons
prélevée de façon transparente et cohérente via une ponction sur chaque allocation assurancielle ou assistancielle qui prend la forme d’un revenu minimum ou d’un revenu de remplacement, en excluant celles qui ont vocation à couvrir certaines dépenses particulières. En d’autres termes, la nature de l’allocation sociale déterminerait si la contribution est due ou non98. 3. Une meilleure harmonisation avec les garanties pénales 51. Comme il fut exposé plus haut, les règles de suspension actuelles sont insuffisamment adaptées aux nouvelles modalités d’exécution des peines recensées dans le statut juridique externe des détenus. Elles entretiennent en outre des rapports tendus avec la présomption d’innocence et les principes de base sur lesquels repose le statut interne des détenus. 52. En ce qui concerne le statut externe des détenus, le législateur – s’il continue à opter pour la suspension de l’allocation sociale – doit préciser s’il souhaite maintenir la suspension vis-à-vis des détenus extra muros, et prendre à cet effet comme point de départ le séjour effectif dans la prison plutôt que l’inscription au rôle d’un établissement pénitentiaire. On pourrait attendre du législateur une attention équivalente à celle qu’il réserverait aux détenus intra muros en leur imposant de contribuer, par un prélèvement sur leur allocation maintenue, aux frais de séjour et d’entretien dans la prison. Pareille contribution peut en effet être adaptée à la modalité d’exécution de la peine accordée. En résulterait non seulement une plus grande égalité de traitement entre allocataires détenus ou non, mais aussi parmi les détenus eux-mêmes, quelle que soit la modalité d’exécution de la peine qui leur est imposée. 53. Les règles suspensives en vigueur ne concordent pas avec les principes fondamentaux sur lesquels réside le statut interne des détenus. La suspension des allocations sociales touche en effet les détenus qui – hors la condition de détention – satisfont pleinement aux conditions actuelles pour l’octroi et le versement de ces prestations. Les règles suspensives sont justifiées par l’intervention du SPF Justice alors que celle-ci n’atteint pas fréquemment le niveau de l’allocation suspendue. Aussi longtemps que le législateur ne peut rehausser l’intervention du SPF Justice au niveau de protection offerte par l’allocation sociale suspendue, il s’expose au reproche selon lequel la privation de liberté s’accompagne d’une peine complémentaire ou, à tout le moins, de dommages évitables de la détention, sous forme d’une perte de protection sociale. L’option du prélèvement d’une contribution dans les frais d’entretien et d’hébergement dans la prison permettrait au législateur 98
Pour autant que les indemnités pour incapacité/invalidité soient augmentées pour cause de perte complémentaire d’autonomie de l’indemnitaire, la contribution ne pourrait être prélevée que sur le montant de base de l’indemnité et non sur sa majoration consécutive au besoin de l’aide d’un tiers.
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de réfuter les précédentes critiques, pour autant que le montant de la contribution corresponde valablement à l’« avantage » tiré de la prise en charge par le SPF Justice. Les règles suspensives sont d’autant plus contestables qu’elles touchent, nous l’avons dit, non seulement le détenu mais aussi ses proches. En réalité, elles tiennent compte de façon très divergente de la charge de famille de l’allocataire social, et cette diversité reflète indubitablement celle avec laquelle les allocations sociales sont adaptées à la situation familiale de l’allocataire. Aussi longtemps que la modalisation du ménage n’est pas harmonisée au sein des différents secteurs de sécurité sociale, la question se posera de savoir si les règles suspensives peuvent intégrer la modélisation du ménage en vigueur pour l’allocation concernée, dès lors qu’elles doivent en même temps s’accorder avec le statut interne des détenus et afficher plus de cohérence mutuelle. Le prélèvement d’une participation personnelle aux frais d’entretien et d’hébergement aurait, en tout état de cause, pour avantage que la répercussion sur la prestation de sécurité sociale demeure la même, peu importe que soit détenu l’allocataire ou la personne à sa charge. Une telle contribution ne dénierait pas, contrairement à la suspension, les droits à la sécurité sociale des familles des détenus et serait dès lors bien plus conforme au statut interne de ces derniers. 54. Les règles suspensives entrent en tension avec la présomption d’innocence pour autant qu’elles provoquent un déficit de protection sociale pour le détenu ou sa famille. La détention cause ainsi des dommages collatéraux, avant même que l’intéressé soit condamné. En outre, le législateur ne prévoit pas systématiquement le paiement de la prestation sociale suspendue lorsqu’il apparaît a posteriori que l’allocataire a subi une détention préventive inopérante. De ce point de vue aussi, une contribution correctement calculée dans les frais d’entretien et d’hébergement ne rencontre pas les mêmes objections que la suspension de l’allocation sociale. En effet, cette contribution compenserait seulement le « bénéfice » dont jouit le détenu par sa prise en charge dans la prison et que l’allocataire non détenu ne peut par nature revendiquer. L’exécution immédiate du prélèvement concorderait avec le motif qui le sous-tend. Au cas où le prélèvement devait prendre la forme d’une retenue/cotisation sur l’allocation, le législateur pourrait toutefois, pour des raisons pratiques, le reporter jusqu’à ce que la détention atteigne une certaine durée. On éviterait ainsi, pour un temps, les tracasseries administratives en empêchant que la partie de l’allocation sociale qui aurait dû faire l’objet d’une retenue dès le début de son incarcération soit payée indûment au détenu, et doive dès lors être réclamée a posteriori.
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III. TRAVAIL PENITENTIAIRE99 55. Le travail pénitentiaire, réalisé au bénéfice de la prison100 ou d’entreprises privées, est organisé par l’autorité publique101 et exécuté par les détenus. Les personnes qui subissent des travaux d’intérêt général, n’effectuent aucun travail pénitentiaire, vu qu’ils ne peuvent être considérés comme détenus. Le travail effectué dans la société libre par des personnes qui bénéficient de modalités d’exécution de la peine extra muros n’est pas non plus qualifié de travail pénitentiaire102. 56. Alors que la Loi de principes consacre, en quelque sorte, un « droit au travail » au bénéfice des détenus103, on déplore constamment le problème récurrent de carence de postes disponibles en prison, mais aussi la faiblesse de sa qualité dès lors qu’il est généralement peu valorisant, sous-rémunéré et pas qualifiant104. Nous nous limitons toutefois ici à examiner d’abord si le travail pénitentiaire ouvre droit à des allocations sociales (A.) et ensuite s’il peut, le cas échéant, faire obstacle à l’attribution et au versement d’allocations préalablement perçues (B.).
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Sur cette question, voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op. cit., pp. 91115. Concrètement, un grand nombre de tâches incombant à l’institution sont exécutées par les détenus : ils cuisinent et distribuent les repas, nettoient les espaces non privatifs, assument la fonction de garde-malade auprès des détenus souffrants, réparent les éviers, classent les radiographies du Centre Médicochirurgical, contrôlent les préaux, fabriquent les uniformes et les meubles des prisons, … Voy. F. DUFAUX, Du travail forcé à la faveur du labeur : Sens et fonctions du travail carcéral aujourd’hui, ULB, Faculté de Droit/ Ecole de Sciences Criminologiques Léon CORNIL, Mémoire sous la direction de Ph. MARY, 2008, p. 78. Ne prestent donc pas de travail pénitentiaire les détenus autorisés à accomplir en prison un travail autre que celui « offert » par l’établissement pénitentiaire. K. NEVENS, « Penitentiair arbeidsrecht. Dringt het arbeidsrecht de gevangenis binnen », T.S.R. 2007, pp. 231-302. Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op. cit., pp. 91-115. Voy. en ce sens : Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants du Conseil de l’Europe (CPT), Rapport au Gouvernement de la Belgique relatif à la visite effectuée en Belgique, Conseil de l’Europe, Strasbourg, 2006. http://www.cpt.coe.int/fr/etats/bel.htm. Le CPT a recommandé aux autorités belges de s’efforcer à augmenter l’offre de travail au sein de l’établissement d’Andenne qui avait fait l’objet d’une visite officielle. Dans sa réponse au CPT, le Gouvernement indiquait qu’« une personne de référence vient d’être désignée à l’administration pénitentiaire pour le démarchage d’entreprises qui pourraient offrir du travail au sein des établissements pénitentiaires. Elle aura également une mission d’information auprès des entreprises. » (p.41). Une délégation du CPT a effectué une cinquième visite en Belgique du 28 septembre au 7 octobre 2009. Il s’agissait notamment de vérifier la mise en œuvre de ses rapports précédents. Le compte-rendu de sa cinquième visite n’est, au 1er janvier 2010, pas encore disponible.
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A. TRAVAIL PENITENTIAIRE COMME SOURCE DE DROITS A LA SECURITE SOCIALE
57. Avant l’abrogation de l’article 30ter du Code pénal105, il était pratiquement unanimement admis que le caractère obligatoire du travail pénitentiaire excluait la conclusion d’un contrat de travail entre le détenu concerné et l’Etat belge106. La Commission Dupont précisa que cette abrogation visait à ce que le travail dans les prisons puisse désormais faire l’objet d’un contrat de travail, la finalité poursuivie par le législateur étant l’inclusion des détenus dans le régime de sécurité sociale des travailleurs salariés107. Aujourd’hui, certains auteurs estiment, en toute logique, qu’il n’y a plus d’obstacle à considérer le travail pénitentiaire comme réalisé en exécution d’un contrat. D’autres contestent, arguant du fait que l’existence d’un contrat de travail n’était auparavant pas non plus reconnue à l’égard de certaines catégories de prisonniers qui ne pouvaient pourtant pas être contraints au travail sous l’article 30ter du Code pénal. D’autres encore doutent que la faible rémunération du travail pénitentiaire puisse être considérée comme salaire au sens de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail, et sont pour cette raison extrêmement sceptiques quant à la possibilité de qualifier de contrat de travail, la relation professionnelle entre les détenus et l’Etat belge108. La jurisprudence récente n’incite probablement pas à penser que l’existence d’un contrat de travail entre les détenus et l’Etat belge sera reconnue sans coup férir, quoiqu’on ne dispose aujourd’hui d’aucune décision judiciaire relative à une relation
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Abrogé par l’article 169, 5° de la Loi de principes, entré en vigueur à la suite de l’arrêté royal du 28 décembre 2006 concernant l’administration pénitentiaire ainsi que le statut juridique des détenus. Trib. Trav. Hoeilaert, 21 septembre 2005, R.G. n° 58.430, inédit ; Trib. Trav. Bruxelles 29 juin 2007, R.G. n°35788/02, inédit ; Trib. Trav. Bruxelles, 18 octobre 2007, réf. 63/06, inédit. Rapport final de la Commission « Loi de principes concernant l’administration pénitentiaire et le statut juridique des détenus », Doc. parl., Ch. repr. 2000-2001, n° 1076/1, pp. 149, 154 et 159 ; Rapport fait au nom de la Commission de la justice au sujet de la proposition de Loi de principes concernant l’administration pénitentiaire et le statut juridique des détenus, Doc. parl., Ch. repr., S.E. 2003, n° 231/015, p. 112. Il est intéressant de mentionner ici la décision de recevabilité rendue par la Cour européenne des droits de l’Homme dans une affaire interrogeant la nature du travail pénitentiaire : Cour eur. D.H., 11 octobre 2007, Stummer c. Autriche, req. n°37.452/02. En l’espèce, le gouvernement autrichien estime que le travail pénitentiaire ne peut être assimilé à un travail accompli en vertu d’un contrat de travail, dès lors notamment que la gratification versée n’a pas pour objectif de subvenir aux besoins du travailleur détenu et que l’activité est généralement occupationnelle. L’arrêt de la Cour n’est, au 15 janvier 2010, pas encore rendu.
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professionnelle engendrant une situation litigieuse postérieurement à l’abrogation de l’article 30ter du Code pénal109. La Loi du 12 janvier 2005 consacre le principe de « protection juridique » et de « normalisation », en disposant que la mise au travail des prisonniers s’opère, dans la mesure du possible, dans les mêmes circonstances que dans le monde extérieur110. Il est à prévoir que la Loi de principes ait pour effet que des détenus s’adresseront de plus en plus fréquemment au juge dans l’espoir d’entendre dire pour droit qu’ils possèdent la qualité de travailleurs salariés. 58. Dans ces conditions, il est vivement recommandé au législateur d’aider à l’élimination de cette insécurité juridique. Il doit réfléchir à l’opportunité de considérer le travail pénitentiaire comme un travail effectué en exécution d’un contrat de travail, ou assimilable à celui-ci. La question de savoir si la législation relative aux contrats de travail dans son ensemble doit être étendue aux détenus excède le cadre de nos actuelles considérations. Des recherches antérieures ont pu constater que la législation sociale s’applique déjà en grande partie au travail pénitentiaire, même si la relation juridique entre le détenu concerné et l’Etat belge n’a pas été qualifiée de contrat de travail111. L’octroi de droits à la sécurité sociale aux détenus exécutant un travail pénitentiaire n’est d’ailleurs pas conditionné par cette qualification. Dans l’état actuel de la législation, l’application du système de sécurité sociale pour les salariés peut en effet, pour autant que ce soit souhaitable112, être élargie par arrêté royal aux détenus travailleurs. Le Roi peut du reste limiter cet élargissement à certains secteurs de la sécurité sociale, et le lier à d’autres conditions que celles qui régissent les salariés non détenus. Le choix opéré par le législateur en la matière doit concorder avec son point de vue sur la responsabilité du système de la sécurité sociale à l’égard des détenus. Au fur et à mesure que leur protection sociale est organisée via un autre mécanisme de protection, diminue la légitimité du choix éventuel de faire contribuer les détenus effectuant un travail pénitentiaire et leurs mandants au financement d’un système d’assurance sociale dont les prestations sont, dans la majorité des cas, suspendues en cas de détention113. 109
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L’arrêt le plus récent à notre connaissance est : C. trav. Bruxelles, 27 août 2007, n°R.G. 47.364, inédit. Voy. à ce sujet, V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 109-110. Art. 6 et 83, L. de principes. K. NEVENS, « Penitentiair arbeidsrecht. Dringt het arbeidsrecht de gevangenis binnen », T.S.R. 2007, pp. 231-302. L’article 26.17 de la Recommandation Rec(2006) du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe aux Etats membres sur les Règles pénitentiaires européennes qui stipule que « les détenus exerçant un travail doivent, dans la mesure du possible, être affiliés au régime national de sécurité sociale ». Pour autant que la conservation de la qualité d’attributaire dans les assurancesallocations familiales pousse le législateur à appliquer la loi du 27 juin 1969 revisant
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59. L’existence d’un contrat de travail entre les détenus et l’Etat belge n’est pas encore explicitement reconnue. Ni le système de sécurité sociale des salariés, ni la législation en matière d’accidents du travail n’ont jusqu’à présent été adaptés aux détenus exécutant un travail pénitentiaire. Les intéressés victimes ne jouissent par conséquent pas de compensations légales d’accident de travail. Une réglementation de réparation administrative a certes été développée en la matière, mais les indemnités accordées n’atteignent en aucun cas le niveau des compensations légales d’accident du travail114. Le législateur doit dès lors évaluer s’il veut accroître les avantages du régime actuel de réparation administrative, ou s’il veut rendre la législation en matière d’accidents du travail applicable aux accidents survenus lors du travail pénitentiaire ou sur le chemin du travail pénitentiaire. Les détenus doivent, en tout état de cause, pouvoir compter sur une même réparation des accidents au travail que dans le monde extérieur peu importe qu’ils ressortent, pour le reste, du système de sécurité sociale des salariés115. L’article 86, § 3, de la Loi de principes semble indiquer que le législateur juge préférable de maintenir en état le régime particulier de réparation administrative. Sans indiquer de quelle manière cette dernière devrait être revalorisée, il appelle à l’adoption d’un arrêté royal en la matière qui n’a, au 15 janvier 2010, pas encore été adopté.
B. TRAVAIL PENITENTIAIRE COMME OBSTACLE AUX DROITS A LA SECURITE SOCIALE 60. Parallèlement à la question de savoir si le travail pénitentiaire peut constituer une source de droits à des prestations de sécurité sociale, on s’interroge sur l’obstacle qu’il peut constituer pour l’octroi ou le paiement de prestations sociales116.
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l’arrêté-loi du 28 décembre 1944 concernant la sécurité sociale des travailleurs (« loi O.N.S.S. ») au travail pénitentiaire, cette application peut éventuellement être limitée par arrêté royal au secteur concerné de la sécurité sociale. Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 185-195. L’article 26.14 de la Recommandation Rec(2006) du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe aux Etats membres sur les Règles pénitentiaires européennes prévoit que « des dispositions doivent être prises pour indemniser les détenus victimes d’accidents du travail et de maladies professionnelles dans des conditions non moins favorables que celles prévues par le droit interne pour les travailleurs hors de prison ». A titre comparatif, voy. Voy. Ph. AUVERGNON et C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question : une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, p. 105. Cette question demeure en grande partie hypothétique parce que, dans l’état actuel de la législation, la plupart des prestations sociales sont suspendues en cas de détention.
La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons
61. Dans le cadre des régimes d’assistance sociale, les dispositions légales normalement applicables devraient conduire à ce que les revenus du travail pénitentiaire soient en principe117 pris en considération comme une forme des moyens de subsistance qui doit être imputée sur le montant de la prestation sociale. Comme il le fait à l’égard d’autres revenus du travail, le législateur devrait toutefois veiller à ce que les revenus du travail pénitentiaire ne soient pas intégralement déduits des prestations assistancielles, afin d’éviter un piège à l’emploi118. 62. Quant aux assurances sociales, les pensions, les allocations de chômage et les indemnités d’incapacité de travail sont suspendues en cas de détention. Pour autant que la détention n’exclurait dorénavant plus le paiement des allocations de chômage119, se pose la question de savoir si le travail pénitentiaire doit être considéré comme une forme de travail pour un tiers, pour lequel le travailleur reçoit un quelconque salaire ou avantage matériel qui peut contribuer à sa subsistance ou à celle de son ménage. Dans ce cas en effet, le détenu effectuant le travail pénitentiaire ne remplirait pas les conditions pour l’octroi des allocations de chômage120. Vu le montant actuel de la gratification du travail pénitentiaire, une réponse affirmative serait toutefois assez irrationnelle. Pour autant que de besoin, le Roi peut déterminer que la rémunération du travail pénitentiaire n’est pas considérée comme un salaire ou un avantage matériel au sens de la législation sur le chômage121. Les pensions de retraite et de survie ne sont payées à l’ayant droit que pour autant qu’il cesse tout travail non autorisé. En cas de détention, les pensions ne sont suspendues qu’à l’expiration d’un certain délai. La question préliminaire consiste dès lors à savoir si le travail pénitentiaire constitue une activité professionnelle admise : on observe qu’en pratique, il n’est pas considéré comme une forme de travail qui constituerait un obstacle au paiement de la pension122. Tenant compte du caractère modeste de la rémunération du travail pénitentiaire et du défaut de droits à la sécurité sociale ouverts par celui-ci, il est recommandé, dans 117
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Une exception à cette règle : dès lors que les revenus du travail pénitentiaire ne sont pas soumis à l’impôt, ils ne conduisent pas à une diminution des allocations aux personnes handicapées. Voy. art. 27, A.R. du 23 mai 2001 portant règlement général en matière de garantie de revenus aux personnes âgées ; art. 9bis A.R. du 6 juillet 1987 relatif à l’allocation de remplacement de revenus et à l’allocation d’intégration. Les allocations de chômage sont refusées au motif que les détenus ne sont pas disponibles pour le marché général du travail. Il est exposé ci-dessus que cette règle ne devrait pas s’appliquer à l’égard des détenus dispensés de cette exigence, ni eu égard aux membres de leur famille. Art. 44-45, A. R. du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage. Le Roi a déjà agi de la sorte pour d’autres types de compensations (voy. art. 46, A. R. du 25 novembre 1991 portant réglementation du chômage). Voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 345-346.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
l’état actuel des choses, de faire abstraction du travail pénitentiaire quant à la question de savoir si le détenu accomplit déjà, oui ou non, un travail autorisé. Les indemnités d’incapacité de travail ne sont pas suspendues, ou en partie seulement. Si le détenu accomplit un travail pénitentiaire, il faudra déterminer au cas par cas s’il est encore en état d’incapacité de travail. L’assurance indemnité pour travailleurs salariés, principalement, exige que le bénéficiaire cesse toute activité. Le volontariat est toléré dans une certaine mesure mais, dans la plupart des cas, le travail pénitentiaire ne peut être qualifié comme tel. En revanche, le législateur pourrait établir, par analogie, que le travail pénitentiaire ne doit pas être considéré comme une activité incompatible avec l’état d’incapacité, pour autant que le médecin conseil constate que le travail effectué ne contrevient pas à l’état de santé général du détenu123.
IV. CONCLUSION 63. On constate aujourd’hui une exclusion significative des détenus du système de sécurité sociale belge, non pleinement compensée par la protection sociale garantie dans les établissements pénitentiaires. La Loi de principes, énonçant notamment des principes fondamentaux qui doivent régir la philosophie de la peine et la pratique pénitentiaire, laissait pourtant présager quelque changement en ce domaine. Il est grand le mystère de la loi. 64. Nous l’avons exposé : le législateur belge a déchargé, en grande partie, le système de sécurité sociale des obligations qui pèsent ordinairement sur lui, se fondant sur le fait que les détenus seraient déjà à charge d’un mécanisme alternatif de protection sociale, le SPF Justice en l’espèce. Notre étude a épinglé le manque de connaissance des réglementations existantes, la difficulté de les appliquer124 ainsi que des lacunes
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Art. 100, L.C. du 14 juillet 1994. Les transferts répétés d’un détenu d’une prison à l’autre ne sont, par exemple, pas communiqués à tous. Cette carence engendre des difficultés pratiques lorsque la localisation de la personne est nécessaire pour l’ouverture d’un droit. Un second exemple concerne le détenu sous bracelet électronique. Il ne fait aucun doute qu’il est soutenu financièrement par le SPF Justice, à travers la perception d’une allocation spéciale, lorsqu’il ne perçoit pas à nouveau ses allocations de chômage, ses allocations pour personnes handicapées ou d’autres prestations. Mais la question du droit à une éventuelle intervention subsidiaire des CPAS, en termes d’aide sociale destinée à compléter l’allocation spéciale du SPF Justice, demeure en revanche non résolue. La problématique de fond à trancher est de nature politique : est-ce au SPF Justice exclusivement, ou aux CPAS locaux également, à prendre en charge l’aide aux personnes qui exécutent une peine extra muros ? Des débats similaires entourent l’octroi ou non d’une aide sociale du CPAS, subsidiaire et complémentaire, aux détenus intra muros.
La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons
au sein des dispositions en vigueur125 : l’ensemble nous autorise à formuler un certain nombre de recommandations au législateur126. 65. Le législateur formel doit poser ce choix lui-même et non, comme dans le passé, l’abandonner largement au pouvoir exécutif. Il lui appartient de déterminer les règles qui gouvernent l’intervention du SPF Justice ainsi que les modalités d’exécution de celles-ci dans des arrêtés convenablement diffusés avec un fondement légal. Le législateur suspend, avec des dispositions spécifiques très divergentes pour chaque secteur de sécurité sociale, le paiement des prestations de sécurité sociale accordées avant la détention. Regrouper ces dispositions dans une loi unique pourrait en favoriser l’accessibilité, constituer pour le législateur une bonne occasion pour en interroger le manque actuel de légitimité et de cohérence, ainsi qu’en améliorer l’harmonisation avec le statut interne et externe des détenus et les garanties pénales dont ils jouissent. 66. Ainsi le législateur devrait également accorder plus d’attention aux délimitations de groupes de détenus à qui il rend applicables les dispositions suspensives, compte tenu des développements sur le terrain du statut juridique externe. Le législateur devrait prendre à cet effet comme point de départ le séjour effectif dans la prison plutôt que l’inscription au rôle d’un établissement pénitentiaire et traiter les détenus en détention limitée de la même manière que ceux qui sont placés sous surveillance électronique. A notre estime, le législateur ne peut suspendre le paiement des prestations de sécurité sociale que dans la mesure où l’intervention du SPF Justice atteint le même niveau et satisfait le besoin à la protection sociale de façon équivalente à celle qu’offre la prestation de sécurité sociale suspendue127. Si le législateur maintient la suspension des allocations sociales, il doit, dans la plupart des cas, soit rehausser la prise en charge du SPF Justice, soit admettre l’intervention des institutions concernées de sécurité sociale à concurrence de la différence ; il importe également 125 126
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Pour un résumé de celles-ci, voy. V. VAN DER PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN, op cit., pp. 477-478. Aux côtés des nécessaires réformes législatives qui doivent être entamées, d’autres mécanismes peuvent encore être mis en place pour faire de la protection sociale des (ex-)détenus et de leur famille une haute priorité sociétale et répondre aux problèmes esquissés plus haut. Un programme de formation continue pourrait être organisé pour les travailleurs sociaux des prisons, soit au niveau de chaque établissement pénitentiaire, soit au niveau de l’administration pénitentiaire elle-même. Ce sont surtout les détenus jouissant de certaines modalités d’exécution de la peine et ceux avec personnes à charge qui perdent, de par la suspension, une part importante de la protection sociale. Ainsi la suspension des allocations de chômage d’un détenu cause préjudice à sa famille s’il bénéficiait auparavant du taux « chef de ménage » ou si le paiement de cette allocation lui permettait de faire face à son obligation alimentaire en faveur de son (ses) enfant(s).
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de clarifier la délimitation des missions réciproques des deux systèmes de protection sociale en tenant compte de la question légitime de leurs moyens. Le législateur devrait suspendre les prestations de sécurité sociale toujours au même moment et prévoir une réglementation uniforme lorsqu’il apparaît a posteriori que le détenu a fait l’objet d’une détention inopérante. De même, nous avons précédemment recommandé de ne mettre en œuvre la suspension qu’après la condamnation de l’ayant droit ou, en tout état de cause, de la postposer par rapport au premier jour de privation de liberté. 67. Dans l’état actuel de notre recherche, nous recommandons cependant au législateur de réfléchir à la question de savoir si le prélèvement d’une contribution dans les frais d’entretien et d’hébergement ne serait pas préférable à la suspension entière, aujourd’hui répandue, des allocations sociales des détenus. Bien plus que la suspension des prestations de sécurité sociale, le prélèvement d’une telle contribution sur les allocations maintenues nous semble également restaurer l’égalité entre les détenus allocataires et ceux qui ont perdu leurs revenus professionnels. La suppression des règles de suspension aurait en outre pour conséquence que les détenus pourront mobiliser leurs prestations de sécurité sociale pour faire face aux besoins émergeant suite à leur détention. Le prélèvement d’une contribution tient par conséquent mieux compte des droits sociaux fondamentaux des détenus que la règle suspensive : ce dispositif n’empêche pas la mise en œuvre de la réintégration et de la réhabilitation des détenus, ni la réparation des dommages causés aux victimes, comme prévu par La loi de principe. Pareille contribution ne peut être qualifiée de sanction additionnelle automatique ou de forme de dommages évitables de la détention et préserve le législateur de la mission difficile consistant à faire concorder entre eux les responsabilités et les moyens de certains secteurs de sécurité sociale et du SPF Justice. Un prélèvement à la source d’une telle contribution sur toute prestation sociale destinée à remplacer le revenu professionnel perdu du détenu ou à lui procurer un revenu minimum serait, vraisemblablement, une mesure cohérente. Ce mécanisme pourrait aussi être étendu à d’autres revenus éventuels – à condition qu’ils soient d’un montant suffisant128 – afin de contribuer à l’égalité entre l’ensemble des détenus, qu’ils soient ou non allocataires. Si ce mécanisme de contribution est sensé améliorer substantiellement le statut social des détenus, il ne faut toutefois pas négliger le fait qu’elle constituerait un recul pour ceux qui, en vertu de la législation actuelle, ne sont nullement privés de leur allocation sociale (les titulaires d’une indemnité à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, par exemple) et sur laquelle dorénavant ils se verraient prélever une somme. Bien qu’un tel système garantirait l’égalité entre tous les détenus, ce « recul » pour certains
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Voy. supra, n°43.
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d’entre eux pourrait affecter l’acceptabilité sociale de la proposition ou l’évaluation de sa pertinence. Une recherche ultérieure serait en outre certes nécessaire pour vérifier, au cas où le prélèvement d’une contribution s’avérait être un dispositif souhaitable et praticable, si celle-ci devrait plutôt revêtir la forme d’un montant forfaitaire ou être calibrée sur les capacités financières des détenus. La contribution ponctionnée sur la prestation de sécurité sociale pourrait, selon nous, bien entendu prendre la forme d’une suspension partielle de l’allocation, mais différerait de la suspension actuelle de par sa destination. Le prélèvement bénéficierait au SPF Justice plutôt qu’au système de sécurité sociale qui accorderait désormais au détenu l’allocation partiellement suspendue tout en réservant le reliquat pour l’administration pénitentiaire. Si cette option s’avérerait plus respectueuse des droits individuels des détenus, reste encore à examiner – et c’est d’importance – son impact budgétaire sur le système de solidarité collective. Cela nécessiterait vraisemblablement une réallocation des ressources étatiques au bénéfice de la sécurité sociale, diminuant le cas échéant le budget du SPF Justice dès lors que ce dernier bénéficierait désormais des contributions des détenus aux frais de séjour et d’entretien. Il importe aussi de rappeler ici que ce système de contribution n’est défendable qu’à la condition préalable que la Loi de principes soit pleinement respectée, à la fois quant au lieu de séjour devant observer des règles minimum de dimensions, d’éclairage, d’aération, d’installations sanitaires et d’entretien (art. 41), mais aussi quant à une alimentation respectant les normes qualitatives et fournie en quantité suffisante (art. 42), ou encore quant à la fourniture régulière de produits d’hygiène corporelle (art. 44) et aux soins de santé adéquats (art. 87 et s.). Il serait symboliquement inconcevable que le détenu contribue directement129 aux frais d’un hébergement insalubre et infiniment trop exigu, ainsi qu’à une nourriture et des soins de santé de mauvaise qualité. Il faudra également veiller – et c’est une fois encore primordial – à éviter que cette proposition de « contribution par prélèvement » soit détournée de son objectif. D. Kaminski a magistralement exposé que d’apparentes victoires au bénéfice de groupes vulnérables ne sont parfois que le fruit d’un cynisme managérial étatique : ainsi, ajoute le criminologue, la reconnaissance de droits substantiels en faveur des détenus se réalise généralement « lorsqu’elle est susceptible de produire des effets fonctionnels et symboliques plus rentables pour le système étatique (en l’occurrence pour son administration pénitentiaire) que les modalités antérieures »130. Ainsi le maintien des allocations sociales, sur lesquelles serait prélevée une contribution, pourrait en effet être invoqué, voire promu, comme facilitant ou s’alignant 129 130
Actuellement la contribution est indirecte, à travers la suspension souvent totale, parfois partielle, de l’allocation sociale. D. KAMINSKI, « Les droits des détenus au Canada et en Angleterre : entre révolution normative et légitimation de la prison », in L’institution du droit pénitentiaire. Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Bruxelles, Bruylant L.G.D.J., 2002, p. 91.
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parfaitement avec des velléités de privatisation totale des établissements pénitentiaires soumettant leur gestion intégrale aux principes de « libre marché » et du profit131/132. Selon cette logique déjà en vigueur dans certains Etats133, les firmes privées bâtiraient et géreraient entièrement des prisons plus ou moins luxueuses, accessibles aux détenus selon leurs capacités financières puisque désormais ils paient leur entretien et leur hébergement134. Cette hypothèse exigerait naturellement des analyses approfondies qui dépassent largement le cadre de la présente étude. 68. En ce qui concerne la période de libération, le législateur doit éviter, autant que possible, que les détenus une fois libérés voient la détention prolonger ses effets négatifs sur leurs droits à la sécurité sociale. Substituer à la suspension des allocations une contribution dans les frais d’entretien et d’hébergement dans la prison est, sur ce point, une mesure neutre. Le législateur doit éviter au maximum que les détenus ne puissent satisfaire, pour la seule raison de leur détention, aux stages d’attente et aux périodes de référence normalement en vigueur. Il doit également veiller à offrir aux détenus l’occasion de préserver, au cours de leur privation de liberté, la construction ultérieure de leurs droits à la sécurité sociale, par le biais d’une assurance continuée financièrement accessible. Le législateur doit aussi mettre un terme à la déchéance des droits de retraite des fonctionnaires. 69. Enfin, sur la base du principe de normalisation consacré dans la Loi de principes, le législateur devrait s’atteler à accoler au travail pénitentiaire les mêmes droits à la sécurité sociale que ceux qu’il lie à l’exercice d’une profession à l’extérieur de l’enceinte carcérale. Aussi longtemps que la rémunération du travail pénitentiaire ne sera pas alignée sur celle du travail exercé extra muros, il ne nous semble toutefois pas justifié d’exiger des détenus qu’ils payent des cotisations sociales équivalentes à 131 132
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Voy. en ce sens la mise en garde de Sonja SNACKEN dans sa contribution au présent recueil : « Sociale zekerheid voor gedetineerden – Algemene conclusies ». Sur la problématique de la privatisation, voy. notamment N. CHRISTIE, L’industrie de la punition, prison et politique pénale en Occident, Autrement, 2003 ; A. JAMES, K. BOTTOMLEY, A. LIEBLING, E. CLARE, Privatizing Prisons, Sage Publications, 1997 ; E. GENDERS ET E. PLAYER, « The Commercial Context of Criminal Justice : Prison Privatisation and the Perversion of Purpose », Crim. L. R., 2007, pp. 513-529. Voy. notamment Prison Privatisation Report International, n° 48, Juin/Juillet 2002, publiée par le « Public Services International Research Unit (PSIRU) », University of Greenwich, London, England, http://www.psiru.org/justice/ppri48.asp (publication financée par la Fondation « Open Society Institute »). Dans un terrible scénario, ne pourrait-on pas craindre aussi le maintien par les firmes privées, dans les murs et sous le joug d’un travail pénitentiaire obligatoire non rémunéré, des détenus qui ne parviendraient plus à payer la contribution due. Ph. COMBESSIE rappelle que dans l’Angleterre du 18e siècle, les pauvres étaient gardés en prison lorsqu’ils n’avaient pas payé leurs frais d’entretien pendant la période d’enfermement précédant leur procès. Voy. Ph. COMBESSIE, Sociologie de la prison, Ed. La Découverte, Paris, 2009, p. 72.
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celles des membres libres de la population active. Le législateur peut utiliser la législation existante pour élargir l’applicabilité du système de sécurité sociale des salariés aux détenus qui exécutent un travail pénitentiaire. A découvrir la réglementation du travail pénitentiaire dans d’autres pays européens, force est de constater le retard accusé par la Belgique en la matière et l’impérieuse nécessité pour le législateur d’y remédier135. Il doit prioritairement veiller, en tout état de cause, à attribuer aux détenus victimes d’accidents ou de maladies dans l’exercice de leur travail pénitentiaire, aussi bien au cours qu’après leur privation de liberté, une protection équivalente à celle que peuvent revendiquer les bénéficiaires de l’assurance accidents du travail ou maladies professionnelles. 70. Il faut vivement regretter que, cinq ans après l’adoption de la Loi de principes, l’arrêté royal en matière d’accident du travail pénitentiaire (art. 86 § 3) ne soit pas encore en projet. Inexistants également celui destiné à fixer le montant des revenus offerts pour un tel travail (art. 86 § 1er)136, ou encore l’arrêté déterminant la
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Voy. dans le présent recueil, la contribution de Philippe AUVERGNON : « Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens ». Les éléments issus du droit comparé doivent nous convaincre que des réformes du droit pénitentiaire ne sont pas illusoires. Ainsi, la France a établi, pour les détenus travailleurs, un revenu minimum à hauteur de 40 à 45% du salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC), tandis que l’Italie a fixé la rémunération des détenus aux deux tiers de ce que garantissent les accords collectifs ad hoc. En Espagne, les détenus qui exécutent un travail pénitentiaire sont assujettis au régime général de sécurité sociale depuis 2001, et sont liés par un contrat de travail lorsqu’ils travaillent pour le compte d’entreprises privées. L’Italie prévoit aussi la conclusion d’un tel contrat. Voy. également : P. AUVERGNON, Le travail pénitentiaire en question, Paris, La documentation française, 2006, 195 p. L’argument selon lequel augmenter le salaire des détenus rendrait leur travail non concurrentiel par rapport au travail en atelier protégé, et provoquerait dès lors une baisse de la demande de main d’œuvre pénitentiaire par les firmes privées, est souvent véhiculé. Il est naturellement critiquable, tant sur le plan de sa légitimité théorique que sur celui de sa crédibilité empirique. Ainsi, il serait utile de vérifier ces croyances à partir de données précises quant à l’ampleur du différentiel salarial entre détenus et personnes handicapées aujourd’hui, sur le rythme et la nature du travail confié aux uns et aux autres, … Il ne faut pas oublier, comme le rappelle Florence DUFAUX, qu’en « terme de rendement, la possibilité d’agencer librement une main d’œuvre extrêmement flexible, dont la réserve est numériquement abondante, toujours disponible et présente sur place, représente un avantage loin d’être négligeable dans l’ordonnancement économique actuel de la production matérielle, soumise à d’incessantes oscillations conjoncturelles ». Contrairement aux autres lieux de travail, les détenus « sont disposés » à travailler, en cellule, les samedis et dimanches, par exemple. Voy. F. DUFAUX, Du travail forcé à la faveur du labeur : Sens et fonctions du travail carcéral aujourd’hui, ULB, Faculté de Droit/ Ecole de Sciences Criminologiques Léon Cornil, Mémoire sous la direction de Ph. MARY, 2008, p. 73.
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participation financière du détenu dans les soins prodigués par le médecin de son choix (art. 91 § 3). Il y a pourtant nécessité juridique et urgence sociale. Le Rapport final sur l’avantprojet de Loi de principes enseignait déjà que la sécurité sociale des détenus, y compris le statut du travail pénitentiaire, était un souci majeur et que seules des réformes en ce domaine permettraient de conférer à l’ensemble sa pleine effectivité. 71. Enfin, on ne saurait conclure la présente contribution sans rappeler un dilemme devenu « classique »137. Nous sommes toujours tiraillés entre « l’idéal » – un changement radical qui, inévitablement, prendra du temps – et le « pragmatisme » – les droits de l’homme, au maximum, ici et maintenant. Et toujours confrontés à cette question épineuse : améliorer les conditions du réel – pour le rendre plus tolérable, plus vivable, plus acceptable – ne revient-il pas à le cautionner au point de ne plus envisager de le transformer ? Autrement dit, est-ce qu’améliorer les conditions de détention, par l’octroi d’un statut social aux détenus et la reconnaissance de nouveaux droits, ne consiste-t-il pas à accepter et légitimer la prison comme un mal nécessaire désormais exempt de toute critique ? Mais a contrario, l’idéal abolitionniste – aussi défendable soit-il – vaut-il que l’on abandonne les détenus actuels à leur sort ? La question est largement débattue. Nous considérons pour notre part qu’il est indispensable d’améliorer au plus vite les conditions de vie carcérale ; mais que cette amélioration – sociale et juridique – ne vaut pleinement que si la question du comment n’évacue jamais celle du pourquoi la prison.
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Voy. notamment D. KAMINISKI, « Les droits des détenus au Canada et en Angleterre : entre révolution normative et légitimation de la prison », in L’institution du droit pénitentiaire. Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Bruxelles, Bruylant L.G.D.J., 2002, pp. 91 et s. ; Y. CARTUYVELS, « Le dilemme des prisons », dans le même ouvrage.
SOCIALE GERECHTIGHEID MAG GEEN HALT HOUDEN AAN DE GEVANGENISPOORT HET (NIET ERKEND) RECHT OP SOCIALE ZEKERHEID VAN GEDETINEERDEN IN BELGIË
door Guido VAN LIMBERGHEN Professor aan de VUB Vakgroep Sociaal Recht en Véronique VAN DER PLANCKE Onderzoekster aan het Centrum Droits fondamentaux et Lien social (FUNDP), Onderzoekster verbonden aan het Centre de Philosophie du droit (UCL), Advocate aan de balie van Brussel
« La confusion des pouvoirs à un bout, et à l’autre la profusion de personnes qui n’ont rien à perdre et tout à gagner; entre les deux un marais inquiet et privé de repères: un tel contexte est propice au retour de la violence. Non pas la violence organisée et réfléchie des luttes ouvrières, mais la violence individuelle, comme ultime forme d’expression ou de redistribution (…). Le droit pénal serait alors l’avenir du droit social (les Etats-Unis montrent ici la voie), comme il a été son passé »1
I. INLEIDING2 1.
In 1984 verklaarde het Europees Hof voor de Rechten van de Mens in het richtinggevend arrest Campbell en Fell dat de gerechtigheid niet mag stoppen aan de poort van de gevangenis. Het Hof kende vervolgens aan de gedetineerde eisers het volledige genot toe van de burgerlijke en politieke rechten in het kader van een tuchtprocedure die tegen hen liep.3 Deze verklaring kwam indertijd over als een “verovering”, maar wordt vandaag systematisch in herinnering gebracht als een zo niet bereikte, dan toch onbetwistbare vereiste. Een kwarteeuw later komt het ons toe, om het hof te parafraseren, ervoor te zorgen dat het verlangen naar sociale gerechtigdheid de drempel van de gevangenisinrichtingen oversteekt. Dit wordt een onontkoombare opdracht.
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A. SUPIOT, “L’avenir d’un vieux couple: travail et Sécurité sociale”, Droit Social 1995, 829. Deze bijdrage steunt op een in 2007 gevoerd onderzoek met betrekking tot de sociale bescherming van gedetineerden, waarvan de resultaten zijn gepubliceerd in G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 437 p. en V. VAN DER PLANCKE en G. VAN LIMBERGHEN, La sécurité sociale des (ex-)détenus et de leurs proches, Bruxelles, La Charte, 2008, 517 p. Wat de hierna verkort geciteerde wetgeving en de gehanteerde verwijzingsregels betreft, verwijzen de auteurs naar hun rubriek “Citeerwijzen en afkortingen” in G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, XIX-XXVII. De auteurs zijn door de vzw Réseau Détention et Alternatives, het Netwerk Samenleving en Detentie en de Koning Boudewijnstichting in de mogelijkheid gesteld dat onderzoek te voeren. Met deze bijdrage beogen zij de conclusies uit hun vorig onderzoek nog beter in de verf te zetten en verder door te trekken. Vermits systematisch wordt verwezen naar de voormelde monografieën, geeft deze bijdrage geen gedetailleerd overzicht van de invloed van de detentie in elke sector van de sociale zekerheid afzonderlijk. Wat de rechtspraak betreft, verwijzen de auteurs in de regel slechts naar beslissingen waaraan nog niet werd gerefereerd in de monografieën. EHRM 28 juni 1984, A nr. 80, § 69. Campbell en Fell/UK.
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
Het sociale vraagstuk tekent zich scherp af in de gevangenis. Daar zijn personen uit minder gegoede middens traditioneel immers oververtegenwoordigd. Het rapport 2008 van de Belgische afdeling van het Observatoire International des Prisons bevestigt de grootschalige uitsluiting – op economisch en sociaal vlak – van gedetineerden. Zij staan voor de grote moeilijkheid om een plaats te verwerven of te behouden in de traditionele maatschappelijke structuren, zoals de familie en de arbeid, die sociale integratie met zich meebrengen.4 Men voegt eraan toe dat men een verarming van de gevangenisbevolking vaststelt: de opsluiting biedt geen oplossing voor de sociale situatie van gedetineerden, maar verergert hun marginalisering.5 Zij hypothekeert hun familiale relaties en brengt alleenstaande gedetineerden vaak in de onmogelijkheid hun huurgelden te betalen en hun huisvesting te behouden. Als de gedetineerde een betrekking had, wordt hij bij zijn vrijlating bijna systematisch geconfronteerd met het vooruitzicht van een ontslag. Detentie blijkt dan ook één van de voornaamste factoren van sociale onthechting en uitsluiting te zijn.6 2.
Ondanks de extreme sociale kwetsbaarheid van de gevangenisbevolking, worden gedetineerden in België in belangrijke mate onttrokken aan het socialezekerheidssysteem. Vele socialezekerheidswetten bepalen immers dat de betaling van de uitkeringen waarin zij voorzien, wordt geschorst, in geval van detentie van de uitkeringsgerechtigde. Deze uitsluiting heeft schadelijke gevolgen voor de familie van de gedetineerden en sorteert vaak nog effecten na hun vrijlating. Ingeval een gedetineerde gevangenisarbeid verricht, wordt bovendien traditioneel aangenomen dat die arbeid niet wordt gepresteerd ter uitvoering van een arbeidsovereenkomst. Daaruit wordt ook afgeleid dat gedetineerden geen socialezekerheidsrechten putten uit hun penitentiaire arbeid. De auteurs van het eindverslag van de Commisie-Dupont7 waren duidelijk: “(Gedeeltelijke) uitsluiting uit het stelsel van de sociale zekerheid komt, in het licht van de bepaling van de vrijheidsstraf als het verlies van het recht van komen en gaan, in wezen neer op een (niet bedoelde) overbestraffing, is bron van vermijdbare detentieschade, staat haaks op het beginsel van de normalisering”.8 Deze buitensporige uitsluiting uit het geïnstitutionaliseerde systeem van collectieve solidariteit is volgens de commissie van die aard dat zij “eerder desocialiseert dan 4 5 6 7 8
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OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DES PRISONS (Section belge), Notice 2008 – De l’état du système carcéral belge, Bruxelles, 15 oktober 2008, p. 27. Zie ook Ph. COMBESSIE, Sociologie de la prison, Paris, Ed. La Découverte, 2009, 14 en 35-39. OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DES PRISONS (Section belge), Notice 2008 – De l’état du système carcéral belge, Bruxelles, 15 oktober 2008, p. 27. De commissie die werd belast met de redactie van de Basiswet, kreeg de naam commissie-Dupont naar de naam van haar voorzitter, professor Lieven DUPONT. Eindverslag van de commissie “basiswet gevangeniswezen en rechtspositie van gedetineerden”, Parl.St. Kamer 2000-01, nr. 1076/1,148-149.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
bijdraagt tot de reïntegratie, niet in het minst ook, omdat zij niet of nauwelijks op grond van zelf opgenomen verantwoordelijkheden bij te dragen tot de ondersteuning van hun gezinsleden die – voor zover zij al ondersteuning genieten – deze ondersteuning « krijgen » ongeacht het engagement van de gedetineerde. De financiële kringloop die zich toch doorzet rond de gedetineerden en hun naastbestaanden vindt plaats zonder dat de gedetineerde er zich in de regel kan op beroepen daar constructief toe bij te dragen. Het totaal-instituut9 gevangenis is derhalve niet begrensd binnen de muren van de gevangenissen zelf, maar is geïnfiltreerd tot in één van de sterkste peilers van de sociale rechtsstaat: de sociale zekerheid”. Bijgevolg acht de commissie “een fundamentele hervorming van het statuut van de sociale zekerheid van de gedetineerden, in de geest van het normaliseringsbeginsel, een niet te vermijden opgave”.10 Volgens het normaliseringsbeginsel moet het leven in de gevangenis zoveel mogelijk overeenstemmen met het leven in de buitenwereld.11 3.
Wat is er geworden van die convergerende bezorgdheden? Sinds enkele jaren heeft de wetgever de rechtspositie van gedetineerden ingrijpend gewijzigd met drie opeenvolgende basiswetten: de Basiswet van 12 januari 2005 betreffende het gevangeniswezen en de rechtspositie van de gedetineerden, de wet van 17 mei 2006 betreffende de externe rechtspositie van de veroordeelden tot een vrijheidsstraf en de wet van 21 april 2007 betreffende de internering van personen met een geestesstoornis. De wetten van 17 mei 2006 en 21 april 2007 hebben betrekking op het externe juridische statuut van veroordeelde respectievelijk geïnterneerde personen. Die wetten definiëren de uitvoeringsmaatregelen van straffen extra muros respectievelijk
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Eigen onderlijning van de auteurs. Het begrip ‘totaal-instituut’ duidt op de gevangenis als een gesloten ruimte waarin alle aspecten van het dagelijkse leven worden beleefd en waarvan alles afhangt: de gevangenis straft, zij voedt op, zij beheert het geld van de gedetineerde of berooft hem ervan zie S. SNACKEN, “ ‘Normalisation’ dans les prisons: concepts et défis. L’exemple de l’Avant-projet de loi pénitentiaire belge” in D. KAMINSKI en O. DE SCHUTTER (eds), L’institution du droit pénitentiaire – Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Brussel, Bruylant, L.G.D.J., 2002, 137. Eindverslag van de commissie “basiswet gevangeniswezen en rechtspositie van gedetineerden”, Parl.St. Kamer 2000-01, nr. 1076/1, 154. Men vindt vergelijkbare revindicaties in andere landen, bijvoorbeeld in Frankrijk waar auteurs opmerken dat het sociaal recht grotendeels niet toepasselijk is op gedetineerden en dat hervormingen op dat vlak zowel juridisch als sociaal urgent zijn (zie M. HERZOGEVANS, “La révolution pénitentiaire Française” in D. KAMINSKI en O. DE SCHUTTER (eds.), L’institution du droit pénitentiare. Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Brussel, Bruylant, L.G.D.J., 2002, 30; Ph. AUVERGNON en C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question: une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, 195 p.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
van de internering en bepalen de rechtsregels die op elk van die maatregelen van toepassing zijn.12 Bij wet betreffende de internering van personen met een geestesstoornis definieert de wetgever ten slotte de modaliteiten voor de uitvoering van de internering en bepaalt hij de voorwaarden voor de toekenning daarvan. De Basiswet van 12 januari 2005 aanvaardt geen andere beperkingen aan de rechten – waaronder de sociale grondrechten – van gedetineerden dan degene die voortvloeien uit de strafrechtelijke veroordeling of de vrijheidsbenemende maatregel, degene die onlosmakelijk verbonden zijn met de vrijheidsberoving en degene die door of krachtens de wet worden bepaald.13 De Basiswet codificeert het recht van gedetineerden op socialezekerheidsprestaties niet, ongeacht of dat zou voortvloeien uit het verrichten van gevangenisarbeid. De reeds van kracht zijnde basisbeginselen van titel II van de wet voeren naar hervormingen in dat domein. In het licht van het principe van de rechtsbescherming zou elke wet die gedetineerden berooft van een socialezekerheidsprestatie voortaan moeten worden onderwerpen aan een krachtige rechtvaardigingstoets. Een wet doorstaat die toets niet, als de tenlasteneming van gedetineerden door de FOD Justitie de gedetineerden geen evenwaardige sociale bescherming garandeert. Deze gedachtegang stemt overeen met de “Règles pénitentiaires européennes 2006”. Deze brengen in herinnering dat beperkingen die worden opgelegd aan van hun vrijheid beroofde personen, moeten beperkt blijven tot het strikt noodzakelijke en moeten in evenredigheid zijn met de legitieme doelen waarvoor zij worden opgelegd.14 De toepassing van de principes van de responsabilisering en de beperking van de detentieschade, die in de Basiswet zijn vastgelegd, verbieden dat de familie van de gedetineerde wordt beroofd van voordelen omwille van de detentie van hun familielid. Het principe van de “vermijdbare detentieschade” wordt in werking gesteld door het normaliseringsprincipe, dat niet woordelijk wordt overgenomen in de Basiswet, maar waaraan uitvoerig wordt gerefereerd door de Commissie-Dupont.
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Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 38-54. Art. 6, § 1 Basiswet (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 16-37). Art. 3 Règles pénitentiaires européennes (Recommendation Rec(2006) van het Comité des Ministres du Conseil de l’Europe aux Etas membres sur les Règles pénitentiares européennes). Deze regels willen een daadwerkelijke penitentiaire politiek definiëren en zijn zeker niet dwingend. (zie M. EUDES, “La révision des règles pénitentaires européennes – Les limites d’un droit commun des conditions de détention”, Droits fondamentaux, 2006, afl. 56, 17 p., www.droits-fondamentaux.org.; J.-M. LARRALDE, “Les règles pénitentiaires européennes, instrument d’humanisation et de modernisation des politiques carcérales”, Rev.Trim D.H. 2007, 993-1015).
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
Overeenkomstig dat principe moet de levensomstandigheden in de gevangenis zoveel mogelijk beantwoorden aan de levensomstandigheden in de vrije wereld.15 De Europees16 geïnspireerde normalisering van het leven in de gevangenis geldt sinds de jaren ’80 als een grondbeginsel van de officiële politiek inzake de strafuitvoering. Het doel van dat nieuwe principe bestaat niet erin het gedrag van gevangenen met discipline vorm te geven, maar wel, zoals S. SNACKEN stelt, de voorwaarden te scheppen waaronder vrijgelaten gevangenen stand kunnen houden in de samenleving zonder een nieuwe confrontatie met het strafrechtelijk apparaat.17 Het normaliseringsbeginsel heeft dus een doel. Het beoogt zowel iets te zeggen over de draagwijdte van de straf – welk leed mag worden toegebracht? – als over de functie van de penitentiaire behandeling. Het normaliseringsprincipe wordt voortaan beschouwd als een essentiële voorwaarde voor de verwezenlijking van de andere functies van de gevangenisstraf dan de bestraffing zelf: de wederinschakeling, het herstel en het eerherstel.18 Slechts als de gevangenis niet meer berust op het concept van het totaal-instituut bestaat een echte kans op een geslaagde re-integratie. Het evenwicht tussen beide doelstellingen van de straf, met name bestraffing en reintegratie, is ten minste theoretisch verschoven van de retrospectieve kastijding (backward looking) naar de prospectieve investering (forward looking), van de nood tot uitsluiting naar de noodzaak tot insluiting. 15
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Eindverslag van de commissie “basiswet gevangeniswezen en rechtspositie van gedetineerden”, Parl.St. Kamer 2000-01, nr. 1076/1, 8. Wolfgang LESTING heeft het begrip ‘normalisering’ gedefinieerd als de gelijke toenadering van de levensomstandigheden tijdens detentie tot de standaarden in de vrije wereld, zowel op sociaal als juridisch vlak (zie W. LESTING, Normalisierung im Strafvollzug: Potential und Grenzen, Pfaffenweiler, Centaurus Verlag, 1988, p. 6, aangehaald door E. SHEA, “Les paradoxes de la normalisation du travail pénitentiaire en France et en Allemagne”, Déviance et Société, 2005/3, afl. 29, p. 349-365. Zie art. 64-65 van de Règles pénitentiaires européennes du Conseil de l’Europe (1987). Die regels bekrachtigen principes zoals de eerbieding van de rechten van gedetineerden, inzonderheid de wettigheid van de strafuitvoering, de vrijheidsberoving als een straf op zich die niet moet worden verergerd door nodeloos lijden, de organisatie van gevangenisregimes die de menselijke waardigheid eerbiedigen en de nefaste gevolgen van de opsluiting weren door contacten met de buitenwereld en de responsabilisering van de gevangenen. Die regels hebben als referentiepunt gediend voor de Belgische Basiswet. Zij werden geactualiseerd in 2006 (cf., supra). De bepalingen 5, 6 en 102 betreffen het normaliseringsbeginsel. S. SNACKEN, “ ‘Normalisation’ dans les prisons: concepts et défis. L’exemple de l’Avant-projet de loi pénitentiaire belge” in D. KAMINSKI et O. DE SCHUTTER (eds.), L’institution du droit pénitentiaire – Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Brussel, Bruylant, L.G.D.J., 2002, 134. Ph. MARY, F. BATHOLEYNS en J. BEGHIN, “La prison en Belgique: de l’institution totale aux droits des détenus?”, Déviance et Société 2006, vol. 30, nr. 3, 397.
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Volgens S. Snacken betekent het normaliseringsprincipe bijgevolg, op individueel vlak dat de gedetineerde wordt erkend in de diversiteit van zijn maatschappelijke rollen dankzij de vaststelling van een juridisch statuut, en op het collectieve vlak dat het aanbod van diensten in de gevangenis gelijkwaardig moet zijn aan het aanbod in de vrije wereld, inzonderheid wat de gevangenisarbeid en de beschikbare gezondheidszorgen betreft. In het huidige systeem zou de door het normaliseringsprincipe vereiste gelijkwaardigheid inzake de kwaliteit van de omvang van de gezondheidszorgen bijvoorbeeld makkelijker te bereiken zijn, als de gedetineerde deel uitmaakt van het socialezekerheidssysteem dat geldt in de vrije wereld.19 4.
De wetgever zou zich nu in het licht van de nieuwe interne en externe rechtspositie van gedetineerden opnieuw moeten beraden over de traditionele schorsing van socialezekerheidsuitkeringen en de gangbare weigering om gevangenisarbeid te beschouwen als een bron van socialezekerheidsrechten. Hij moet de vele lacunes in de huidige wetgeving ongedaan maken. Deze bijdrage hoopt de wetgever daarbij dienstig te zijn.
II. SCHORSING VAN SOCIALEZEKERHEIDSUITKERINGEN 5.
In België heeft de FOD Justitie de opdracht om in te staan voor de sociale bescherming van gedetineerden. Als gevolg daarvan schorst de Belgische wetgever de uitbetaling van de meeste socialezekerheidsprestaties, ingeval de betrokken uitkeringsgerechtigde wordt gedetineerd. Hierna stellen wij kritische vragen bij deze beleidskeuze, uiten wij kritiek op de wijze waarop die beleidskeuze is geïmplementeerd en tonen wij aan dat het de moeite loont om nader te onderzoeken of de heffing van een bijdrage in de kosten van verblijf en onderhoud een betere optie vormt. 19
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S. SNACKEN, “ ‘Normalisation’ dans les prisons: concepts et défis. L’exemple de l’Avant-projet de loi pénitentiaire belge” in D. KAMINSKI et O. DE SCHUTTER (eds.), L’institution du droit pénitentiaire – Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Brussel, Bruylant, L.G.D.J., 2002, 141. De auteur signaleert dat de exacte draagwijdte van het normaliseringsprincipe problematisch kan blijken te zijn. Het roept immers zowel de vraag op wat als normaal moet worden beschouwd buiten de gevangenis en bijgevolg moet worden verwezenlijkt binnen de gevangenis (is het bijvoorbeeld legitiem de sociale ongelijkheden in de vrije wereld over te nemen in de gevangenis of moet men streven naar een gemiddelde levensstandaard en op welk peil moet deze worden vastgesteld?), als de vraag welke beperkingen noodzakelijkerwijze verbonden zijn aan de gevangenis. Het antwoord kan niet voor eens en altijd worden gegeven: alles hangt af van de evolutieve economische en sociale omstandigheden in een samenleving. S. SNACKEN preciseert dat het normaliseringsprincipe een voortdurende oefening vergt in flexibiliteit en reflexiviteit met betrekking tot wat op een gegeven ogenblik met de vrijheidsberoving samengaande en bijgevolg onveranderbare beperkingen leken (ibid., 136 en 145).
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
A. KRITISCHE VRAGEN BIJ DE BELEIDSKEUZE 6.
Internationale en nationale normen kennen ook aan gedetineerden een grondrecht op sociale bescherming20 toe, maar preciseren niet met welk instrument dat grondrecht moet worden verwezenlijkt.21 Het komt bijgevolg de wetgever toe om te bepalen welk instrument daartoe het best kan bijdragen. In het kader van een parlementaire democratie beschikt de wetgever dienaangaande over een ruime beoordelingsvrijheid en mag hij dus ervoor opteren de sociale bescherming van gedetineerden te verwezenlijken hetzij met het socialezekerheidssysteem, hetzij met een ander beschermingsmechanisme.22 In België heeft de FOD Justitie de opdracht gekregen om de sociale bescherming van de gedetineerden ten laste te nemen. 20
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Onder “sociale bescherming” rekenen wij in deze bijdrage zowel de bescherming via het socialezekerheidssysteem, als de bescherming via andere beschermingsmechanismen zoals de tussenkomst van de FOD Justitie. Met de term “sociale zekerheid” duiden wij op het geheel van de sociale verzekeringen (werkloosheidsverzekering, pensioenverzekeringen, arbeidsongeschiktheidsongeschiktheidsverzekeringen, …) en de socialebijstandsregelingen (regelingen inzake het recht op maatschappelijke integratie, inkomensgarantie voor ouderen, tegemoetkomingen voor personen met een handicap, …). Andere auteurs gebruiken de term « sociale zekerheid » om alleen de sociale verzekeringen te benoemen en brengen onder de term « sociale bescherming » het geheel van sociale verzekeringen en socialebijstandsregelingen. Wat de draagwijte van het grondrecht op sociale zekerheid betreft, verwijzen wij naar de bijdrage van W. VANDENHOLE in deze bundel. De auteur geeft een overzicht van de toepasselijke rechtsinstrumenten in de schoot van de Verenigde Naties en de Raad van Europa en de plaats die daarin is toebedeeld aan de gedetineerden. Wij brengen hier in herinnering dat, overeenkomstig artikel 9 van de Resolutie van de Raad van Europa van 1 februari 1962 – RES(62)2 relative aux droits électoraux, civils et sociaux du détenu, de detentie niets wijzigt aan het recht op socialezekerheidsprestaties die de gedetineerde heeft verworven vóór zijn vrijheidsberoving. Artikel 10 voegt eraan toe dat de noodzakelijke maatregelen worden genomen, opdat de gedetineerde in de mate van het mogelijke zijn recht op die voordelen behoudt tijdens zijn verblijf in de gevangenis. Vijfentwintig jaar later bepaalt artikel 68-1 van de “Recommendation n° R (87) 3 – Règles pénitentiares européennes – Version européenne révisée de l’Ensemble des règles minima pur le traitement des détenus” dat “la préparation des détenus à leur libération devrait commencer le plus tôt possible après leur arrivée dans un établissement pénitentiaire. On doit se garder de faire sentir aux détenus qu’ils sont exclus de la société, mais bien au contraire leur donner à penser qu’ils continuent à en faire partie. Dans cette optique, il serait bon de faire appel dans toute la mesure du possible à des organismes et à reclasser les détenus et, en particulier, à entretenir et à améliorer les relations du détenu avec sa famille, avec d’autres personnes et avec les organismes sociaux. Des mesures doivent être prises aux fins de sauvegarder, dans toute la mesure compatible avec la loi et la peine infligée, les droits civils, les droits en matière de sécurité sociale et autres avantages sociaux des détenus”. Het valt te betreuren dat deze bepaling niet is overgenomen bij de herziening in 2006 van de Règles pénitentiares européennes. Zo acht het Grondwettelijk Hof het te verantwoorden dat de integratietegemoetkoming voor personen met een handicap gedeeltelijk wordt opgeschort bij opname in een
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
De tussenkomst van de FOD Justitie als alternatief beschermingsmechanisme brengt de Belgische wetgever ertoe de uitbetaling van de meeste niet van alle socialezekerheidsprestaties geheel of gedeeltelijk te schorsen, ingeval de betrokken uitkeringsgerechtigde wordt gedetineerd. Dat het socialezekerheidssysteem geheel of gedeeltelijk wordt ontslagen van zijn anders geldende verplichtingen, zou, zoals ook de Nederlandse wetgever aanneemt,23 ertoe bijdragen dat gedetineerde uitkeringsgerechtigden niet worden bevoordeeld, noch ten opzichte van gerechtigden op socialezekerheidsprestaties die niet zijn gedetineerd, noch ten opzichte van gedetineerden die geen socialezekerheidsprestaties genoten vóór hun detentie.24 7.
Uitkeringsgerechtigden die niet worden beroofd van hun vrijheid, kunnen inderdaad geen aanspraak maken op de tussenkomst van het alternatieve beschermingsmechanisme, in België de tenlasteneming door de FOD Justitie. Om de gelijkheid tussen gedetineerde en niet-gedetineerde uitkeringsgerechtigden te herstellen wenst de wetgever de tussenkomst van het socialezekerheidssysteem daarom stop te zetten gedurende de detentie. De desbetreffende socialezekerheidsprestatie wordt ook geschorst, ingeval het sociaal verzekerd risico blijft bestaan tijdens de detentie of als de kosten voor het levensonderhoud en de huisvesting van de gedetineerde of zijn gezin geheel of gedeeltelijk doorlopen tijdens de detentie.25 De schorsing van de socialezekerheidsprestatie dreigt bijgevolg een deficit aan sociale bescherming te veroorzaken, vermits de wetgever niet garandeert dat de tenlasteneming door de FOD Justitie hetzelfde peil bereikt als de geschorste uitkering.
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instelling op kosten van de overheid, als een dienstverlening in die instelling het gebrek aan zelfredzaamheid van de betrokkenen compenseert (GWH nr. 145/2007, 22 november 2007). Voor een uiteenzetting van de Nederlandse situatie verwijzen wij naar de bijdrage van G. VONK in deze bundel. De Nederlandse Centrale Raad van Beroep is van oordeel dat de schorsing van de tussenkomst van de sociale zekerheid om die redenen niet onverzoenbaar is met het gelijkheidsbeginsel en het verbod tot onrechtmatige aantasting van eigendomsrechten. De Raad wijst erop dat de rechter in het kader van de Nederlandse staatsrechtelijke verhoudingen de keuze van de wetgever slechts doorbreekt, als zij niet berust op redelijke en objectieve gronden. Dat een andere keuze denkbaar is of volgens de rechter zelfs verkieslijk, volstaat niet om de door de wetgever gemaakte keuze onaanvaardbaar te achten (Centrale Raad van Beroep (Nederland) LJN AP4680, 18 juni 2004, zoeken.rechtspraak.nl/ResultPage.aspx). Om de algemene schorsing van de betaling van socialezekerheidsuitkeringen te rechtvaardigen verklaarde de Nederlandse wetgever te willen vermijden dat de gedetineerde voordeel haalt uit zijn detentie en als het ware een buit verwerft. Volgens een bekritiseerbare logica wordt eraan toegevoegd dat het verlies van de beroepsinkomsten niet meer het gevolg is van een sociaal risico, maar van de vrijheidsberoving en dat het socialezekeheidssysteem wel in de eerste, maar niet in de tweede hypothese moet tussenkomen (zie de bijdrage van G. VONK in deze bundel).
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
8.
Het stemt evenzeer overeen met de werkelijkheid dat werkende personen het gevaar lopen hun arbeidsinkomen te verliezen als gevolg van hun detentie. Bij de wens om de gedetineerde uitkeringsgerechtigden niet te bevoordelen ten opzichte van deze personen, kan men zich de vraag stellen of men de ongelijkheid – tussen arbeids- en vervangingsinkomens – die bestaat in de buitenwereld, wel moet vervangen door een absolute gelijkheid binnen de muren van de gevangenis. Belangrijker is de vaststelling dat de voorliggende ongelijkheid ook kan worden hersteld door niet alleen gedetineerde uitkeringsgerechtigden, maar ook gedetineerde werknemers, ambtenaren en zelfstandigen toe te staan tijdens de vrijheidsberoving aanspraak te maken op sommige socialezekerheidsprestaties die de wetgever hen thans ontzegt met toepassing van de vele schorsingsregels in ons socialezekerheidssysteem. Het socialezekerheidssysteem zou dan veel meer bijdragen tot de sociale bescherming van gedetineerden die hun arbeidsinkomen erbij inschieten en evenzeer als gedetineerde uitkeringsgerechtigden worden geconfronteerd met tijdens de vrijheidsberoving doorlopende kosten van levensonderhoud en huisvesting voor henzelf of hun gezin.
9.
De wetgever dient ook deze keuzemogelijkheid ernstig in overweging te nemen. De thans gangbare schorsing van socialezekerheidsuitkeringen stuit immers op principiële bezwaren. De volledige schorsing van socialezekerheidsprestaties treft de uitkeringsgerechtigden in zeer ongelijke mate, rekening houdend met de uiteenlopende aard en hoogte van de diverse prestaties. Daartegen zou geen bezwaar bestaan, ingeval het andere beschermingsmechanisme steeds een hogere sociale bescherming zou verlenen of ingeval het aan gedetineerden gevraagde aandeel in de financiering van het andere mechanisme hun socialezekerheidsuitkeringen zou overtreffen. Buiten die thans wellicht weinig voorkomende gevallen neemt de onredelijkheid van de volledige schorsing van een socialezekerheidsuitkering toe, naarmate het bedrag van de geschorste uitkering de kosten van onderhoud en verblijf van de gedetineerde of zijn verwachte bijdrage tot de financiering daarvan te boven gaat.
B. KRITIEK OP DE IMPLEMENTATIE VAN DE BELEIDSKEUZE 10. Het komt uiteindelijk de wetgever toe om de voor- en nadelen van de verschillende beleidsopties tegen elkaar af te wegen. Ongeacht welke optie de wetgever neemt, mag men verlangen dat de gemaakte keuze tot stand komt volgens daartoe voorgeschreven regels en wordt vastgelegd in behoorlijk opgestelde, coherente en consistente wetsbepalingen. Zoals hierna wordt aangetoond zou de wetgever de ter zake geldende wetsbepalingen bovendien meer 109
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kunnen afstemmen op de interne en externe rechtspositie van gedetineerden en bepaalde fundamentele regels van het strafrecht. 1. Nood aan een betere regelgeving 11. Artikel 23 van de Grondwet eist dat de formele wetgever – en niet de uitvoerende macht – die beleidskeuze maakt en de wettelijke regelingen ter uitvoering daarvan goedkeurt. Voor zover de wetgever (een deel van) zijn bevoegdheid wenst te delegeren, zou hij, rekening houdend met de adviezen van de afdeling wetgeving van de Raad van State, zelf ten minste de essentiële beleidskeuzes en de richtsnoeren voor de Koning moeten vastleggen.26 Wij stellen vast dat voor een aantal “gebruikelijke praktijken” geen wettelijke grondslag bestaat. Als de wetgever ervoor blijft opteren om de FOD Justitie te belasten met de sociale bescherming van gedetineerden, moet de wetgever in ieder geval een einde maken aan de praktijk om de tussenkomst van de FOD vast te leggen in administratieve regelingen. De talloze omzendbrieven zijn veel minder toegankelijk dan formele wetgeving en uitvoeringsbesluiten.27 Zij bieden ook niet dezelfde rechtszekerheid en rechtsbescherming aan gedetineerden als behoorlijk bekendgemaakte wettelijke regels.28 12. Vermits de Belgische wetgever ervoor kiest om gedetineerden ten laste te laten nemen door de FOD Justitie, ontslaat hij het socialezekerheidssysteem grotendeels van een tussenkomst ten behoeve van gedetineerden. De wetgever doet dat niet door middel van een wet waarbij de verdeling van verantwoordelijkheden tussen de FOD Justitie en het socialezekerheidssysteem wordt vastgelegd op een algemene wijze,29 maar beperkt de tussenkomst van de diverse socialezekerheidsregelingen met specifieke bepalingen in elk van de 26
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Artikel 86, § 3 van de Basiswet dat aan de Koning de bevoegdheid toevertrouwt de regels te bepalen voor de vergoeding van ongevallen bij gevangenisarbeid, is in die zin vatbaar voor verbetering. Slechts weinige omzendbrieven, worden bekendgemaakt in het Belgisch Staatsblad, andere zijn alleen beschikbaar op de website van de FOD Justitie – die nog altijd niet gemakkelijk toegankelijk is – en nog andere, zoals diegene met betrekking tot de daklozen, zijn in strijd met elkaar. Die kritiek geldt bijvoorbeeld ten aanzien van de administratieve vergoedingenregeling met betrekking tot arbeidsongevallen en beroepsziekten, veroorzaakt door het verrichten van gevangenisarbeid (al zullen art. 86, § 3 van de Basiswet en het nog te nemen uitvoeringsbesluit in die zin wel een stap voorwaarts vormen) en ten aanzien van de tussenkomst van de FOD Justitie ter vervanging van het leefloon voor gedetineerden onder elektronisch toezicht. De Basiswet brengt op dat punt geen verandering, omdat zij wel bepaalt dat de gedetineerden recht hebben op gezondheidszorg, sociale hulp en vergoeding van aan gevangenisarbeid te wijten ongevallen, maar geen bepalingen bevat over de rol die het socialezekerheidssysteem daartoe op zich moet nemen.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
afzonderlijke socialezekerheidswetten. Het hergroeperen van deze wetsbepalingen in één specifieke wettekst met betrekking tot de socialezekerheidsrechten van gedetineerden en hun verwanten zou de duidelijkheid en kenbaarheid van de desbetreffende regels ten goede komen30 en wellicht op zich ook een aansporing tot een grotere coherentie en consistentie vormen. Sociaal assistenten in de gevangenissen maken melding van moeilijkheden die zij ondervinden, telkens zij voor een gedetineerde stappen ondernemen bij een socialezekerheidsinstelling, zoals een ziekenfonds, een OCMW, de RVA, enz.31 Het ontbreekt hen aan een instrument dat niet alleen de rechten van de gedetineerden op een socialezekerheidsuitkering verduidelijkt, maar bovendien de wettekst die daaraan ten grondslag ligt, aanwijst. Aan de moeilijkheid om een overzicht te krijgen van het geheel van diverse en verwarrende reglementeringen, wordt gedeeltelijk verholpen door de uitwerking van intranet-sites op het niveau van de centrale psychosociale diensten van het gevangeniswezen. Maar de permanente bijwerking van deze sites vergt blijvende aandacht. Tussenpersonen zouden uit eigen beweging elke nieuwe wetgeving met een invloed op de sociale bescherming van gedetineerden doorsturen naar de centrale psychosociale diensten en zouden bevoorrechte gesprekspartners zijn van het gevangeniswezen. De vraag rijst of het opzetten van een officieel netwerk van doeltreffende tussenstations in de diverse socialezekerheidsinstellingen om de informatie op de sites te valideren en bij te werken een ernstige slaagkans heeft. 2. Nood aan consistentie en coherentie 13. Omwille van de tenlasteneming van gedetineerden door de FOD Justitie schorst de wetgever de betaling van vele socialezekerheidsprestaties, ingeval de uitkeringsgerechtigde wordt beroofd van zijn vrijheid. De talrijke schorsingsbepalingen vertonen vele onderlinge verschilpunten. De tussenkomst van een socialezekerheidsregeling wordt nu eens volledig, dan weer gedeeltelijk en soms zelfs helemaal niet geschorst in geval van detentie. De schorsing geldt de ene keer ten opzichte van gedetineerden, een andere maal ten opzichte van uitkeringsgerechtigden die zijn “opgesloten in de gevangenis”.32
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Cf. Ph. AUVERGNON en C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question: une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, 34. Zie de bijdrage in deze bundel van R. RASSON en A. VERSTRAETE. Die uitdrukking – die voorkomt in de regeling inzake tegemoetkomingen aan personen met een handicap – leidt soms tot onenigheid over de vraag of gedetineerden in beperkte hechtenis daaronder vallen, als zij meer dan twaalf uur per dag buiten de gevangenis verblijven (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 233 e.v.
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De schorsing van een socialezekerheidsprestatie treedt vaak onmiddellijk in, soms pas enige tijd na de aanvang van de detentie. De schorsing blijft zelden beperkt tot het geval waarin de gedetineerde reeds is veroordeeld. Meestal maar niet altijd wordt de schorsing wel opgeheven met retroactieve kracht, als achteraf blijkt dat het gaat om een onwerkdadige hechtenis. 14. De wetgever maakt zijn motieven voor die uiteenlopende regels niet altijd kenbaar. Als dat toch het geval is, bestaat de ingeroepen rechtvaardiging voor de schorsing van een socialezekerheidsprestatie, op één uitzondering na,33 erin dat de gedetineerde, rekening houdend met de tenlasteneming door de FOD Justitie, geen tweede keer ten laste moet worden genomen door de overheid.34 Dat ene motief kan echter geen verklaring vormen voor de talrijke verschillen tussen de uiteenlopende schorsingsregels in de diverse socialezekerheidsregelingen. Daarom gaan wij na of de verschillen in de schorsingsregels parallel lopen met verschillen in de cumulatiebepalingen van de diverse socialezekerheidsregelingen en onderzoeken wij of enige samenhang bestaat tussen de schorsingsregels en het klassieke onderscheid tussen socialebijstandsregelingen en sociale verzekeringen. a) Schorsingsregels en cumulatiebepalingen 15. Vrijwel alle socialezekerheidsregelingen bevatten cumulatiebepalingen om te voorkomen dat eenzelfde menselijke schade of behoefte tweemaal wordt gedekt. Ingeval een dergelijke cumulatiebepaling bestaat en de tussenkomst van de FOD Justitie tot de toepassing van die bepaling zou kunnen leiden, kan de wetgever even goed kiezen voor de schorsing van een socialezekerheidsprestatie bij detentie. Een voorbeeld hiervan treffen wij aan in de ziekte- en invaliditeitsverzekering. De prestaties van de ziekte- en invaliditeitsverzekering worden immers geweigerd, ingeval de betrokkene voor de schade die voortvloeit uit ziekte, letsels, functionele stoornissen of overlijden, werkelijk schadeloos wordt gesteld krachtens een andere wetgeving.35 Het stemt met de logica van die regel overeen dat de verzekering voor geneeskundige verzorging die deel uitmaakt van de ziekte- en invaliditeitsverzekering, geen prestaties verleent, voor zover de FOD Justitie reeds de kosten van de geneeskundige verzorging van gedetineerden ten laste neemt. De wetgever kan ervoor opteren om deze regel vast te leggen in een afzonderlijke 33
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De schorsing van het recht op werkloosheidsuitkeringen wordt gerechtvaardigd door de onbeschikbaarheid van de gedetineerde voor de algemene arbeidsmarkt (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 103-106). Dat geldt bijvoorbeeld ook voor de Franse wetgever (Ph. AUVERGNON en C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question: une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, 105). Art. 136, § 2 ZIV-Wet.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
wetsbepaling.36 De tussenkomst van de FOD Justitie dekt echter niet de schade die voortvloeit uit arbeidsongeschiktheid,37 zodat het bestaan van de hoger in herinnering gebrachte cumulatiebepaling niet de schorsing van arbeidsongeschiktheidsuitkeringen bij detentie kan rechtvaardigen. Toch wordt de gedetineerde uitkeringsgerechtigde die geen personen ten laste heeft, beroofd van de helft van zijn arbeidsongeschiktheidsuitkering.38 16. Zelfs ingeval de schorsing van een socialezekerheidsprestatie in geval van detentie parallel loopt met het bestaan van een cumulatiebepaling, zou de desbetreffende socialezekerheidsregeling slechts mogen worden ontslagen van haar tussenkomst ten behoeve van gedetineerden, voor zover de bescherming door de FOD Justitie ten minste een even hoog peil bereikt. Het is vaak niet duidelijk of dat wel het geval is. Zo blijkt niet met zekerheid dat de tussenkomst van de FOD Justitie bijvoorbeeld steeds het peil van de tussenkomst van de verzekering voor geneeskundige verzorging bereikt.39 17. Wij stellen dus vast dat de bestaande cumulatiebepalingen in de diverse socialezekerheidsregelingen niet de verschillen tussen de schorsingsregels in de diverse socialezekerheidsregelingen verklaren. b) Schorsing van socialebijstandsuitkeringen 18. Wij onderzoeken nu of de schorsing van socialebijstandsuitkeringen kan worden verklaard door de kenmerkende eigenschappen van de socialebijstandsregelingen. De socialebijstandsregelingen hebben als gemeenschappelijk kenmerk dat zij hun tussenkomst voorbehouden aan uitkeringsgerechtigden die niet beschikken over toereikende bestaansmiddelen. Een scala van wetsbepalingen legt voor elke socialebijstandsuitkering vast welke en wiens bestaansmiddelen in rekening worden gebracht en hoe het bedrag van die bestaansmiddelen precies moet worden berekend. Zolang het aan te rekenen gedeelte van het totale bedrag aan 36
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Het gaat thans om art. 5 Verordening 28 juli 2003 tot uitvoering van artikel 22, 11° van de wet betreffende de verplichte verzekering voor geneeskundige verzorging en uitkeringen, gecoördineerd op 14 juli 1994. We laten het geval van arbeidsongeschiktheid die voortvloeit uit het verrichten van penitentiaire arbeid hier voorlopig buiten beschouwing. Art. 105 ZIV-Wet; art. 233 ZIV-Besluit; art. 32 Arbeidsongeschiktheidsbesluit Zelfstandigen; zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 172-197. Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 198-219. Ook in Frankrijk is vastgesteld dat de tenlasteneming door een ander beschermingsmechanisme de gedetineerden niet vrijwaart van armoede (Ph. AUVERGNON en C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question: une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, 105-106).
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bestaansmiddelen lager is dan het wettelijke bedrag van de desbetreffende socialebijstandsuitkering, ontvangt de gerechtigde een uitkering tot beloop van het verschil tussen beide.40 Het zou overeenstemmen met de logica van deze bijstandsregelingen dat de wetgever de tussenkomst van de FOD Justitie zou beschouwen als een bestaansmiddel dat tot beloop van het door de wetgever te bepalen bedrag in mindering zou worden gebracht op de bijstandsuitkering waarop een gedetineerde aanspraak maakt. De socialebijstandsregelingen gaan echter niet te werk op die wijze, maar schorsen vrijwel allemaal de betaling van hun uitkeringen in geval van detentie, met opmerkelijke uitzonderingen voor de maatschappelijke dienstverlening41 en de gewaarborgde gezinsbijslagen.42 Zo verliezen de gedetineerde titularissen van een leefloon,43 inkomensgarantie voor ouderen of tegemoetkoming aan een persoon met een handicap hun minimuminkomen. Die schorsing wordt gerechtvaardigd met het motief dat de gedetineerde al ten laste is van de overheid. De socialebijstandsregelingen worden inderdaad niet gespijsd met bijdragen van de uitkeringsgerechtigden, maar met een deel van de algemene middelen van de overheid.44 Het principe45 van de schorsing is bijgevolg consistent met het daarvoor ingeroepen motief. 40
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Alleen in de regeling inzake gewaarborgde gezinsbijslagen ontvangt de gerechtigde de volledige of helemaal geen uitkering, naargelang zijn bestaansmiddelen een wettelijke grens niet of wel overtreffen (art. 3 Wet Gewaarborgde Gezinsbijslagen). De wetgeving inzake de maatschappelijke dienstverlening bevat weliswaar niet de regel dat de toegekende dienstverlening wordt geschorst in geval van detentie. De facto is dat nochtans vaak het geval. Zoals hoger is uiteengezet, belet het residuaire karakter van de maatschappelijke dienstverlening immers de tussenkomst van een OCMW, voor zover de tenlasteneming van de gedetineerde door de FOD Justitie de betrokkene al in staat stelt een leven te leiden dat beantwoordt aan de menselijke waardigheid. Een gebeurlijke tussenkomst van het OCMW is dan gerechtvaardigd, voor zover de tussenkomst van de FOD Justitie niet even doorgedreven is als de door openbare centra voor maatschappelijk welzijn geboden dienstverlening. De gewaarborgde gezinsbijslagen worden niet geschorst in geval van detentie. Wel kan de detentie van de natuurlijke persoon die instaat voor het rechtgevende kind, van het rechtgevende kind of van de bijslagtrekkende in concrete gevallen leiden tot het verlies of de vermindering van de gewaarborgde gezinsbijslag, omdat niet meer voldaan is aan bepaalde voorwaarden voor de toekenning van een (hogere) uitkering (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 261-267). Alleen de betaling van het leefloon is geschorst, niet het recht op maatschappelijke integratie dat kan worden toegekend in de vorm van arbeid (bijvoorbeeld ter uitvoering van een arbeidsovereenkomst overeenkomstig artikel 60, § 7 van de OCMW-Wet). De beslissing waarbij een OCMW het recht op maatschappelijke integratie in de vorm van arbeid schorste gedurende de periode van elektronisch toezicht, werd dan ook vernietigd (Arbrb. Nivelles, AR 09/1044/A, 30 oktober 2009). De financiële last van de gewaarborgde gezinsbijslagen wordt echter gedragen door de RKW (art. 5 Wet Gewaarborgde Gezinsbijslagen) die noch hiervoor, noch met het oog
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19. Daarmee is de kous echter niet af. Artikel 23 van de Grondwet bepaalt dat iedereen – dus ook een gedetineerde – het recht heeft een menswaardig leven te leiden en legt de wetgever daartoe de verplichting op het recht op sociale bijstand te waarborgen. De integrale schorsing van socialebijstandsuitkeringen is bijgevolg slechts gerechtvaardigd als de tussenkomst van de FOD Justitie een evenwaardige sociale bescherming verleent als de geschorste bijstandsuitkering. Men mag niet te licht aannemen dat dit het geval is. De wetgever wil het recht op maatschappelijke integratie slechts toekennen aan personen die niet beschikken over toereikende bestaansmiddelen en niet in staat zijn deze zelf op enige manier te verwerven. De bestaansmiddelen van de betrokkenen worden bijgevolg in mindering gebracht op het bedrag van het leefloon dat hen kan worden toegekend.46 Die regel zou de integrale schorsing van de betaling van het leefloon kunnen rechtvaardigen, indien de tussenkomst van de FOD Justitie hetzelfde peil bereikt als het leefloon. Of dat wel het geval is, is niet zonder meer duidelijk.47 Meer twijfels rijzen nog met betrekking tot het recht op maatschappelijke dienstverlening. Om dat recht aan iedereen te waarborgen staan de openbare centra voor maatschappelijk welzijn in voor een gediversifieerde en geïndividualiseerde dienstverlening. Het residuaire karakter48 van het recht op maatschappelijke dienstverlening rechtvaardigt de weigering van een dienstverlening niet, als de
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op de financiering van de gezinsbijslagenverzekeringen enige rijkstegemoetkoming geniet, zodat de gewaarborgde gezinsbijslagen de facto niet worden gefinancierd met de algemene overheidsmiddelen, maar met werkgeversbijdragen. De ontstentenis van een schorsingsregel stemt bijgevolg overeen met de bijzondere financieringswijze van deze socialebijstandsregeling. De toekenning van gewaarborgde gezinsbijslagen in geval van detentie is bovendien ook te rechtvaardigen, omdat de FOD Justitie slechts de bestaanszekerheid van de gedetineerde en niet de bestaanszekerheid van zijn kinderen ten laste neemt, zodat de tussenkomst van deze socialezekerheidsregeling niet samenloopt met de tussenkomst van een alternatief beschermingsmechanisme. Zoals wij hierna uiteenzetten, vormen de gezinsbijslagen ook in het kader van de sociale verzekeringen een uitzondering op het principe van de schorsing van de socialezekerheidsuitkeringen. Dat verklaart evenwel niet een aantal verschillen in de modaliteiten van de schorsing in de socialebijstandsregelingen, bijvoorbeeld in geval van onwerkdadige hechtenis. Art. 3, 4 en 14 Wet Maatschappelijke Integratie. Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 311-356. Ook in Frankrijk is vastgesteld dat de tenlasteneming door een ander beschermingsmechanisme de gedetineerden niet vrijwaart van armoede (Ph. AUVERGNON en C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question: une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, 105-106). Maatschappelijke dienstverlening moet volgens de rechtspraak immers niet worden verleend aan degene die een menswaardig leven kan leiden, zonder een beroep te moeten doen op de overheid (RvS nr. 34.059, 15 februari 1990).
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gedetineerde die bijstand nodig heeft om een menswaardig bestaan te leiden en de tussenkomst van de FOD Justitie niet tegemoetkomt aan deze behoefte.49 Niet zozeer het principe van de schorsing van de bijstandsuitkeringen, maar wel een duidelijkere afbakening van de wederzijdse verantwoordelijkheden50 van de FOD Justitie en de openbare centra voor maatschappelijk welzijn is voorwerp van discussie.51 20. Toch wensen wij de wetgever niet aan te bevelen te blijven kiezen voor de schorsing van socialebijstandsprestaties, in geval van detentie. Die keuze komt immers erop neer dat personen die gerechtigd zijn op socialebijstandsuitkeringen en dus het minst beschikken over eigen bestaansmiddelen, financieel het meest lijden onder hun detentie. Dat gevolg lijkt moeilijk verenigbaar met de solidariteitsidee waarvan ons socialezekerheidssysteem is doordrongen. De schorsing van socialebijstandsuitkeringen verhindert bovendien dat gedetineerden die nog geen socialezekerheidsinkomen genoten en hun arbeidsinkomen verliezen als gevolg van hun detentie, kunnen terugvallen op een socialebijstandsuitkering.
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Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 311-356. Het is belangrijk dat die verantwoordelijkheidsverdeling ook gepaard gaat met een gelijklopende verdeling van ter beschikking gestelde middelen ((zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 31-33. De Basiswet expliciteert de rechten van de gedetineerden en verstevigt de afdwingbaarheid ervan. Gedetineerden doen een toenemend beroep op de tussenkomst van hun sociale kas, op sociale hulpverlening vanwege de gemeenschappen en gewesten en op de maatschappelijke dienstverlening van de openbare centra voor maatschappelijk welzijn. De verantwoordelijkheden tussen de sociale kassen van de gedetineerden en de openbare centra voor maatschappelijk welzijn moeten duidelijker worden afgebakend. Wij zijn een tendens in de rechtspraak waarbij de verantwoordelijkheid in eerste instantie bij de sociale kassen wordt gelegd, niet erg genegen. Gedetineerden dragen immers tot die kassen bij naargelang van hun aankopen en niet naargelang van hun financiële middelen. Minder draagkrachtige gedetineerden besteden soms de opbrengsten van hun onderbetaalde gevangenisarbeid aan talrijke alledaagse artikelen – tegen een hogere prijs dan in de buitenwereld –, omdat zij niets ter hunner beschikking hebben. Andere gevangenen kopen daar slechts sporadisch, omdat hun familie hun van een en ander voorziet. De werking van deze kassen garandeert bijgevolg niet de rechtvaardigheid die aan de grondslag moet liggen van een solidair systeem van collectieve herverdeling, zoals de sociale zekerheid (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 342-346).
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
c) Schorsing van socialeverzekeringsprestaties 21. De wetgever schorst ook socialeverzekeringsprestaties, ingeval de gerechtigde in hechtenis wordt genomen. Dat wekt meer verwondering dan de schorsing van socialebijstandsuitkeringen. Het algemeen ingeroepen motief dat de gedetineerde geen tweede maal moet worden ten laste genomen door de overheid, verliest hier immers aan kracht. Socialeverzekeringsprestaties worden grotendeels gefinancierd met bijdragen van de sociaal verzekerden.52 Daarenboven is de toekenning van socialeverzekeringsprestaties niet afhankelijk van de voorwaarde dat het de uitkeringsgerechtigde ontbreekt aan toereikende bestaansmiddelen. De tussenkomst van de FOD Justitie kan bijgevolg niet als een vorm van bestaansmiddelen in mindering van de socialeverzekeringsprestaties worden gebracht en de schorsing van de socialeverzekeringsprestaties ook geen alternatief hiervoor zijn. De sociale verzekeringen beogen de gerechtigden niet alleen te vrijwaren voor behoeftigheid, maar streven ook ernaar de betrokkenen een vergelijkbare levensstandaard als voorheen te garanderen bij intrede van een verzekerd sociaal risico. Die doelstelling is vreemd aan de tussenkomst van de FOD Justitie die in vele gevallen niet het peil van de socialeverzekeringsprestaties bereikt. De tenlasteneming van de gedetineerde door de FOD kan bijgevolg zeker niet de volledige schorsing van socialeverzekeringsprestaties rechtvaardigen. 22. De schorsing een socialeverzekeringsprestatie zou wel verantwoord zijn, ingeval de situatie van de sociaal verzekerde omwille van zijn detentie niet langer beantwoordt aan het verzekerde sociaal risico. Om die reden acht men de schorsing van werkloosheidsuitkeringen vaak gerechtvaardigd. Men gaat ervan uit dat gedetineerden niet beschikbaar zijn voor de algemene arbeidsmarkt en bijgevolg niet voldoen aan de voorwaarde van onvrijwillige werkloosheid, zoals deze wordt omschreven in de werkloosheidsverzekering.53 Die argumentatie schiet echter tekort ten aanzien van 52
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In dezelfde zin kon het argument dat de Belgische Staat niet moest instaan voor in het buitenland verblijvende gepensioneerden, niet verhinderen dat mijnwerkerspensioenen betaalbaar bleven tot beloop van tachtig procent van hun bedrag (art. 27 Pensioenwet Werknemers, gew. art. 10 KB nr. 50 van 16 juli 1986). Detentie kan voorts werkloosheid veroorzaken en ertoe leiden dat de betrokkene niet onvrijwillig werkloos wordt. In geval van vrijwillige werkloosheid kan een werkloze tijdelijk worden uitgesloten van het recht op uitkeringen, maar vangt de betaling van de werkloosheidsuitkeringen aan na afloop van de tijdelijke uitsluiting, voor zover de betrokkene dan beschikbaar is voor de algemene arbeidsmarkt en geen passende arbeid weigert.
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uitkeringsgerechtigde werklozen die zijn vrijgesteld van het vereiste beschikbaar te zijn voor de algemene arbeidsmarkt.54 Zij volstaat evenmin ten aanzien van gedetineerden die bepaalde strafuitvoeringsmaatregelen genieten precies om hen toe te laten zich beschikbaar te stellen voor de algemene arbeidsmarkt.55 In de meeste gevallen waarin de wetgever socialeverzekeringsprestaties schorst, blijft het verzekerde sociaal risico bestaan tijdens de detentie. Detentie neemt bijvoorbeeld een bestaande arbeidsongeschiktheid niet weg, terwijl uitkeringsgerechtigden zonder personen ten laste toch worden beroofd van de helft van hun arbeidsongeschiktheidsuitkering.56/57 Hetzelfde geldt voor de diverse pensioenen die worden toegekend door de pensioenverzekeringen. Detentie maakt de titularis van een rustpensioen niet jonger en brengt ook de ambtenaar, werknemer of zelfstandige die het recht op een overlevingspensioen heeft doen ontstaan, niet opnieuw tot leven. 23. De wetgever schorst weliswaar niet alle socialeverzekeringsprestaties, maar daaruit kan ons inziens niet de bereidheid van de wetgever worden afgeleid om terug te komen op zijn keuze om pensioenen, arbeidsongeschiktheids- en werkloosheidsuitkeringen te schorsen. 54 55
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Cf. Ch. VANDERLINDEN, “Travail pénitentiaire et sécurité sociale du détenu”, Rev.dr.pén. 2003, 647. Men moet betreuren dat gedetineerden in beperkte hechtenis – anders dan gedetineerden onder elektronisch toezicht – verstoken blijven van het recht op werkloosheidsuitkeringen, ook al zijn de toekennings- en uitbetalingsvoorwaarden vervuld. De RVA is traditioneel van oordeel dat dat gedetineerden in beperkte vrijheid ten laste blijven van de gevangenisinrichting en geen bijkomend vervangingsinkomen onder de vorm van een uitkering mogen genieten. Er bestaat andere rechtspraak, maar recente rechtspraak bevestigt het standpunt van de RVA (Arbh. Luik, AR 32.892/04, 23 december 2005). Als de persoon in beperkte hechtenis beschikbaar is voor de algemene arbeidsmarkt, is de zienswijze van de RVA nochtans niet gerechtvaardigd. Een wetgevend ingrijpen op dit punt zou nuttig zijn (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 106-110). Art. 105 ZIV-Wet; art. 233 ZIV-Besluit; art. 32 Arbeidsongeschiktheidsbesluit Zelfstandigen. Een rechter rechtvaardigt recentelijk nog die vermindering met het klassieke motief dat de gedetineerde onderhoud en verblijf geniet op kosten van de staat, terwijl de werknemer in de buitenwereld zelf in zijn levensonderhoud en huisvestingskosten moet voorzien (Arbrb. Liège AR 332950, 13 oktober 2008). De detentie stelt op zichzelf geen einde aan de voordien bestaande arbeidsongeschiktheid. Wel kan in voorkomend geval uit de gestrafte feiten (drug- of voertuigensmokkel, diefstallen) worden afgeleid dat de betrokkene niet meer arbeidsongeschikt is (Arbh. Mons AR 19.839, 14 mei 2009 – dit arrest maakt het voorwerp uit van een cassatieberoep; Arbh. Mons AR 21.033, 3 september 2009).
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
Arbeidsongevallen- en beroepsziektevergoedingen worden inderdaad niet geschorst in geval van detentie. Dat wordt veeleer verklaard door de ontstaansgeschiedenis van deze sociale verzekeringen die werden opgevat als verzekeringen van de aan werkgevers en tewerkstellende overheden opgelegde risicoaansprakelijkheid. In de logica van die aansprakelijkheidsregelingen worden de toe te kennen vergoedingen slechts verminderd, als het slachtoffer omwille van zijn arbeidsongeval of beroepsziekte een vergoeding tot dekking van dezelfde schade verkrijgt via een ander beschermingsmechanisme.58 De tenlasteneming van gedetineerden door de FOD Justitie kan echter niet worden beschouwd als een vergoeding van dezelfde schade. De faillissementsverzekering voor zelfstandigen kent ook niet de regel dat de toegekende uitkeringen worden geschorst in geval van detentie. De faillissementsuitkeringen werden oorspronkelijk immers toegekend onder zeer restrictieve voorwaarden en slechts voor een periode van twee maanden, zodat een gelijktijdig appel op een tussenkomst van de FOD Justitie en de faillissementsverzekering zich wellicht niet kon voordoen. In geval van een strafrechterlijke veroordeling op grond van de artikelen 489, 489bis en 489ter van het Strafwetboek, kan de betrokkene trouwens geen aanspraak maken op de faillissementsuitkering. Bovendien heeft de wetgever de faillissementsuitkering veeleer opgevat als een overbruggingsuitkering die de zelfstandige moet toelaten zich te reorganiseren. De wetgever achtte het wellicht niet de moeite dat zou worden nagegaan of de uitkeringsgerechtigde inspanningen daartoe leverde in de korte periode waarin hij de uitkering genoot. De wetgever stelde, anders dan in het kader van de werkloosheidsverzekering, ook niet de eis dat de betrokkene beschikbaar was voor de algemene arbeidsmarkt. Dat uitgangspunt is niet gewijzigd, al is de periode waarin de betrokkene faillissementsuitkeringen kan genieten, intussen opgetrokken tot één jaar. Die specifieke kenmerken van de faillissementsverzekering hebben tot gevolg dat uit het ontbreken van een schorsingsregel ons inziens niet kan worden afgeleid dat de wetgever afstand heeft genomen van de principiële schorsing van socialeverzekeringsprestaties. Wellicht heeft de wetgever de hypothese van de detentie van de uitkeringsgerechtigde om een reden die geen verband hield met het faillissement, gewoon niet voor ogen gehad. Ten slotte wordt de betaling van gezinsbijslagen niet geschorst. De wetgever stelt integendeel uitdrukkelijke regels vast om zoveel mogelijk de doorbetaling van de gezinsbijslagen te waarborgen. De wetgever laat zich hierbij deels door praktische motieven leiden. Ingeval de rechthebbende wordt gedetineerd, zou men in vele gevallen voor hetzelfde rechtgevend kind wel een andere rechthebbende vinden, zodat de gezinsbijslagen via die weg verzekerd zouden blijven. Het opheffen van de schorsingsregel laat toe hetzelfde resultaat te bereiken met minder administratieve
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Art. 47 Arbeidsongevallenwet; art. 14-14bis Arbeidsongevallenwet Overheidspersoneel; art. 51 Beroepsziektewet.
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rompslomp en komt uiteraard ook de betrokken kinderen ten goede.59 De tussenkomst van de FOD Justitie zou ook geen voldoende grond voor een schorsing vormen, ongeacht of men de gezinsbijslagen beschouwt als een recht van het kind of als een voordeel voor de volwassene die het rechtgevende kind ten laste heeft. De FOD Justitie neemt immers alleen de gedetineerde en niet zijn kinderen ten laste. 24. Men kan uit wat hoger is uiteengezet, besluiten dat de schorsing van socialeverzekeringsprestaties onvoldoende wordt gerechtvaardigd met het ingeroepen motief dat de betrokkene reeds ten laste is van de overheid, dat de schorsing meer blootstaat aan kritiek naarmate de geschorste uitkering de tussenkomst van de FOD Justitie overtreft en dat, zelfs op het vlak van het principe van de schorsing, de diverse sociale verzekeringen weinig coherente regels kennen. 3. Nood aan een betere afstemming op de externe rechtspositie van gedetineerden 25. De wetgever duidt de personen aan wie een schorsing van hun socialezekerheidsprestatie wordt opgelegd, niet steeds in dezelfde bewoordingen aan. Bovendien zijn de wetsbepalingen die een schorsing van socialezekerheidsprestaties opleggen, nog niet aangepast aan de intussen gewijzigde of nieuwe strafuitvoeringsmodaliteiten waarin de externe rechtspositie van de gedetineerden thans voorziet.60 De antwoorden van de bevoegde ministers op in het parlement gestelde vragen brengen ter zake vaak wel enige opheldering. Toch zou de wetgever interpretatieproblemen en daarmee gepaard gaande rechtsonzekerheid kunnen voorkomen door in de diverse schorsingsbepalingen en tewerkstellingsmaatregelen uitdrukkelijk te refereren aan de strafuitvoeringsmodaliteiten waarop zij van toepassing zijn. 26. De wetgever moet niet alleen voor meer terminologische duidelijkheid zorgen, hij dient zich evenzeer te beraden over het principe van de schorsing van de socialezekerheidsprestaties ten aanzien van gedetineerden extra muros. Het motief dat de betrokkene al ten laste is van de overheid, kan de schorsing van de socialezekerheidsuitkeringen slechts rechtvaardigen, als de FOD Justitie ook de gedetineerden extra muros effectief ten laste neemt. De integrale schorsing van socialezekerheidsuitkeringen kan voorts worden beschouwd als een bijkomende straf, voor zover die tenlasteneming minder om het lijf heeft dan de tussenkomst van 59 60
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Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 245-267. Dat blijkt bijvoorbeeld duidelijk uit de wijze waarop de gedetineerde begunstigden van diverse tewerkstellingsmaatregelen worden aangeduid (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 121-137).
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
de sociale zekerheid. Als de wetgever bijvoorbeeld een tussenkomst van de FOD Justitie ten behoeve van gedetineerden onder elektronisch toezicht wenst te behouden, dient hij dan ook het peil van die tussenkomst te koppelen aan de evolutie van het leefloon. Zoniet dreigt die tussenkomst voortdurend achterop te hinken bij het leefloon waarop gedetineerden onder elektronisch toezicht anders aanspraak zouden kunnen maken.61 Voorts dient de wetgever te waken over de gelijke behandeling van gedetineerden met vergelijkbare strafuitvoeringsmodaliteiten. Het verdient ons inziens de voorkeur dat de wetgever daarbij het effectieve verblijf in de gevangenis veeleer dan de inschrijving op de rol van een strafinrichting als criterium voor een verschillende behandeling zou nemen. De wetgever dient zich in het bijzonder de vraag te stellen of de verschillen tussen het elektronische toezicht en de beperkte hechtenis een voldoende rechtvaardiging vormen voor de thans erg uiteenlopende behandeling van beide categorieën van gedetineerden. De gedetineerde onder elektronisch toezicht behoudt of verkrijgt meestal opnieuw de betaling van zijn socialezekerheidsuitkering, terwijl voor gedetineerden in beperkte detentie de volledige schorsing van de uitkering de regel blijft.62 4. Nood aan een betere afstemming op de interne rechtspositie van gedetineerden 27. De integrale schorsing van socialezekerheidsprestaties komt neer op een verlies aan sociale bescherming en kan worden beschouwd als een bijkomende straf of een vorm van vermijdbare detentieschade, ingeval de tussenkomst van de FOD Justitie niet evenwaardig is aan het peil van de geschorste socialezekerheidsprestatie. Het moet bovendien worden voorkomen dat de detentie ook na de vrijlating van de betrokkene een verlies aan sociale bescherming blijft veroorzaken. Daarenboven moet worden voorkomen dat de schorsing niet alleen de gedetineerde, maar ook de leden van zijn gezin treft. a) Meer eerbied voor de sociale grondrechten van gedetineerden 28. Artikel 23 van de Grondwet verleent eenieder, dus ook de gedetineerden, het recht op sociale zekerheid. De gedetineerde mag overeenkomstig artikel 6, § 1 van de Basiswet geen andere beperkingen van zijn sociale rechten ondergaan dan deze die voortvloeien uit of onlosmakelijk verbonden zijn met de vrijheidsberoving en deze die worden bepaald door of krachtens de wet. Gedetineerden mogen dus niet worden 61 62
Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 311-356. Eén van de gevolgen van dit verschil in behandeling bestaat erin dat de gedetineerde onder elektronisch toezicht recht heeft op een werkloosheidsuitkering, terwijl de gedetineerde in beperkte hechtenis ervan verstoken blijft, terwijl beiden beschikbaar zijn voor de algemene arbeidsmarkt.
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beroofd van hun recht op sociale zekerheid onder het voorwendsel dat een ander beschermingsmechanisme hen ten laste neemt. De schorsing van socialezekerheidsprestaties is maar geoorloofd, voor zover de FOD Justitie effectief een gelijkwaardige bescherming biedt. De tenlasteneming door de FOD Justitie haalt in vele gevallen echter niet hetzelfde peil als dat van socialeverzekeringsprestaties of socialebijstandsuitkeringen. Als de wetgever blijft vasthouden aan de schorsing van socialezekerheidsprestaties, moet hij telkens waar nodig, ofwel de toekenning van een « surplus » door het socialezekerheidssysteem toelaten, ofwel de tussenkomst van de FOD Justitie verhogen. In het eerste geval dient de wetgever de respectieve verantwoordelijkheden van de FOD Justitie en de respectieve socialezekerheidsinstellingen te verduidelijken en, vooral wat het recht op maatschappelijke integratie en het recht op maatschappelijke dienstverlening betreft, oog te hebben voor een daarmee overeenstemmende allocatie van middelen. In het tweede geval moet de wetgever voorzien in een automatische koppeling van de tussenkomst van de FOD Justitie aan het niveau van de socialezekerheidsprestaties om te vermijden dat de sociale bescherming van gedetineerden achterop hinkt bij indexering of verhoging van socialezekerheidsprestaties. b) Meer aandacht voor de rechten van de gedetineerde na de vrijlating 29. De onttrekking van gedetineerden aan het socialezekerheidssysteem na afloop van de detentie63 is een veel radicalere uitsluiting uit de samenleving dan wordt bedoeld met de tenuitvoerlegging van de vrijheidsstraf en komt neer op een vorm van overbestraffing in de zin van artikel 6, § 1 van de Basiswet. Toch heeft onze socialezekerheidswetgeving in een aantal gevallen tot gevolg dat detentie kan leiden tot een verlies van socialezekerheidsaanspraken na de vrijlating van de betrokkene. Zo kunnen het bestaan van wachttermijnen en referentieperioden waarin de sociaal verzekerde een bepaald beroepsverleden of een aantal bijdragestortingen moet aantonen, dat de sociaal verzekerde niet kan voldoen aan de voorwaarden voor de toekenning van een socialezekerheidsprestatie, omwille van zijn detentie in het verleden. De verlenging van dergelijke referentieperioden64 en de 63 64
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Na afloop van de detentie stopt immers ook de tussenkomst van het andere beschermingsmechanisme. De failissementsverzekering der zelfstandigen zou op dat punt kunnen leren van de werkloosheidsverzekering (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 142143).
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
inkorting van dergelijke wachttermijnen in verhouding tot de duur van de detentie65 kunnen dan verlies van socialezekerheidsrechten na de vrijlating voorkomen. Een aanbod van afdoende mogelijkheden tot voortgezette verzekering kan ertoe leiden dat de gedetineerde de hoedanigheid van sociaal verzekerde bewaart of verder socialezekerheidsrechten opbouwt tijdens zijn vrijheidsberoving. De wetgever zou kunnen overwegen om dat voordeel zonder bijdragebetaling toe te kennen aan gedetineerden die gevangenisarbeid verrichten.66 30. Het meest tegen de borst stuit ons inziens het verval van pensioenrechten voor ambtenaren. De veroordeling van een ambtenaar tot een criminele straf heeft nog steeds het verval van zijn toekomstige pensioenrechten als ambtenaar tot gevolg. De toekomstige pensioenrechten die hij in ruil daarvoor verwerft in de pensioenverzekering voor werknemers, maken dat pensioenverlies niet volledig ongedaan. Bovendien leidt de veroordeling tot een criminele straf tot het verval van een reeds toegekend ambtenarenpensioen. Dat verval wordt in het geheel niet gecompenseerd met de toekenning van een werknemerspensioen. Deze maatregel treft de ambtenaar harder, naarmate hij zich meer ten dienste van de overheid heeft gesteld en een hoger pensioen heeft verworven. Beide vormen van pensioenverval sorteren effect na de vrijlating van de betrokkene. Het verval van pensioenrechten krijgt aldus het karakter van een bijkomende straf en miskent, ondanks de mogelijkheid van eerherstel of gratieverlening, de beginselen van de Basiswet. De wetgever dient het verval van pensioenrechten als ambtenaar ongedaan te maken en het verval van een reeds ingegaan overheidspensioen om te zetten in een schorsing ervan, als hij geen afstand wenst te nemen van de schorsing van andere pensioenen dan de rustpensioenen voor ambtenaren. c) Meer aandacht voor de gezinssituatie van de gedetineerde 31. De schorsingsregels in de diverse socialezekerheidsregelingen houden niet allemaal rekening met het bestaan van gezinsleden van de gedetineerde en vertonen op dat vlak ook een gebrek aan onderlinge coherentie. Dat geldt zowel ingeval de uitkeringsgerechtigde wordt gedetineerd, als ingeval een persoon ten laste van de uitkeringsgerechtigde in hechtenis wordt genomen. 65 66
Op die manier kan bijvoorbeeld het verlies van vervroegde rustpensioenen of van minimumpensioenen worden voorkomen. Het lijkt weinig waarschijnlijk dat het grondwettelijk gelijkheidsbeginsel de wetgever verplicht om dat te doen (zie ook M. COUSINS, “Overview of recent Cases before the European Court of Human Rigths and the European Court of Justice (OctoberDecember 2007)”, European Journal of Social Security 2007, 371-372).
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1°
Detentie van de uitkeringsgerechtigde
32. De schorsingsregels lopen sterk uiteen, als de uitkeringsgerechtigde met gezinslast zelf wordt gedetineerd. Het leefloon, de werkloosheidsuitkeringen, de tegemoetkomingen aan personen met een handicap en de inkomensgarantie voor ouderen worden volledig geschorst. Hoewel het bedrag van deze uitkeringen wordt verhoogd naargelang van de gezinslast van de uitkeringsgerechtigde, slaat de volledige schorsing van de prestatie zwaarder toe naarmate de verhoging wegens gezinslasten een hoger peil bereikt.67 Beter vergaat het gepensioneerde werknemers en zelfstandigen en hun echtgenoot ten laste. De detentie wordt immers behandeld als een geval van feitelijke scheiding, zodat de niet-gedetineerde echtgenoot ten laste de helft van het gezinspensioen blijft ontvangen. De echtgenoot van de gedetineerde wordt behandeld op dezelfde wijze als de echtgenoot die wordt geconfronteerd met een werkelijke feitelijke scheiding. Een nog gunstigere regeling is getroffen voor de gerechtigden op arbeidsongeschiktheidsuitkeringen met een persoon ten laste. Hun uitkering wordt helemaal niet geschorst. 33. Het motief voor de schorsing van de socialezekerheidsprestatie bestaat erin dat de gedetineerde wordt ten laste genomen door de FOD Justitie. De FOD staat echter slechts in voor de persoon van de gedetineerde. De volledige schorsing van socialezekerheidsuitkeringen die buiten het geval van detentie worden verhoogd wegens de gezinslasten van de uitkeringsgerechtigde, is zowel een vorm van vermijdbare en dus te vermijden detentieschade, als een aanslag op normaliseringsprincipe.68 De volledige schorsing van socialezekerheidsprestaties in geval van detentie van de uitkeringsgerechtigde is ons inziens niet verenigbaar met de beginselen waarop de Basiswet berust. Een gedeeltelijke schorsing van de uitkering die rekening houdt met de mate waarin de FOD Justitie instaat voor het levensonderhoud van de gedetineerde uitkeringsgerechtigde zelf, lijkt wel te stroken met de Basiswet. De wetgever zou dan wel voor meer onderlinge consistentie van de schorsingsregels moeten zorgen. 34. Dat lijkt evenwel geen lichte opdracht te zijn. 67
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Alleen de schorsing van de inkomensgarantie voor ouderen blijft in dat opzicht vrij van kritiek. Het bedrag van deze uitkering wordt immers nooit verhoogd wegens de gezinslasten van de uitkeringsgerechtigde. Dat blijkt zeer duidelijk in de gevallen waarin de schorsing van de socialezekerheidsuitkering de gedetineerde in de feitelijke onmogelijkheid stelt om nog langer onderhoudsgeld te betalen.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
Men zou misschien voorstellen alleen het basisbedrag van de uitkering te schorsen bij detentie van de uitkeringsgerechtigde en voor het overige de verhoging wegens gezinslast van dat bedrag door te betalen. De afgeleide rechten van de personen ten laste van de gedetineerde uitkeringsgerechtigde blijven dan onaangetast. Vooral in het kader van de sociale verzekeringen stoot een dergelijk voorstel op bezwaren. De verhoging van een socialezekerheidsprestatie wegens gezinslast vertegenwoordigt immers in vrijwel alle sociale verzekeringen waarin zij voorkomt, een zeer gering gedeelte van de totale uitkering waarop de gerechtigde aanspraak kan maken vóór zijn detentie. De persoon ten laste die niet is gedetineerd, zou dan een zo schraal gedeelte van de voorheen aan de gedetineerde toegekende socialeverzekeringsprestatie ontvangen dat hij in feite wordt verwezen naar de socialebijstandsregelingen. Niet alle vermijdbare detentieschade wordt aldus voorkomen. De schorsingsregel in de pensioenverzekeringen voor werknemers en zelfstandigen lijkt daarom beter model te kunnen staan voor een mogelijke oplossing. De detentie van de uitkeringsgerechtigde heeft in de pensioenverzekeringen immers slechts de schorsing van de helft van de uitkering aan gezinsbedrag tot gevolg, zodat de in vrijheid vertoevende persoon ten laste de andere helft blijft ontvangen. Die regel zou kunnen worden ingevoerd in de socialebijstandsregelingen.69 Vele socialebijstandsuitkeringen verdubbelen thans immers het bedrag van hun uitkeringen voor gerechtigden met personen ten laste.70 De invoering van die regel in de andere sociale verzekeringen ligt echter moeilijker. Feitelijke scheiding leidt in de werkloosheidsverzekering thans tot een daling van het bedrag van de werkloosheidsuitkering, tenzij de werkloze op grond van een rechterlijke of notariële akte onderhoudsgeld betaalt of zijn echtgenoot is gemachtigd door derden verschuldigde geldsommen te ontvangen. Behoudens in die laatste hypothese zou de overname van de schorsingsregel in de pensioenverzekeringen erop neerkomen dat de wetgever eerst moet bepalen dat bij feitelijke scheiding de werkloosheidsuitkering « aan gezinsbedrag » behouden blijft 69
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Een vergelijkbare regeling bestaat reeds, wat de inkomensgarantie voor ouderen betreft. Elk lid van het gezin heeft een individueel recht op die uitkering, zodra de betrokkene voldoet aan de voorwaarden voor de toekenning ervan. Bovendien wordt het bedrag van die uitkering niet verhoogd wegens gezinslast. De detentie van één van de betrokkenen brengt op zich geen verandering in het recht van de andere. Als de detentie zou uitmonden in een afzonderlijke hoofdverblijfplaats voor de gedetineerde, kan wel verandering in het toegekende bedrag optreden (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 306-308). Dat geldt voor het leefloon en de inkomensvervangende tegemoetkoming voor personen met een handicap. Voor zover de achterblijvende persoon dan zelf aanspraak kan maken op een socialebijstandsuitkering, bekomt hij in feite nu reeds een gehalveerde gezinsuitkering.
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en dat slechts de helft, met name het deel van de gedetineerde werkloze, wordt geschorst. De vraag rijst of de wetgever daartoe bereid zou zijn. In de arbeidsongeschiktheidsverzekering zou de invoering van de schorsingsregel in de pensioenverzekeringen een achteruitgang voor de betrokkenen betekenen, omdat de gedetineerde arbeidsongeschikte thans zijn uitkering integraal behoudt, ingeval deze wegens gezinslast is verhoogd. Daar komt nog bovenop dat een gehalveerd gezinspensioen in de huidige stand van zaken ook niet altijd het peil van socialebijstandsuitkeringen voor alleenstaanden haalt, zodat de niet-gedetineerde persoon ten laste vaak niet gevrijwaard blijft van een ernstige daling van zijn levensstandaard, al geldt dit ook voor gevallen van feitelijke scheiding waarin geen van beide partners is gedetineerd. De uitbreiding van deze regel naar andere sociale verzekeringen zou aldaar hetzelfde effect sorteren. Voorstellen in die zin moeten bijgevolg met de nodige omzichtigheid worden onderzocht. 2°
Detentie van gezinsleden van de uitkeringsgerechtigde
35. Ook de detentie van de persoon ten laste van de uitkeringsgerechtigde heeft, naargelang van de desbetreffende socialezekerheidsregeling, uiteenlopende gevolgen voor diens uitkering. In de werkloosheidsverzekering geldt gedurende een periode van twaalf maanden71 het vermoeden dat de uitkeringsgerechtigde en zijn gedetineerd gezinslid een gezin blijven vormen. De wetgever houdt aldus ermee rekening dat, ondanks de detentie van de persoon te zijnen laste, de vrije uitkeringsgerechtigde vaak dezelfde kosten heeft als vóór de detentie van zijn echtgenoot of partner en ook verplaatsingskosten voor de bezoeken aan de strafinrichting of de instelling van sociaal verweer moet dragen. In de arbeidsongeschiktheidsverzekering behoudt de gerechtigde bij ontstentenis van een uitdrukkelijke regel in de ene of de andere zin waarschijnlijk zijn hoedanigheid van gerechtigde met persoon ten laste, indien de gedetineerde te zijnen laste blijft en dus zolang de gerechtigde hem bijvoorbeeld een maandelijkse som of onderhoudsgeld betaalt. In de pensioenverzekeringen voor werknemers en zelfstandigen wordt de halvering van het gezinspensioen ook toegepast, als de persoon ten laste van de uitkeringsgerechtigde wordt gedetineerd. 36. Die laatste regeling staat beter geen model voor een uniforme oplossing. Voor zover men zou mogen aannemen dat door de tussenkomst van de FOD Justitie de 71
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Art. 59, tweede lid, 2° MB 26 november 1991 houdende toepassingsregelen van de werkloosheidsreglementering.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
gedetineerde niet meer als persoon ten laste van de uitkeringsgerechtigde kan worden beschouwd, zou deze laatste ten minste toch het bedrag voor een alleenstaande moeten ontvangen. Bovendien zou de wetgever voor alle socialezekerheidsuitkeringen moeten aannemen dat de uitgaven van de vrije uitkeringsgerechtigde niet onmiddellijk dalen na de detentie van zijn persoon ten laste, zodat het gerechtvaardigd is de uitkering aan gezinsbedrag nog enige tijd te handhaven. De wetgever zou ook nadien de toekenning van het gezinsbedrag kunnen blijven toestaan, ingeval de uitkeringsgerechtigde kan aantonen nog in een bepaalde mate in te staan voor het levensonderhoud van de gedetineerde persoon ten laste. 5. Nood aan een betere afstemming op de essentiële waarborgen van het strafrecht 37. De schorsing van socialezekerheidsprestaties treft gedetineerden meestal reeds vóór zij zijn veroordeeld. De wetgever vat de schorsing bovendien op als een automatisch gevolg van de detentie. a) Vermoeden van onschuld 38. De grond tot schorsing van socialezekerheidsuitkeringen bestaat in de detentie van de uitkeringsgerechtigde, veeleer dan in zijn veroordeling. Op één uitzondering na gaat de schorsing van de uitkeringen immers onmiddellijk in bij de aanvang van de detentie. In alle andere gevallen worden in voorlopige hechtenis genomen uitkeringsgerechtigden bijgevolg evenzeer door de schorsingsregels getroffen als veroordeelde uitkeringsgerechtigden.72 39. De onderscheiden socialezekerheidsregelingen kennen voorts uiteenlopende regels, voor het geval achteraf blijkt dat het gaat om een onwerkdadige hechtenis.73 De werkloosheidsverzekering en de ziekte- en invaliditeitsverzekering bevatten ter zake geen specifieke regel en voorzien niet in een vertraagde betaling van de geschorste uitkeringen. De ten onrechte in hechtenis genomen uitkeringsgerechtigde kan slechts proberen een vergoeding vanwege de Belgische Staat te verkrijgen op grond van de wet van 13 maart 1973 betreffende de vergoeding voor onwerkzame voorlopige hechtenis. 72
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Alleen de pensioenverzekeringen voor werknemers en zelfstandigen stellen de schorsing van de pensioenbetaling uit tot de vrijheidsberoving een wettelijk vastgestelde bepaalde duur bereikt. Ook dan is het niet uitgesloten dat de schorsing ingaat, alvorens de betrokkene is veroordeeld. Voor uitkeringen die niet worden geschorst, is uiteraard niet voorzien in een regeling voor gevallen van onderwerkdadige hechtenis.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
Leefloon wordt wel achteraf gerecupereerd, tenzij de betrokkene een vergoeding van de Belgische Staat verkrijgt. De wetgever laat immers de cumulatie van het leefloon met deze vergoeding niet toe.74 Tegemoetkomingen aan personen met een handicap, pensioenen en de inkomensgarantie voor ouderen worden achteraf gestort, ongeacht of de betrokkene tevens aanspraak maakt op die vergoeding. Ook op dit punt mangelt het de diverse schorsingsregels aan onderlinge coherentie. 40. Kan men aanvoeren dat niet de veroordeling, maar de hechtenis de grondslag is voor de schorsing van de socialezekerheidsprestaties, vermits het motief van de wetgever erin bestaat dat de betrokkene geen twee maal ten laste moet worden genomen door de overheid? Zou men daaruit kunnen afleiden dat de schorsingsregels niet op gespannen voet staan met het vermoeden van onschuld? Zou men dan ook de gevolgtrekking kunnen maken dat de betrokkene geen aanspraak op latere betaling van de geschorste prestatie moet worden gegund, vermits hij ook tijdens de onwerkdadige hechtenis ten laste is van de FOD Justitie en de latere betaling van de uitkering de consistentie van de schorsingsregel ondergraaft? De gedetineerde zou – als men die redenering volgt – het verschil tussen zijn ingehouden uitkering en de tenlasteneming door de FOD Justitie kunnen terugvorderen in de vorm van een vergoeding. Die oplossing schenkt geen volledige voldoening. Zij zou erop neerkomen dat de betrokkene onrechtstreeks ertoe wordt verplicht ten minste tijdelijk bij te dragen tot de onderhouds- en verblijfskosten van zijn onrechtmatige hechtenis. De volledige teruggave van de socialezekerheidsprestatie verdient de voorkeur. De uitkeringsgerechtigde verkrijgt dan immers op een makkelijkere wijze het ten onrechte gederfde bedrag. Er bestaat immers geen discussie over de omvang van dat bedrag en er moet ook geen bijzondere procedure worden gevolgd. Men mag daarenboven niet uit het oog verliezen dat het genot van een socialezekerheidsuitkering gepaard gaat met andere voordelen die niet verbonden zijn aan een vergoeding,75 die de ten onrechte in hechtenis genomen uitkeringsgerechtigde bijgevolg niet helemaal herstelt in de tevoren bestaande toestand. De integrale teruggave van een socialebijstandsuitkering zou evenwel slechts mogen worden toegelaten bij ontstentenis van een effectieve vergoeding wegens onwerkdadige of onrechtmatige hechtenis. De toegekende vergoeding zou dan in mindering moeten worden gebracht op de desbetreffende socialebijstandsuitkering, voor zover zij niet louter de morele schade van de betrokkene compenseert. 74
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Die regel veroorzaakt thans interpretatieproblemen (zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 331-332). Zo behoudt de uitkeringsgerechtigde de hoedanigheid van sociaal verzekerde in andere sectoren van de sociale zekerheid.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
41. Een zodanige handelwijze strookt ook beter met het strafrechtelijke vermoeden van onschuld. Dat vermoeden zou nog beter worden geëerbiedigd, ingeval zelfs de gedeeltelijke schorsing van een socialezekerheidsuitkering pas zou ingaan op het ogenblik waarop de gedetineerde effectief veroordeeld is, zodat van een onwerkdadige hechtenis geen sprake meer kan zijn. Het vermoeden van onschuld vereist immers dat elke vorm van detentieschade die niet onontkoombaar verbonden is aan de vrijheidsberoving, maximaal wordt voorkomen ten aanzien van nietveroordeelde gedetineerden. De Basiswet bepaalt in die zin dat verdachten de faciliteiten die verenigbaar zijn met de orde en de veiligheid en bepaalde aanpassingen van hun regime van uitvoering van de vrijheidsbenemende maatregel dienen te genieten, zodat elke schijn wordt vermeden dat hun vrijheidsbeneming het karakter heeft van een straf.76 Men mag wellicht aannemen dat het uitstel van de schorsing gedurende een voldoende lange periode, gecombineerd met de teruggave van bij onwerkdadige hechtenis ingehouden uitkeringen, in grote mate daarop neerkomt.77 Als de wetgever voor de schorsing van socialezekerheidsuitkeringen blijft opteren, zou hij met een uitstel van de schorsing beter het proportionaliteitsbeginsel eerbiedigen. De wetgever zou dan immers de uitkeringsgerechtigden die in geval van detentie weinig vat hebben op de gebeurtenissen, een overgangsperiode gunnen en aldus voorkomen dat de schorsing als maatregel van algemeen belang een onevenredige last legt op individuele gerechtigden. Het uitstel van de schorsing veroorzaakt misschien enig gebrek aan coherentie. De gedetineerde zou in het begin van zijn detentie bevoordeeld kunnen zijn ten opzichte van de niet-gedetineerde uitkeringsgerechtigde. Niettemin vertoont een “geïnstitutionaliseerd” uitstel van de schorsing nog een belangrijk praktisch voordeel. Uitstel van schorsing vermindert de noodzaak tot terugvordering van onverschuldigd betaalde socialezekerheidsuitkeringen door de socialezekerheidsinstellingen die vaak niet tijdig ervan op de hoogte zijn dat de uitkeringsgerechtigde is gedetineerd. Uitstel eerbiedigt ook beter het recht op privacy van gedetineerden waaraan ook de nodige aandacht moet worden geschonken bij het uitwerken van een sluitende uitwisseling van informatie tussen gevangenissen en gemeenten en tussen de FOD Justitie en het socialezekerheidssysteem.78 b) Automatisch gevolg van de straf 42. Zonder dit probleem grondig te analyseren vanuit de invalshoek van het beginsel non bis in idem,79 wijzen wij erop dat de schorsing van de 76 77 78 79
Art. 10-13 Basiswet. Die combinatie bestaat in de pensioenverzekeringen voor werknemers en zelfstandigen. Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 381-382. Dit beginsel werd door het Grondwettelijk Hof ingeroepen met betrekking tot de wettelijke beperking van het stemrecht van gedetineerden (GWH nr. 187/2005, 14
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socialezekerheidsprestaties van gedetineerden kan overkomen als een automatisch gevolg van de straf of de schuld.80 Het Grondwettelijk Hof heeft een beroepsverbod verbonden aan een hoofdveroordeling reeds als ongrondwettelijk beoordeeld, zowel omwille van het automatische karakter van het verbod, als wegens de onmogelijkheid voor de gedetineerde om de gegrondheid ervan te betwisten.81 Ook al bestaat de wettelijke grondslag voor de schorsing veeleer in de detentie dan in de veroordeling van de uitkeringsgerechtigde, toch rijst de vraag of de schorsing van socialezekerheidsprestaties moet worden beschouwd als een automatisch gevolg van de straf of de schuld, als men rekening houdt met het gebrek aan consistentie tussen de schorsingsregels en het motief dat de wetgever ervoor inroept. c) Bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf als alternatief voor de schorsing 43. Bij de beleidskeuze van de wetgever om de sociale bescherming van gedetineerden toe te vertrouwen aan de FOD Justitie en dienvolgens de uitbetaling van vele socialezekerheidsuitkeringen geheel of gedeeltelijk te schorsen, kunnen, zoals hoger is uiteengezet, kritische vragen worden gesteld. Voorts staat de wijze waarop die beleidskeuze wordt geïmplementeerd, bloot aan ernstige kritiek. Het mangelt de schorsingsbepalingen aan consistentie en coherentie. Daarenboven dienen zij beter in overeenstemming gebracht te worden met de principes waarop de interne rechtspositie van gedetineerden berust, met de strafuitvoeringsmodaliteiten waarin de externe rechtspositie van gedetineerden voorziet en met bepaalde essentiële strafrechtelijke waarborgen. Zoals wij hierna uiteenzetten, kan de heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf tegemoetkomen aan die pijnpunten. In dat geval wordt het integrale behoud van de betaling van socialezekerheidsuitkeringen aan gedetineerden de regel met als tempering een inhouding aan de bron met het oog op de financiering van onderhoud en verblijf in de gevangenis.82 Een dergelijke bijdrage mag ons inziens slechts ertoe strekken de kosten van levensonderhoud in de brede zin (voedsel, enz.) te dekken. Het gevangeniswezen wordt immers
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december 2005). Zie voorts bijvoorbeeld RvS nr. 91/2008, 18 juni 2008; RvS nr. 67/2007, 26 april 2007. Cf. Ch. VANDERLINDEN, “Travail pénitentiaire et sécurité sociale du détenu”, RPDC 2003, 668. GwH nr. 57/98, 27 mei 1998; GwH nr. 87/98, 15 juli 1998; GwH nr. 38/2000, 29 maart 2000; GwH nr. 40/2000, 6 april 2000; GwH nr. 77/2000, 27 juni 2000. De voeding en het onderhoud van gevangenen zouden in 2007 gemiddeld € 4,12 per gevangene per dag hebben gekost (DIRECTORAAT-GENERAAL PENITENTIAIRE INRICHTINGEN FOD JUSTITIE, Activiteitenverslag 2007, www.just.fgov.be/img_justice/publications/pdf/241.pdf 34). Volgens het OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DES PRISONS beschikken de gevangenissen ongeveer over € 3 per gevangene per dag en is dat bedrag niet meer geïndexeerd in de laatste vijftien jaar (OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DES PRISONS (Section belge), Notice 2008 – De l’état du système carcéral belge, www.oipbelgique.be/biblio.php?type=notice&annee=2008, 92).
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
gefinancierd met publieke middelen. Het zou niet gerechtvaardigd zijn om de gedetineerde te doen bijdragen in de kosten van de infrastructuur, de personeelskosten, de kosten van beveiliging, enz.83 Het gaat ook niet erom de gedetineerden te doen betalen voor wat eerder gratis was. De thans gangbare schorsing van socialezekerheidsprestaties komt immers onrechtstreeks neer op een excessieve en ongelijk gespreide bijdrage tot de kosten van de hechtenis. Voorts moet erop gewezen worden dat de bijdrage in overeenstemming moet zijn met de beginselen van de Basiswet die menswaardige levensomstandigheden, een minimum aan verblijfsruimte, kwaliteitsvolle voeding en gezondheidszorgen en een passende bezoldiging van gevangenisarbeid eist.84 Men kan niet toelaten dat gedetineerden bijdragen tot de financiering van hen opgelegde erbarmelijke levensomstandigheden. De bijdrageheffing moet slechts worden overwogen, op voorwaarde dat de schorsing van de betaling van socialezekerheidsuitkeringen eerst wordt opgeheven en de gedetineerde beschikt over billijke financiële middelen. In die zin komt ons voorstel tegemoet aan de opmerkingen van de Commissie-Dupont die zich in 2001 diende uit te spreken over artikel 84 van het voorontwerp van de Basiswet. Die bepaling die verdween tijdens de finale herziening van de wet, verleende aan de Koning de mogelijkheid om te bepalen dat een gedeelte van de arbeidsinkomsten van de gedetineerden zou worden ingehouden ten voordele van de staat als bijdrage tot hun verblijf in de gevangenis. Volgens de commissieleden mocht alleen aan veroordeelden die beschikten over een normaal (vervangings)inkomen, de betaling van een gedeelte van hun onderhoudskosten worden opgelegd.85/86 De commissie sloot zich aan bij de opvatting van G. DE JONGE87 dat het vermoeden van onschuld zich ertegen verzet dat die heffing eveneens aan verdachten zou worden opgelegd.
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Dat is ook het standpunt van de Commissie-Dupont: “Het huidig artikel 66 van het Algemeen Reglement van de Strafinrichtingen bepaalt thans dat op de opbrengst van de geleverde gevangenisarbeid ten voordele van de Staat vier tienden als beheerskosten worden afgehouden. Aangezien het gevangeniswezen, evenals vele andere overheidsinstellingen, uit de algemene middelen gefinancierd wordt, kan bezwaarlijk een argument gevonden worden voor het afdragen door gedetineerden van een gedeelte van hun inkomen specifiek tot bestrijding van de kosten van de penitentiaire infrastructuur” (Eindverslag van de commissie “basiswet gevangeniswezen en rechtspositie van gedetineerden”, Parl.St. Kamer 2000-01, nr. 1076/1, 161). Art. 41 e.v. Basiswet. Eindverslag van de commissie “basiswet gevangeniswezen en rechtspositie van gedetineerden”, Parl St. Kamer 2000-01, nr. 1076/1, 160-161. Zie ook G. DE JONGE, Strafwerk, Over de arbeidsverhouding tussen gedetineerden en Justitie, Breda, Papieren Tijger, 1994, 162-164. G. DE JONGE, Strafwerk, Over de arbeidsverhouding tussen gedetineerden en Justitie, Breda, Papieren Tijger, 1994, 163.
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Artikel 84 van het voorontwerp werd niet behouden in de uiteindelijke wettekst, omdat het niet voldeed aan die legitimiteitsvereisten.88 44. De vervanging van de schorsing van socialezekerheidsprestaties door een dergelijke bijdrage zou tegemoetkomen aan een aantal principiële bezwaren tegen de schorsing van socialezekerheidsprestaties. De bijdrage zou de regels inzake de sociale bescherming van gedetineerden voorts veel consistenter en coherenter kunnen maken en ze beter verzoenbaar maken met de fundamentele waarborgen die gedetineerden ontlenen aan het strafrecht. 45. De bevolking is gerechtigd van de wetgever te verlangen dat hij zich bezint over een eerder gemaakte keuze. De problematiek van de sociale bescherming van (ex-) gedetineerden en hun gezin, is immers van groot belang voor de hele maatschappij. De sociale bescherming die (ex-)gedetineerden en hun verwanten genieten, draagt ontegensprekelijk bij tot hun vooruitzicht op re-integratie, tot de eerbied voor hun waardigheid en tot het voorkomen van recidive. De doctrine toont aan dat geen enkele relatie bestaat tussen het aantal opsluitingen en het niveau van criminaliteit. De gevangenis blijkt met andere woorden zeer weinig af te schrikken. Daarentegen bestaat een nauw verband tussen het aantal opsluitingen en de bestaansonzekerheid, ja zelfs de werkloosheidsgraad van de bevolking van een land.89 Bestaanszekerheid garanderen aan een individu beschermt de maatschappij bijgevolg tegen de verleiding van één van haar leden om (opnieuw) de onderlinge samenhorigheid te verbreken. 1) Keuze voor de heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf met het oog op meer overeenstemming met de sociale grondrechten van gedetineerden 46. De schorsing van socialezekerheidsprestaties bij detentie stuit op principiële kritiek. Het grondrecht op sociale verzekering en op sociale bijstand wordt immers onder meer bij artikel 23 van de Grondwet ook verzekerd aan gedetineerden. Detentie neemt vaak niet weg dat het door een sociale verzekering gedekte risico of de door een socialebijstandsregeling bestreden behoefte blijft bestaan of leidt soms zelfs ertoe dat die behoefte ontstaat. Als dat het geval is, zou de wetgever moeten 88
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De heffing van een bijdrage op de bezoldiging van gevangenisarbeid als bijdrage tot zijn onderhoudskosten wordt kritisch onthaald door sommige auteurs (zie Ph. AUVERGNON en C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question: une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, 121). Die regeling werd in Frankrijk trouwens opgeheven bij wet 2002-1138 van 9 september 2002. In zijn bijdrage tot deze bundel preciseert Ph. AUVERGNON bovendien dat in Italië de gedetineerden bijdragen tot hun huisvestingskosten met de opbrengst van hun arbeid, maar dat dit niet of niet meer het geval is in Duitsland, Engeland, Spanje en Frankrijk. G. RUSCHE en O. KIRCHHEIMER, Peine et structure sociale: histoire et théorie critique du régime pénal, Paris, Cerf, 1994, 399 p.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
voorzien in de toekenning en uitbetaling van de overeenstemmende socialezekerheidsprestatie, ook al is de uitkeringsgerechtigde gedetineerd.90 De integrale schorsing van socialezekerheidsprestaties leidt bovendien tot ongelijkheid, omdat het bedrag van de geschorste uitkeringen sterk uiteenloopt. Het toegekende bedrag van socialebijstandsuitkeringen is hoger, naarmate de uitkeringsgerechtigde over minder bestaansmiddelen beschikt. De integrale schorsing ervan treft de meest behoeftige uitkeringsgerechtigden dus het hardst. De schorsing van socialeverzekeringsprestaties benadeelt de uitkeringsgerechtigden meer, naargelang zij voordien meer arbeid hebben gepresteerd en een hoger beroepsinkomen hebben genoten en bijgevolg ook meer hebben bijgedragen tot de financiering van de sociale verzekeringen. Het motief voor de schorsing bestaat erin dat de uitkeringsgerechtigde reeds ten laste is van de overheid. Dat motief zou een verband tussen de omvang van de tenlasteneming door de FOD Justitie en de omvang van de schorsing verklaren, maar rechtvaardigt niet dat tegelijkertijd de meest behoeftige en de meest bijdragende uitkeringsgerechtigden harder worden getroffen. 47. Men verdedigt de schorsing van socialezekerheidsprestaties met het argument dat gedetineerde uitkeringsgerechtigden anders worden bevoordeeld, zowel ten opzichte van uitkeringsgerechtigden die niet zijn gedetineerd en bijgevolg geen tussenkomst van de FOD Justitie genieten, als ten opzichte van gedetineerden die hun arbeidsinkomen verliezen als gevolg van hun detentie. In beide gevallen wordt de beoogde discriminatie voorkomen door de sociale bescherming van de gedetineerden aanzienlijk te verminderen. De betaling van vele eerder toegekende socialezekerheidsprestaties wordt geschorst gedurende de periode van detentie. De schorsing verhindert ook dat gedetineerden die hun arbeidsinkomen hebben verloren, om die reden aanspraak zouden kunnen maken op de toekenning en betaling van sommige socialezekerheidsuitkeringen. De wetgever zou nochtans evengoed gelijkheid van behandeling kunnen nastreven door de socialezekerheidsprestaties van gedetineerden niet te schorsen, maar een eventueel forfaitair vastgestelde bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf in de gevangenis erop te heffen. De wetgever zou aldus in eerste instantie vermijden dat gedetineerde uitkeringsgerechtigden worden bevoordeligd ten opzichte van uitkeringsgerechtigden die niet in hechtenis worden genomen. Het behoud van de volledige socialezekerheidsuitkering zou gedetineerden intra muros zonder persoon ten laste in een gunstigere situatie plaatsen dan de vrije burger (aangezien sommige behoeften van de gedetineerde ten laste worden genomen door de FOD Justitie). Dat
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Ter illustratie vermelden wij de discriminerende schorsing van de werkloosheidsuitkering van de gedetineerde die, op het moment van zijn opsluiting, was vrijgesteld van de beschikbaarheid voor de algemene arbeidsmarkt.
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zou op zijn beurt in strijd zijn met de Basiswet. Men moet de gedetineerde “ervan bewust maken” dat het systeem van sociale bescherming niet mag ontaarden.91 De heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf zou bovendien toelaten dat gedetineerden die hun arbeidsinkomen verliezen als gevolg van hun hechtenis, vanaf en tijdens de vrijheidsberoving aanspraak maken op sommige socialezekerheidsprestaties die de wetgever hen thans ontzegt door de betaling van socialezekerheidsuitkeringen te schorsen. De heffing van een “werkelijke” bijdrage door gedetineerden vermijdt veel meer dan een “blinde” schorsing van de uitkeringen dat de wetgever om budgettaire redenen onevenredige lasten legt op individuele rechtsonderhorigen, met name de gedetineerde uitkeringsgerechtigden. 48. Een bijdrage van gedetineerden in de kosten van onderhoud en verblijf is minder denkbeeldig dan men misschien denkt. Wij geven twee – zij het niet van kritiek vrijblijvende – voorbeelden van dit fenomeen. Zo dragen gedetineerden in beperkte hechtenis nu al onder bepaalde voorwaarden – zij het onder kritiek – rechtstreeks een deel van die kosten92 en wordt de geringe omvang van de bezoldiging van gevangenisarbeid wel eens gebillijkt – ten onrechte volgens ons – met het argument dat het eigenlijk gaat om een tegenprestatie voor de in de gevangenis genoten « kost en inwoning ».93 91 92
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Dat houdt ook in dat de gedetineerde wordt geïntegreerd in het maatschappelijk weefsel dat dank zij deze sociale bescherming wordt in stand gehouden. MO 9 februari 1973 ((1172/I) Afhouding voor onderhoudskosten van het loon van de geetineerden aan wie het stelsel van de “beperkte vrijheid” of de “beperkte hechtenis” is toegestaan. Uit die omzendbrief blijkt nochtans dat gedetineerden in beperkte vrijheid slechts moeten bijdragen tot de kosten van detentie als zij een loon ontvangen. In de praktijk varieert het dagelijks door de gedetineerde te betalen bedrag van gevangenis tot gevangenis en benadert het 2,5 euro. Op dezelfde wijze wordt het door een werkgever aan de geïnterneerde in beperkte vrijheid betaalde loon overgemaakt aan de directeur van de inrichting die dertig procent inhoudt als bijdrage in de kosten van de internering (Instructies Et/XVIII 7 maart 1966 betreffende het stelsel van de beperkte vrijheid – wet ter bescherming van de maatschappij van 1 juli 1964, Bestuur van de Penitentiairre inrichtingen en het Sociaal verweer. De instructies voegen eraan toe dat twintig procent van het loon beschikbaar is voor aankopen in de kantine, vervoerskosten en hulp aan de familie. De resterende vijftig procent vormen een reserve die door de directeur wordt gebruikt voor de aankoop van kledij of werkgereedschap ten behoeve van de geïnterneerde of voor hulp aan diens familie. Zie Ph. AUVERGNON en C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question: une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, 121. Als men die gedachtegang doortrekt, zou men tot de conclusie komen dat de uitkeringsgerechtigde die gevangenisarbeid verricht, tweemaal bijdraagt tot de kosten van voeding en onderdak, een eerste maal door de schorsing van zijn socialezekerheidsprestatie en een tweede maal door de ontoereikende omvang van de bezoldiging voor de penitentiaire arbeid.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
Bovendien kent de Belgische wetgeving al op andere terreinen dan de gevangenis gevallen waarin een vaste of van bepaalde parameters afhankelijke bijdrage wordt aangerekend aan personen die gerechtigd zijn en blijven op socialezekerheidsuitkeringen, terwijl zij de tussenkomst van een ander beschermingssysteem genieten. De betaling van een gedeelte van de kinderbijslagen aan de instelling waarin een kind is geplaatst door bemiddeling of ten laste van de overheid94 en de mogelijkheid voor openbare centra voor maatschappelijk welzijn om een bijdrage in de kosten van de maatschappelijke dienstverlening te vragen van uitkeringsgerechtigde begunstigden95 kunnen worden beschouwd als een voorbeeld daarvan. Hetzelfde geldt voor de gedeeltelijke opschorting van de integratietegemoetkoming bij opname van de persoon met een handicap in een instelling, een openbare dienst of een socialezekerheidsinstelling.96 De vergelijking van de doelstelling, aard en omvang van de tussenkomst van die mechanismen, met de doelstelling, aard en omvang van de tenlasteneming door de FOD Justitie kan bijdragen tot een beter inzicht in de vorm die de bijdrage van gedetineerde uitkeringsgerechtigden in de kosten van onderhoud en verblijf kan aannemen. 2) Consistentie en coherentie van de socialezekerheidswetgeving 49. De tenlasteneming door de FOD Justitie leidt ertoe dat de gedetineerde reeds tot op zekere hoogte ten laste is van de overheid. Zelfs als men rekening houdt met de verschillende doelstellingen van de diverse socialezekerheidsregelingen en met de cumulatiebepalingen die zij bevatten,97 vormt dat ene motief geen valabele verklaring voor de talrijke verschillen tussen de talrijke schorsingsregels. Er zou ons inziens een consistent verband bestaan tussen de tenlasteneming door de FOD Justitie van de gedetineerden en de heffing van een bijdrage in de kosten van verblijf en onderhoud in de gevangenis. De vervanging van de huidige schorsingsregels door een dergelijke heffing zou bovendien de coherentie van de socialezekerheidswetgeving ten goede komen. Die heffing is immers verenigbaar met de kenmerken en financieringslogica van zowel de socialebijstandsuitkeringen als de socialeverzekeringsprestaties. Voor beide soorten uitkeringen bestaan immers cumulatiebepalingen die voorkomen dat eenzelfde behoefte aan bestaanszekerheid meer dan één maal wordt gelenigd. Zoals hoger is uiteengezet, kent onze 94 95 96 97
Art. 70 Kinderbijslagwet Werknemers. Art. 98 OCMW-Wet. Art. 12 Wet Tegemoetkomingen Personen met een handicap; art. 28 Besluit Tegemoetkomingen Personen met een handicap. Zo kan men bijvoorbeeld aannemen dat de verzekering voor geneeskundige verzorging geen prestaties verleent, voor zover de FOD Justitie reeds de kosten van de geneeskundige verzorging van een gedetineerde ten laste neemt. In diezelfde zin zou men kunnen begrijpen dat de tussenkomst van de FOD Justitie wordt beschouwd als een bestaansmiddel dat wordt in mindering gebracht op een toe te kennen socialebijstandsuitkering.
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socialezekerheidsregeling overigens al gevallen waarin een bijdrage wordt aangerekend aan de gerechtigden op een socialebijstandsof socialeverzekeringsprestatie, op grond dat zij de tussenkomst van een ander beschermingssysteem genieten. Voor zover de tenlasteneming door de FOD Justitie bijdraagt tot het levensonderhoud en de huisvesting van gedetineerde uitkeringsgerechtigden, verantwoordt deze tussenkomst de heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf in de gevangenis. Die bijdrage kan worden geheven op alle socialezekerheidsuitkeringen die het gederfde arbeidsinkomen van de uitkeringsgerechtigde vervangen of hem een minimuminkomen verlenen en die aldus bijdragen tot zijn levensonderhoud en huisvesting. De tenlasteneming door de FOD Justitie rechtvaardigt geen heffing van een dergelijke bijdrage op socialezekerheidsprestaties die het arbeids-, vervangings- of minimuminkomen van de betrokkene aanvullen, omdat de uitkeringsgerechtigde bijzondere uitgaven, zoals uitgaven voor de opvoeding van kinderen, medische verzorging, enz., moet dragen. Voor zover de gedetineerde wordt geconfronteerd met die uitgaven en de FOD Justitie die uitgaven op zich niet bestrijdt, vindt men in de tussenkomst van de FOD geen rechtvaardiging voor de heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf op die socialezekerheidsprestaties. 50. Een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf in de gevangenis zou consistent zijn met het ervoor ingeroepen motief. Zij kan bovendien worden geheven op een transparante en coherente wijze. De bijdrage kan immers worden ingehouden op elke socialeverzekerings- of socialebijstandsuitkering die de vorm van een minimuminkomen of een vervangingsinkomen aanneemt. De bijdrage mag niet worden toegepast op socialezekerheidsprestaties die het inkomen van de uitkeringsgerechtigde aanvullen met het oog op de bestrijding van bepaalde uitgaven. De aard van de socialezekerheidsuitkering bepaalt met andere woorden of de bijdrage verschuldigd is of niet.98 3)
Een betere overeenstemming met de strafrechtelijke waarborgen
51. Zoals hoger is uiteengezet, zijn de huidige schorsingsregels onvoldoende aangepast aan de nieuwe strafuitvoeringsmodaliteiten waarin de externe rechtspositie van gedetineerden voorziet. De schorsingsregels staan bovendien op gespannen voet met de basisbeginselen waarop de interne rechtspositie van gedetineerden berust en met het vermoeden van onschuld.
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Voor zover arbeidsongeschiktheidsuitkeringen worden verhoogd wegens het bijkomend verlies van zelfredzaamheid van de gerechtigde, mag de bijdrage alleen worden geheven op het basisbedrag van de uitkering en niet op de verhoging wegens de nood aan de hulp van derden.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
52. Wat de externe rechtspositie van de gedetineerden betreft, zou de wetgever – als hij voor de schorsing van socialezekerheidsprestaties blijft opteren – moeten verduidelijken of hij de schorsing wenst toe te passen ten aanzien van gedetineerden extra muros. De wetgever zou daarbij het effectieve verblijf in de gevangenis veeleer dan de inschrijving op de rol van een strafinrichting als uitgangspunt moeten nemen. De wetgever zou gedetineerden in beperkte hechtenis op dezelfde wijze moeten behandelen als gedetineerden onder elektronisch toezicht. Diezelfde zorgvuldigheid mag men ook van de wetgever verlangen, als hij een bijdrage in de kosten van het verblijf en onderhoud in de gevangenis zou heffen op socialezekerheidsprestaties. Een dergelijke bijdrage kan uiteraard worden aangepast aan de verleende strafuitvoeringsmodaliteit. De heffing ervan zou dan niet alleen bijdragen tot een grotere gelijkheid tussen gedetineerde en niet-gedetineerde uitkeringsgerechtigden, maar ook tot een gelijke behandeling van gedetineerden, ongeacht de hun verleende strafuitvoeringsmodaliteiten. 53. De huidige schorsingsregels stroken niet zo goed met de basisprincipes waarop de interne rechtspositie van de gedetineerden berust. De schorsing van socialezekerheidsprestaties treft immers gedetineerden die – behoudens de voorwaarde van detentie – voldoen aan de huidige voorwaarden voor de toekenning en uitbetaling ervan. Zij wordt gerechtvaardigd met de tenlasteneming door de FOD Justitie. Deze tussenkomst bereikt zeer vaak evenwel niet het peil van de geschorste socialezekerheidsprestatie. Zolang de wetgever de tussenkomst van de FOD Justitie niet optrekt tot het niveau van de socialezekerheidsuitkeringen, stelt de wetgever zich bloot aan het verwijt dat hij de vrijheidsberoving doet gepaard gaan met een bijkomende straf of vermijdbare detentieschade in de vorm van een verlies aan sociale bescherming. Met de heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf in de gevangenis zou de wetgever die kritiek ontzenuwen, voor zover het bedrag van de bijdrage in verhouding staat tot het genoten voordeel van de tenlasteneming door de FOD Justitie. De schorsingsregels stoten nog meer tegen de borst, voor zover zij niet alleen de gedetineerde zelf, maar ook zijn verwanten treffen. Zij houden ook op zeer uiteenlopende wijze rekening met de gezinslast van de uitkeringsgerechtigde. Die diversiteit is ongetwijfeld mede te wijten aan de uiteenlopende wijze waarop de diverse socialezekerheidsuitkeringen worden aangepast aan de gezinssituatie van de uitkeringsgerechtigde. Zolang de gezinsmodalisering van socialezekerheidsuitkeringen niet wordt geharmoniseerd, rijst de vraag of de schorsingsregels wel kunnen passen in de gezinsmodalisering van socialezekerheidsprestaties buiten het geval van detentie, als zij tezelfdertijd ook moeten worden afgestemd op de interne rechtspositie van de gedetineerden en meer onderlinge coherentie moeten vertonen. De heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf in de gevangenis zou alleszins tot voordeel hebben dat de weerslag op de socialezekerheidsuitkering dezelfde blijft, ongeacht of de uitkerings137
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
gerechtigde dan wel zijn persoon ten laste wordt gedetineerd. De bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf ontneemt – anders dan de schorsing van de socialezekerheidsprestaties – de betrokken gezinnen geen socialezekerheidsrechten in geval van detentie en is wel verzoenbaar met de interne rechtspositie van de gedetineerden. 54. Voor zover de schorsingsregels leiden tot een verlies aan sociale bescherming voor de gedetineerde of zijn gezin, staan zij op gespannen voet met het vermoeden van onschuld. De detentie veroorzaakt immers reeds bijkomende schade, alvorens de betrokkene is veroordeeld. Bovendien voorziet de wetgever vaak niet in de betaling van de geschorste socialezekerheidsprestaties, ingeval achteraf blijkt dat het gaat om een onwerkdadige hechtenis. Ook vanuit dat oogpunt stuit een goed berekende bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf niet op dezelfde bezwaren als de schorsing van socialezekerheidsprestaties. Zij compenseert immers slechts een genoten voordeel waarop niet-gedetineerde uitkeringsgerechtigden geen aanspraak maken. De onmiddellijke ingang van de heffing zou stroken met de onderliggende ratio ervan. Ingeval de heffing de vorm zou aannemen van een inhouding op de uitkering, zou de wetgever de heffing om praktische redenen kunnen uitstellen tot de hechtenis een zekere tijd aanhoudt. Aldus vermijdt men administratieve rompslomp en voorkomt men dat een gedeelte van de socialezekerheidsuitkeringen nog enige tijd na de aanvang van de detentie onverschuldigd wordt uitbetaald en achteraf moet worden teruggevorderd.
III. GEVANGENISARBEID99 55. Gevangenisarbeid, verricht ten behoeve van de gevangenis100 of private ondernemingen, wordt georganiseerd door de overheid en verricht door gedetineerden.101 Personen die een werkstraf ondergaan, verrichten geen gevangenisarbeid, vermits zij niet kunnen worden beschouwd als gedetineerden. Als gedetineerden gebruik maken van de hun verleende strafuitvoeringsmodaliteiten om arbeid te presteren in de buitenwereld, verrichten zij evenmin gevangenisarbeid.102
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Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 63-86. Een groot aantal taken binnen de gevangenis wordt verricht door gedetineerden. Zij bereiden en verdelen de maaltijden, reinigen de niet private ruimtes, passen op zieke medegevangenen, herstellen gootstenen, klasseren radiografieën, controleren de binnenplaatsen en maken de uniforme kledij en meubelen in de gevangenis (zie F. DUFAUX, Du travail forcé à la faveur du labeur: Sens et fonctions du travail carcéral aujourd’hui, Brussel, ULB, 2008, 78). Gedetineerden die de toelating krijgen om andere dan in de gevangenis beschikbaar gestelde arbeid te verrichten tijdens hun detentie, presteren geen gevangenisarbeid. Zie K. NEVENS, “Penitentiair arbeidsrecht. Dringt het arbeidsrecht de gevangenis binnen?”, TSR 2007, 231-302.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
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De Basiswet bekrachtigt in zekere zin een recht op arbeid voor gedetineerden.103 Men betreurt het voortdurende gebrek aan beschikbare arbeid in de gevangenis en de geringe kwaliteit van de meestal weinig valoriserende, onderbetaalde en ongeschoolde arbeid.104 Wij beperken ons in deze bijdrage ertoe eerst te onderzoeken of het verrichten van gevangenisarbeid een recht op socialezekerheidsprestaties met zich meebrengt, en vervolgens of gevangenisarbeid een struikelblok voor de toekenning of uitbetaling van socialezekerheidsprestaties kan vormen.
A. GEVANGENISARBEID ALS BRON VAN SOCIALEZEKERHEIDSRECHTEN 57. Vrijwel algemeen werd aangenomen dat het verplichte karakter van gevangenisarbeid uitsloot dat een arbeidsovereenkomst werd gesloten tussen de betrokken gedetineerde en de Belgische Staat.105 Sinds de opheffing van artikel 30ter van het Strafwetboek door de Basiswet heeft gevangenisarbeid echter geen verplicht karakter meer.106 De Commissie-Dupont preciseerde dat de opheffing van artikel 30ter ertoe strekte dat gevangenisarbeid voortaan het voorwerp van een arbeidsovereenkomst zou kunnen uitmaken. De wetgever beoogde immers de integratie van gevangenen in het socialeverzekeringssysteem voor werknemers.107 Sommigen zijn daarom van oordeel dat er dan ook geen beletsel meer bestaat voor de kwalificatie van gevangenisarbeid als arbeid die wordt verricht ter uitvoering van 103 104
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Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 74-79. Zie COMITE EUROPEEN POUR LA PREVENTION DE LA TORTURE ET DES PEINES OU TRAITEMENTS INHUMAINS OU DEGRADANTS DU CONSEIL DE L’EUROPE, Rapport au Gouvernement de la Belgique relatif à la visite effectuée en Belgique, Strasbourg, Raad van Europa, 2006, www.cpt.coe.int/fr/etats/bel.htm. Het comité beveelt de Belgische overheden aan inspanningen te doen om het arbeidsaanbod in de gevangenis te Andenne, die een officieel bezoek kreeg, te verhogen. In haar antwoord wees de regering erop dat een opdrachthouder werd aangewezen om demarches, met inbegrip van een informatie-opdracht, te ondernemen naar ondernemingen die arbeid zouden kunnen bieden aan de gevangenisinrichtingen. Een delegatie van het comité heeft een vijfde bezoek aan België gebracht van 28 september tot 7 oktober 2009 om de uitvoering van de vorige rapporten te onderzoeken. Het verslag van dit bezoek was nog niet beschikbaar op 1 januari 2010. Arbrb. Hoei AR 58.430, 21 september 2005, onuitg.; Arbrb. Brussel AR 35788/02, 29 juni 2007, onuitg.; Arbrb. Brussel, AR 63/06, 18 oktober 2007, onuitg. Art. 30ter SW,, opgeheven bij art. 169, 5° Basiswet, in werking getreden krachtens het koninklijk besluit van 28 december 2006 betreffende het gevangeniswezen en de rechtspositie van de gedetineerden. Eindverslag van de commissie “basiswet gevangeniswezen en rechtspositie van gedetineerden”, Parl.St. Kamer 2000-01, nr. 1076/1, 149, 154 en 159; Verslag namens de Commissie voor de Justitie bij het vorostel van basiswet gevangeniswezen en rechtspositie van gedetineerden, Parl.St. Kamer 2003-04, nr. 231/15,112.
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een arbeidsovereenkomst. Anderen wijzen erop dat het bestaan van een arbeidsovereenkomst vroeger ook niet werd erkend ten aanzien van bepaalde categorieën van gevangenen die niet konden worden verplicht te arbeiden onder de gelding van artikel 30ter van het Strafwetboek. Nog anderen betwijfelen dat de lage bezoldiging voor gevangenisarbeid wel kan worden aangemerkt als loon in de zin van de Arbeidsovereenkomstenwet, en zijn om die reden uiterst sceptisch ten aanzien van de mogelijkheid om de arbeidsrelatie tussen gedetineerden en de Belgische Staat te kwalificeren als een arbeidsovereenkomst.108 Recente rechterlijke uitspraken doen wellicht niet vermoeden dat het bestaan van een arbeidsovereenkomst tussen gedetineerden en de Belgische Staat zonder slag of stoot zal worden erkend, al is er nog geen beslissing over een betwisting die is ontstaan na de opheffing van artikel 30ter van het Strafwetboek.109 Daartegenover staat dat de Basiswet onder meer het normaliseringsprincipe huldigt en bepaalt dat de tewerkstelling van gedetineerden zoveel mogelijk geschiedt in dezelfde omstandigheden als in de buitenwereld. De wetgever wenst dat gedetineerden geen andere beperkingen van hun sociale rechten moeten dulden dan deze die voortvloeien uit of onlosmakelijk verbonden zijn met de vrijheidsberoving en deze die worden bepaald door of krachtens de wet.110 Men verwacht dat de Basiswet ertoe zal leiden dat gedetineerden zich in steeds meer gevallen tot de rechter zullen wenden in de hoop voor recht te horen zeggen dat zij de hoedanigheid van werknemer bezitten. 58. Het verdient aanbeveling dat de wetgever de ter zake bestaande rechtsonzekerheid uit de wereld zou helpen. De wetgever dient zich daartoe te beraden over de opportuniteit om gevangenisarbeid te beschouwen als of gelijk te stellen met arbeid die wordt verricht ter uitvoering van een arbeidsovereenkomst. De vraag of de toepassing van de arbeidsovereenkomstenwetgeving moet worden uitgebreid tot gedetineerden, blijft hier buiten beschouwing. Bij eerder onderzoek is vastgesteld dat de arbeidsreglementering reeds grotendeels van toepassing is op gevangenisarbeid, ook al is de rechtsverhouding tussen de betrokken gedetineerde en de Belgische Staat niet gekwalificeerd als een arbeidsovereenkomst.111 Het is ook 108
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Het EHRM heeft een beslissing van ontvankelijkheid gewezen in een zaak waarbij de aard van de penitentiaire arbeid in het geding is (EHRM Stummer c. Autriche, 11 oktober 2007). De Oostenrijkse regering voert in deze zaak aan dat gevangenisarbeid niet kan worden gelijkgesteld met arbeid ter uitvoering van een arbeidsovereenkomst, op grond dat de bezoldiging niet ertoe strekt te voorzien in het levensonderhoud van de gedetineerde en dat gevangenisarbeid beoogt de gedetineerden een bezigheid te bieden. Het EHRM had zijn arrest nog niet geveld op 1 januari 2010. Voor zover ons bekend, is de recentste uitspraak een arrest van het Arbeidshof te Brussel (Arbh. Brussel AR 47.364, 27 augustus 2007, onuitg.). Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 79-81. Art. 6 en 83 Basiswet. Zie K. NEVENS, “Penitentiair arbeidsrecht. Dringt het arbeidsrecht de gevangenis binnen?”, TSR 2007, 231-302.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
niet noodzakelijk dat de wetgever die rechtsverhouding erkent als een arbeidsovereenkomst, opdat socialezekerheidsrechten zouden kunnen worden toegekend aan gevangenisarbeid verrichtende gedetineerden. In de huidige stand van de wetgeving kan de toepassing van het socialeverzekeringssysteem voor werknemers immers, voor zover gewenst,112 bij koninklijk besluit worden uitgebreid tot gedetineerden die penitentiaire arbeid verrichten. De Koning kan die uitbreiding overigens beperken tot bepaalde sectoren van de sociale zekerheid. Hij kan die uitbreiding ook afhankelijk maken van andere voorwaarden dan voor nietgedetineerde werknemers. De keuze die de wetgever ter zake maakt, moet consistent zijn met zijn zienswijze over de verantwoordelijkheid van het socialezekerheidssysteem ten aanzien van gedetineerden. Naarmate de sociale bescherming van gedetineerden wordt georganiseerd via een ander beschermingsmechanisme, daalt de legitimiteit van een gebeurlijke keuze om gevangenisarbeid verrichtende gedetineerden en hun opdrachtgevers te verplichten tot het storten van bijdragen die zouden worden aangewend voor de financiering van het socialeverzekeringssysteem. De socialezekerheidsprestaties worden in de huidige stand van zaken immers meestal geschorst in geval van detentie.113 59. Het bestaan van een arbeidsovereenkomst tussen gevangenisarbeid verrichtende gedetineerden en de Belgische Staat wordt nog niet expliciet erkend. Noch het socialezekerheidssysteem der werknemers, noch de arbeidsongevallenwetgeving is tot op heden toepasselijk gemaakt op gedetineerden die gevangenisarbeid verrichten. De betrokkenen genieten bijgevolg geen wettelijke arbeidsongevallenvergoedingen, als zij een ongeval oplopen bij het verrichten van penitentiaire arbeid. Ter zake is een administratieve vergoedingenregeling uitgewerkt. De toegekende vergoedingen bereiken echter vaak niet het peil van de wettelijke arbeidsongevallenvergoedingen.114 De wetgever dient bijgevolg ofwel de voordelen van de administratieve vergoedingenregeling te verhogen, ofwel de arbeidsongevallenwetgeving 112
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Artikel 26.17 Rec(2006) van het Comité van Ministers van de Raad van Europa aan de lidstaten over de “Règles pénitentiaires européennes” bepaalt dat gedetineerden die arbeid verrichten, in de mate van het mogelijke moeten worden aangesloten bij het socialezekerheidsstelsel. Die penitentiaire regels die een penitentiair beleid willen definiëren, zijn weliswaar niet dwingend van aard (zie J.-M. LARRALDE, “Les règles pénitentiaires européennes, instrument d’humanisation et de modernisation des politiques carcérales”, RTDH 2007, 993-1015. Voor zover het behoud van de hoedanigheid van rechthebbende in de gezinsbijslagenverzekeringen de wetgever zou drijven tot een toepassing van de RSZ-Wet op gevangenisarbeid, kan deze bij koninklijk besluit wellicht worden beperkt tot de desbetreffende sector van de sociale zekerheid. Zie G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, “Naar een volwaardige regeling voor ongevallen bij penitentaire arbeid” in Arbeidsrecht tussen wel-zijn en niet-zijn. Liber amicorum Prof. Dr. Othmar Vanachter, Antwerpen, Intersentia, 2009, 147-162.
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toepasselijk te maken op ongevallen bij penitentiaire arbeid of op de weg naar en van penitentiaire arbeid. Gedetineerden moeten immers kunnen rekenen op een zelfde vergoeding van ongevallen bij arbeid als in de buitenwereld, ongeacht of zij voor het overige ressorteren onder het systeem der werknemers.115 Artikel 86, § 3 van de Basiswet lijkt veeleer erop te wijzen dat de wetgever het systeem van een afzonderlijke vergoedingenregeling in stand wenst te houden. Wij wachten op het uitvoeringsbesluit dat niet was tot stand gekomen op 1 januari 2010.
B.
GEVANGENISARBEID ZEKERHEIDSRECHTEN
ALS
HINDERPAAL
VOOR
SOCIALE-
60. Naast de vraag of gevangenisarbeid een bron van rechten op socialezekerheidsuitkeringen kan zijn, rijst ook de vraag of gevangenisarbeid een struikelblok voor de toekenning of uitbetaling van socialezekerheidsuitkeringen kan vormen.116 61. In het kader van de socialebijstandsregelingen zouden de normaal toepasselijke wetsbepalingen ertoe leiden dat de inkomsten uit gevangenisarbeid in principe117 in aanmerking moeten worden genomen als een vorm van bestaansmiddelen die moeten worden aangerekend op het bedrag van de uitkering. Zoals ten aanzien van andere arbeidsinkomsten, zou men dan ervoor moeten waken dat de inkomsten uit penitentiaire arbeid niet integraal worden afgetrokken van de bijstandsuitkeringen om een tewerkstellingsval te vermijden.118 62. Wat de sociale verzekeringen betreft, worden pensioenen en werkloosheids- en arbeidsongeschiktheidsuitkeringen geschorst in geval van detentie.
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Artikel 26.14 Rec(2006) van het Comité van Ministers van de Raad van Europa aan de lidstaten over de “Règles pénitentiaires européennes” bepaalt dat de lidstaten gedetineerden die het slachtoffer worden van arbeidsongevallen of beroepsziekten even goed moeten vergoeden als vrije werknemers (zie ook Ph. AUVERGNON en C. GUILLEMAN, Le travail pénitentiaire en question: une approche juridique et comparative, Paris, Mission de recherche Droit et justice, 2006, 105). Die vraag blijft, in de huidige stand van de wetgeving, grotendeels hypothetisch, omdat de meeste socialebijstandsuitkeringen worden geschorst in geval van detentie. Vermits inkomsten uit penitentiaire arbeid niet worden belast, leiden zij niet tot een vermindering van de tegemoetkomingen aan personen met een handicap. Cf. art. 27 Algemeen Reglement Inkomensgarantie Ouderen. Art. 9bis Besluit Tegemoetkomingen Personen met een handicap.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
Als detentie de uitbetaling van werkloosheidsuitkeringen niet in de weg zou staan,119 rijst de vraag of gevangenisarbeid moet worden beschouwd als een vorm van arbeid voor een derde waarvoor de werknemer enig loon of materieel voordeel ontvangt dat kan bijdragen tot zijn levensonderhoud of dat van zijn gezin. In dat geval zou de gevangenisarbeid verrichtende gedetineerde immers niet voldoen aan de voorwaarden voor de toekenning van de werkloosheidsuitkeringen.120 Gelet op de huidige omvang van de vergoeding van gevangenisarbeid zou een bevestigend antwoord toch wel erg verregaand zijn. Voor zover nodig zou de Koning kunnen bepalen dat de bezoldiging van gevangenisarbeid niet wordt beschouwd als een loon of materieel voordeel in de zin van het Werkloosheidsbesluit.121 Rust- en overlevingspensioenen worden slechts uitbetaald, voor zover de pensioengerechtigde elke niet toegelaten arbeid staakt. In geval van detentie worden pensioenen na enige tijd geschorst. Voordien kan bijgevolg de vraag rijzen of gevangenisarbeid behoort tot de toegelaten arbeid. Gevangenisarbeid wordt in de praktijk niet beschouwd als een vorm van beroepsarbeid die een beletsel kan vormen voor de uitbetaling van pensioenen.122 Rekening houdend met de omvang van de bezoldiging van gevangenisarbeid en met het gegeven dat gevangenisarbeid geen socialezekerheidsrechten opent, verdient het aanbeveling gevangenisarbeid buiten beschouwing te laten bij de beoordeling van de vraag of de gedetineerde al dan niet een toegelaten arbeid verricht. Arbeidsongeschiktheidsuitkeringen worden niet of slechts gedeeltelijk geschorst. Als de gedetineerde gevangenisarbeid verricht, moet geval per geval worden nagegaan of hij zich nog in staat van arbeidsongeschiktheid bevindt. Vooral de arbeidsongeschiktheidsverzekering voor werknemers eist dat de uitkeringsgerechtigde elke werkzaamheid stopzet. Vrijwilligerswerk wordt tot op zekere hoogte gedoogd, maar penitentiaire arbeid kan in de meeste gevallen niet als zodanig kan worden beschouwd. Wel zou de wetgever naar analogie kunnen bepalen dat gevangenisarbeid niet wordt beschouwd als een met de staat van arbeidsongeschiktheid onverenigbare werkzaamheid, voor zover de adviserende geneesheer vaststelt dat de verrichte penitentiaire arbeid verenigbaar is met de algemene gezondheidstoestand van de gedetineerde.123
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Werkloosheidsuitkeringen worden geweigerd op grond dat gedetineerden niet beschikbaar zijn voor de algemene arbeidsmarkt. Hoger is uiteengezet dat die regel niet zou mogen gelden ten aanzien van gedetineerden die zijn vrijgesteld van dat vereiste, noch ten aanzien van hun familieleden. Art. 44-45 Werkloosheidsbesluit. De Koning bepaalt dat ook ten aanzien van andere vergoedingen (art. 46 Werkloosheidsbesluit). G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-) gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 294-295. Cf. art. 100 ZIV-Wet.
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IV. CONCLUSIE 63. De significante uitsluiting van gedetineerden uit het Belgische socialezekerheidssysteem wordt niet volledig gecompenseerd door de sociale bescherming die wordt geboden door de gevangenisinrichtingen. De Basiswet die de principes voor de bestraffing en de penitentiaire praktijk vastlegt, liet nochtans enige verandering op dat vlak voorspellen. “Il est grand le mystère de la loi”. 64. De Belgische wetgever heeft, zoals wij hebben uiteengezet, het socialezekerheidssysteem grotendeels ontslagen van zijn anders geldende verplichtingen, op grond dat de gedetineerden reeds ten laste worden genomen door een alternatief beschermingsmechanisme, met name de FOD Justitie. Ons onderzoek wijst op een gebrek aan kennis van de bestaande reglementeringen, op moeilijkheden bij de toepassing ervan124 en op leemten in de geldende wetsbepalingen.125 Het laat ons toe een aantal aanbevelingen aan de wetgever126 te formuleren. 65. De formele wetgever moet de beleidskeuze zelf maken en niet, zoals in het verleden, grotendeels overlaten aan de uitvoerende macht. De formele wetgever moet de regels die de tussenkomst van de FOD Justitie beheersen, zelf bepalen en de
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Als een gedetineerde bijvoorbeeld verscheidene malen wordt overgeplaatst van de ene gevangenis naar een andere, worden deze overplaatsingen niet allemaal meegedeeld. Dat leidt tot moeilijkheden, als de persoon dient gelokaliseerd te worden met het oog op de toekenning van een recht. Een tweede voorbeeld betreft de gedetineerde onder elektronisch toezicht. Hij wordt immers financieel onderhouden door de FOD Justitie, door middel van een speciale uitkering, als hij niet opnieuw zijn werkloosheidsuitkering, zijn tegemoetkomingen aan personen met een handicap of een andere socialezekerheidsprestatie krijgt. De kwestie van het recht op een eventuele bijkomende tussenkomst van de OCMW’s om de bijzondere uitkering van de FOD Justitie te vervolledigen, blijft daarentegen onopgelost. De belangrijkste vraag waarover een beslissing moet worden genomen, is van politieke aard. Komt het uitsluitend aan de FOD Justitie of ook aan de OCMW’s toe, om te zorgen voor de hulp aan personen die een straf ondergaan extra muros? Gelijkaardige debatten worden gevoerd over het al dan niet toekennen van een maatschappelijke dienstverlening door het OCMW, subsidiair en complementair, aan de gedetineerden intra muros. Voor een samenvatting ervan kan worden verwezen naar G. VAN LIMBERGHEN en V. VAN DER PLANCKE, Sociale zekerheid van (ex-)gedetineerden en hun verwanten, Brugge, die Keure, 2008, 422-423. Naast de noodzakelijke wetgevende hervormingen die moeten worden aangevat, kunnen nog andere mechanismen worden opgezet om van de sociale bescherming van (ex-) gedetineerden en hun gezin een hogere maatschappelijke prioriteit te maken en het hoofd te bieden aan de hoger geschetste problemen. Er kan een programma van voortgezette opleiding worden georganiseerd voor de sociale werkers van de gevangenissen, hetzij op het niveau van elke strafinrichting, hetzij op het niveau van het gevangeniswezen zelf.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
uitvoeringsmodaliteiten ervan doen vastleggen in behoorlijk bekendgemaakte uitvoeringsbesluiten met een wettelijke grondslag. De wetgever schorst de uitbetaling van een aantal socialezekerheidsprestaties met specifieke wetsbepalingen die zeer sterk uiteenlopen. Het groeperen van deze wetsbepalingen in één wet zou de kenbaarheid ervan bevorderen en voor de wetgever een goede gelegenheid zijn om zich vragen te stellen over het gebrek aan consistentie en coherentie van de regels en over een betere afstemming op de interne en externe rechtspositie van de gedetineerden en de strafrechtelijke waarborgen die zij genieten. 66. Zo zou de wetgever meer aandacht moeten besteden aan de afbakening van de groepen van gedetineerden op wie hij die schorsingsbepalingen toepasselijk maakt, rekening houdend met de ontwikkelingen op het vlak van de externe rechtspositie van gedetineerden. De wetgever zou daarbij veeleer het werkelijke verblijf dan de formele inschrijving in gevangenis als uitgangspunt moeten nemen en gedetineerden in beperkte hechtenis moeten behandelen op een vergelijkbare wijze als gevangenen onder elektronisch toezicht. De wetgever zou de uitbetaling van socialezekerheidsprestaties slechts mogen schorsen, voor zover de tussenkomst van de FOD Justitie een vergelijkbaar peil bereikt en de behoefte aan sociale bescherming op vergelijkbare wijze wegneemt als de geschorste socialezekerheidsprestatie.127 Als de wetgever blijft vasthouden aan de schorsing van socialezekerheidsprestaties, moet hij in een aantal gevallen hetzij de tussenkomst van de FOD Justitie optrekken, hetzij de tussenkomst van de desbetreffende socialezekerheidsinstelling tot beloop van het verschil toelaten en daarbij zowel duidelijkheid creëren over de afbakening van de wederzijdse bevoegdheden als tegemoetkomen aan de rechtmatige vraag naar middelen van beide socialebeschermingssystemen. De wetgever zou de schorsing van de socialezekerheidsprestaties steeds moeten laten ingaan op hetzelfde tijdstip en in een eenvormige regeling moeten voorzien voor het geval achteraf blijkt dat de gedetineerde het voorwerp heeft uitgemaakt van een onwerkdadige voorlopige hechtenis. Het verdient aanbeveling de schorsing pas te laten ingaan na de veroordeling van de gedetineerde of in ieder geval niet onmiddellijk bij de vrijheidsberoving. 67. In de huidige stand van ons onderzoek bevelen wij de wetgever echter aan zich te beraden over de vraag of de heffing van een bijdrage in de kosten van onderhoud en 127
Vooral gedetineerden die bepaalde strafuitvoeringsmodaliteiten genieten en gedetineerden met personen ten laste, verliezen door de schorsing een belangrijk deel van hun sociale bescherming. Zo kan de schorsing van de werkloosheidsuitkering van de gedetineerde schade berokkenen aan zijn gezin, als hij een uitkering aan gezinsbedrag genoot of als de uitkering hem toeliet om te voldoen aan zijn onderhoudsplicht ten aanzien van zijn kind(eren).
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verblijf niet de voorkeur verdient op de thans gangbare schorsing van de socialezekerheidsprestaties van gedetineerden. De heffing van een dergelijke bijdrage op verder uitbetaalde uitkeringen lijkt ons evenzeer als de schorsing van socialezekerheidsprestaties de gelijkheid te herstellen tussen uitkeringsgerechtigde gedetineerden en gedetineerden die hun arbeidsinkomen verliezen. De bijgaande opheffing van de schorsingsregels heeft tot gevolg dat gedetineerden aanspraak kunnen maken op socialezekerheidsprestaties ter bestrijding van behoeften die ontstaan als gevolg van hun detentie. De heffing van een bijdrage komt bijgevolg beter tegemoet aan de sociale grondrechten van de gedetineerden en verhindert niet dat de re-integratie en rehabilitatie van gedetineerden worden verwezenlijkt en de schade van de slachtoffers wordt hersteld, zoals gewild door de Basiswet. De bijdrage kan niet worden beschouwd als een bijkomende straf of een vermijdbare vorm van detentieschade en vrijwaart de wetgever van de moeilijke opdracht om de verantwoordelijkheden en middelen van sommige socialezekerheidsinstellingen en de FOD Justitie beter op elkaar af te stemmen. De heffing van een dergelijke bijdrage op alle socialezekerheidsuitkeringen die het gederfde arbeidsinkomen van de uitkeringsgerechtigde vervangen of hem een minimuminkomen verschaffen, is een consistente en coherente maatregel. De heffingsbasis kan worden uitgebreid met andere, zij het voldoende hoge128 inkomsten van gedetineerden, zodat zij in die mate ook bijdraagt tot de gelijkheid van uitkeringsgerechtigde en andere gedetineerden. De vervanging van de schorsing van socialezekerheidsprestaties door de bijdrageheffing houdt een substantiële verbetering van het sociaal statuut van de gedetineerden in. Wel komt zij neer op een achteruitgang voor de gedetineerden die in de huidige stand van de wetgeving geen schorsing van de betaling van hun uitkering ondergaan (titularissen van een arbeidsongevallen- of beroepsziektevergoeding bijvoorbeeld) en voortaan worden geconfronteerd met een bijdrageheffing. Dat zou de sociale aanvaardbaarheid van de heffing of de pertinentie ervan in het gedrang kunnen brengen, al draagt de heffing daardoor ook bij tot de gelijkheid onder de gedetineerden. Ingeval de heffing opportuun en praktisch uitvoerbaar wordt geacht, is verder onderzoek nodig om na te gaan of die bijdrage best de vorm zou aannemen van een forfaitair bedrag of zou worden afgestemd op de financiële mogelijkheden van gedetineerden. De bijdrage op een socialezekerheidsuitkering kan uiteraard de vorm aannemen van een – naar wij aannemen – gedeeltelijke schorsing van de uitkering, maar verschilt ook door haar bestemming van de gangbare schorsing. De bijdrage komt immers ten goede aan de FOD Justitie en niet aan de socialezekerheidsregeling die de geschorste uitkering verleent. Ook al eerbiedigt de bijdrage beter de individuele rechten van de gedetineerden, toch is het belangrijk dat ook de budgettaire impact ervan op het socialezekerheidssysteem wordt onderzocht. 128
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Cf. supra, nr. 43.
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
Een dergelijke bijdrageheffing is voorts maar verdedigbaar, op voorwaarde dat de door de Basiswet opgelegde voorwaarden worden nageleefd: verblijfsruimtes en ruimtes voor gemeenschappelijke activiteiten die voldoen inzake gezondheid, brandveiligheid en hygiëne en inzake omvang, verlichting, verluchting, sanitaire voorzieningen en onderhoud (art. 41), voldoende voedsel dat voldoet aan de normen van de moderne hygiëne en zo nodig aangepast is aan de vereisten van zijn gezondheidstoestand (art. 42), dagelijkse en behoorlijke verzorging van het uiterlijk en lichamelijke hygiëne (art. 44) en een gelijkwaardige gezondheidszorg als in de vrije samenleving, aangepast aan de specifieke noden van de gedetineerden (art. 87 e.v.). Het is ondenkbaar dat de gedetineerde rechtstreeks129 zou moeten bijdragen tot de kosten van een ongezonde en veel te enge huisvesting of tot ondermaatse voeding en gezondheidszorgen. Het is van het uiterste belang dat de bijdrageheffing niet van haar doel wordt afgewend. D. KAMINSKI legt op meesterlijke wijze uit dat ogenschijnlijke overwinningen ten voordele van kwetsbare groepen soms slechts het resultaat zijn van een cynisme van de Staat. Zo, voegt deze criminoloog eraan toe, komt de erkenning van de grondrechten van gedetineerden meestal tot stand “lorsqu’elle est susceptible de produire des effets fonctionnels et symboliques plus rentables pour le système étatique (en l’occurrence pour son administration pénitentiaire) que les modalités antérieures”.130 Zo moet men zich ervoor hoeden dat het behoud van socialezekerheidsuitkeringen met bijdrageheffing wordt gebruikt als koren op de molen van zij die een privatisering van de gevangenisinrichtingen voorstaan en het beheer ervan willen onderwerpen aan de wetten van de vrije markt en het winstoogmerk.131/132 Volgens deze logica die reeds wordt toegepast in sommige landen,133 bouwen en beheren private ondernemingen meer of minder luxueuze gevangenissen die voor de gedetineerden toegankelijk zijn naargelang van hun financiële mogelijkheden. Zij betalen immers voor hun onderhoud en huisvesting.134 129 130
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Thans gaat het om een onrechtstreekse bijdrage in de vorm van de gehele of gedeeltelijke schorsing van de uitbetaling van de uitkeringen. D. KAMINISKI, “Les droits des détenus au Canada et en Angleterre: entre révolution normative et légitimation de la prison” in L’institution du droit pénitentiaire. Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Brussel, Bruylant L.G.D.J., 2002, 91. Zie de waarschuwing die S. SNACKEN geeft in haar bijdrage tot deze bundel. Wat de problematiek van de privatisering betreft, kan worden verwezen naar E. GENDERS en E. PLAYER, “The Commercial Context of Criminal Justice: Prison Privatisation and the Pervesion of Purpose”, Crim.L.R. 2007, 513-529. Zie Prison Privatisation Report International, afl. 48, 2002, gepubliceerd door Public Services International Research Unit (PSIRU), University of Greenwich, London, England, www.psiru.org/justice/ppri48.asp. Kan men volgens een afschuwelijk scenario zelfs niet vrezen dat private firma’s gevangenen die hun bijdrage niet kunnen betalen, zouden vasthouden binnen de muren van de gevangenis onder het juk van onbezoldigde en verplichte gevangenisarbeid. Ph. COMBESSIE herinnert eraan dat in het Engeland van de achttiende eeuw armen in de gevangenis werden gehouden, als zij hun bijdrage in de kosten niet konden betalen voor
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Deze problematiek verdient een nader onderzoek dat het bestek van deze bijdrage te buiten gaat. 68. Wat de periode na de vrijlating betreft, dient de wetgever zoveel mogelijk te vermijden dat de detentie na de vrijlating van de gedetineerden nog negatieve effecten sorteert voor hun socialezekerheidsrechten. Het vervangen van de schorsing van uitkeringen door een bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf in de gevangenis is op dat punt een neutrale maatregel. De wetgever dient zoveel mogelijk te vermijden dat de gedetineerden louter omwille van hun detentie niet kunnen voldoen aan de normaal gangbare wachttermijnen en referteperiodes en moet de gedetineerden zoveel mogelijk de gelegenheid bieden om tijdens hun detentie de verdere opbouw van hun socialezekerheidsrechten te vrijwaren door middel van een voortgezette verzekering. De wetgever dient vooral het verval van pensioenrechten voor ambtenaren ongedaan te maken. 69. Omwille van het door de Basiswet gehuldigde normaliseringsprincipe zou de wetgever aan het verrichten van penitentiaire arbeid zoveel mogelijk dezelfde socialezekerheidsrechten moeten koppelen als aan het verrichten van beroepsarbeid buiten de muren van de gevangenis. Zolang gevangenisarbeid niet op hetzelfde peil wordt bezoldigd als beroepsarbeid extra muros, lijkt het ons niet gerechtvaardigd van de gedetineerden daartoe de betaling van dezelfde socialezekerheidsbijdragen te eisen als van de vrije leden van de beroepsbevolking. De wetgever kan gebruik maken van de bestaande wetgeving om de toepasselijkheid van het socialeverzekeringssysteem voor werknemers uit te breiden tot gedetineerden die gevangenisarbeid verrichten. In afwachting van verder onderzoek van de reglementering van de penitentiaire arbeid in andere landen, stelt men op dit vlak vast dat België achterop loopt en dat de Belgische wetgever dringend hieraan moet verhelpen.135 Prioritair moet de wetgever ervoor zorgen dat gedetineerden die het slachtoffer worden van aan hun gevangenisarbeid te wijten ongevallen of ziekten, zowel tijdens als na hun detentie een even goede bescherming genieten als degenen die aanspraak
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de periode van opsluiting die voorafging aan hun proces (Ph. COMBESSIE, Sociologie de la prison, Paris, Ed. La Découverte, 2009, 72). Zie de bijdrage van Ph. AUVERGNON tot deze bundel. Rechtsvergelijkend onderzoek moet ons ervan overtuigen dat hervormingen van het penitentiair recht niet denkbeeldig zijn. Zo heeft Frankrijk voor werkende gedetineerden een minimuminkomen van veertig tot vijfrenveertig procent van het “salaire interprofessionnel de croissance” ingevoerd, terwijl Italië de bezoldiging van gedetineerden heeft vastgesteld op twee derden van wat collectieve overeenkomsten ad hoc waarborgen. In Spanje ressorteren gedetineerden die gevangenisarbeid verrichten, onder het algemene socialezekerheidssysteem sinds 2001. Zij hebben een arbeidsovereenkomst als zij arbeid verrichten voor rekening van private ondernemingen. Ook Italië kent een dergelijke overeenkomst (Ph. AUVERGNON, Le travail pénitentiaire en question, Paris, La documentation Française, 2006, 194 p.).
Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort
kunnen maken op de prestaties van de arbeidsongevallen- en de beroepsziekteverzekeringen in het kader van de sociale zekerheid. 70. Het valt te betreuren dat vijf jaar na de aanneming van de Basiswet, nog steeds geen ontwerp bestaat van het bij artikel 86, § 3 van de wet bedoelde koninklijk besluit inzake ongevallen bij penitentiaire arbeid. Hetzelfde geldt voor de besluiten die het bedrag van de inkomsten voor de in de gevangenis beschikbaar gestelde arbeid (art. 86, § 1)136 en de financiële bijdrage van de gedetineerde in de kosten van de zorgverlening door de arts van zijn keuze (art. 91, § 3) moet vaststellen. De totstandkoming van die besluiten is nochtans noodzakelijk vanuit juridisch oogpunt en dringend op het sociale vlak. Het eindverslag van de Commissie-Dupont leert dat de sociale zekerheid van gedetineerden, met inbegrip van de reglementering van de gevangenisarbeid, een belangrijk punt van zorg is en dat alleen hervormingen op dit terrein aan het geheel van de Basiswet een volledige doeltreffendheid zullen verlenen. 71. Wij willen ten slotte wijzen op een klassiek dilemma.137 Mensen weifelen steeds tussen het ideale – een radicale verandering die onvermijdelijk tijd vraagt – en het pragmatische – de rechten van de mens zoveel en zo snel mogelijk realiseren. Dat brengt ons tot de netelige vraag of de wens om de levensomstandigheden van gedetineerden draaglijker, leefbaarder en aanvaardbaarder te maken ons niet ertoe brengt zoveel waarborgen te vragen dat wij niet meer ertoe komen die levensomstandigheden te veranderen. Met andere woorden: leidt het verbeteren van de detentievoorwaarden door de toekenning van een sociaal statuut aan de gedetineerden en de erkenning van nieuwe 136
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Men beroept zich op het argument dat de verhoging van het loon van gedetineerden tot gevolg zou hebben dat hun arbeid niet langer concurrentieel is ten opzicht van de arbeid in beschermde werkplaatsen en daardoor een daling van de vraag naar gevangenisarbeid bij private ondernemingen zou veroorzaken. Dat argument staat bloot aan kritiek, zowel op het vlak van de theoretische legitimiteit ervan, als op het vlak van de empirische geloofwaardigheid. Het zou nuttig zijn de huidige loonverschillen tussen gedetineerden en personen met een handicap en verschillen in het ritme en de aard van de arbeidsprestaties in kaart te brengen. F. DUFAUX brengt in herinnering dat “en terme de rendement, la possibilité d’agencer librement une main d’œuvre extrêmement flexible, dont la réserve est numériquement abondante, toujours disponible et présente sur place, représente un avantage loin d’être négligeable dans l’ordonnancement économique actuel de la production matérielle, soumise à d’incessantes oscillations conjoncturelles”. Anders dan elders zijn de gedetineerden steeds beschikbaar voor arbeid in de cellen, bijvoorbeeld tijdens de weekends (F. DUFAUX, Du travail forcé à la faveur du labeur: Sens et fonctions du travail carcéral aujourd’hui, Brussel, ULB, 2008, 73). D. KAMINISKI, “Les droits des détenus au Canada et en Angleterre: entre révolution normative et légitimation de la prison” en Y. CARTUYVELS, “Le dilemme des prisons” beide in L’institution du droit pénitentiaire. Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Brussel, Bruylant L.G.D.J., 2002, 308 p.
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rechten niet ertoe de gevangenis te aanvaarden en te legitimeren als een van elke kritiek verstoken noodzakelijk kwaad? Maar is het abolitionistische ideaal zoveel waard dat wij de gedetineerden van vandaag aan hun lot overlaten? Deze kwestie is omstreden. Wij zijn enerzijds van oordeel dat men zo snel mogelijk de levensomstandigheden in de gevangenissen moet verbeteren, maar anderzijds ook dat deze juridische en sociale verbetering slechts haar volle waarde bereikt, als de vraag naar de wijze waarop dit dient te geschieden de vraag naar het waarom van de gevangenis niet versmacht.
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DAGELIJKSE ERVARINGEN VAN DE PSYCHOSOCIALE DIENSTEN VAN DE STRAFINRICHTINGEN MET SOCIALE ZEKERHEID/SOCIALE BIJSTAND
door Roland RASSON en Anneli VERSTRAETE Inspecteurs Maatschappelijk Werk
I. INLEIDING De psychosociale diensten van de gevangenissen vinden het erg belangrijk een bijdrage te mogen/kunnen leveren aan dit onderzoeksproject. Vooreerst worden de maatschappelijk assistenten van de psychosociale diensten dagelijks met vragen en moeilijkheden rond sociale zekerheid en sociale bijstand geconfronteerd. Hierop kunnen ze slechts beperkt en gedeeltelijk antwoord geven, zolang de structurele aanpak uitblijft. Hun ervaringen zijn de bouwstenen voor deze knelpuntennota. Ten tweede benaderen de psychosociale diensten het probleem vanuit een eigen, specifieke invalshoek: de individuele en concrete sociale toestand van de gedetineerden en hun gezin. Onze meerwaarde in dit debat is te kunnen illustreren tot welk ‘soms Kafkaiaans’ resultaat het in uitvoering brengen van sociale zekerheid- en administratieve regelgevingen kan leiden en hoe dit zich concretiseert (en soms haaks op elkaar inwerkt) in de levenssituatie van gedetineerden en hun gezin. Ten derde hebben de psychosociale diensten (en het DG EPI waartoe ze behoren) er alle belang bij dat de problematiek van de sociale bescherming van gedetineerden bestudeerd en structureel verbeterd wordt. De Basiswet van 12 januari 2005 betreffende het gevangeniswezen en de rechtspositie van de gedetineerden en de wet van 17 mei 2006 betreffende de externe rechtspositie van veroordeelden tot een vrijheidstraf en de aan het slachtoffer toegekende rechten in het kader van de strafuitvoeringsmodaliteiten voeren een aantal standaarden in, die door alle medewerkers van DG EPI moeten gerealiseerd worden. We zullen aantonen dat sociale zekerheid/bijstand een belangrijk instrument is om deze standaarden te realiseren, gegeven de opbouw van ons Belgisch sociaal zekerheidssysteem en de sociale kenmerken van de grootste groep veroordeelden. Vooraleer de realiteit ‘intra muros’ te beschrijven zullen we kort de psychosociale dienst voorstellen en situeren in het forensisch werkveld. Vervolgens zullen we aangeven waarom sociale zekerheid en sociale bijstand tijdens detentie zo een belangrijk aandacht- en werkpunt is. Hieraan zullen we dan de bedenkingen en moeilijkheden toevoegen waarmee maatschappelijk assistenten, maar vooral de gedetineerde en hun familie geconfronteerd worden. Nog een opmerking vooraf: in deze toelichting focussen we ons op de groep gedetineerden met recht op verblijf in België. Hiermee sluiten we een grote groep gedetineerden uit: namelijk al deze zonder recht op verblijf in België.
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
II. VOORSTELLING EN SITUERING VAN DE PSYCHOSOCIALE DIENSTEN VAN DE GEVANGENISSEN
In elke Belgische gevangenis organiseert de Federale Overheid een psychosociale dienst. Deze bestaat uit maatschappelijk assistenten, psychologen en een psychiater en wordt geleid door een gevangenisdirecteur. De missie van de PSD is driedelig: vanuit wetenschappelijke hoek een adviserende medewerking te verlenen m.b.t. de uitvoering van de verschillende vrijheidsberovende straffen en maatregelen; gedetineerden te omkaderen en te begeleiden met oog op het voorbereiden van hun psychosociale re-integratie en het evalueren van hun reclasseringsvoorstellen; haar medewerking te verlenen aan een rechtsconforme, veilige en humane uitvoering van de vrijheidsberovende straffen en maatregelen, en dit alles binnen een geest van een herstelgerichte Justitie. De missie van de Psychosociale dienst van de gevangenis kadert binnen de eerste maatschappelijke opdracht1 van het directoraat – generaal penitentiaire inrichtingen. DG EPI is verantwoordelijk voor de rechtsconforme, veilige en humane uitvoering van vrijheidsberovende straffen en maatregelen. Deze verantwoordelijkheid ligt wettelijk verankerd in de Basiswet betreffende het gevangeniswezen en de rechtspositie van gedetineerden van 12 januari 2005. Door deze recente wet heeft de strafuitvoering een wettelijke basis gekregen en is ze conform aan de Universele rechten van de mens en de Europese regelgeving. De eerste taak van de maatschappelijk assistent van Justitie is elke nieuw gedetineerde binnen de 48 uren te onthalen. Dit betekent: wegwijs maken in de gevangenis, vragen beantwoorden, crisisinterventie organiseren, sociaal administratieve toestand bespreken, een luisterend oor bieden en verkennen van emotionele en/of psychische risicofactoren. De belangrijkste opdracht van de maatschappelijk assistenten en de psychologen is de adviesverlening aan gevangenisdirecties en andere beslissende instanties in het kader van de geïndividualiseerde strafuitvoering. Aan de hand van psychosociaal onderzoek, testonderzoek, risicotaxatie en evaluatie van de reclasseringsvoorstellen beschrijven we de psychosociale context van de gedetineerde, de feiten en geven we een advies over de haalbaarheid van een wettelijk mogelijke 1
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De Missie van DG EPI: - is verantwoordelijk voor de rechtsconforme, veilige en humane uitvoering van vrijheidsberovende straffen en maatregelen; - heeft, vanuit zijn expertise, een adviserende rol op penitentiair vlak; - verzekert een doelgericht beheer van elke entiteit binnen zijn bevoegdheid, en dit alles binnen de geest van een herstelgerichte Justitie.
Dagelijkse ervaringen van de psychosociale diensten van de strafinrichtingen met sociale zekerheid / sociale bijstand
strafuitvoeringsmodaliteit. De PSD beoordeelt of concretiseert voorstellen voor penitentiair verloven, beperkte detentie, elektronisch toezicht, vervroegde invrijheidstellingen, ... Zijn deze voorstellen ‘op maat van de persoon en de situatie van de gedetineerde’? Komen deze maximaal tegemoet aan de belangen van de drie betrokken partijen: de samenleving, de slachtoffers en de veroordeelde? Uit onze missie blijkt ook dat we een taak hebben op het vlak van het omkaderen en begeleiden van gedetineerden met het oog op het voorbereiden van hun psychosociale re-integratie. In deze opdracht staan we niet alleen. Hulp- en bijstand aan gedetineerden en hun verwanten is persoonsgebonden materie die onder de bevoegdheid valt van de gemeenschappen. Vandaar dat de Federale Overheidsdienst Justitie in het verleden meerdere samenwerkingsakkoorden afgesloten heeft met de Vlaamse Gemeenschap, het Waalse en het Brussels gewest en de Franse Gemeenschap. Al hun diensten moeten toegang hebben tot de gevangenis, en hun aanbod aan de gedetineerden kunnen doen. Vandaag concretiseert zich dat in onze samenwerking met Justitiële Welzijnswerk, de VDAB, de voorzieningen voor basiseducatie, BLOSO, bibliotheekwezen, ambulante geestelijke gezondheidszorg enz. Nu het strategisch plan inzake hulp- en dienstverlening van de Vlaamse gemeenschap in alle Vlaamse gevangenissen geïmplementeerd is, betekent dit dat gedetineerden – net zoals een vrije burger in Vlaanderen – van het aanbod van al deze sectoren kunnen genieten. Het brengt ook mee dat voor vragen en moeilijkheden op het vlak van sociale zekerheid en administratie de gedetineerde een beroep kan doen op de PSD, op de trajectbegeleider van het JWW, maar ook op zijn advocaat of een hulpverlener van buiten. Inzake voorbereiden van de psychosociale re-integratie heeft de PSD geen monopoliepositie.
III. WAAROM
IS SOCIALE ZEKERHEID EN SOCIALE BIJSTAND VOOR DE GEDETINEERDE EN ZIJN GEZINSLEDEN ZO EEN BELANGRIJK AANDACHTSPUNT/WERKPUNT TIJDENS DE DETENTIE?
Het antwoord is te vinden in de twee recent uitgevaardigde wetten, de Basiswet van 12 januari 2005 betreffende het gevangeniswezen en de rechtspositie van de gedetineerden en de wet van 17 mei 2006 betreffende de externe rechtspositie van veroordeelden tot een vrijheidstraf en de aan het slachtoffer toegekende rechten in het kader van de strafuitvoeringsmodaliteiten. Beide wetten bepalen de standaarden, waaraan de praktijk van de strafuitvoering moet beantwoorden. Art. 6, § 1 van de Basiswet voert het normaliseringbeginsel in. Het stelt dat de gedetineerde aan geen andere beperkingen van zijn politieke, burgerlijke, sociale, economische of culturele rechten mag onderworpen worden dan deze die uit de strafrechtelijke veroordeling of uit de vrijheidsbenemende maatregel voortvloeien,
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
deze die onlosmakelijk met de vrijheidsbeneming verbonden zijn en deze die door of krachtens de wet worden bepaald. Art. 6, § 2 stelt dat bij de uitvoering van de vrijheidsstraf of de vrijheidsbenemende maatregel vermijdbare detentieschade dient voorkomen te worden. Art 48 van de wet op de externe rechtspositie koppelt een vervroegde invrijheidstelling aan het hebben van een sociaal reclasseringsplan. In de Memorie van toelichting bij de wet op de externe rechtspositie staat dat deze reclasseringsprojecten moeten objectief zijn (op grond van objectieve en niet van morele gronden). Naast deze wettelijke verplichting is er nog de sociale realiteit waarmee we binnen de gevangenispopulatie geconfronteerd worden. In de vrije samenleving putten de meeste volwassenen hun inkomen uit arbeid, terwijl het materieel bestaan van het merendeel van de gevangenispopulatie steunt op sociale uitkeringen, zoals ziekteuitkeringen, werkloosheid, leefloon, tegemoetkomingen voor personen met een handicap. Aangezien de gevangenis ook vaak het eindpunt is van marginaliseringprocessen, onthalen we vrij vaak ook de ‘thuisloze burgers’, die door de mazen van het net gevallen zijn en met niets meer in orde zijn. Hen reclasseren is onmogelijk zonder voorafgaandelijk een ‘sociale check up’ uit te voeren. Aangezien sociale zekerheid- en bijstandsuitkeringen het fundament zijn van de materiële bestaanszekerheid van de grootste groep gedetineerden en hun familie, is ons stelsel van sociaal beschermingsrecht individueel en maatschappelijk erg belangrijk. We beschrijven en ordenen de ‘intra muros’ vastgestelde problemen aan de hand van voornoemde wettelijk opgelegde standaarden.
IV. PRAKTIJKEN, BEDENKINGEN EN KNELPUNTEN A. HET NORMALISERINGBEGINSEL (BASISWET ART. 6, § 1) De vraag of het huidig sociaal statuut van de gedetineerde beantwoordt aan het normaliseringbeginsel is het vertrekpunt van dit onderzoeksproject. Zonder ons in het juridisch discours te wagen, schetsen we aspecten van de realiteit die moeilijk te rijmen zijn met het normaliseringbeginsel: tijdens de detentie bouwt een werkende gedetineerde geen pensioenrechten op; door het tekort aan werk in de gevangenis blijven een aantal werkwillige gedetineerden werkloos, zonder hiervoor een vergoeding te ontvangen; gehandicapten die in de buitenwereld niet in staat zijn om te werken en hiervoor een vervangingsinkomen krijgen, geraken in de gevangenis ook heel moeilijk aan het werk en hebben geen enkel inkomensbron; een gedetineerde in beperkte detentie, die geen werk vindt, is wel beschikbaar voor de arbeidsmarkt en toch heeft hij geen recht op een werkloosheidsvergoeding; 156
Dagelijkse ervaringen van de psychosociale diensten van de strafinrichtingen met sociale zekerheid / sociale bijstand
-… Problemen hierbij zijn: -
Wettelijke logica is (ons) niet duidelijk en dus ook moeilijk uit te leggen aan de cliënten. Een voorbeeld: wanneer een persoon met handicap ten laste komt van de publieke overheid, dan verliest hij zijn integratietegemoetkoming. Wordt de gehandicapte opgesloten in de gevangenis, dan geldt deze regeling vanaf de eerste opnamedag. Wordt hij opgenomen in een voorziening voor gehandicapten, dan behoudt hij gedurende de eerste drie maanden zijn integratietegemoetkoming en nadien 1/3 om de lopende kosten te dekken;
-
De inkomsten van de meeste gedetineerden liggen lager dan in de buitenwereld, terwijl de kostprijs van goederen en diensten in de gevangenis gelijke tred houdt met de prijzen in de buitenwereld. Tewerkgestelde gedetineerden ontvangen minimum € 200, maximum € 450 per maand. Enkel de gedetineerden die recht hebben op rustpensioen (tijdens eerste jaar detentie), ziekte- en invaliditeitsuitkeringen (geheel of gehalveerd) en schadeloosstellingen t.g.v. arbeidsongevallen en beroepsziekten behouden deze inkomsten tijdens de detentie. Alle andere uitkeringen worden geschorst. Maar (bijna) elke gedetineerde heeft geld nodig tijdens de detentie: voor huur TV, kantine; voor het in stand houden van familiale relaties (postzegels, telefoonkaarten, geschenken aan kinderen en feestjes in de gevangenis, tussenkomen in de vervoersonkosten van het gezin); voor de betaling van de burgerlijke partij aan de slachtoffers.
B. DETENTIESCHADE VOORKOMEN FAMILIE (BASISWET ART. 6, § 2)
VOOR GEDETINEERDE EN ZIJN
Om de impact van de detentie op de sociale zekerheidstoestand van de gedetineerde en zijn gezin zo beperkt mogelijk te houden, dienen bij aanvang van detentie en in bepaalde gevallen ook tijdens de detentie een aantal administratieve stappen gezet te worden. Instellingen zoals de mutualiteiten en de vakbonden benadrukken dat het recht op… bij einde detentie zich snel weer opent, als de detentie onmiddellijk aangemeld wordt.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
1. Sociale zekerheidstoestand ‘aanpassen’ aan detentietoestand Door de detentie komt de persoon voor kost, inwoon en geneeskundige verzorging ten laste van de FOD Justitie. Daardoor wordt bijvoorbeeld het recht op leefloon, geneeskundige verzorging, tegemoetkomingen aan personen met een handicap geschorst. Ook de werkloosheidsuitkering verliest men tijdens detentie, vanuit de logica dat men niet meer beschikbaar is voor de arbeidsmarkt. De detentie wijzigt het sociaal statuut van de gedetineerde. Dit kan ook gevolgen hebben voor zijn gezin. Wanneer de gedetineerde het gezinshoofd is, valt bij voorbeeld het gezinsinkomen weg. Dit is zo bij werkenden, maar ook bij elk stempelgerechtigd gezinshoofd. Ook het recht op geneeskundige verzorging voor de personen ten laste moet herbekeken worden, wanneer het gezinshoofd zijn vrijheid ontnomen wordt. Detentie brengt dus voor de partner, naast alle andere problemen, heel veel administratief geloop mee. Tijdens het onthaalgesprek informeert de PSD-maatschappelijk assistent de gedetineerde over implicaties van de detentie op zijn sociaal statuut en zijn aangifteplicht. Hij bespreekt met hem waarom het belangrijk is om de detentie aan te geven en wijst hem op de gevolgen van niet-aangifte van detentie: terugbetaling van ten onrechte ontvangen uitkeringen, oplopen van schorsing van de werkloosheidsuitkering bij niet ingaan op oproepen van de VDAB consulent. Het is de eigen verantwoordelijkheid van de gedetineerde om deze instellingen op de hoogte te brengen. Hij kan hierbij de hulp inroepen van de PSD, het JWW, de advocaat, familieleden of andere steunfiguren (bv. zijn OCMW-maatschappelijk werker). Ook de implicaties van de detentie voor het gezin komen ter sprake tijdens de eerste gesprekken met de gedetineerde. Ook hier kan de PSD-medewerker alleen maar de gedetineerde correct informeren in de hoop dat hij dit bespreekt met zijn partner, zodanig dat deze de nodige schikkingen treft. Binnen Justitieel Welzijnswerk en Service d’aide aux Justiciabeles zijn er initiatieven die dit rechtstreeks oppakken met de partners. Sommige diensten stellen aan elke binnenkomende gedetineerde voor om een huisbezoek af te leggen bij zijn gezin, andere houden een permanentie open in de wachtzaal tijdens de bezoekuren. 2. Sociale zekerheidstoestand in orde houden Controle op de ziekte-uitkeringen, erkenningsprocedures van het Vlaams Agentschap voor personen met een handicap, van het Directoraat-Generaal Personen met een handicap of van het Fonds voor arbeidsongevallen houden medische consulten in. Wanneer een gedetineerde hiervoor opgeroepen wordt, wordt nagegaan of de gedetineerde via uitgangsvergunningen hieraan kan voldoen. Indien niet, dan probeert de PSD om het medisch onderzoek in de gevangenis te laten plaatsvinden.
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Dagelijkse ervaringen van de psychosociale diensten van de strafinrichtingen met sociale zekerheid / sociale bijstand
Problemen op vlak van ‘voorkomen van detentieschade’ zijn: -
Het ambtsgeheim en de discretieplicht van de ambtenaar maakt dat de PSD enkel de gedetineerde kan informeren over zijn plicht om de detentie te melden aan SZ-instellingen en hen kan bewust maken van wat de gevolgen zijn als de gedetineerde het niet doet. Of de gedetineerde de detentie effectief meldt (zelf, via steunfiguren van buiten of via de PSD) is de verantwoordelijkheid van de gedetineerde;
-
De instellingen die instaan voor de sociale uitkeringen hebben de plicht onrechtmatige uitbetalingen terug te vorderen. Voor de gedetineerde betekent dit het ontstaan of verhogen van de schuldenlast van de gedetineerde;
-
Voor de uitbetalingsinstellingen is terugvorderen een grote verliespost. Vandaar dat zij aandringen op een systematische melding van de detentie aan de Kruispuntbank Sociale Zekerheid. Vanuit de FOD Justitie kunnen we – binnen de huidige regelgeving – aan deze vraag geen antwoord geven. Enerzijds omwille van het responsabiliseringsprincipe van de gedetineerde (opgenomen in de Basiswet), anderzijds op basis van artikel 1410 van het gerechtelijk wetboek. Dit stelt dat ambtshalve meldingen door FOD Justitie niet kunnen;
-
PSD is afhankelijk van de informatie die de gedetineerde wil /kan meedelen. Sommige gedetineerden verzwijgen aan de maatschappelijk assistent hun sociale inkomsten. Andere, zwakkere gedetineerden weten zelf niet goed wat ze ontvangen en via welke uitbetalinginstelling;
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PSD opereert binnen de muren en is sterk afhankelijk van de bereidheid van anderen (familie, diensten) om papieren, schuldvorderingen, oproepingen, … bijeen te krijgen;
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Wanneer melden? Bij onmiddellijke aanhouding, na de bevestiging door de raadkamer of bij verwijzing naar het vonnisgerecht. Gezien de tijdelijkheid van een preventieve hechtenis kan het onmiddellijk melden grote gevolgen hebben voor de gedetineerde en zijn gezin. In de praktijk blijkt dat de uitbetaling van sociale uitkeringen stopzetten heel snel kan gaan, terwijl het heropenen doorgaans meer tijd vergt;
-
De beslissing ‘wanneer melden’ wordt complexer als door het wegvallen van de uitkering ook de huishuur niet meer kan betaald worden. Vandaar dat bij ‘Carrouselgedetineerden’,2 die gesteund worden door het OCMW gepleit wordt om de huishuur drie maanden te laten doorlopen, zodanig dat de man nog huisvesting heeft bij vrijlating. Voor de sociale diensten (OCMW, JWW, …)
2
Dit zijn gedetineerden die regelmatig korte tijd worden opgesloten.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
brengt dit tijdswinst met zich mee, want er moet geen nieuwe huisvesting gezocht worden bij vrijlating; -
Om in regel te blijven met sociale rechten moeten brieven beantwoord worden (bv. oproepen controlerende geneesheer, formulieren van gezinsbijslag voor meerderjarige kinderen). Dit veronderstelt dat de post toekomt bij de gedetineerde op een postadres of in de gevangenis. Ook hier beperkt de taak van de sociaal assistent zich tot het correct informeren en motiveren van de gedetineerde om een adreswijziging door te geven, maar het doen behoort tot het zelfbeschikkingsrecht van de gedetineerde;
-
Inkomsten uit werk of uit sociale zekerheid worden gestort op een bankrekening. Het vereist een hele administratie om vanuit de gevangenis betalingsopdrachten te verrichten of om deze gelden te laten toekomen op de rekening van de gevangenis.
3. Uitwerken van reclasseringen met oog op psychosociale re-integratie of ter voorkoming van recidive (artikel 48 van wet 17 mei 2006) Uitkeringen van sociale zekerheid en sociale bijstand zijn – in de praktijk – het fundament van de reclasseringsplannen bij het merendeel van de veroordeelden met recht op verblijf in België en dit op twee manieren. Willen we recidive (proberen te) voorkomen, dan is het hebben van een inkomen primordiaal. Om in aanmerking te komen voor een vervroegde invrijheidstelling, moet de gedetineerde aan de SURB ondermeer aantonen dat hij over (voldoende) inkomen beschikt. Slechts een heel beperkte groep van gedetineerden kan tijdens deze procedure een arbeidscontract voorleggen. Gelukkig is er het circuit van sociale werkplaatsen, waar een beperkt aantal gedetineerden terecht kunnen. Al de anderen beroepen zich op hun recht op werkloosheidsuitkering, inkomensvervangende tegemoetkoming voor personen met een handicap als inkomensbron bij voorwaardelijke invrijheidstelling. Andere takken van sociale zekerheid geven toegang tot diensten die essentieel zijn voor het aspect huisvesting, dagbezigheid of tewerkstelling in een reclasseringsplan ‘op maat’. Een voorbeeld hiervan is het erkenningsnummer van het Vlaams Agentschap voor sociale integratie van personen met een handicap dat de toegang opent voor een opname in beschut wonen of tewerkstelling in een beschutte werkplaats. Om behandeld te kunnen worden in een psychiatrisch ziekenhuis of therapeutische gemeenschap dient de gedetineerde in regel te zijn met de verplichte verzekering voor geneeskundige verzorging. Het regelen van de sociale administratie voor een gedetineerde met een stabiele arbeidscarrière kan al veel opzoekingwerk inhouden. Voor de gedetineerden die bij
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Dagelijkse ervaringen van de psychosociale diensten van de strafinrichtingen met sociale zekerheid / sociale bijstand
de aanvang van detentie met niets meer in orde waren, dient daarbij eerst nog de ‘sociale check -up’ uitgevoerd te worden. Problemen hierbij zijn: -
De ‘naadloze aansluiting’ bij de overgang van detentie naar vervroegde invrijheidstelling is onmogelijk te realiseren. Een goede reclassering veronderstelt dat vanuit detentie al de administratie is afgehandeld om de rechten op bijvoorbeeld gezondheidszorg of vervangingsinkomen vanaf de eerste dag ‘in vrijheid’ te openen. In de praktijk is dit niet mogelijk. Vanuit de detentie kan de gedetineerde, al dan niet met professionele hulp, enkel informatie verzamelen, contacten leggen, afspraken maken. Deze instellingen (her)openen pas een dossier als de ex-gedetineerde zich persoonlijk aanbiedt met detentieattest (de lijfelijke aanwezigheid is vereist). Doorgaans is naar de mutualiteit gaan of naar het OCMW gaan niet de eerste prioriteit van een pas vrijgekomen ex-gedetineerde, waardoor deze zaken niet geregeld geraken met als gevolgen: Nog langer wachten op het doorlopen van de erkenningsprocedures; Recidivegevaar indien de net vrijgestelde persoon niet over geld beschikt; Klassenjustitie: wie tijdens en na detentie kan terugvallen op een ondersteunend milieu maakt meer kans op vrijlating en succesvolle reintegratie.
-
Het leefloon van het OCMW is gekoppeld aan ‘het hebben van een verblijfplaats’. Moeilijkheden hierbij zijn: Verblijfplaats is niet te regelen vanuit detentie; Vicieuze cirkel: geen leefloon zonder verblijfplaats, geen verblijfplaats zonder geld; Benadeling van alleenstaanden: voor hen is het veel moeilijker om een sociaal statuut te regelen dan voor een partner. Partners kunnen ingeschreven worden als ‘ten laste van...’.
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Koppeling van sociale zekerheidsuitkeringen aan het rijksregister en het domicilie terwijl gedetineerden vrij vaak ambtshalve geschrapt zijn. Domiciliering op het gevangenisadres is mogelijk, maar de administratieve procedure duurt lang. Het gebeurt dat de beklaagde al vrijgelaten is en/of de veroordeelde getransfereerd werd tegen dat de gedetineerde ingeschreven is op het adres van de gevangenis. Gedetineerden willen dit ook niet altijd. Het staat vermeld op de adressenhistoriek, sommigen zijn bang dat ze dan geen kans meer maken op vrijlating.
-
‘Sociale check up’ is zeer arbeidsintensief en vraagt nauwkeurige opvolging. De kans is groot dat de check up niet afgerond is bij verlaten van de gevangenis. Wie zorgt dan voor de opvolging? 161
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
-
‘Sociale check up’ is Sisyfusarbeid, waarbij de maatschapppelijk assistent van de gevangenis vaak de ‘zoveelste’ is die hieraan begint. Vermoeidheid bij instelling of medewerker die voor de zoveelste keer gevraagd wordt om de ‘administratieve toestand van persoon X uit te pluizen en op papier te zetten’ is vaak te begrijpen...
Tot slot: Praktijkwerkers stellen dat werken aan de reclassering van gedetineerden, die meestal een zeer complexe voorgeschiedenis hebben, zelden verloopt volgens een vast omschreven scenario. Steeds opnieuw moeten individuele oplossingen worden gezocht.
V. STRUCTURELE PROBLEMEN Ten slotte willen we ook de aandacht vestigen op enkele structurele problemen.
A. ONUITVOERBAARHEID
VAN SOCIALE ZEKERHEIDSREGELGEVING BINNEN DE COMPLEXITEIT VAN DE GEVANGENIS
Net zoals in de vrije wereld kunnen binnen de gevangenis ziekte-uitkeringen gecombineerd worden met beperkte tewerkstelling mits erkenning door de medische controle en maandelijkse aangifte van de inkomsten. Op dit ogenblik kan de gevangenisadministratie het afleveren van deze aangiften niet realiseren.
B. KENMERKEN ADMINISTRATIEVE INSTELLINGEN
VAN THUISLOZENPOPULATIE STAAT HAAKS OP RATIONALITEIT VAN SOCIALE ZEKERHEIDS-
Voortdurend verhuizen, administratieve nonchalance, ... zijn zeer moeilijk verenigbaar met de waarden die belangrijk zijn in de administratie: orde, stabiliteit, nauwgezetheid (brieven beantwoorden, op tijd lidgeld betalen).
C. ONBEKENDHEID
EN/OF ONWIL VAN SOCIALE ZEKERHEIDSINSTELLINGEN MET HET SOCIAAL STATUUT VAN (EX-)GEDETINEERDEN
Door het zeer uitgebreid net van organisaties die de sociale wetgeving uitvoeren, is de kans dat een (mutualiteit of pensioenfonds-)medewerker in contact komt met een dossier van een (ex-)gedetineerde zeer klein. Zijn kennis van de specifieke (RIZIV of pensioen)regelgeving in geval van detentie is geen parate kennis. De medewerker van een SZ-instelling zal (extra) opzoekingwerk moeten doen. Ook zijn kennis over strafrecht en penitentiair recht is beperkt. De medewerker moet ruimte maken (tijd en openheid) om zich te laten informeren en de PSD-medewerker 162
Dagelijkse ervaringen van de psychosociale diensten van de strafinrichtingen met sociale zekerheid / sociale bijstand
moet tijd en energie steken in het informeren. De tijdsinvestering die dit vraagt is niet altijd en aan weerszijde mogelijk. Vaak worden PSD-medewerkers geconfronteerd met weerstanden t.a.v. gedetineerdenpopulatie in het algemeen of t.a.v. de concrete betrokkene. Om in die situatie op te komen voor de rechten van de betrokkene is goede kennis van specifiek wetgeving en assertiviteit van de PSDmedewerker nodig. Deze weerstanden proberen te verminderen vergt tijd. De PSDmedewerker moet bereid zijn om te luisteren naar de negatieve ervaringen en te zorgen voor correcte informatie bij de medewerker van de sociale voorziening.
VI. BESLUIT Wij hopen dat we met deze toelichting ‘uit het dagelijkse leven van de gevangenis’ aangetoond hebben hoe belangrijk en noodzakelijk wij het vinden dat dit onderzoeksproject rond sociale zekerheidsrechten voor gedetineerde, zijn familie en in belang van de samenleving plaats gevonden heeft. Door de detentie te beschouwen als neutrale periode, zijn gedurende de laatste 30 jaren in de verschillende takken van de sociale zekerheid veel hindernissen weggewerkt. Dit onderzoeksproject en al de aanbevelingen die eruit voortkomen, tonen aan dat er nog maatregelen te nemen zijn. Collega’s met jarenlange ervaring hebben al veel gedetineerden ontmoet die eigenlijk sociale zekerheid ervaren als een grillig fenomeen van de natuur, al dan niet door zichzelf in de hand gewerkt. Voor veel gedetineerden lijkt sociale zekerheid on(be)grijpbaar. Zij beleven de sociale zekerheid als een kansspel. Het overkomt hen dat zij al dan niet in een gunstige situatie terecht komen. In elk specifiek geval hebben we nog veel opzoekwerk om hen juist te informeren. De vaak ingewikkelde regelgeving maakt het ons niet gemakkelijk. Maar ook voor de bediende in de mutualiteit, vakbond of OCMW is de impact van detentie op een sociale uitkering geen parate kennis en vergt dit de bereidheid om opzoekwerk te willen doen. Zonder een degelijk kennis van sociaal recht en assertiviteit is het risico om van het kastje naar de muur geslingerd te worden groot, zowel voor de gedetineerde als voor de maatschappelijk assistenten intra en extra muros, die met zijn dossier bezig zijn. Vandaar dat we heel opgezet zijn met dit onderzoeksproject dat aanzet tot meer duidelijkheid en congruentie. We hopen dat dit werk in gang gezet door de VZW ‘Aide et reclassement’ en ter harte genomen door de Koning Boudewijnstichting zal uitmonden in een consistent wetgevend werk.
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LE REGARD DES DETENUS SUR LE DROIT A LA SECURITE SOCIALE
par Thierry MOREAU Professeur à la Faculté de droit de l’U.C.L. Président de l’Ecole de criminologie de l’U.C.L. Avocat au Barreau de Nivelles
Les organisateurs du colloque nous ont conféré un redoutable honneur à Juliette Beguin et moi-même. Celui de parler au nom des sans voix, de ceux qui ont tort mais aussi de ces nombreux présumés innocents qui peuplent nos prisons en étant traités comme des coupables. J’espère m’en montrer digne et ne pas les trahir, eux qu’on n’invite jamais dans les colloques et qu’on n’associe pas assez souvent aux travaux qui les concernent. La clientèle de la prison est un peuple d’exclus de par le stigmate de la prison ellemême. Que peut donc signifier la sécurité sociale pour eux que la société a « incapacités » ou « neutralisés » selon des expressions consacrées ? En quoi la société peut-elle être source de sécurité et de solidarité alors que, par la décision d’incarcération, elle contribue généralement à aggraver les difficultés et leurs problèmes ? Toutefois, à lire certains textes, on pourrait croire qu’il est inexact d’affirmer que les détenus sont des exclus sociaux. Ainsi, l’article 23 de la Constitution dispose que chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine. La Cour européenne des droits de l’homme a jugé que la justice ne saurait s’arrêter à la porte des prisons1. Mais ces paroles sublimes, qui constituent des horizons stimulants, ne peuvent masquer la réalité vécue quotidiennement par les personnes privées de liberté. Le rapport final de la Commission Dupont la rappelle sans détour : A quelques exceptions près, le détenu est largement exclu du système de la sécurité sociale qui pourtant constitue l’un des piliers de l’Etat de droit2. Je voudrais tenter de vous partager le vécu de ceux qui se trouvent dans cette situation. Méthodologiquement, la chose n’est toutefois pas évidente à réaliser surtout si on veut répercuter la parole des détenus eux-mêmes. D’un côté, il faut trouver un moyen de la connaître. J’ai donc interrogé différents détenus ou anciens détenus rencontrés dans le cadre de ma profession d’avocat et j’ai demandé à des collaborateurs de faire de même. Cette approche a donc ses limites et il faut en être conscient. De l’autre, il faut se garder de travailler « sur » la parole des détenus mais accepter plutôt d’en rendre compte comme un matériau brut. En raison du caractère limité de mon intervention, je me propose de pointer quelques questions relatives à la sécurité sociale durant la détention et quelques autres dans le cadre de la libération. Je les illustrerai par des exemples recueillis auprès des détenus. Ce travail ne prétend donc à aucune exhaustivité. Il doit plutôt être reçu comme une invitation à approfondir la question et à alimenter le débat.
1 2
Cour eur. D.H., 28 juin 1984, Campbell et Fell c. Royaume-Uni, § 69. Rapport final de la Commission Dupont, Doc. parl., Chambre, 2000-2001, 50-1076/1, p. 148.
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
I. DURANT LA DETENTION La porte de la prison à peine refermée sur lui, le détenu est souvent envahi par l’angoisse. Il prend conscience du poids de l’exclusion dont il fait l’objet et de l’incapacité dans laquelle il se trouve de régler quantité de questions qui faisaient son quotidien au dehors. Il ressort de différents témoignages que, au début de la détention, le principal souci du détenu est l’impact de la détention et de son absence sur sa famille et ses proches. Il n’est pas centré sur lui-même. Il se sent coupable d’avoir lâché son entourage et de lui nuire tant par la publicité liée à son incarcération que par la situation problématique dans laquelle il les plonge. Le propos est également vrai en matière de sécurité sociale : -
Je suis chômeur. Ma femme a-t-elle encore droit aux allocations de chômage?
-
J’étais le seul à travailler. Qu’est-ce que ma femme aura comme ressources ? Mes enfants auront-ils encore des allocations familiales ?
-
J’avais une indemnité de mutuelle car j’étais en incapacité de travail. Que va toucher ma famille ?
-
Je vivais seul avec ma mère qui n’a rien. Qui va s’en occuper ? Qui va payer pour elle ?
-
Ma femme et mes enfants ont-ils encore droit à la mutuelle car j’ai une fille gravement malade ?
-
…
Par la suite, arrivent les questions qui concernent la situation personnelle du détenu : -
Est-ce que, durant ma détention, je perçois l’indemnité qui m’a été accordée suite à un accident de travail ?
-
Le temps passé en prison va-t-il compter pour la pension ?
-
Le patron peut-il me licencier si je suis en détention préventive ?
-
Puis-je percevoir mon allocation d’intégration d’handicapé durant ma détention ?
-
Comment dois-je faire pour obtenir des médicaments bien précis afin de poursuivre mon traitement pour soigner une maladie grave ?
168
Le regard des détenus sur le droit à la sécurité sociale
-
Vais-je pouvoir bénéficier d’une certaine discrétion sur le fait que je dois me faire fournir des protections en raison de mon incontinence qui est une séquelle de ma dernière opération ?
-
…
Ces questions ne sont pas faciles à résoudre. Le détenu cherche des réponses autour de lui. Il découvre ainsi la profonde solitude dans laquelle il se trouve. L’aide n’est, en effet, pas la mission prioritaire du personnel de la prison. Les directeurs le reconnaissent eux-mêmes, ils n’ont plus le temps de traiter les dossiers personnels des détenus3. Leur mission première est de gérer la prison au niveau du personnel, de la sécurité, de l’administration, etc. Le service social interne n’a pas non plus pour mission principale d’apporter une aide individuelle aux détenus. Sa fonction est d’apporter, par son expertise, une assistance à la prise de décision. En outre, le détenu éprouve de la peine à faire pleinement confiance au personnel de la prison en raison du fait que ses confidences pourraient se retourner contre lui. En effet, le directeur peut être amené à statuer dans le cadre d’une éventuelle procédure disciplinaire. Tant le directeur que le service social devront remettre des avis sur les demandes de permission de sortie, de congés pénitentiaires ou de libération conditionnelle. Le plus souvent, le personnel orientera le détenu vers les services sociaux externes, généralement agréés et subsidiés par les Communautés, en charge de l’aide aux détenus. Toutefois, il faut constater que ces services sont en sous-effectif par rapport à la demande. L’accès aux détenus, voire parfois à la prison, n’est pas toujours aisé. Les détenus doivent souvent attendre longtemps pour recevoir une réponse à leurs questions. Il n’est pas rare non plus que ces questions présentent un aspect trop techniques et que ces services ne soient pas en mesure d’y répondre de manière précise. Les détenus peuvent également s’adresser à leur avocat, spécialement pour obtenir une réponse aux questions juridiques qu’ils se posent sur le plan social. Mais, généralement, ils sont assistés par un pénaliste qui n’est pas un spécialiste du droit social qui n’est donc pas en mesure de les aider dans cette matière qu’il ne connaît pas. Or, beaucoup de détenus ne disposent pas des moyens pour faire appel à un conseil supplémentaire, spécialisé en droit social. Par ailleurs, spécialement sur le plan juridique, une difficulté supplémentaire réside dans le fait que le détenu n’est pas en mesure de fournir les documents utiles à son conseil car, bien souvent, ceuxci sont restés au lieu de sa résidence.
3
V. SPRONCK, « Le Tribunal de l’application des peines ou l’incursion du droit dans les mur », L’exécution des peines privatives de liberté. Regards croisés, Louvain-la-Neuve, Anthémis, 2008, p. 114.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
La commission de surveillance, les visiteurs de prison et les ministres du culte sont perçus par les détenus comme des personnes de confiance à qui ils font parfois appel pour obtenir un soutien en vue de résoudre leurs difficultés sur le plan social. Mais souvent les questions sont trop complexes et les connaissances techniques et les moyens de ces personnes trop limités. Celles-ci peuvent éventuellement chercher la réponse ou une aide à l’extérieur mais il n’y aura alors aucun contact direct entre le détenu et la personne sollicitée, ce qui – l’expérience nous l’enseigne – réduit sensiblement le caractère efficace de l’intervention. Sur le plan social, le début d’une incarcération est toujours très pénible. Tant sa famille que le détenu vivent une solitude extrême dans un monde inconnu, froid et agressif : ils ignorent ce qu’ils peuvent faire, ils se voient reprocher de ne pas avoir accompli telle ou telle démarche dont ils ne soupçonnaient pas l’existence et qu’ils étaient supposés réaliser, … L’information qui leur parvient est souvent tardive, parcellaire, contradictoire, superficielle. Tout au long de la détention, ce sentiment d’abandon et d’impuissance se maintient. Il est cultivé par les incohérences qui traversent le régime pénitentiaire comme en témoignent les deux exemples suivants qui démontrent que même lorsqu’on accorde un droit au détenu, son effectivité peut être profondément affectée par des conditions d’exercice déplorables. Le premier exemple concerne la possibilité pour le détenu de consulter un médecin de son choix, extérieur à la prison. Le libre choix du médecin est un principe garanti par l’article 6 de la loi du 22 août 2002 relative aux droits des patients qui ne prévoit aucune limitation pour les détenus. Toutefois, en prison, l’exercice de ce droit est loin d’être évident. Tout d’abord, la règlementation en vigueur soumet l’exercice de ce droit à une condition supplémentaire : le détenu ne peut faire appel au médecin de son choix qu’avec l’accord préalable du directeur4. En général, comme le prescrit d’ailleurs la circulaire 1495/XII, le directeur accepte la demande du détenu. Mais le problème se situe souvent au niveau du délai nécessaire pour obtenir le document confirmant l’autorisation. Ainsi, plusieurs témoignages font état de ce que des détenus ayant fait l’objet de coups et blessures lors de l’intervention d’agents pénitentiaires n’ont pas pu faire constater les traces de ces coups car ils n’ont obtenu de la direction l’autorisation de faire venir un médecin extérieur qu’après que celles-ci ont disparu. De la même manière, malgré leurs plaintes, l’état de certains détenus a gravement empiré avant que le détenu puisse faire l’objet d’un examen par un spécialiste tant l’attente a été longue avant de disposer de l’autorisation permettant de faire venir un spécialiste de l’extérieur. 4
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Article 96 de l’arrêté royal du 21 mai 1965 portant Règlement général des établissements pénitentiaires. Voy. Également la circulaire 1495/XII du 16 octobre 1985.
Le regard des détenus sur le droit à la sécurité sociale
Ensuite, le détenu doit disposer des fonds nécessaires pour faire venir un médecin de l’extérieur. En effet, en raison de sa détention, son droit au remboursement des frais médicaux par l’assurance soins de santé est suspendu. Certes, en compensation, le détenu ne doit pas payer les soins prodigués par le médecin attaché à la prison mais la conséquence logique de cette situation est que le détenu doit payer lui-même la consultation de tout médecin extérieur à l’établissement et pour laquelle il ne percevra aucun remboursement via son organisme de mutuelle. La situation est donc particulièrement difficile pour les détenus indigents ou pour ceux qui n’ont pas de travail. Tel était le cas d’un détenu âgé atteint d’un cancer suivi par un médecin spécialiste depuis plusieurs mois avant son arrestation. Il n’a pas disposé des moyens financiers de faire venir le médecin à la prison pour poursuivre son traitement et l’incarcération a été la cause d’une aggravation de son état. D’autres obstacles, souvent insoupçonnés des personnes extérieures qui n’y voient qu’évidences, compliquent encore l’exercice par le détenu de son droit de consulter un médecin de son choix. Ainsi, il faut connaître un médecin à qui faire appel. Dans son témoignage, un jeune de 25 ans explique qu’il est en prison depuis l’âge de 16 ans suite à un dessaisissement du juge de la jeunesse. Vers l’âge de 24 ans il a commencé à souffrir de maux à la jambe. Le médecin de la prison lui disait de ne pas s’en faire et avait diagnostiqué un problème lié à la pratique du sport. Le mal persistant, le détenu a voulu consulter un spécialiste. Sa principale difficulté a été de n’en pas connaître. En effet, d’une part, il n’existe pas une liste de médecins disponibles avec leur spécialisation, d’autre part, les possibilités d’entrer en contact sont très réduites. Le détenu a perdu partiellement l’usage de sa jambe. Une autre difficulté peut résider dans le fait de ne pas disposer des accès nécessaires pour appeler le médecin. Tel était le cas de ce jeune homme placé au cachot, qui voulait faire constater les traces du viol dont il prétendait avoir été l’objet de la part d’un ou plusieurs membres du personnel. Il n’a jamais pu exercer son droit car, étant au cachot, il ne pouvait pas disposer du nécessaire pour écrire sa demande au directeur. Par ailleurs, il n’avait aucune possibilité de contact avec l’extérieur. Enfin, autre obstacle, et pas des moindres, il faut trouver un médecin qui accepte de venir consulter le détenu à la prison, ce qui n’est pas aussi courant qu’on pourrait le croire. Le second exemple a pour objet l’aide sociale. En vertu de l’article 1er de la loi du 8 juillet 1976 organique des centres publics d’aide sociale, toute personne a droit à l’aide sociale. Celle-ci a pour but de permettre à chacun de mener une vie conforme à la dignité humaine. Des détenus indigents expliquent avoir obtenu de la part du C.P.A.S. dont ils relèvent une aide pour « cantiner » le nécessaire pour leur hygiène et leurs besoins vitaux5. D’autres nous ont fait part de ce qu’ils ont dû attaquer la décision de refus 5
On aura compris que le verbe « cantiner » signifie, dans le langage de la prison : acheter à la cantine.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
du C.P.A.S. et n’ont obtenu l’aide que sur une décision du tribunal du travail. Certains détenus ont également bénéficié d’une aide sociale destinée à couvrir des besoins spécifiques qu’en raison de la détention, le C.P.A.S. a jugé nécessaire de rencontrer pour que le critère de la dignité humaine soit atteint. Ainsi, un détenu a-til obtenu la prise en charge par le C.P.A.S. des frais liés à la réalisation d’un examen mental par un psychiatre dont il voulait déposer le rapport à l’appui de sa défense et qu’il n’avait pas la possibilité de financer. Un autre détenu, musicien, s’est vu octroyer une guitare car il ne disposait pas des fonds pour s’en acheter une. Une détenue a reçu un ordinateur pour poursuivre ses études. Mais de nombreux détenus rapportent aussi avoir obtenu des décisions de refus même en sollicitant une aide réduite pour leurs besoins les plus élémentaires. Parfois même, ils expliquent n’avoir jamais reçu de réponse à leur demande. Au sein de la prison, le détenu démuni peut également faire appel à la caisse de solidarité des détenus alimentée par certaines activités, notamment la vente de boissons et de friandises lors des visites. Cette caisse est gérée par la direction. Le détenu n’a aucun droit à cette aide. Elle reste une mesure discrétionnaire. Les montants octroyés sont très modiques et ne permettent pas d’affirmer que le détenu qui en bénéficie mène une vie conforme à la dignité humaine. En outre, ces aides sont toujours payées sous forme d’avances. Par conséquent, si le détenu obtient du travail au sein de la prison, s’il reçoit une aide sociale ou s’il perçoit de l’argent de l’extérieur, il doit commencer par rembourser l’avance à la caisse de solidarité. Dans certains cas, des directeurs ont, paradoxalement, exigé que les détenus introduisent une demande au C.P.A.S. avant de recevoir une aide de la caisse de solidarité. Le détenu reste ainsi sans aide aucune tant que le C.P.A.S. n’a pas statué et répondu, ce qui peut parfois prendre plusieurs semaines sans oublier qu’il existe des cas où le C.P.A.S. ne répond jamais. En d’autres termes, la situation de ces détenus est particulièrement précaire. Ils vivent très certainement en-dessous du seuil de la dignité humaine alors, pourtant, que leur situation dépend quasi exclusivement des autorités publiques.
II. LA PREPARATION DE LA SORTIE Du témoignage de différents détenus, il ressort que de nombreuses questions relatives à la sécurité sociale se posent au moment de la préparation de la libération, notamment lors de l’élaboration du plan de réinsertion sociale qui sera soumis au tribunal de l’application des peines : -
Ai-je accès aux formations du Forem ?
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Comment dois-je faire pour obtenir le bénéfice des allocations d’handicapé après ma libération suite à l’accident dont j’ai été victime durant mon incarcération ?
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Le regard des détenus sur le droit à la sécurité sociale
-
Comment puis-je me rendre au C.P.A.S. pour entamer les démarches si je suis détenu aux moments où il est ouvert ?
-
Quelles démarches dois-je accomplir pour retrouver le bénéfice de mes allocations de mutuelle dont je disposais avant mon arrestation ?
-
Le traitement ultérieur de désintoxication en milieu fermé qui m’est imposé par le tribunal de l’application des peines (TAP) est-il couvert par la mutuelle ?
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Suis-je couvert par la mutuelle pour mon traitement lors des congés pénitentiaires ?
-
…
Bien souvent, des contraintes liées au dispositif de sécurité sociale freinent l’avancement du plan de réinsertion sociale. Ainsi, tel détenu n’a pas de logement et doit en louer un. Mais le C.P.A.S. ne veut pas lui avancer la garantie locative avant sa libération effective alors que le T.A.P. a annoncé à ce détenu qu’il ne le libérerait que lorsque son logement serait certain. Tel autre détenu avait articulé son plan de reclassement autour d’une formation qui devait débuter à une date précise. En raison d’une grève du personnel surveillant, les audiences du T.A.P. ont été remises car il n’était pas possible de pénétrer dans l’établissement. La date du début de la formation a été dépassée et le plan ne valait plus rien. Le détenu n’a donc pas été libéré. Tel autre détenu encore pensait entamer un suivi en milieu hospitalier mais il s’avère que son assurance soins de santé n’est pas en ordre. La libération pour le détenu isolé et indigent est une épreuve difficile dont personne ne s’inquiète vraiment. Rien n’est fait pour faciliter la tâche de ces êtres fragilisés par de longues périodes de privation de liberté qui reviennent dans un monde souvent bien différent de celui qu’ils ont quitté quelques années plus tôt. Ils sont totalement dépendants de ce monde-là alors qu’ils ignorent tout de son fonctionnement et de ses rouages. Un détenu raconte qu’il est sorti de prison avec quelques euros en poche. Il s’est rendu au C.P.A.S. mais quand il est arrivé, le bureau était déjà fermé. Il est revenu le lendemain pour demander le revenu d’intégration sociale (RIS). Il lui a été répondu qu’il fallait préalablement la confirmation qu’il avait un domicile, ensuite la tenue d’une enquête sociale, enfin, une décision du conseil de l’aide sociale, ce qui allait prendre plusieurs semaines. Le détenu a demandé avec quoi il allait vivre d’ici-là et comment il pouvait prendre un logement en location pour y fixer son domicile s’il ne disposait pas au minimum du RIS. Le C.P.A.S. a confirmé sa position mais lui a accordé une aide sociale qui s’est avérée insuffisante. Finalement, le salut du détenu a tenu dans la rencontre qu’il a faite d’une personne généreuse qui l’a aidé.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
III. EN GUISE DE CONCLUSION Le déficit d’effectivité de la sécurité sociale tant durant la détention qu’à la libération est une épreuve difficile et désespérante pour le détenu. Elle est tellement pénible qu’elle évoque le spectre de la double peine : d’une part, la privation de liberté, d’autre part, la privation des droits économiques et sociaux qui sont les moyens de reconnaître la dignité d’un homme dans un Etat de droit. Lors du vote de la loi Dupont en 2005, les détenus étaient remplis d’espoir : leur statut allait changer. Quatre ans après, la mise en œuvre de la loi n’a pas progressé et les détenus en sont venus à conclure « on nous a bien eus ». La reconnaissance du droit des détenus à accéder à la sécurité sociale est, sans conteste, un élément nécessaire. Mais, comme nous l’avons vu, il n’est pas suffisant. Une convention internationale, une loi, un texte réglementaire doivent être autre chose que du papier et de l’encre. Pour changer le monde de la prison, il faudra passer de la parole sublime aux actes crédibles. Il faut insister sur l’au-delà des droits, c’est-à-dire sur l’engagement de celui qui est en position de force à l’égard de celui qui est en position de faiblesse. En effet, il n’y a un sens à proclamer les droits fondamentaux que si ceux-ci sont soutenus par des politiques sociales et économiques adaptées et qui en respectent la logique. Cette solidarité dans l’agir doit être l’objet de notre vigilance.
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DE GEVANGENIS ALS ALTERNATIEF VOOR DE SOCIALE ZEKERHEID BERICHTEN UIT DE NOORDELIJKE NEDERLANDEN
door Prof. dr. Gijsbert VONK* Hoogleraar socialezekerheidsrecht Rijksuniversiteit Groningen en Vrije Universiteit Amsterdam
*
De auteur heeft voor deze bijdrage dankbaar gebruik gemaakt van een paper van J. FALKENA en L. KLAVER voor het keuzevak Socialezekerheidsrecht 2008 in Groningen.
I. INLEIDING De titel van deze bijdrage kan op twee manieren worden begrepen. In ruime zin zou men deze kunnen opvatten als metafoor voor een overheid die voor de oplossing van zijn sociale problemen meer naar het strafrecht grijpt dan naar het sociaal beleid. In die zin heb ik erover gesproken in mijn Groninger oratie “Recht op sociale zekerheid” in 2008.1 In deze rede legde ik een verband tussen de verschraling van de sociale zekerheid en de verharding van het strafklimaat (verviervoudiging van het aantal gevangenen sinds 1984, met name op conto van de kleine criminaliteit): van verzorgingsstaat naar strafstaat.2 Dit is echter niet het perspectief van waaruit deze bijdrage is geschreven. Deze gaat over de rechtspositie van gedetineerden in het Nederlandse socialezekerheidsrecht, of om preciezer te zijn: de uitsluiting van gedetineerden van het recht op uitkeringen uit hoofde van de in het jaar 2000 ingevoerde Wet socialezekerheidsrechten gedetineerden (Wsg). De gevangenis geldt hier letterlijk als alternatief voor socialezekerheidsuitkering. Blijft staan dat het oude beeld van Nederland als uitblinker in een mild strafklimaat en een genereus sociaal beleid al lang niet langer up to date is. Degenen die dit beeld nog hebben, kunnen dat maar beter bijstellen. Er is in Nederland een killere wind gaan waaien. Misschien is ook de Wsg door deze wind leven ingeblazen. Deze wet heeft over de gehele breedte van het Nederlandse socialezekerheidsstelsel een eenvormig regime gecreëerd voor gedetineerden. Eenieder die « rechtens van zijn vrijheid » is beroofd, is uitgesloten van elk recht op socialezekerheidsuitkeringen. Een uitzondering gold nog voor uitkeringen ingevolge de Nederlandse Algemene Ouderdomswet. Ook deze uitzondering is echter inmiddels door de regering ongedaan gemaakt. Samen met nog enkele andere “vergeten regelingen”3 is de Algemene Ouderdomswet met ingang van 1 januari 2009 onder het regime van de Wsg gaan vallen. De laatste 120 gevangenen met een uitkering (in de vorm van een ouderdomspensioen) hebben deze moeten inleveren. Voor de invoering van de Wsg in 2000 werd de vraag of gedetineerden voor een uitkering in aanmerking kwamen verschillend beantwoord. Zo bestond er geen recht op sociale bijstand omdat de staat al anderszins in het levensonderhoud van de betrokkene voorzag. Op grond van art. 35, lid 1 van het Wetboek van Strafrecht komen de kosten van gevangenis en hechtenis immers ten laste van de staat. Als men in de gevangenis verzorgd werd, ontviel aldus de noodzaak om bijstand uit te keren. Het recht op werkloosheidsuitkering kon niet ontstaan aangezien gedetineerden niet voldoen aan de voorwaarde van art. 16, lid 1 Werkloosheidswet dat men beschikbaar moet zijn voor de arbeidsmarkt. Een uitkering vanwege 1 2 3
G.J. VONK, Recht op sociale zekerheid, van identiteitscrisis naar hernieuwd zelfbewustzijn, oratie Groningen, 2008. Vgl. Loïc WACQUANT, Straf de Armen, het nieuwe beleid van de sociale onzekerheid, Berchem, 2006. Zoals de Wet Studiefinanciering.
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arbeidsongeschiktheid of ziekte ten tijde van detentie is in theorie wel mogelijk. Bij de invoering van de toenmalige Wet op de Arbeidsongeschiktheidsverzekering is de mogelijkheid van arbeidsongeschiktheid in de gevangenis overwogen. De wetgever heeft hier de aan de verzekeringsgedachte een doorslaggevende rol toegekend. De gedachte was toen dat het oneerlijk is naar de verzekerde om de uitkering, waar de gedetineerde jarenlang premies voor betaald heeft, te stoppen in het geval hij in de gevangenis terecht zou komen.4 Bij de invoering van de Ziektewet werd een andere overweging gemaakt. Hier werd het op grond van art. 35, lid 1 van het Wetboek van Strafrecht voorzien van levensonderhoud door de Staat voldoende geacht om geen gelden uit te keren ten tijde van detentie.5 Voor de overige socialezekerheidsregelingen bestonden geen belemmeringen voor het recht op uitkering voor gedetineerden. Kortom, de vraag of sprake was van recht op uitkering voor gevangenen werd vooral bepaald door de eigen logica van de diverse socialezekerheidsregelingen. De Wsg moet worden beschouwd als een maatregel die voor de gehele sociale zekerheid een eenvormige rechtspositie voor gedetineerden invoert. Het gaat daarbij om een uitsluitingsmaatregel. Het lijkt er op dat deze maatregel in Nederland op een grote consensus berust. De wet werd in ieder geval met steun van alle politieke partijen in de Tweede Kamer aangenomen en heeft niet geleid tot veel maatschappelijke commotie. Het tegenovergestelde is eerder het geval. De publieke opinie reageert telkens weer geschokt bij geruchten over zware criminelen, die bij ommekomst van hun detentie grote uitkeringsbedragen zouden opstrijken. Bijna symbolisch voor een dergelijke kwestie is de zaak Ferdi E. Hij was de ontvoerder en brute moordenaar van de zoon van ’s-Lands nationale kruidenier Albert Heijn, Gerrit Jan Heijn. Toen Ferdi E. na twintig jaar gevangenschap weer werd vrijgelaten, incasseerde hij een bedrag van circa 300.000 Euro aan achterstallige arbeidsongeschiktheidsuitkeringen. Na verluid zou hij er een aardig villaatje voor hebben gekocht. Het Nederlandse publiek reageerde getergd. De Wsg past in een aantal andere “consequente maatregelen” die de Nederlandse regering rond de eeuwwisseling nam om schoon schip te maken met de versnipperde uitkeringsregimes. Andere maatregelen uit die tijd zijn de zogenaamde Koppelingswet (1998) die een einde maakte aan een recht op elke collectieve voorziening voor niet-rechtmatig verblijvende vreemdelingen en de Wet beperking export uitkeringen (2000) die het verbiedt uitkeringen uit te betalen aan mensen die buiten Nederland wonen, tenzij er sprake is van een internationaalrechtelijke exportverplichting. Al deze wetten introduceren een overkoepelende logica voor de uitsluiting van socialezekerheidsrechten. Het bespreken van de rechtspositie van gedetineerden in het Nederlandse socialezekerheidsrecht komt neer op een beschrijving van de Wsg. In deze bijdrage 4 5
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Kamerstukken II 1997/98, 26063, nr. 3, p. 2. Kamerstukken II 1997/98, 26063, nr. 3, p. 2.
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kwijt ik mij van die taak. Allereerst ga ik in op de gekozen rechtsgronden voor de uitsluiting (paragraaf 2). Vervolgens bespreek ik op welke wijze vorm is gegeven aan het uitsluitingscriterium (paragraaf 3). En ten slotte bekijken we hoe de Wsg ontvangen is in de rechtspraak (paragraaf 4). Ik sluit af met enkele bespiegelende conclusies. Bij een bijdrage als deze zou een kort overzicht moeten worden gegeven van het Nederlandse socialezekerheidsstelsel en van het strafrechtelijk systeem. Ik zie daar echter vanaf en kom onmiddellijk ter zake. Afkortingen en jargon zal ik zoveel mogelijk vermijden. Voor een goed begrip zij nog vermeld dat Tbs verwijst naar een vorm van gedwongen terbeschikkingstelling aan de regering. Tbs is een behandelingsmaatregel die door de rechter als alternatief of in aanvulling op een gevangenisstraf wordt opgelegd aan mensen die zware delicten hebben gepleegd en lijden aan een psychische stoornis of ziekte. Naast Tbs kan een persoon ook nog gedwongen opgenomen worden in een psychiatrische inrichting. Een dergelijke opname kan door de rechter worden gelast bij zware psychische klachten, al dan niet in samenhang met een gepleegd delict.
II. DE RECHTSGROND VAN DE UITSLUITING In de Nederlandse wetgevingstraditie is het gewoonte om de rechtsgrond van de desbetreffende regeling te formuleren. Een rechtsgrond moet worden beschouwd als de ultieme rechtvaardiging, de causa finalis, kortom: de rechtvaardiging van de wet. Bij de langdurige voorbereiding van de Wsg is over de rechtsgrond van de uitsluiting het nodige te doen geweest. Een interdepartementale werkgroep die al in 1993 was ingesteld om een blik te werpen op de combinatie van uitkering en detentie, was tot het oordeel gekomen dat hoe dan ook moet worden vermeden dat iemand die in de gevangenis verkeert relatief in een betere financiële positie belandt door die gevangenschap. Als gedetineerden uitkeringsgerechtigd zijn, zou een dergelijke bevoordeling zich kunnen voordoen aangezien, zo was de gedachte, men van staatswege wordt onderhouden, terwijl het uitkeringsgeld kan worden opgepot. Volgens de werkgroep waren er twee opties om dit probleem op te lossen. De eerste ging ervan uit dat er van gedetineerden een eigen bijdrage werd gevraagd ter compensatie van kosten van verzorging, de tweede impliceerde een uitsluiting van het uitkeringsrecht. De werkgroep adviseerde de tweede optie. Een eigenbijdrageregeling zou administratief te bewerkelijk zijn, terwijl de uitsluitingsoptie beter zou worden begrepen door de burger die de lasten voor de uitkeringen moet opbrengen. Hoewel een aantal partijen in de Tweede Kamer6 de voorkeur gaf aan de invoering van een eigenbijdrageregeling, nam de toenmalige regering het advies van de interdepartementale werkgroep over. Aanvankelijk werd de rechtsgrond voor de 6
GroenLinks, Christen Democratisch Appèl en RPF/GPV (thans ChristenUnie).
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uitsluiting door de regering gezocht in de logica van het verzekerd risico bij de sociale verzekeringen. Bij gevangenschap is de derving van het inkomen niet gelegen in het feit dat dit risico zich heeft voorgedaan, maar doordat men van zijn vrijheid is beroofd, zo luidde de redenering.7 In feite lag aan de uitsluiting van werkloosheidsuitkering een dergelijke redering reeds ten grondslag. De Raad van State verwees deze rechtsgrond echter naar het rijk der fabelen. Volgens dit adviescollege moest het verzekerd risico worden losgezien van detentie.8 Een volledig arbeidsongeschikte werknemer zou bijvoorbeeld ook buiten zijn detentie niet in staat zijn middels arbeid een inkomen te verkrijgen. De regering moest bakzeil halen en twee nieuwe rechtsgronden werden van stal gehaald, namelijk: -
de onwenselijkheid van dubbele betaling aan de gedetineerde door te voorzien in levensonderhoud en de betaling van de uitkering; en de ongelijkheid tussen gedetineerden die voor hun detentie in loondienst werkten en hun inkomen kwijt raken en gedetineerden die voorafgaand aan de detentie niet werkten, een uitkering ontvingen en deze inkomsten blijven houden.
In het verlengde van deze twee gronden werd er bovendien nog op gewezen dat het niet de bedoeling kan zijn dat de gedetineerde de uitkering kan aanwenden om een vermogen op te bouwen, als gevolg waarvan de gedetineerde in een financieel gunstigere positie komt te verkeren door zijn detentie.9 Tijdens de parlementaire behandeling verwierp de regering een beroep op de verzekeringsgedachte. Door Staatssecretaris Hoogervorst is er nog met nadruk op gewezen dat de solidariteit die aan de sociale zekerheid ten grondslag ligt, zich tegen een dergelijk beroep verzet. De solidariteit vereist dat er verantwoord moet worden omgegaan met premies die door burgers worden opgebracht. Het verstrekken van uitkeringen aan gedetineerden zou voor de burger onbegrijpelijk zijn.10 Anders gesteld: de betaling van een uitkering aan een gedetineerde moet worden gezien als “een onjuiste besteding van premiegelden”.11 Dit laatste argument dat een beroep doet op het “common sense” (of wellicht beter: het “gesundenes Volksempfinden” bij de burger) domineerde ook de recente uitbreiding van de Wsg tot de Algemene Ouderdomswet. In het desbetreffende wetsvoorstel werd simpelweg volstaan met de mededeling dat er voor het betalen van pensioenen aan gedetineerden geen enkel maatschappelijk draagvlak meer bestaat. In het debat over de Wsg is ook aandacht besteed aan de positie van gezinsleden van gedetineerden. De regering verwierp de suggestie dat ook zij worden gestraft door de uitsluiting van uitkering. Bij onvoldoende eigen middelen van bestaan bestaat er 7 8 9 10 11
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Kamerstukken II 1997/98, 26063, nr. 3, p. 4. Kamerstukken II 1997/98, 26063, nr. 3. p. 4-5. Kamerstukken II 1997/98, 26063, nr. 3, p. 3 (MvT). Handelingen II 1998/99, p. 4056. Kamerstukken I 1999/00, 26063, nr. 42. p. 4 (MvA).
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immers voor hen een mogelijkheid een bijstandsuitkering aan te vragen. Bovendien brengt de structuur van de Algemene Kinderbijslagwet met zich mee dat de nietgedetineerde partner automatisch in de rechten treedt van degene die in verband met gevangenschap geen recht op bijslag heeft. Dit laatste was overigens ook de reden dat de Wsg geen consequenties heeft gehad voor het recht op AKW. Er bestond toch al geen recht op kinderbijslag voor de gedetineerde.
III. VORMGEVING VAN HET UITSLUITINGSCRITERIUM De Wsg is ingevoerd door middel van een aanpassing van de diverse socialezekerheidswetten. Er is geen sprake van een definitieve beëindigingsgrond, noch van een loutere schorsingsbepaling. Formeel is sprake van een uitsluitingsgrond. Dit heeft als gevolg dat het recht wordt stopgezet gedurende de detentie en weer herleeft als deze ten einde komt. Het wettelijke criterium voor detentie verwijst naar een persoon wiens vrijheid rechtens is ontnomen. Het moet dan gaan om een periode van langer dan 30 dagen. Het is een ruime omschrijving. Eronder vallen niet alleen een klassieke gevangenisstraf, maar ook voorlopige hechtenis, Tbs, vreemdelingenbewaring en gedwongen opname in een psychiatrische inrichting op grond van een bijzondere opneming in een psychiatrische ziekenhuis. Alleen deze laatste vorm is expliciet door de Wsg uitgezonderd. Voor de andere vormen kent het wetgevingscomplex geen genade. Een aantal van deze bijzondere vormen wordt hieronder behandeld. Gedwongen opname in verband met geestesstoornis De Wsg is niet van toepassing op personen, die op grond van de Wet bijzondere opneming in psychiatrische ziekenhuizen of art. 37, lid 1 van het Wetboek van Strafrecht gedwongen in een psychiatrisch ziekenhuis worden opgenomen. Hiervoor zijn door de regering drie redenen opgevoerd. Allereerst zijn degenen die zijn opgenomen verplicht om na een jaar een eigen bijdrage te leveren in de kosten van de verzorging.12 Ten tweede kan het strafbaar feit niet worden toegerekend, vanwege de geestesstoornis waardoor men gedwongen opgenomen dient te worden.13 Een derde reden is gelegen in het doel van de opname. De opname heeft een resocialiserend karakter. Het doel van de opname is om de betrokken persoon dusdanig te behandelen dat hij weer naar huis kan en daar ‘normaal’ kan functioneren.14
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Art. 6, lid 4 AWBZ + AMvB. Kamerstukken II 1997/98, 26063, nr. 3, p. 12. Kamerstukken I 1999/00, 26063, nr. 42. p. 11.
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Tbs Hoewel Tbs enige raakvlakken heeft met de gedwongen opname in verband met geestesstoornissen, hebben personen die in een Tbs-kliniek verblijven geen recht op een uitkering. De Raad van State was destijds van mening dat ten tijde van opname in een Tbs-kliniek het recht op de uitkering moet herleven, omdat ook Tbs’ers een geestesstoornis hebben en omdat, aangezien een Tbs-inrichting op grond van de Algemene Wet Bijzondere Ziektekosten gezien wordt als een psychiatrisch ziekenhuis, ook zij na één jaar een eigen bijdrage moeten betalen.15 Verschil is wel dat bij gedwongen opname er in zijn geheel geen sprake is van verwijtbaar en toerekenbaar gedrag op grond van de stoornis. De regering liet echter een andere, vooral pragmatische overweging prevaleren. Er werd op gewezen dat een Tbsmaatregel vaak wordt opgelegd in combinatie met een gevangenisstraf en dat de betrokkene het niet zou begrijpen als zijn uitkering tijdens detentie zou worden ingetrokken om tijdens Tbs te herleven onder aftrek van de eigen bijdrage voor het verblijf in de inrichting. Voorlopige hechtenis Uitgesloten zijn ook personen die in voorlopige hechtenis zitten in afwachting van hun proces. De regering heeft dit verdedigd met een beroep op het tegengaan van verschillen tussen personen met een korte en lange duur van de voorlopige hechtenis. Gedetineerden die lang in voorarrest hebben gezeten en daarna een straf krijgen onder aftrek van die periode zouden anders te veel worden bevooroordeeld. Dit argument houdt echter geen rekening met de mogelijkheid dat de verdachte wordt vrijgesproken van hetgeen hij verdacht werd. Dat in die situatie een schadevergoeding kan worden toegewezen om het ontstane nadeel teniet te doen, vormde voor de regering het argument om de voorlopige hechtenis ten volle onder de reikwijdte van de Wsg te brengen. Detentie in het buitenland Het wettelijk systeem maakt evenmin een uitzondering voor personen die in het buitenland in de gevangenis hun straf uitzitten. Op zich is dit opmerkelijk aangezien het argument van “dubbele betaling” voor de kosten van het levensonderhoud hier niet opgaat. De regering heeft zich destijds tegen dit argument verzet door er op te wijzen dat door de consulaire diensten hulp wordt verstrekt aan Nederlandse gedetineerden in het buitenland. Dit argument is natuurlijk niet erg principieel. Veel sterker vond ik de suggestie van een mijn studenten tijdens een werkgroep waarin de Wsg aan de orde kwam, namelijk dat het aankomt op een element van reciprociteit. Zoals de buitenlandse overheid verantwoordelijk is voor het levensonderhoud van Nederlandse gedetineerden is dat vice versa evenzeer het geval.
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Kamerstukken II 1997/98, 26063, nr. A. p. 3-4.
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IV. DE RECHTERLIJKE TOETS De Nederlandse rechter heeft een sterke traditie ontwikkeld in het toetsten van nationale wetgeving aan internationale verplichtingen. Deze traditie wordt gevoed door enerzijds het zogenaamde toetsingsverbod van wetten in formele zin aan de Grondwet en anderzijds de voorrang en rechtstreekse toepasselijkheid van een ieder verbindende bepalingen van internationaal recht. Door deze constitutionele principes heeft de Nederlandse rechtspraak een sterke internationale oriëntatie ontwikkeld.16 Er is met spanning uitgekeken naar de opvattingen van de Centrale Raad van Beroep (CRvB) over de Wsg. De CRvB is het hoogste rechtscollege dat uitspraken doet op het terrein van de sociale zekerheid. In zijn uitspraak van 18 juni 2004 heeft de CRvB in zeven gevallen beoordeeld of het uitvoeringsorgaan op grond van de Wsg uitkeringen ingevolge de arbeidsongeschiktheidswetgeving mocht intrekken of weigeren.17 De CRvB stelt in deze uitspraak eerst vast dat alle besluiten in overeenstemming zijn met het nationale recht en gaat vervolgens over tot de toetsing aan het internationale recht. Daarbij overweegt de CRvB dat aan art. 25 van de Universele Verklaring van de Rechten van de Mens, art. 12 van het Europees Sociaal Handvest en art. 9 van het Internationaal Verdrag inzake economische, sociale rechten niet kan worden getoetst, omdat deze artikelen naar hun inhoud niet een ieder kunnen verbinden. Ook de toetsing aan art. 32 van ILO-conventie 128 loopt hierop stuk. Daarbij overweegt de CRvB dat ILO-conventie 128 een instructiekarakter draagt en gericht is tot de verdragsluitende partijen, hetgeen in het algemeen in de weg zal staan aan de mogelijkheid van het inroepen van een rechtens afdwingbare aanspraak op een concrete prestatie in een individueel geval. Een staat wordt geacht te voldoen aan deze conventie als het collectieve beschermingsniveau adequaat is, zonder daarbij acht te slaan op datgene wat in het individuele geval tot uitbetaling komt. De verdragsluitende partijen kunnen voorts op verschillende wijzen inhoud geven aan die instructienormen, zodat deze moeilijk te sublimeren zijn tot een rechtens afdwingbare norm voor burgers. Vervolgens gaat de CRvB in op de stelling dat in de Wsg een door art. 14 van het EVRM verboden onderscheid wordt gemaakt tussen gedetineerde uitkeringsgerechtigden en niet-gedetineerde uitkeringsgerechtigden. Daarbij verwijst de CRvB naar het EHRM-arrest Koua Poirrez en oordeelt dat toetsing aan art. 14 van het EVRM (in samenhang met art. 1 van het Eerste Protocol) mogelijk is als de belanghebbende voldoet aan alle wettelijke voorwaarden voor het (voort)bestaan van een recht op uitkering, met uitzondering van de voorwaarden waarvan hij de rechtsgeldigheid in verband met een vermeend discriminatoir karakter bestrijdt. 16
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Vgl. G.J. VONK, Overijverige rechter of terkortschietende rechter, over de rol van rechter en wetgever bij het proces van doorwerking van internationale normen in het sociale zekerheidsrecht, 1999, oratie Vrije Universiteit. CRvB 18 juni 2004, RSV 2004/298, USZ 2004/255 en JB 2004/303.
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Toegepast op deze zaak, oordeelt de CRvB dat de gedetineerden voldoen aan alle wettelijke voorwaarden met uitzondering van het ene criterium dat zij als discriminatoir bestempelen, namelijk de voorwaarde dat hun vrijheid niet rechtens is ontnomen. Toetsing aan artikel 14 van het EVRM is dus mogelijk. De CRvB oordeelt vervolgens dat het onderscheid tussen gedetineerde uitkeringsgerechtigden en niet-gedetineerde uitkeringsgerechtigden objectief gerechtvaardigd is. De CRvB verwijst hierbij naar de wetsgeschiedenis en stelt vast dat de wetgever heeft beoogd een einde te maken aan de ongewenst geachte situatie dat tijdens wettelijke vrijheidsontneming verstrekking van een socialeverzekeringsuitkering plaatsvindt, terwijl de Staat reeds in de kosten van het levensonderhoud voorziet. Daarnaast wenste de wetgever met de Wsg een einde te maken aan de ongelijke positie van enerzijds degenen die voor hun detentie in loondienst werkten en die tijdens detentie hun inkomen verliezen, en anderzijds de uitkeringsgerechtigden die hun uitkering tijdens detentie kunnen behouden. Deze doelstellingen zijn volgens de CRvB rechtens aanvaardbaar en het middel van de Wsg is in zijn algemeenheid geëigend om elk van deze doelstellingen te bereiken. Het feit dat bepaalde kosten tijdens detentie geheel of ten dele doorlopen en het feit dat het verzekerd risico tijdens detentie blijft voortbestaan, brengt de CRvB niet tot een ander oordeel. Bij deze beoordeling heeft de CRvB zich terughoudend opgesteld. Uit de jurisprudentie van het EHRM blijkt immers dat de wetgever bij de implementatie van maatregelen op sociaal en economisch gebied over een ruime beoordelingsmarge beschikt. Gezien deze ruime beoordelingsmarge is het volgens de CRvB ook toegestaan om een onderscheid te maken tussen personen die in een Tbs-inrichting verblijven en personen die met toepassing van artikel 37, eerste lid van het Wetboek van Strafrecht zijn opgenomen in een psychiatrisch ziekenhuis. Volgens de CRvB bestaan er tussen deze categorieën zodanige verschillen dat de wetgever tot het oordeel heeft mogen komen dat de eerste groep wel onder de werking van de Wsg valt, en de tweede groep niet. De wetgever heeft zijn beoordelingsmarge echter wel overschreden door de Wsg ook toe te passen op personen die zijn ontslagen van alle rechtsvervolging en die vervolgens zijn opgenomen in een Tbs-inrichting dan wel in afwachting van opname in een Tbsinrichting in een penitentiaire inrichting verblijven. Volgens de Raad bestaat er namelijk geen rechtens relevant verschil tussen deze personen en de personen die met toepassing van artikel 37, eerste lid van het Wetboek van Strafrecht zijn opgenomen in een psychiatrisch ziekenhuis. De Raad voegt hieraan toe dat toetsing aan artikel 26 van het Internationaal Verdrag inzake burgerrechten en politieke rechten (IVBPR) niet tot een ander oordeel leidt. Vervolgens gaat de Raad in op de stelling dat de weigering of de intrekking van de arbeidsongeschiktheidsuitkering in strijd is met artikel 1 van het Eerste Protocol. De weigering van een uitkering na 1 mei 2000 levert geen strijd op met dit artikel. De Wsg is namelijk op 1 mei 2000 in werking getreden, waardoor er in geval van een weigering na deze datum niet gesproken kan worden van een eigendomsontneming. De intrekking van een uitkering met ingang van 1 juni 2000 is daarentegen wel als 184
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eigendomsontneming te kwalificeren. In tegenstelling tot de wetgever meent de CRvB dat deze eigendomsontneming niet voldoet aan de vereisten van proportionaliteit en subsidiariteit. Volgens de CRvB is de overgangstermijn te kort om de getroffen uitkeringsgerechtigden in staat te stellen om hun zaken op orde te brengen. Hierbij is mede van belang dat het door de staat verschafte onderhoud en onderdak niet kan worden beschouwd als een vorm van compensatie voor de intrekking van hun uitkering. Deze intrekking kan bovendien een lange periode beslaan. Daarnaast is relevant dat de overgangstermijn veel korter is dan in andere situaties waarin het recht op uitkering werd beperkt of ingetrokken. Vervolgens stelt de CRvB zelf een overgangstermijn voor door ten overvloede te overwegen dat een overgangstermijn van zes maanden wel in overeenstemming zou kunnen worden geacht met artikel 1 van het Eerste Protocol. De slotsom is dat, afgezien van een enkele grenscorrectie en kritiek op het overgangsrechtelijk regime, de Wsg de rechterlijke toets heeft doorstaan. Het overgangsrechtelijk aspect voor de Nederlandse rechtsontwikkeling heeft een grote betekenis gehad. Het is op zich al zeer uitzonderlijk dat een rechtscollege oordeelt dat er sprake is van strijd met artikel 1 van het Eerste Protocol, maar wat deze uitspraak nog uitzonderlijker maakt, is dat de CRvB aan het uitvoeringsorgaan laat weten wat een redelijke overgangstermijn zou kunnen zijn. Hierbij werd concreet een periode van zes maanden gesuggereerd. Bij de laatste uitbreiding van de Wsg naar de Algemene Ouderdomswet werd een dergelijke overgangstermijn door de wetgever ook keurig in acht genomen. De norm van zes maanden lijkt dus tot het rechtsbewustzijn doorgedrongen, maar voor de principiële rechtsgeldigheid van de uitsluiting van het recht op uitkering voor gedetineerden, heeft dit niets van doen.
V. CONCLUSIE Uit het voorgaande blijkt dat de radicale uitsluiting van gedetineerden van alle socialezekerheidsuitkeringen waarvoor de Nederlandse regering heeft gekozen, is terug te voeren op één achterliggend oermotief: het ontbreken van enig draagvlak onder het Nederlandse volk voor het betalen van uitkeringen aan mensen in de gevangenis. Waarom dit het geval is, wordt soms in verdekte termen geduid: een ongerechtvaardigde cumulatie van overheidsprestaties moet worden vermeden of er mag geen onderscheid ontstaan tussen hen die voorafgaande aan de detentie werkten en hen die een uitkering genoten. De diepere reden die misschien minder makkelijk wordt geformuleerd is dat men het niet legitiem vindt uitkeringen te verstrekken van overheidswege aan personen die de belangen van de samenleving hebben geschaad. Uit de vormgeving van het uitsluitingscriterium zou je kunnen afleiden dat dit legitimiteitsargument wel degelijk een rol heeft gespeeld. Immers, in alle gevallen waarbij mogelijk sprake is van een strafrechtelijke veroordeling volgt een uitsluiting, terwijl uitzonderingen uitsluitend worden toegestaan ten aanzien van personen die zijn opgesloten zonder dat hieraan een strafrechtelijk verboden handeling ten grondslag ligt, zoals personen die een bijzondere opname in een psychiatrische inrichting ondergaan. 185
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Al met al heeft de Nederlandse maatregel een nogal Spartaans karakter. Zij kent nauwelijks toeters en bellen. Een ieder die langer dan een maand rechtens van zijn vrijheid is beroofd, is uitgesloten van uitkering. Daarbij worden noch in wetgeving, noch in de jurisprudentie nauwelijks enige uitzonderingen van betekenis toegelaten. Of een dergelijke regeling de Belgen tot voorbeeld zou moeten strekken, is nog maar de vraag. Pogingen om meer orde en systematiek te realiseren kunnen soms onverwacht strenge gevolgen oproepen. Misschien kan men vanuit dat perspectief sommige dossiers maar beter onaangeroerd laten.
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UNE APPROCHE JURIDIQUE COMPAREE DU TRAVAIL PENITENTIAIRE DANS QUELQUES PAYS EUROPEENS
par Philippe AUVERGNON Directeur de recherche au CNRS, Comptrasec UMR CNRS 5114, Université Montesquieu-Bordeaux IV
I. INTRODUCTION Enfermement et travail entretiennent une vieille relation dans le monde, notamment en Europe1. Les sociétés ont attribué d’abord une fonction expiatoire au travail avant de lui assigner une fonction réhabilitatrice au milieu de XXème siècle et parfois aujourd’hui un but de socialisation, voire de réinsertion2. Si l’on peut discuter fortement l’atteinte d’un tel objectif, il est indiscutable que l’accès au travail en prison est souvent synonyme de moins mauvaises conditions de vie, de possibilités d’entretien de liens sociaux extérieurs, de dignité de la personne incarcérée. On peut à propos du travail pénitentiaire tenir facilement un discours pessimiste ; le contexte économique est pour le moins défavorable (crise de l’emploi à l’extérieur, délocalisation des emplois peu qualifiés, …). Certaines politiques pénales visant à l’enfermement du plus grand nombre n’arrangent pas les choses ; il en va de même de la montée des populismes observable dans de nombreux pays. Dans un tel contexte, on ne voit pas bien comment le statut du travail en prison pourrait évoluer alors qu’il n’aurait pas progressé en Europe dans les 30 ou 40 dernières années et que le détenu accédant au travail ne jouirait « d’aucun des droits ni des protections accordés aux travailleurs »3. On doit cependant se garder de toute généralisation. Une approche juridique comparée de quelques pays européens4 conduit non pas à nier la gravité de la situation mais à observer, en fonction du pays considéré, des progrès tant au plan des principes que parfois de l’encadrement juridique de la prestation de travail en prison5.
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Cf. not. S. LORVELLEC, « Travail et peine », R.P.D.P. 1997, p. 208 ; D. VAN ZYL and F. DÜNKEL (ed.), Prison Labour : Salvation or Slavery? International Perspectives, Aldershot UK, Dartmouth Publishing 1999, 368 p. ; E. SHEA, Le travail pénitentiaire : un défi européen, Ed. L’Harmattan, Paris 2006, 242 p. ; PH. AUVERGNON et C. GUILLEMAIN, Le travail pénitentiaire en question, LdF, Paris 2006, 196 p. ; F. GUILBAUD, Des travailleurs en quête de liberté – Sociologie du travail pénitentiaire -, Thèse de doctorat, Université Paris X-Nanterre, 2008, p. 51 à 86. Par delà les discours, il apparaît évident que ce n’est pas le type de travail réalisé en prison qui peut favoriser la réinsertion professionnelle ; les tâches le plus souvent confiées sont généralement très éloignées des métiers que les détenus pourront occuper à leur sortie. C’est davantage dans la norme, les rythmes de travail et l’habitude de travailler que cela a des conséquences (Cf. not. F. GUILBAUD, op. cit. sp. p. 291 et s.). E. SHEA, « Les paradoxes de la normalisation du travail pénitentiaire en France et en Allemagne », Revue Déviance et société, 2005/3, p. 349. L’éclairage comparatif est ici principalement limité aux droits d’Allemagne, d’Angleterre et du Pays du Galles, d’Espagne, de France et d’Italie. On ne peut que souhaiter l’étendre à l’étude des droits et situations prévalant dans les pays scandinaves mais aussi dans les plus récents Etats-membres de l’Union européenne. A propos de l’évolution de la situation carcérale, on doit souligner l’impact des « Règles pénitentiaires européennes », prescriptions destinées à tous les États membres du Conseil de l’Europe. Bien que n’ayant pas de force contraignante, ces règles ont un poids réel du fait tant de leur qualité que de l’autorité du Conseil de l’Europe.
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
Certes, des pays européens continuent à afficher une obligation de travail, parmi eux l’Allemagne et l’Italie6. Mais d’autres, comme la France7 et la Belgique8 ont fait le choix de l’abrogation d’une telle obligation alors qu’on parle en Angleterre simplement « d’accomplir un travail utile ». Quelques pays tels l’Espagne et le Danemark, avaient substitué à l’obligation de travail une « obligation d’activité ». La législation française vient d’affirmer une telle obligation9 pour la seule personne « condamnée », dorénavant « tenue d’exercer au moins l’une des activités qui lui est proposée » (…) dès lors que celle-ci « a pour finalité la réinsertion de l’intéressé et est adaptée à son âge, à ses capacités, à son handicap et à sa personnalité ». Il est précisé que l’activité peut consister « par priorité dans divers apprentissages » (lecture, écriture, calcul) et que « l’organisation des apprentissages est aménagée » lorsque la personne condamnée « exerce une activité de travail ». On ne peut que regretter un certain flou dans la distinction entre « activité » et « travail », et partant entre « activité obligée » et « travail non forcé ». Toutefois, certains insisteront sur le peu de « réalisme » de telles observations en notant d’une part que la proposition d’activités suppose des moyens, d’autre part que la question partout en Europe n’est pas aujourd’hui d’imposer un travail mais de pouvoir en proposer un. On doit toutefois prendre acte de la tendance. Les encadrements juridiques nationaux du travail en prison ont eux-mêmes connu des changements notables depuis les années 1970. Le plus significatif concerne, à n’en point douter, l’Espagne. Le gouvernement de ce pays a été habilité par une loi du 2 septembre 1999 à fixer par décret les particularités du droit du travail des détenus. Un décret du 6 juillet 2001 est venu ainsi déterminer les principales règles applicables à la prestation de travail et faire bénéficier les détenus du régime général de Sécurité sociale. Le droit espagnol reconnaît et encadre aujourd’hui une relation
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Pour l’Allemagne, l’article 41 alinéa 1 de la loi sur l’exécution des peines de 1976 ; pour l’Italie, l’article 20 de la loi pénitentiaire n° 354 de 1975. Le refus du détenu peut l’exposer à des sanctions (Allemagne) ; il peut aussi être accepté dès lors que l’affectation à l’emploi ne tenait pas compte des compétences du détenu (Italie). Loi n° 87-432 du 22 juin 1987. Il faut toutefois souligner que le fait de travailler peut permettre parfois au détenu d’obtenir des réductions de peines (ex. France) ; on peut de ce fait se demander s’il est véritablement libre d’accepter ou de refuser de travailler et, par là même, si la Convention n° 29 de l’OIT est dans son esprit respectée ; sur le cas français, voir les observations de la Commission d’experts de l’OIT (http://www.ilo.org/ilolex) L’article 169, 5° de la Loi de principes du 12 janvier 2005 concernant l’administration pénitentiaire et le statut juridique des détenus, a abrogé l’article 30 ter du Code pénal (Cf. Moniteur belge du 1er février 2005, p. 2848) Art. 27 de la loi pénitentiaire n° 2009-1436 du 24 novembre 2009, parue au JO 20091436 du 25 novembre 2009. Cette loi a fait l’objet d’un recours devant le Conseil constitutionnel, introduit le 20 octobre 2009. Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision relative à la loi pénitentiaire le 19 novembre 2009 (Décision n° 2009-593 DC). Sa décision ne remet en cause aucune des dispositions relatives au travail pénitentiaire.
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
de travail spéciale10. En Italie, une loi du 26 juillet 1975 relative au système pénitentiaire, a énoncé les grands principes applicables au travail des détenus ; un règlement du 30 juin 2000 comporte un ensemble de dispositions plus détaillées, notamment sur l’organisation du travail en prison11. Il n’en va pas de même dans d’autres pays pour lesquels il faut chercher dans des normes générales ou particulières, ne concernant pas centralement la question du travail, des indications sur cette question. En Allemagne, le fondement juridique du travail en prison peut être trouvé dans la loi sur l’exécution des peines du 16 mars 197612. En Angleterre, on se réfère à un « order » sur les prisons de 1999, texte à caractère assez général complété par de nombreux documents internes à l’administration pénitentiaire13. En France, le travail pénitentiaire reste régi par des articles du Code de procédure pénale14 ; en l’absence de véritables précisions, les responsables d’établissement pénitentiaire s’en remettaient à des circulaires, des notes de service ou à un document de la Direction centrale de l’Administration pénitentiaire dénommé « Pacte 2 »15 ; ils ont dorénavant à prendre en compte quelques dispositions de la loi pénitentiaire du 13 octobre 200916. En réalité, parmi les pays précités, seules l’Italie et l’Espagne prévoient que les détenus accomplissent un travail pénitentiaire dans le cadre d’un « contrat de travail », mais nous verrons qu’il n’en découle pas toujours de conséquence logique. Dans l’ensemble des pays européens étudiés, on retrouve concrètement deux grands types de travail. Une première forme de travail est liée au fonctionnement de la prison ; elle correspond notamment à l’entretien des locaux, de matériels, aux activités de cuisine ou de nettoyage du linge, … ; on parle alors en France de 10
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Cf. not. J. A. SOLER ARREBOLA, « La relation de travail spéciale de travail des détenus dans les ateliers pénitentiaires en Espagne », Bulletin de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, 2007, p. 199. Cf. not. G. LOY ET S. FERNANDEZ, « Le travail des détenus dans les prisons en Italie », Bulletin de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, 2007, p. 165. Articles 41 et s. de la loi du 16 mars 1976. Les règlements et circulaires administratives pris pour l’application de cette loi sont, quant à eux, fondés sur un « accord » conclu entre les administrations de la Justice des différents Länder (Cf. not. A. HÖLAND et M. MAUL-SARTORI, « Le travail des détenus dans les prisons en Allemagne », Bulletin de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, 2007, p. 135). Cf. not. J. CARBY-HALL, « Droit du travail en prison : le cas de l’Angleterre et du Pays de Galles », Bulletin de droit comparé du travail et de la sécurité sociale, 2007, p. 107. Articles 720, 720-1 AA et D. 98 et suivants du Code de procédure pénale Ce « Pacte » n’est passé avec personne. Il s’agit du sigle du « Plan d’Amélioration des conditions de travail et de l’emploi » prévu pour la période 2000-2003, ayant succédé à un « Plan d’action pour la croissance du travail et de l’emploi », dit Pacte 1, couvrant la période 1997-1999. Pour l’essentiel : l’article 32 instaurant un taux horaire de rémunération minimum indexé sur le salaire minimum de croissance, et l’article 33 prévoyant la signature d’un « acte d’engagement » en cas de « participation des personnes détenues aux activités professionnelles organisées dans les établissements pénitentiaires ».
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
l’affectation au « service général », en Espagne de la « gestion de services », en Italie, de « travail domestique ». C’est également une réalité en Angleterre et au Pays de Galles. En Allemagne, il n’y a pas là une possibilité mais bien une obligation, de service17 ; on relèvera que, quel que soit le pays, ce travail contribue directement à « l’équilibre financier » de la prison. Une seconde forme correspond à un travail « productif » ; celui-ci peut être réalisé sous la direction et pour le compte d’une institution relevant de l’Etat (Angleterre, Espagne, France)18 ; il peut être aussi effectué sous la direction de l’autorité pénitentiaire ou d’un organisme ad hoc mais pour le compte d’une entreprise extérieure, au titre d’un contrat de « prestation de services » ou de « sous-traitance » (ex. France). Enfin, il peut s’agir d’un travail effectué pour le compte et sous la direction d’une entreprise extérieure. L’administration pénitentiaire (ex. France, Italie) ou un organisme ad hoc (Espagne, France)19 fournit alors des détenus à une entreprise privée qui organise la production dans des locaux mis à sa disposition. Dans une même logique, la loi nationale peut prévoir « l’installation d’entreprises privées en prison » (ex. Allemagne). Toujours au sein de la prison, il arrive que légalement puisse être prévue la possibilité de prestations de travail autonome ou indépendant (ex. Allemagne, France, Italie)20. Dans l’ensemble des pays, on retrouve développées des activités productives sensiblement de même nature. Il s’agit concrètement de menuiserie, métallerie, mécanique générale, imprimerie, confection, conditionnement, agriculture, informatique, vêtements, chaussures, pièces pour l’aéronautique, parachutes, … Le plus souvent il y a là des activités ne nécessitant pas de qualification, relevant essentiellement du conditionnement ou du façonnage, parfois d’un objectif de reproduction matériel et symbolique de l’institution carcérale (portes, barreaux, mobilier carcéral). Exceptionnellement, on requiert un réel savoir-faire, ainsi du montage et du contrôle de circuits électroniques pour la téléphonie mobile, voire certains talents d’artisan (céramique). De façon pour le moment marginale, on relève que, face au chômage régnant en prison, certaines administrations acceptent de s’ouvrir à des activités du secteur tertiaire, ainsi de l’implantation de centres d’appels téléphoniques21. 17 18
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Obligation limitée à trois mois par an (Cf. article 41 alinéa 1er de la loi sur l’exécution des peines de 1976). Il s’agit en Angleterre d’une possibilité de « gestion en direct » par « Prison enterprises », agence du ministère de l’Intérieur, en Espagne de l’une des modalités d’intervention de l’Office autonome pour le travail et les prestations pénitentiaires (OATPP), en France de la Régie industrielle des établissements pénitentiaires (RIEP). OATTP en Espagne, Prison Enterprises en Angleterre. Ce type de travail semble toutefois exceptionnel en France ; il est théoriquement possible mais rare en Angleterre, possible mais non pratiqué en Espagne. En Italie, la loi l’autorisant prévoit qu’il doit être effectué hors des heures destinées au « travail ordinaire » sauf autorisation de la direction de l’établissement pénitentiaire (Cf. article 20 n° 354 de la loi italienne du 26 juillet 1975). Ainsi en France dans les prisons de Rennes (Ille et Vilaine) et de Bapaume (Nord-Pasde-Calais).
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
Si la nature du travail réalisé en prison ne change pas énormément d’un pays à l’autre, en revanche il n’en va pas de même des conditions de son exécution. Si le travail en cellule a tendance heureusement à reculer22, il reste important en Angleterre, en France et en Italie ; il est rare en Allemagne, inexistant en Espagne. En ce qui concerne l’organisation de la production et la surveillance de la qualité, l’encadrement du travail est réalisé soit par les détenus eux-mêmes (ex. Angleterre, France), soit par des chefs d’atelier, membres de l’administration pénitentiaire (Angleterre, Allemagne, Espagne, France, Italie), soit encore par du personnel d’entreprise extérieure détaché en prison (Allemagne, Espagne, France, Italie). Par-delà les questions – importantes – d’organisation et de nature du travail, c’est la reconnaissance de droits au détenu en tant que travailleur qui apparaît presque partout toujours problématique. Si l’influence du modèle salarial se fait sentir au point de connaître des traductions majeures dans quelques pays (I), partout la prégnance du modèle sécuritaire pèse, au point de nier des droits élémentaires de tout travailleur (II).
II. L’INFLUENCE DU MODELE SALARIAL « EXTERIEUR » Dans de nombreux pays européens, l’écart entre la situation du détenu au travail et celle d’un salarié libre reste considérable. Pourtant, le modèle salarial fait sentir son influence, à des degrés divers, sur quelques questions. On fait ainsi référence aux taux de rémunérations de l’extérieur pour fixer des minima inférieurs (A) ; les normes « extra muros » valent également en matière de durée de travail (B) ; on affirme enfin une identité (restant souvent théorique !) de protection de la santé et de la sécurité au travail (C). Le rapport existant entre travail et protection sociale en prison s’avère quant à lui fort révélateur, creusant l’écart d’une certaine façon entre pays ayant accepté de voir le travail pénitentiaire « aspiré » par le modèle salarial et pays refusant la reconnaissance officielle d’une relation de travail subordonnée (D).
A. REMUNERATION DU TRAVAIL INFERIEURS
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UN PRINCIPE… ET DES MINIMA
A l’exception de l’Angleterre23, les autres pays étudiés (Allemagne, Espagne, France et Italie) prévoient un taux minimum de rémunération du travail effectué en prison. Celui-ci est toujours inférieur au salaire minimum légal – lorsque celui-ci existe – ou aux minima conventionnels.
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Le travail en cellule est peu bénéfique pour la formation et la réinsertion professionnelle ; il correspond par ailleurs à des conditions de travail très critiquables sur le plan de l’hygiène, de la sécurité et la durée du travail, tout élément le rapprochant des conditions prévalant en matière de travail clandestin. En Angleterre, seuls les détenus âgés ont droit au salaire minimum national (Cf. J. CARBY-HALL., op. cit.).
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
En Allemagne, la loi sur l’exécution des peines prévoit une rémunération pénitentiaire de base servant de référence pour la détermination des rémunérations réelles. Celle-ci correspond à 9% du salaire moyen de l’année précédente24. En France, la loi précise que les rémunérations du travail doivent se rapprocher autant que possible de celles des activités professionnelles extérieures afin notamment de préparer les détenus aux conditions normales du travail libre25. Ces prescriptions ne semblent pas toujours respectées en pratique. Le travail en atelier de production est ainsi rémunéré en principe par référence à un Seuil Minimum de Rémunération (SMR). Ce taux horaire minimum, équivalant à 40 à 45 % du Salaire Minimum Interprofessionnel de Croissance (SMIC), est une création de l’Administration pénitentiaire26 ; on a récemment discuté en France d’une indexation de la rémunération des détenus employés en prison sur le SMIC, en soulignant qu’elle introduirait « un peu de droit commun du travail dans l’établissement pénitentiaire et (contribuerait) à donner au détenu le sentiment qu’il est, de ce point de vue un travailleur comme un autre »27. La loi pénitentiaire adoptée le 13 octobre 2009 est effectivement venue préciser que « la rémunération du travail des personnes détenues ne peut être inférieure à un taux horaire fixé par décret et indexé sur le salaire minimum de croissance défini à l’article L. 3231-2 du code du travail » ; il est toutefois indiqué que « ce taux peut varier en fonction du régime sous lequel les personnes détenues sont employées »28. En Espagne, l’Organisme autonome du travail et des prestations pénitentiaires fixe annuellement des taux horaires minimum variant en fonction de l’activité assurée ; ce taux est proche du salaire minimum interprofessionnel applicable hors prison. En Italie, la loi pénitentiaire a prévu que les revenus doivent être déterminés de façon équitable en fonction de la qualité et de la quantité de travail fourni, de 24 25 26
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Cf. A. HÖLAND et M. MAUL-SARTORI, op. cit. Cf. article D. 102 du Code de procédure pénale. Antérieurement à la loi du 13 octobre 2009 prévoyant une indexation sur le SMIC, la rémunération du détenu évoluait à l’occasion de la réévaluation (éventuelle) du SMR dont était chargé, tous les ans en janvier, un agent de la Direction centrale de l’Administration pénitentiaire. Nicolas About, avis n° 222 fait au nom de la commission des Affaires sociales sur le projet de loi pénitentiaire (http://www.senat.fr/rap/a08-222/a08-222.html ). Article 32 de la loi du 13 octobre 2009. Cet article constitue un nouvel alinéa de l’article 717-3 du code de procédure pénale. On observera, au passage, qu’on fait à l’article 32 référence à des personnes détenues « employées », alors que dans l’article 33 de la même loi, on prévoit l’établissement d’un « acte d’engagement » non pas pour des « employés » mais pour la « participation des personnes détenues à des activités professionnelles ». Il est décidemment difficile d’aborder la question du lien d’emploi quand on tient idéologiquement à refuser toute possible qualification de contrat de travail. Cette dernière option est malheureusement assumée de façon explicite à l’alinéa 2 du même article 33 : « (l’acte d’engagement) précise notamment les modalités selon lesquelles la personne détenue, (…) nonobstant l’absence de contrat de travail, bénéficie des dispositions relatives à l’insertion par l’économique prévues aux articles L. 5132-1 à L. 5132-17 du code du travail ».
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
l’organisation et de la nature du travail, et que leur montant ne doit pas être inférieur aux deux-tiers de ce qui est prévu par les minima des conventions collectives correspondantes à l’activité réalisée. Des niveaux de rémunérations minimales peuvent être prévus spécifiquement pour le travail lié au fonctionnement général de la prison ; ils sont en tout cas inférieurs aux minima de référence pour le travail « productif ». Pour ce dernier, il arrive aussi que soient prévues réglementairement des grilles de classification fixant des minima en fonction des niveaux de compétence (Allemagne, Espagne) ou qu’existent des classifications en fonction de la catégorie de travailleurs (ex. Angleterre). Dans le seul cas de l’Italie, les grilles de classifications et les rémunérations y liées, sont celles applicables à l’extérieur de la prison. Bien que non prévues légalement ou réglementairement, on peut rencontrer en France de telles « grilles » instituées aussi bien pour le travail en régie qu’en concession29. La question d’un salaire minimum en prison doit toutefois ne pas être confondue avec celle d’une garantie minimum de revenu, singulièrement du fait d’une rémunération à l’heure voire à la pièce, prévue parfois expressément (ex. Allemagne, Angleterre), de toute façon assez généralement pratiquée. La prise en compte notamment de l’amélioration de la qualité du travail, de l’augmentation de la productivité est envisagée, quant à elle, par le droit espagnol, au travers de « primes à la production ». De telles primes sont aussi possibles en Allemagne, en Angleterre et en France. En Italie, c’est également le droit commun du travail qui a vocation à s’appliquer ici. Dans l’ensemble des situations nationales étudiées, on note l’existence d’une trace écrite et précise de la rémunération du travail du détenu. Cependant l’obligation de délivrance de « bulletins de salaire » aux détenus ne paraît exister qu’en Italie dès lors que le travail est effectué dans le cadre d’un contrat de travail classique passé avec une entreprise privée ; le détenu a les mêmes droits que tout autre travailleur à l’information écrite sur son salaire30. En Allemagne, bien qu’on ne parle pas de salaire, la loi sur l’exécution des peines prévoit que le détenu doit être informé par écrit. Ce dernier reçoit effectivement un relevé mensuel indiquant les heures travaillées et le montant de la rémunération. Ailleurs, on relève des pratiques apparaissant toutefois systématiques ; ainsi, en Angleterre, le détenu-travailleur reçoit une « feuille de paye » comportant certaines indications telles que le nombre d’heures travaillées et les déductions opérées sur la rémunération du travail. En Espagne, s’il existe une pratique de « feuilles de paye », celles-ci n’obéissent pas formellement à un modèle précis. En France où, une fois de plus, ni le droit ni les 29
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Ces « grilles » sont le plus souvent rudimentaires distinguant, par exemple, avec un humour involontaire au regard de la population concernée : les débutants, les affirmés, les confirmés et les experts. On fait ici référence à la directive européenne 91/533/CEE du 14 octobre 1991 relative à l’obligation de l’employeur d’informer le travailleur des conditions applicables aux contrats ou à la relation de travail.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
pratiques n’apparaissent très avancés, on peut simplement relever d’une part que l’établissement de feuilles de rémunération est prévu dans le cadre d’un contrat-type de concession31, d’autre part que la récente loi pénitentiaire stipule qu’en cas d’acte d’engagement signé entre le chef d’établissement et la personne détenue, cet « acte » énonce notamment les « conditions de travail et de rémunération »32. Les solutions nationales varient quant à la part de rémunération à disposition du détenu. Tout d’abord qu’il s’agisse ou non de salaire, un certain nombre de déductions au titre de cotisations sociales sont effectuées ; il en va ainsi en Allemagne pour les seules cotisations d’assurance-chômage, en Angleterre des cotisations telles que celles du service de santé (« national health contributions »). En France, sauf en ce qui concerne la rémunération d’un travail au service général, il y a versement de cotisations patronales et salariales au titre des assurances maladiematernité et vieillesse. De façon générale, en Espagne et en Italie, les cotisations sociales retenues sont les mêmes que celles prévues pour n’importe quel salarié. Par ailleurs, d’autres déductions que celles opérées au titre des cotisations sociales, peuvent intervenir impérativement ou éventuellement. Ainsi, en Italie, les détenus doivent, sur le produit de leur travail, participer à leurs frais d’hébergement ; ceci n’est pas ou n’est plus le cas en Allemagne, en Angleterre, en Espagne et en France. Outre les frais d’entretien, en Italie des sommes peuvent être déduites au titre du dommage causé ou de frais de procédures ; la jurisprudence constitutionnelle italienne interdit toutefois de retenir une part au titre de l’indemnisation des victimes33. En France, d’autres déductions sont calculées au regard de toutes les sommes qui échoient au détenu34. Au-delà d’un montant minimal considéré comme ayant un caractère alimentaire, 10 % de la rémunération est destiné à la constitution d’un pécule de libération ; 20 à 30% sont par ailleurs affectés à l’indemnisation des parties civiles et aux créanciers d’aliments35. En Allemagne, la loi sur l’exécution des peines prévoit la constitution obligatoire d’un pécule de sortie ; son montant varie en fonction de la situation individuelle et familiale du détenu dont il est censé assurer la subsistance pendant quatre semaines suivant sa sortie de prison36. En Angleterre, une épargne dans la perspective de la sortie de prison ou pour la famille du détenu peut être retenue sur la rémunération du travail mais elle n’est en aucun cas obligatoire ou forcée37. La constitution d’un pécule liquidable à la sortie du détenu est également prévue par la législation en Espagne38. Dans ce dernier pays, le 31 32 33 34 35 36 37 38
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Cf. Article 7.3 du contrat de concession-type de l’administration pénitentiaire française. Cf. Article 33 de la loi pénitentiaire adoptée le 13 octobre 2009, op. cit. Cf. G. LOY et S. FERNANDEZ, op. cit. Cf. le total des sommes ne doit pas excéder 200 euro par mois, plafond doublé à l’occasion des fêtes de fin d’année (cf. article 320 du Code de procédure pénale). 20% pour la fraction >200 euro et <400 euro ; 25% pour la fraction >400 euro < 600 euros ; 30 % pour la fraction > 600 euro (cf. article 320 du Code de procédure pénale). Cf. A. HÖLAND et M. MAUL-SARTORI, op. cit. Cf. J. CARBY-HALL, op. cit. Cf. articles 321 et 322 du Décret royal n° 190 du 9 février 1996.
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
paiement sur la rémunération du travail de frais de procédures ou de dommagesintérêts est possible mais s’avère difficile du fait de l’application des règles du Statut des travailleurs relatives à la saisie des salaires à la relation de travail spéciale en milieu carcéral. Il y a ainsi insaisissabilité du salaire des 30 derniers jours dans la limite d’un montant équivalent au double du salaire minimum interprofessionnel39. La situation est voisine en France ; le code de procédure pénale y précise que « la saisie des rémunérations du détenu peut être opérée dans les conditions du droit commun »40. Rien n’est prévu en la matière en Angleterre, mais la saisie, même partielle, serait pratiquement inexistante du fait du très bas niveau des rémunérations. En Allemagne, la part vouée à la constitution obligatoire du pécule de sortie reste insaisissable ainsi que les trois septièmes de la rémunération mis à la disposition du détenu à l’intérieur de la prison notamment pour faire des achats. En Italie, les trois quarts de la rémunération du travail, réservés au détenu, sont saisissables sauf paiement d’une pension alimentaire ou remboursement de dommages occasionnés aux biens meubles ou immeubles de l’administration pénitentiaire.
B. TEMPS DE TRAVAIL : UNE « EXTRA MUROS »
REFERENCE GENERALE AUX NORMES
De façon générale, il est fait référence au droit commun de la durée du travail. En pratique, si certains dépassements sont exceptionnellement signalés, la durée du travail en prison est en fait le plus souvent inférieure à celle pratiquée à l’extérieur ; ce temps de travail réduit s’explique en grande partie par un manque de travail et l’organisation d’un partage du travail disponible. En Allemagne, la durée de travail en prison a pour référence la réglementation en vigueur dans la fonction publique. Cette réglementation est largement basée sur des conventions collectives, qui prévoient une durée de travail par semaine s’échelonnant entre 38,5 et 40 heures. En Angleterre, une ordonnance de 1999 a prévu pour tout détenu un « travail utile » d’une durée maximum de dix heures par jour. Mais, en pratique, les détenus qui travaillent effectueraient en moyenne 24 heures par semaine. En France, la journée de travail des détenus est souvent inférieure aux plafonds prévus par le Code du travail ; elle serait pour les détenus travaillant au plus de six heures par jour ; de façon générale, les détenus travaillant effectuent moins de trente-cinq heures par semaine. Les horaires varient toutefois de façon importante d’un établissement à un autre et il peut aussi arriver que la durée du travail effective soit supérieure aux prévisions du code du travail et notamment aux 35 heures41. 39 40 41
Cf. article 32 du Statut des travailleurs. Article D. 333 du Code de procédure pénale. Cf. not. PH. AUVERGNON et C. GUILLEMAIN, Le travail pénitentiaire en question, op. cit., sp. p. 103.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
En Italie, la journée de travail ne peut, selon la loi pénitentiaire, dépasser la durée de la journée de travail à l’extérieur, à savoir huit heures. Il en va de même en Espagne, la durée de la journée de travail ne doit pas excéder les prévisions du droit commun. La moyenne d’heures travaillées varie là aussi énormément d’un atelier à un autre, en fonction du type d’activité, du volume des commandes, du niveau de production, ... certaines enquêtes conduisent à situer la moyenne hebdomadaire dans une fourchette allant de 10 à 25 heures par semaine42. Les « nécessités » de la prison induisent des spécificités dans l’organisation des temps de travail et de repos. Il n’y a qu’en Espagne qu’est prévu juridiquement l’établissement d’un calendrier annuel de travail par le directeur de l’établissement pénitentiaire, ce dernier pouvant procéder à des modifications en cours d’année avec l’accord des travailleurs. De façon traditionnelle, les détenus bénéficient d’un repos hebdomadaire, en principe pris le samedi et le dimanche ou le dimanche et un autre jour de la semaine, sauf travaux urgents ou « service général » (Allemagne, Angleterre, Espagne, France, Italie). Ils bénéficient également de jours fériés (Allemagne, Angleterre, Espagne, France, Italie, …) En Angleterre, un repos lors des jours de fêtes correspondant à la religion du détenu est également prévu. En matière de congés annuels, rien n’est prévu en Angleterre et en France pour les détenus qui travaillent ; en revanche, il existe un droit à congés de vingt-quatre jours ouvrables avec versement d’une indemnité en Allemagne43, de trente jours ouvrables rémunérés en Espagne. En Italie, la jurisprudence constitutionnelle reconnaît un droit à congés ou « à vacances » pour le détenu-travailleur qui, dans l’hypothèse où il n’en bénéficierait pas, doit percevoir une indemnité44.
C. SANTE
ET SECURITE AU TRAVAIL PROTECTION
:
UNE IDENTITE (THEORIQUE) DE
Selon les Règles pénitentiaires européennes, édictées par le Conseil de l’Europe, « les mesures appliquées en matière de santé et de sécurité doivent assurer une protection efficace des détenus et ne peuvent pas être moins rigoureuses que celles dont bénéficient les travailleurs hors prison »45. La référence est explicite ici, elle 42 43
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Cf. J. A. SOLER ARREBOLA, op. cit. ; aucune statistique nationale ne semble disponible sur ce point en Espagne. Indemnité calculée sur la base de la rémunération des trois derniers mois. Sur les 24 jours prévus 6 peuvent, sous certaines conditions, être utilisés pour réduire la durée de la peine ou pour une permission de sortie (Cf. article 42 de la loi sur l’exécution des peines). Cour constitutionnelle, 22 mai 2001, arrêt n° 158, Massimario di giurisprudenza del lavoro, 2001 n° 12, p. 1226. Cf. Annexe à la Recommandation (2006) 2 du Comité des ministres aux Etats membres sur les règles pénitentiaires européennes, adoptée le 11 janvier 2006, point 26.13.
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
l’est aussi dans la plupart des règlementations nationales mais il s’agit d’une identité pour le moins théorique, sauf quelques rares exemples de conditions et processus de production équivalant à ceux d’établissements industriels de l’extérieur. Outre des services de premier secours ou d’assistance médicale prévus dans l’ensemble des pays étudiés en cas d’accident du travail, les institutions censées participer à la protection de la santé et de la sécurité au travail sont les services d’inspection du travail et, parfois, des instances internes telles que des comités d’hygiène et de sécurité. Les services d’inspection du travail ont, en ce qui concerne la surveillance du travail en prison, des compétences identiques à celles qui leur sont reconnues à l’extérieur de la prison au titre du contrôle des entreprises privées dès lors que des détenus bénéficient d’un contrat de travail en Espagne et en Italie. On estime qu’il en va de même en Allemagne en l’absence de texte dérogatoire et malgré l’inexistence de contrats de travail. Cette identité de compétence pour contrôler l’application des lois relatives à l’hygiène, la santé et la sécurité est expressément prévue en Angleterre46. Il n’existe ici encore qu’une exception notable, celle de la France. La compétence des services d’inspection du travail se réduit, dans ce pays, à une fonction de quasiconseil en matière d’hygiène et de sécurité des directions d’établissement pénitentiaire. Les services des Caisses Régionales d’Assurance Maladie (CRAM) peuvent également suggérer au chef d’établissement de prendre certaines mesures de prévention, sans toutefois adresser des injonctions. Un type voisin d’intervention est possible en Allemagne, de la part d’organismes d’assurance contre les accidents du travail. Des comités d’hygiène et de sécurité ou des instances équivalentes en charge du suivi des conditions de travail des détenus existent en revanche en Angleterre et en Italie. En Espagne, les dispositions applicables en la matière à tout établissement de travail sont applicables « avec les adaptations nécessaires à la prise en compte des spécificités du milieu carcéral »47. La loi n’en prévoit pas moins la participation des détenus à des équipes de contrôle et de maintenance des systèmes de sécurité ainsi que de prévention des risques professionnels. En Allemagne, l’ensemble des règles de droit commun relatives à l’hygiène et à la sécurité ainsi qu’à la prévention des accidents du travail sont applicables dès lors qu’il y a travail à l’intérieur de la prison. L’administration de l’établissement en a la responsabilité ; là aussi, il existe des comités spécifiques d’hygiène et de sécurité concernant le travail des détenus48. En revanche, en France, les dispositions relatives à la médecine et au service social du travail du Code du travail ne s’appliquent pas ; il existe des comités d’hygiène et de sécurité spéciaux aux établissements pénitentiaires mais ceux-ci ne concernent que les conditions de travail des personnels pénitentiaires. 46 47 48
Cf. Health and Safety at Work Act, 1974. Cf. article 11.4 du décret royal n° 782 du 6 juillet 2001. Comités dénommés « Arbeitssicherheitsausschüsse ».
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
D. TRAVAIL ET PROTECTION SOCIALE : L’ABSENCE OU NON DE LIEN EST REVELATEUR
Une grande distinction peut être faite entre des pays connaissant une protection sociale proche du droit commun, dès lors que le détenu travaille (ex. Italie), et des pays semblant organiser un droit à la protection sociale plus ou moins significatif hors véritable référence à un quelconque travail (ex. France). Néanmoins, à l’exception de la couverture sociale des accidents du travail et des maladies professionnelles communément relativement satisfaisante, l’analyse même très succincte de la protection des risques maladie, maternité et vieillesse, sans parler du chômage, fait apparaître une réalité peu favorable, singulièrement du fait de la privation, le plus souvent, de tout droit à prestations en espèces. L’affirmation d’une prise en charge matérielle du détenu occulte, en réalité, difficilement le fait que dans les différents pays des problèmes de pauvreté se posent, et que le type de protection sociale en place n’y répond pas. En matière de risque maladie-maternité, une grande distinction apparaît entre systèmes détachant la couverture sociale de l’exercice d’un travail ou non. C’est ainsi qu’en Allemagne, tout détenu a droit, indépendamment de toute activité, à une prise en charge gratuite des soins médicaux par son établissement pénitentiaire49. Il en va de même en Angleterre et au Pays de Galles, la prise en charge étant assurée avec le concours des services extérieurs de santé. En France, tous les détenus sont obligatoirement affiliés, dès leur incarcération, aux assurances maladie et maternité du régime général de la sécurité sociale. La protection sociale est donc détachée pour ces deux risques de l’exercice d’un travail50. Il en va de même en Italie. En revanche, en Espagne, seuls les détenus qui exercent une activité dans le cadre d’une relation de travail spéciale accèdent obligatoirement à la couverture du régime général de la sécurité sociale en matière de maladie-maternité. La couverture du risque vieillesse témoigne de grandes différences de situation. En Allemagne, des dispositions légales prévoyant une affiliation obligatoire à l’assurance vieillesse de tout détenu, ne sont pas entrées en vigueur pour des questions budgétaires. De même, rien n’est prévu en Angleterre et au Pays de Galles. En Espagne, tous les détenus qui exercent une activité dans le cadre d’une relation de travail dite spéciale accèdent obligatoirement à la couverture du régime général de la sécurité sociale en matière de risque vieillesse. En France, les détenus qui travaillent sont affiliés à la branche vieillesse du régime général de la sécurité
49 50
200
Des dispositions légales prévoyant une affiliation obligatoire à l’assurance maladie de tout détenu, ne sont pas entrées en vigueur pour des questions budgétaires. L’Etat est redevable d’une cotisation pour chaque détenu affilié. Une contribution peut par ailleurs être demandée aux détenus ou à leurs ayant–droits lorsqu’ils disposent de ressources suffisantes.
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
sociale51. En Italie, le détenu-travailleur est pris en compte au titre de l’assurance vieillesse par l’Institut national de prévoyance sociale. Le risque accidents du travail et maladies professionnelles est couvert, de différentes façons mais systématiquement, dans les différents pays étudiés. Il relève en Allemagne d’une assurance spécifique à l’activité réalisée ou à laquelle est affecté le détenu. En Angleterre et au Pays de Galles, en cas d’accidents du travail ou de maladies professionnelles, le détenu est pris en charge dans le cadre des services de l’inspection de la santé et de la sécurité. Dans les autres pays étudiés, la couverture du risque est quasiment équivalente à celle du droit commun. Ainsi, en Espagne, dès lors que le détenu s’inscrit dans une « relation de travail spéciale », il bénéficie de la couverture du régime général de la sécurité sociale. En France, les détenus effectuant un travail sont eux-mêmes affiliés à l’assurance accidents du travail et maladies professionnelles du régime général52. Enfin, en Italie, dès lors qu’il travaille, le détenu bénéficie d’une prise en charge durant trois jours par l’administration pénitentiaire puis par l’Institut national de prévoyance sociale. La question du chômage en prison, et à la sortie de prison, est singulièrement importante, qu’il s’agisse d’assurer un minimum de revenu pendant et après la détention, ou de faciliter la réinsertion. Les réponses nationales sont en la matière fort diverses. En Angleterre, tout détenu demandant à travailler et n’accédant pas à un travail bénéficie d’une indemnité spécifique de chômage versée par les pouvoirs publics. La solution paraît, sur le plan théorique, intéressante dès lors qu’elle reconnaît implicitement un droit à l’emploi et organise une alternative en cas d’impossibilité d’emploi. Cependant, elle est des plus limitées en pratique puisqu’elle donne lieu à une indemnité de l’ordre 2,5 livres sterling par semaine sur la base de cinq jours ouvrables ! D’autres pays prévoient un éventuel accès à une indemnisation de chômage non pas en prison mais à la sortie ; ainsi, en Allemagne, à condition que le détenu ait travaillé 360 jours au cours des trois dernières années, il bénéficiera d’une assurance chômage après sa libération. Il pourra en aller également ainsi en Espagne, pays dans lequel l’organisme gestionnaire du travail en prison de même que le détenu-travailleur bénéficient de réductions de cotisations à l’assurance chômage. En revanche en France, qu’il y ait ou non du travail, il n’y a pas de contrat de travail et pas d’accès, pour le détenu, à une couverture sociale du chômage subi en prison53. Curieusement, il en va de même en Italie alors que le 51
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Les cotisations sont versées soit par l’administration pénitentiaire seule en cas de travail au « service général », soit par l’administration ou le concessionnaire, d’une part, et par le détenu, d’autre part. Comme pour la couverture du risque vieillesse (v. note précédente), les cotisations sont versées soit par l’administration pénitentiaire seule quand le détenu travaille au « service général », soit par la seule administration pénitentiaire ou le concessionnaire, d’une part, et le détenu, d’autre part, dans les autres cas. Il n’existe par ailleurs aucun droit à revenu minimum à ce jour alors que les situations d’indigence prolifèrent en prison où tout ou presque se paye souvent bien plus cher qu’à l’extérieur. La loi pénitentiaire adoptée le 13 octobre 2009 a-t-elle fait un pas dans la
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
travail réalisé en prison dans le cadre d’un contrat de travail classique peut y être interrompu !
III. LA PREGNANCE DU MODELE SECURITAIRE INTERIEUR On ne peut s’étonner du fait que les responsables et le personnel d’une prison veillent de près à la sécurité et singulièrement à l’absence d’évasion. Certains d’entre eux avouent d’ailleurs que la question du travail des détenus ne les intéresse qu’en tant qu’activité pouvant parmi d’autres (formation, sport, religion, …) contribuer à l’occupation des détenus et à la régulation des tensions internes. Faut-il pour autant, au titre d’une nécessaire « marge de gestion » des individus, comprendre que, dans certains pays européens, on vive dans l’incertitude quant aux conditions d’accès au travail, d’appel, de maintien ou de rappel au travail ? (A) C’est aussi la prégnance du modèle sécuritaire intérieur qui peut expliquer que le plus souvent l’ordre carcéral phagocyte la question de la discipline professionnelle ; d’une certaine façon, soit la faute professionnelle est banalisée, soit bien que commise au travail et à son propos, elle devient une faute attentatoire à l’ordre de la prison (B). Par ailleurs, en cours d’emploi, la plupart des droits « classiques » des travailleurs à « peser » sur leurs conditions de travail sont le plus souvent niés qu’il s’agisse d’expression individuelle ou, bien sûr, de revendications collectives (C). Enfin, dans la majorité des situations nationales, en cas d’arrêt du travail correspondant à une suspension temporaire ou à un arrêt d’évidence définitif, la loi dominante est celle de l’informel (D).
A. MODALITES L’INCERTITUDE
D’ACCES AU TRAVAIL
:
LE CHOIX MAJORITAIRE DE
Il est toujours possible, quel que soit le pays étudié, de faire une demande de travail. On insiste dans certains cas toutefois sur l’existence d’une obligation de travail et, en aucun cas, d’un droit à obtenir un emploi (Allemagne). Ailleurs, ce droit apparaît bien plus théorique que dans le reste de la société, alors même qu’il est reconnu constitutionnellement à tout citoyen (ex. Espagne, France) et que le fait d’être détenu, faut-il le rappeler, ne fait pas perdre sa citoyenneté. Il y aurait sur ce point en prison encore plus qu’à l’extérieur, un « droit d’application progressive » (Espagne) ou un simple « droit à solliciter un emploi » (Angleterre, France, Italie), selon des modalités variables. En Angleterre, les différents emplois disponibles et leur description peuvent être affichés dans la prison. Il existe un service spécialisé s’occupant du travail et de la reconnaissance d’un droit à ressources minimales ? Son article 31 affirme que « les personnes détenues dont les ressources sont inférieures à un montant fixé par voie réglementaire reçoivent de l’Etat une aide en nature destinée à améliorer leurs conditions matérielles d’existence. Cette aide peut aussi être versée en numéraire dans des conditions prévues par décret ».
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Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
formation en prison (« Training and Employment Committee ») ainsi qu’au niveau de chaque établissement une commission chargée de l’affectation des détenus sur les postes de travail disponibles, commission composée de fonctionnaires en charge des questions de travail et de formation ainsi que de membres du management de la prison. En Espagne, les détenus demandeurs d’emploi posent leur candidature au regard d’une liste de postes de travail disponibles établie par l’Organisme Autonome de Travail et de Prestations Pénitentiaires. En France, selon les établissements, la demande d’emploi est plus ou moins formalisée, orale ou écrite. Un document spécifique, précisant notamment le niveau de formation, l’expérience professionnelle, la motivation, a été recommandé dans le cadre des orientations données dans le « Pacte 2 » plus haut cité. Dans certains établissements, on organise un entretien avec le détenu. Très souvent, il existe une « commission de classement » réunissant représentants de la direction, travailleurs sociaux, responsables du travail, représentants du service de la santé, personnel d’enseignement et de surveillance, ... De façon voisine, en Italie il existe une commission attribuant un travail donné à un détenu. La composition de cette commission apparaît cependant originale puisqu’elle comprend le directeur du centre pénitentiaire, des représentants du personnel pénitentiaire et du personnel éducatif, mais aussi des représentants des organisations syndicales les plus représentatives aux niveaux national et local ainsi qu’un représentant des détenus. Les critères d’attribution d’un emploi peuvent être prévus légalement. Ainsi, dans le cas de l’Espagne, doivent être pris en compte prioritairement les détenus dont le « programme individualisé de traitement » prévoit une activité de travail, les détenus condamnés par rapport aux « prévenus », les compétences au regard du poste de travail, la conduite personnelle, l’ancienneté dans l’établissement, les charges de famille ; les détenus ayant travaillé plus d’un an de manière satisfaisante dans un établissement bénéficient, par ailleurs, d’une priorité en cas d’affectation dans un nouvel établissement pénitentiaire54. En Allemagne, la loi sur l’exécution des peines indique quelques critères devant être pris en compte par le « service du travail » dans ses choix d’affectation à un travail ; il s’agit des compétences professionnelles du détenu, de son habileté et de ses centres d’intérêts55. Dans d’autres pays, les critères de recrutement au travail utilisés ne sont pas prévus légalement. Il en va ainsi en France ; on semble faire en pratique cependant une distinction entre « critères négatifs » (dangerosité, risque d’évasion, personnalité, problèmes psychiatriques, alcoolémie et toxicomanie) et « critères positifs » (indigence, ancienneté de la demande, aptitude à occuper le poste et savoir-faire). Il n’existe pas de critères fixes en Angleterre ; toutefois ce sont principalement les compétences, les capacités d’adaptation, l’intérêt et l’habileté du détenu qui seraient pris en compte. En Italie, les critères ont varié ; ils transparaissent au travers des listes de « prioritaires », élaborées dans chaque établissement, se référant à 54 55
Cf. J.A. SOLER ARREBOLA, op. cit. Article 37 alinéa 2 de la loi sur l’exécution des peines, op. cit.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
l’ancienneté de la demande de travail, aux charges de famille, aux compétences et objectifs professionnels. De façon dominante, le refus d’octroyer un travail ne fait pas l’objet d’une procédure formelle, rien n’étant prévu dans les textes à cet effet (ex. Allemagne, Angleterre, France, Italie). Aucune motivation de la « non attribution » d’un travail n’étant due, il peut arriver néanmoins qu’une justification soit donnée. La pratique varie d’un pays à l’autre, d’un établissement à l’autre : on se contente ici d’informer oralement le détenu, ailleurs le refus est motivé ; de façon commune, aucun refus catégorique ou définitif n’est jamais indiqué, le nom du demandeur restant sur la liste éventuelle d’attente ; l’idée implicite est bien évidemment de ne pas désespérer ou de maintenir un peu d’illusion. L’Espagne fait ici encore exception puisque les décisions de refus y sont obligatoirement prises par écrit et motivées. Les possibilités d’exercice d’un recours face à un refus d’emploi sont dans la plupart des pays peu évidentes. Le recours n’est pas possible en Italie. Il peut être exercé en France – contre une décision formelle qui n’est pas obligatoire ! – auprès de la Direction générale de l’Administration pénitentiaire ou du Ministère de la Justice, au plan juridictionnel devant le juge administratif. En Allemagne, des recours de type hiérarchique peuvent être exprimés auprès du chef de l’établissement ou d’un représentant du ministère de la Justice du Land à l’occasion de sa visite officielle de l’établissement. En Angleterre, le détenu peut se plaindre au « Governor » de la prison et, si le refus est confirmé par ce dernier, il peut être fait appel à l’Ombudsman. En revanche, en Espagne, un recours formel est prévu auprès de la Commission interne ayant pris, par écrit, la décision de refus ; en cas de confirmation, un recours peut être exercé devant le juge de l’exécution des peines.
B. DISCIPLINE PROFESSIONNELLE : L’ORDRE CARCERAL PHAGOCYTAIRE Même si la question de la discipline dans l’entreprise privée continue de faire l’objet de débats, le droit du travail encadre aujourd’hui de façon assez précise le pouvoir reconnu à l’employeur de sanctionner des faits produits à l’occasion du travail ou ayant des incidences professionnelles. Toutefois, en prison, la délimitation de l’espace possible d’exercice d’un pouvoir disciplinaire au seul titre du travail ne va pas de soi. D’un côté, la question de la discipline n’est pas limitée au temps et au lieu du travail : elle est posée à tout moment, à toute heure du jour et de la nuit ; de ce fait, la question des strictes fautes professionnelles peut apparaître quelque peu secondaire. D’un autre côté, en prison, tout acte ou comportement repéré comme fautif, quel que soit le lieu ou le moment, peut être analysé comme une atteinte à l’ordre carcéral, ainsi que du non respect des personnels surveillants, du risque d’atteinte à la sécurité des personnes, de perturbations, d’agitations, ... Pareille ambiguïté participe certainement des difficultés de repérage de fautes à proprement parlé « professionnelles ». Pourtant celles-ci existent, même si l’on peut faire l’hypothèse qu’elles seraient moins systématiquement sanctionnées que dans une
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Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
entreprise privée extérieure. A quelle éventuelle procédure disciplinaire sont-elles soumises ? Quelles sanctions encourent-elles ? Des recours existent-ils ? Le fait qu’il soit relativement rare de rencontrer des documents internes aux établissements pénitentiaires listant des fautes professionnelles (ex. Italie) ou rappelant les obligations, notamment de sécurité, des détenus-travailleurs (ex. France)56, peut être regardé comme révélateur du peu d’importance ou de réalité des fautes « professionnelles » en prison. Toutefois, une distinction paraît être faite implicitement, en France, entre fautes à caractère « uniquement » professionnel – éventuellement visées par un règlement d’atelier – et « fautes disciplinaires » – violences physiques, évasion, insultes, vols, … – qui, elles, sont énumérées par la loi de façon limitative57. Une faute intervenue ou non en situation de travail mais qualifiée de « disciplinaire » – et donc attentatoire à l’ordre de la prison – conduira à l’application d’une procédure fondée sur un compte rendu d’incident, un rapport écrit ; elle donnera lieu à convocation devant une commission disciplinaire avec possible bénéfice d’un avocat, notification par écrit et motivation de la sanction. A l’opposé, la faute « uniquement » professionnelle ne bénéficie en l’état, en France, d’aucun encadrement procédural alors même que les deux types de fautes pourront aboutir à des sanctions voisines. Dans un cadre juridique différent, en Italie, dès lors que la faute a été produite dans le cadre d’un contrat de travail liant le détenu à un employeur extérieur, il y a application par ce dernier des dispositions disciplinaires du droit commun du travail. En Allemagne, en cas de « faute grave » à caractère professionnel, une « conférence de direction » (« Vollzugskonferenz ») est saisie et détermine une sanction adéquate, sans référence particulière à un règlement ou un document. Un formalisme plus important est observable en Angleterre puisque toute sanction intervient après respect d’une procédure durant laquelle l’intéressé a le droit de présenter sa défense dans le cadre d’un entretien préalable au prononcé de la sanction qui sera notifiée par écrit. Bien que plus légère, la procédure en Espagne prévoit une notification écrite et une motivation de la sanction. Dans quelques pays, les sanctions possibles en cas de fautes – professionnelles ou non – sont prévues légalement (ex. Espagne, Italie)58. Parfois, la réglementation particulière de la relation de travail en prison permet de préciser des sanctions 56
57 58
Antérieurement à l’adoption le 13 octobre 2009 d’une nouvelle loi pénitentiaire, on pouvait rencontrer en France des « supports d’engagement professionnel » rappelant les obligations de sécurité, de rangement du matériel, ou plus généralement les devoirs du détenu-travailleur relatifs aux consignes de travail, aux exigences de qualité et de quantité de travail, au respect des règles d’hygiène et de sécurité, … La loi pénitentiaire prévoit dorénavant, en cas de participation à des activités professionnelles, la signature d’un acte d’engagement par le chef d’établissement et la personne détenue, acte énonçant notamment « les droits et obligations professionnels de celle-ci ainsi que les conditions de travail et sa rémunération » (article 33 de la loi de 2009 précitée). Article D. 249-1 et suivants du Code de procédure pénale. Cf. en Espagne, l’article 9 et 10 du décret-royal du 6 juillet 2001 et en Italie l’article 39 de la loi 354/1997.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
spécifiquement professionnelles (Espagne)59. On retrouve de façon générale des sanctions telles que l’avertissement (Angleterre, France), la mutation de poste (Angleterre), la suspension temporaire (Allemagne, Angleterre, Espagne) ou la « mise à pied » (France, Italie), le « déclassement » (France), la suspension définitive (Allemagne, Angleterre), « l’extinction » de la relation de travail (Espagne) ou le licenciement (Italie). Parfois des sanctions moins classiques sont mentionnées, ainsi de l’interdiction de participation à certains évènements sociaux au sein de la prison (Allemagne) ou de la suppression de « privilèges acquis » (Angleterre). Les possibilités de recours contre des décisions de sanction sont le plus souvent de type hiérarchique et juridictionnel. En Allemagne, il est possible d’exercer un recours contre des sanctions infligées dans le cadre du travail, normalement par le personnel d’encadrement, auprès de la direction. Dès lors que cette dernière confirme la sanction, le détenu peut saisir la juridiction chargée du suivi de l’exécution des peines (« Strafvollstreckungskammer »). En Angleterre, à condition d’avoir utilisé préalablement la procédure interne dite « grievance procedure », un recours peut être exercé devant l’Ombudsman. En Espagne, en fonction de l’espèce, un recours peut être introduit devant le juge de l’exécution des peines (« juzgado de vigilancia penitenciaria ») ou auprès du juge du travail (« juzgado de lo social »), un recours hiérarchique préalable étant nécessaire dans ce dernier cas. En France, un recours hiérarchique est possible ; il est nécessairement préalable à un éventuel recours exercé devant le juge administratif. Toutefois, un tel recours intervient contre une décision administrative de sanction d’une faute qualifiée de « disciplinaire ». Si une faute « professionnelle » n’est pas qualifiée ou qualifiable de « disciplinaire », elle peut en pratique donner lieu à sanction se traduisant, par exemple, par un « non accès temporaire » au travail et donc une perte de revenu, sans qu’un recours puisse être exercé.
C. EXPRESSION
INDIVIDUELLE ET COLLECTIVE
:
LA NEGATION TACITE
OU EXPLICITE
La possibilité de réclamation individuelle est prévue par la loi en Italie60. En Allemagne, il n’existe pas de prévision normative spécifique pour les réclamations professionnelles mais l’indication générale de la possibilité de demander audience une fois au moins par semaine au directeur de l’établissement préalablement à toute réclamation écrite61. Il est également possible de faire une requête auprès d’un représentant du ministère de la Justice du Land. En Angleterre, la réclamation doit être faite auprès du personnel pénitentiaire « le plus proche » ; en cas de non résolution du problème, le détenu s’adresse par écrit au chef d’établissement ; enfin,
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Article 9.2 et 10 du décret royal du 6 juillet 2001 Article 35 de la loi n° 354 de 1975. Article 108 alinéa 1 de la loi sur l’exécution des peines.
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
il peut faire appel à l’Ombudsman62. En Espagne, avant toute réclamation auprès de l’organisme gestionnaire du travail dans la prison, le détenu doit avoir respecté une procédure administrative légalement prévue63. Dans l’ensemble des pays étudiés, l’expression en prison de réclamations individuelles à propos du travail est envisagée. Cette nécessité d’une possible réclamation individuelle n’est pas niée en France ; elle peut, y compris dans certains établissements, donner lieu à prévision d’une procédure spécifique. Mais il y a là des pratiques et absolument aucune reconnaissance d’un droit individuel à réclamation, sans parler bien évidemment de revendication. Les revendications sont en principe portées via l’exercice de droits collectifs. Qu’en est-il de ces derniers en prison qu’il s’agisse du droit d’association, du droit syndical, du droit de représentation collective? Ces droits ne sont reconnus en prison que de façon très exceptionnelle ; il en va ainsi du droit d’association et du droit syndical en Italie64. Il faut rappeler que dans ce même pays, existe au titre de la représentation collective, dans chaque établissement, une commission compétente en matière d’accès au travail ; elle comprend des représentants des organisations syndicales les plus représentatives ainsi qu’un représentant des détenus, désigné par tirage au sort. Dans d’autres pays, le fondement de droits collectifs est plutôt recherché – paradoxalement – dans l’absence de dispositions légales. Ainsi en Espagne, rien n’est dit en matière de droits collectifs ; en pratique, les détenus effectuant un travail « productif » peuvent s’exprimer, y compris collectivement, sur le travail et son organisation, … ils peuvent participer à des commissions, donner un avis et faire des propositions en matière, par exemple, de fixation annuelle des rémunérations ; ils peuvent aussi faire partie, on l’a déjà signalé, des équipes de contrôle de la sécurité et de prévention des risques professionnels. Ces possibilités reposent, en réalité, sur le silence de la loi et notamment sur l’absence de toute limitation de droits d’association, de syndicalisation, de négociation collective ou de grève. Ceci étant, la mise en œuvre de ces droits apparaît en pratique plus que limitée ne serait-ce que par la possible invocation à tout moment de motifs de sécurité. De façon voisine, en Allemagne, les droits d’association et de réunion ne sont pas interdits ; en revanche, la loi précise que les détenus ont le droit de créer un organisme d’expression et de participation, dit de « co-responsabilité », assimilable – de très loin ! – à une « sorte de comité d’établissement »65. Cette instance se réunit normalement une fois par mois avec le directeur de la prison et ses adjoints afin de discuter des problèmes de vie et d’organisation au sein de l’établissement pénitentiaire. On voit ici que des formes d’institution représentative du personnel peuvent exister en prison. 62 63
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Règlement ministériel de 1999. L’article 1.5 du décret royal n° 782 du 6 juillet 2001 renvoie sur ce point aux articles 69 et suivants de la loi de procédure du travail telle que modifiée par le décret loi n°2 du 7 avril 1995. Un écart peut bien évidemment exister entre reconnaissance légale et pratique ! Article 160 de la loi sur l’exécution des peines, op. cit.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
Enfin, certains pays sont à ranger dans la négation tacite ou explicite du droit syndical et du droit à la représentation collective pour les détenus-travailleurs. Ces droits qui sont encore bien souvent peu « naturels » dans l’entreprise privée extérieure à la prison apparaissent ici « naturellement inconcevables ». Leur transport dans la prison serait en soi contraire à l’ordre de cette dernière – à sa finalité ? -. On prend bien garde de n’envisager aucune adaptation de ces droits aux réalités carcérales. En Angleterre, on note simplement que des revendications collectives peuvent être exprimées auprès des personnels pénitentiaires, du directeur de la prison et en appel devant l’Ombudsman. Les détenus se voient reconnaître par ailleurs un « droit d’association conditionnel » : les associations de détenus font en effet l’objet d’une réglementation particulière à chaque établissement pénitentiaire. La France, une fois de plus, n’apparaît pas parmi les pays sagement innovants. Certes, l’adhésion au sein de la prison à des associations à caractère culturel est possible ; mais on y affirme, en l’absence toutefois de texte explicite, qu’il est interdit de se syndiquer66 ; le droit de représentation collective n’existe pas ; en pratique, il arrive au mieux que des réunions de discussion, de concertation puissent être organisées, à l’initiative de la direction, dans certains établissements. Si avant tout le droit syndical mais aussi le droit à la représentation collective et, dans une moindre mesure, le droit d’association, posent problème que dire alors des droits de négociation et de conflit collectif ?! Le droit à la négociation collective n’est manifestement ni reconnu, ni pratiqué, dans l’ensemble des pays étudiés. Il suppose en toute hypothèse l’existence de représentants syndicaux – et donc du droit syndical – ou de représentants élus ou désignés à cette fin. Même lorsque des formes de représentation existent, elles ne remplissent en aucun cas ce type d’attribution. En ce qui concerne les conflits collectifs, on observera que l’administration pénitentiaire, bien que n’étant pas toujours l’employeur, détient une forme de « droit de lock-out » puisqu’elle peut, à tout moment, invoquer des raisons de sécurité pour interrompre l’activité et fermer les lieux de travail. Pour ce qui est du droit de grève, on retrouve une distinction entre deux groupes de pays. Dans le premier cas, la grève est interdite ; on retrouve ici l’Allemagne, l’Angleterre, la France. De façon générale, toute revendication à caractère collectif passant par une action concertée apparaît prohibée, contraire à l’ordre de la prison ; elle constitue une faute disciplinaire. Ceci ne veut pas dire que des grèves ne se produisent pas à certaines époques dans des établissements pénitentiaires de ces pays. Dans le second cas, on s’appuie sur l’absence d’interdiction légale pour affirmer la possibilité du recours à la grève. C’est le cas de l’Espagne et de l’Italie. Dans ce dernier pays, le débat n’est pas que théorique : dès lors que le travail en prison est effectué pour le compte d’une entreprise extérieure, dans le cadre d’un contrat de travail « classique », la grève est possible mais dans le respect de la réglementation de la prison ; cela veut dire que 66
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S’il n’y a pas d’interdiction formelle de se syndiquer, le fait de participer à une action collective de nature à perturber la sécurité ou l’ordre de l’établissement constitue, par contre, une faute disciplinaire (Articles D. 249-1 2° et D. 249-2 2° du Code de procédure pénale).
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
certaines modalités de grève connues à l’extérieur ne sont pas permises et qu’en pratique le détenu-travailleur en grève restera, aux horaires habituels de travail, dans sa cellule. On voit ici que, dans le cadre d’une mise en œuvre adaptée aux réalités carcérales, et dès lors qu’il existe un strict motif professionnel, la grève est possible en prison.
D. ARRET DU TRAVAIL : LA LOI DOMINANTE DE L’INFORMEL L’activité du détenu-travailleur peut, sans être interrompue définitivement, connaître des temps de suspension du fait d’une décision de la direction de l’établissement pénitentiaire ou de l’entreprise privée faisant travailler en prison, ou encore du fait du détenu lui-même (1). Il arrive également que la relation apparaisse non plus suspendue mais rompue ou « éteinte » (2). Les deux hypothèses semblent de façon dominante être soumises à la loi de l’informel. 1. La suspension de l’activité A l’exception du cas de l’Espagne67, c’est sans référence à une disposition légale particulière que la direction de la prison impose une suspension de l’activité en Allemagne, en Angleterre, en France et en Italie. On doit cependant observer qu’en France, l’administration pénitentiaire peut, dans le cadre d’un contrat de concession, se réserver la possibilité de suspendre le travail en cas d’urgence liée à l’exercice de ses missions ou en cas d’inobservation de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité des personnes ou des installations68. Quel que soit le pays, la direction de la prison réagit en règle générale à un fait précis tel qu’une agression, une révolte ou une évasion ou bien à des soupçons ou à la détérioration du climat interne. Il s’agit alors d’une mesure qui ne trouve pas sa cause fondamentalement dans la gestion de l’activité des détenus. Elle est prise dans le cadre de la discipline générale de la prison pour des raisons de sécurité, en tant que rappel à l’ordre ou à titre conservatoire. L’interruption temporaire de l’activité va le plus souvent concerner l’ensemble des détenus-travailleurs de l’établissement, que ceux-ci aient ou non une part de responsabilité dans la situation à l’origine de la décision : tous ne travailleront pas et perdront une part du revenu attendu de leur travail. En dehors de toute question de discipline, il en ira de même lorsqu’on se trouvera temporairement dans l’impossibilité d’assurer l’encadrement de détenus-travailleurs (ex. « grève » des surveillants, absence du personnel d’encadrement de l’entreprise extérieure, …) ou encore dans l’impossibilité de fournir du travail (ex. défaut de matières premières, problèmes d’approvisionnement ou de fonctionnement de 67
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Différentes hypothèses de suspension pour raisons de sécurité ou de discipline pénitentiaire ou cas de force majeure sont indiquées à l’article 9 du décret royal du 6 juillet 2001. Article 10.4, Clauses et conditions générales d’emploi de détenus par les entreprises concessionnaires du contrat de concession-type de l’administration pénitentiaire française.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
machine, …). On observera qu’en fonction de l’existence ou non d’un contrat de travail, on pourra ou non poser la question de la responsabilité de « l’employeur » qui, en droit du travail, a parmi ses obligations, celle précisément de fournir du travail. En contrepoint, on aperçoit tout l’intérêt que peuvent trouver des entreprises extérieures, sans rapport contractuel avec des détenus, à apporter et faire réaliser un travail en prison quand elles le souhaitent. De son côté, le détenu-travailleur se voit reconnaître la possibilité de suspendre son activité dans un certain nombre d’hypothèses qui vont, notamment, de la visite extérieure, familiale ou médicale, à la préparation d’examen jusqu’à l’état de maladie (Allemagne, Angleterre, Espagne, France, Italie), voire à la participation à des funérailles (ex. Angleterre). On doit cependant souligner que ces possibilités correspondent soit à de simples pratiques ou usages, soit se fondent sur des dispositions juridiques. Dans le premier cas, elles gardent un caractère aléatoire et peuvent côtoyer l’arbitraire ou la discrimination ; dans le second cas, il s’agit de droits exigibles. Lorsqu’est reconnue la possibilité d’un contrat de travail en prison (Espagne, Italie), le détenu-travailleur se voit par là même reconnaître un certain nombre de droits à suspendre son contrat. A titre d’exemple, en Espagne, l’incapacité temporaire et la maternité sont des cas de suspension visés à l’article 9.1 du décret-royal de 2001. L’article 18 du même texte prévoit la suspension en cas de permission ou de sortie autorisée. Bien que d’autres pays ne recourent pas au contrat de travail en prison, le salariat y témoigne de son influence : c’est ainsi qu’en Allemagne, le détenu malade a le droit de suspendre son travail dès lors qu’il peut fournir un certificat médical attestant de son incapacité de travail. Les suspensions ou interruptions temporaires du travail ne donnent pas lieu à notification ou enregistrement écrit en Allemagne, en Angleterre et en Italie ; ce peut être le cas parfois en pratique dans certains établissements pénitentiaires en France. En revanche, en Espagne, la cause de la suspension est indiquée par écrit, sauf très faible durée en Espagne et en Italie. Une fois la cause de la suspension disparue, il y a automatiquement reprise du travail dès lors qu’il y a contrat de travail. Malgré l’absence de ce type de sécurité juridique, il y aurait de fait reprise du travail quasi systématiquement en Allemagne et en France, à la différence de l’Angleterre où le détenu peut retrouver éventuellement son poste ou un autre poste. 2. L’extinction de la relation Les principales causes ou hypothèses de rupture de la relation de travail en prison se retrouvent d’un pays à l’autre. Mais, ici aussi, l’existence ou non d’un contrat de travail « classique » (Italie) ou l’encadrement juridique spécifique de la relation de travail (Espagne) constitue un critère de distinction entre situations nationales qui n’est pas sans conséquences pratiques. En Italie, dès lors que le travail est effectué pour un tiers et qu’il y a contrat de travail, les causes justifiant la rupture sont 210
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
identiques à celles prévues pour le même type de contrat qui donnerait lieu à prestation de travail hors situation carcérale. La solution a le mérite de la clarté, avec le risque de ne pas prendre en compte la spécificité du lieu et des conditions d’exécution du travail. On doit toutefois signaler qu’on reconnaît aussi à ces contrats des causes spécifiques de rupture telles que le comportement incorrect dans les rapports entre détenus ou envers le personnel de surveillance, le transfert du détenu ou sa sortie de prison. En Espagne, l’encadrement juridique de la relation spéciale de travail prévoit précisément que cette dernière peut s’éteindre du fait d’un certain nombre de causes : accord mutuel des parties, réalisation de l’objet ou de la prestation de service pour lesquels le contrat a été prévu, constat ou survenance d’une inaptitude professionnelle, de l’invalidité ou du décès du détenu-travailleur, de son accès aux droits à la retraite, en raison d’un cas de force majeure, de la démission du travailleur, du manque d’adaptation du travailleur aux évolutions techniques de son poste de travail. Il en ira de même en cas de non-respect des obligations professionnelles minimales ou de transfert dans un autre établissement pénitentiaire et, bien évidemment, lors de sa libération69. Il n’existe aucune norme juridique en matière d’interruption du travail du détenu en Allemagne et en Angleterre. En France, le Code de procédure pénale prévoit la possibilité de « déclassement », c’est-à-dire de retrait d’emploi en cas de non respect des consignes de travail et de fautes disciplinaires ; mais aucune autre disposition à caractère juridique n’envisage un motif de rupture. En pratique, toutefois, on retrouve des causes classiques de rupture des rapports de travail (« démission », absence au travail, faute professionnelle, …) ou certaines hypothèses spécifiques au milieu carcéral (punition de cellule, placement à l’isolement, transfert et libération). On retrouve donc globalement en prison, quel que soit le pays, un certain nombre de cas non pas de suspension mais d’interruption de l’activité. Ces ruptures donnentelles lieu à une procédure particulière en pratique ou prévue juridiquement ? La réponse est parfaitement négative en Allemagne et en Angleterre. En France, la situation est sensiblement équivalente. Certes, une procédure visée au Code de procédure pénale70, intégrant notamment une notification écrite de la sanction décidée, peut aboutir à l’interruption de l’accès au travail. Mais ladite procédure ne doit être respectée qu’en cas de fautes disciplinaires, entendues d’atteintes à l’ordre de la prison. Les hypothèses d’interruption du travail en prison sont, on l’a vu, beaucoup plus nombreuses. Toutes ces autres situations (« démission », inaptitude, problème économique, faute « simplement » professionnelle, …) ne donnent pas lieu à la moindre procédure, sauf « pratiques » de tel ou tel établissement. En revanche, plus au sud, en Italie, il y a application du droit commun de la démission ou du licenciement en cas d’existence d’un contrat de travail avec l’entreprise extérieure ; dans l’hypothèse où la rupture est, de fait, décidée par la direction de l’établissement pénitentiaire (sanction, transfert, libération, …), la réglementation prévoit un 69 70
Article 10 du décret royal n° 782 du 6 juillet 2001. Article D. 250-4 du Code de procédure pénale.
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entretien préalable du directeur de l’établissement avec le détenu-travailleur et le chef d’entreprise71. En Espagne, dans le cadre du respect de la procédure administrative générale, il y a information écrite du motif de « l’extinction » de la relation spéciale de travail. En toute hypothèse, lorsque rarement une procédure doit être respectée lors de l’interruption de l’activité assurée par le détenu, elle est des plus minimales. On observera au passage que même si en Allemagne il a été envisagé d’instaurer, dans certaines conditions, un préavis de rupture de la relation de travail72, en l’état aucune des législations étudiées n’en prévoit. Surtout, dans l’ensemble des pays, l’arrêt du travail (Allemagne, Angleterre, France) l’extinction de la relation de travail (Espagne) ou encore la rupture à l’initiative de l’employeur (Italie) ne donne lieu à versement d’indemnités de rupture ou de licenciement liées à la durée de la relation. Ceci conduit à dire que le détenu-travailleur qui perd son travail sans motif ou pour un motif injustifié n’a droit à aucune indemnisation.
IV. CONCLUSION Affirmer des droits et obligations du détenu travaillant en prison peut, dans certains pays européens, sembler encore aujourd’hui relever de l’utopie. Pourtant, cet objectif paraît à portée de main dès lors qu’on veut bien être réaliste, c’est-à-dire aménager le modèle salarial extérieur pour tenir compte des spécificités du modèle sécuritaire intérieur. On pourrait ainsi imaginer de recourir bien évidemment au contrat à durée déterminée mais également au contrat à durée indéterminée, à condition de prévoir des causes légitimes de rupture spécifiques tels que le transfert du détenu dans un autre établissement pénitentiaire ou sa libération. On pourrait aussi utiliser la forme d’un contrat à durée indéterminée intermittent, garantissant un minimum d’heures de travail – et donc de revenu par mois ou par an -, ou encore bien évidemment le contrat à temps partiel ; ces deux contrats peuvent à la fois assurer un minimum de garanties au détenu travailleur et être assez « flexibles » pour tenir compte de la disponibilité de travail ; ils peuvent également permettre de prendre en compte d’autres activités du détenu, et notamment d’articuler temps de travail et temps de formation. En ce qui concerne les droits collectifs, il paraît possible de reconnaître des formes d’expression individuelle sur le travail mais aussi collective, au travers d’une représentation des détenus travaillant ou de modalités particulières de consultation. La liberté d’association, de réunions cultuelles est, dès aujourd’hui, de jure ou de facto en fonction des pays, acquise. On ne voit pas pourquoi une organisation collective portant les revendications professionnelles ne pourrait pas exister. L’arrêt de travail collectif et concerté sans préavis comme la manifestation 71 72
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Article 47 du règlement pénitentiaire. Cf. Projet de préavis au maximum de six semaines dans le cas de travail en prison pour le compte d’une entreprise privée
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
collective dans la prison ou encore l’occupation des locaux professionnels ou des voies intérieures peuvent difficilement être envisagés. En revanche, l’appel par voie de préavis écrit ou électronique à ne pas aller travailler, en restant en cellule tel jour, ne paraît pas nécessairement attentatoire à l’ordre de la prison, dès lors qu’expressément fondé sur des motifs strictement professionnels. Il n’est pas besoin de dire que de fortes résistances au changement sont à l’œuvre. En ce qui concerne l’organisation et le développement d’un travail « productif » décemment rémunéré, on ne peut nier, parmi d’autres variables, l’impact du « chômage extérieur », l’état des locaux carcéraux, les « impératifs de contrôle et de sécurité » intérieurs, ... Plus profondément, on ne peut que constater la vitalité du principe dit de la moindre éligibilité, de « less eligibility »73, dans l’opinion publique et donc chez les gouvernants, sans oublier les personnels de l’administration pénitentiaire ; pour ces derniers, il est en particulier inenvisageable que les rémunérations des détenus travailleurs soient comparables aux leurs. La résistance à l’attraction du « modèle salarial » invoque également parfois des raisons d’équité et « le souci de faire accéder aux emplois productifs des détenus difficilement employables »74. Il n’est pas question de nier que s’il manque du travail en prison, il y a parfois aussi carence de travailleurs ou, tout au moins, des personnes – suffisamment – capables de travailler75. De ce point de vue, on doit distinguer en prison les « activités occupationnelles » du « travail ». Dans ce dernier cas, quelles que soient les dispositions juridiques nationales, on sait bien que les critères d’existence d’un contrat de travail sont très souvent réunis. Le recours à la forme « contrat de travail » emporte en réalité toute une série de conséquences en termes de droits et d’obligations du travailleur mais aussi de protection sociale de ce dernier lorsqu’il ne peut travailler (temps de maladie, incidence de l’accident du travail et de la maladie professionnelle, chômage technique, motivation et indemnisation de la rupture, …). Les exemples de l’Italie et de l’Espagne montrent que le travail en prison peut être presté dans un cadre contractuel. L’option italienne est de permettre le recours aux formes de contrat de travail utilisées à l’extérieur de la prison ; on peut s’interroger sur son « réalisme » au regard des spécificités carcérales. Le choix espagnol est de reconnaître l’existence d’une relation de travail spéciale développée dans le cadre d’un contrat
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Sur les limites induites par le principe de less eligibility : Cf not. E. SHEA, « Les paradoxes de la normalisation du travail pénitentiaire en France et en Allemagne », Revue Déviance et société, 2005/3 p. 349/365. E. SHEA, op. cit. Cf. not. PH. AUVERGNON et C. GUILLEMAIN, Le travail pénitentiaire en question, op. cit., p. 40. Outre l’augmentation de la présence en prison de personnes atteintes de troubles mentaux incapables de travailler, on relève en France que près de 40% des détenus n’ont jamais travaillé avant leur incarcération (J.-R. LECERF, Rapport au nom de la Commission des lois sur le projet de loi pénitentiaire, 2008-2009 n°143, spéc. p. 28 et 32).
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
de travail particulier. Tout en observant quelques faiblesses76, on peut voir dans le système espagnol un exemple réel et sérieux d’attraction du travail pénitentiaire dans la sphère du salariat. On a récemment pu espérer une évolution de la situation française. Dans le cadre d’une réforme de la loi pénitentiaire, un « contrat de travail aménagé » avait été préconisé77. La loi adoptée définitivement le 13 octobre 2009 s’en tient à prévoir que « la participation des personnes détenues aux activités professionnelles organisées dans les établissements pénitentiaires donne lieu à l’établissement d’un acte d’engagement par l’administration pénitentiaire » et que cet « acte », signé par le chef d’établissement et la personne détenue, énonce « les droits et obligations professionnels de celle-ci ainsi que ses conditions de travail et sa rémunération »78. Non seulement la suppression de la disposition du Code de procédure pénale interdisant le recours au contrat de travail, n’a pas été envisagée79 mais, aux détours d’un alinéa80, la loi de 2009 rappelle « l’absence de contrat de travail » en prison. Face à une telle situation de blocage et de maintien, de fait, d’une pratique de la « double peine »81, l’avenir de la situation juridique du travail pénitentiaire en Belgique apparaît plus ouvert. L’obligation de travail a été abrogée82 ; la loi affirme que « le détenu n’est soumis à aucune limitation de ses droits politiques, sociaux, économiques et culturels » autres que celles « qui découlent de sa condamnation pénale ou de la mesure privative de liberté »83. On semble ne plus attendre qu’une reconnaissance jurisprudentielle de l’existence d’un contrat de travail ou l’assimilation légale, dans certaines conditions, des détenus travailleurs à des salariés. La possibilité de conclusion d’un contrat de travail emporte, quel que soit le pays, le recul d’une partie de non-droit qui caractérise encore trop souvent l’espace carcéral. Mais, ne serait-ce qu’au regard des compétences professionnelles existant en prison et des problèmes d’emploi frappant nos sociétés, on ne doit pas tout attendre d’un 76 77
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Singulièrement en ce qui concerne les conséquences à tirer lors de la rupture de la relation de travail Le Comité d’Orientation Restreint de la loi pénitentiaire avait estimé nécessaire l’instauration d’un tel contrat « formalisant les conditions d’embauche du détenu, la durée du contrat, la période d’essai, la rémunération, les conditions de suspension ou de rupture, etc. » (Cf. COR, Orientations et Préconisations, Rapport, Ministère de la Justice, 2007, sp. p. 13 (www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/074000721/index.shtml). Article 33 de la loi pénitentiaire, op. cit. L’article 717-3 du Code français de procédure pénale précise que « les relations de travail des personnes incarcérées ne font pas l’objet d’un contrat de travail ». Alinéa 2 de l’article 33 de la loi pénitentiaire, op. cit. Il faut ici encore rappeler que dans la peine d’emprisonnement, la privation de liberté est la seule punition prévue par la loi. Cf. Article 169, 5° de la Loi de principes du 12 janvier 2005, op. cit. , p. 2848. Cf. Article 6 de la Loi de principes du 12 janvier 2005, op. cit. p. 2830. Voy. également les articles 81 et s. de la loi.
Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens
possible recours au « contrat de travail ». En matière de droits sociaux des détenus, le principal enjeu n’est-il pas d’éviter d’opposer mais bien d’articuler les droits de ceux qui travaillent et les droits de ceux qui ne peuvent pas travailler. Le seul accès à la protection sociale par le ticket « contrat de travail » peut être vecteur d’accroissement des inégalités entre détenus. Le bénéfice pour tous et sans condition d’une protection sociale peut être pour sa part porteur d’un décrochage de toute référence à la valeur « travail », incontournable à l’extérieur. On retrouve alors, de façon caricaturée en prison, la nécessité qu’ont nos sociétés de garantir une couverture sociale et un revenu minimum à leurs membres qui ne peuvent pas travailler, sans abandonner la perspective d’un emploi, vecteur souvent d’autonomie et de dignité.
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PEINE ET SECURITE SOCIALE : LE JEU DE LA LESS ELIGIBILITY
par Hugues-Olivier HUBERT Maître de conférences aux FUNDP et à l’ULB, Membre du Centre Droits fondamentaux et Lien social (FUNDP), Chercheur à la Fédération des Centres de Service Social et Véronique VAN DER PLANCKE Chercheuse au Centre Droits fondamentaux et Lien social (FUNDP), Chercheuse associée au Centre de Philosophie du droit (UCL), Avocate au Barreau de Bruxelles
C’est au tour de Guy. Avec Ali, Henry et Boris, ils se retrouvent de temps en temps autour d’un jeu de société. Ensemble ils tuent ainsi un peu de leur temps d’incarcération. Les deux dés roulent : 6 et 2 ! Il avance son pion, 6, 7, 8, et atterrit sur une case « chance ! ». Il croise les doigts, retourne une carte : « En prison sans passer par la case départ ! ». « Décidément, aujourd’hui c’est la guigne » grommelle Guy. Déjà ce matin, à la visite : même si elle se montre forte pour ne pas trop l’inquiéter, il la connaît sa Cécile ; il a bien compris que c’était de plus en plus difficile pour elle et les gosses. Puis c’était au service social de la prison : bon, il est bien gentil l’A.S. Il fait ce qu’il peut. Même quand comme tout à l’heure il n’a pas de bonne nouvelle, il a toujours un mot pour remonter le moral. Mais franchement qu’est-ce que ça change ? Tout ça, c’est trop dur. C’est pas humain.1 « En prison sans passer par la case départ… ». Et donc, sans toucher l’allocation versée à chaque tour bouclé. Tous, nous connaissons cette sentence du Monopoly, ce jeu où l’on apprend à tirer son épingle d’un contexte aléatoire et hyperconcurrentiel. On pourrait envisager de changer radicalement de jeu et lui préférer un jeu de coopération. On pourrait aussi imaginer des alternatives à la case « prison » et la supprimer tout bonnement. Si ces perspectives restent fondamentales, si plus encore elles constituent le véritable défi, la question posée ici est plus modeste : ne pourraiton, sans préjudice pour les joueurs, maintenir quoiqu’il en soit le passage par la case départ, c’est-à-dire garantir le paiement de l’allocation sociale ? La question est sans doute plus modeste mais elle n’en est pas moins essentielle pour deux raisons. Premièrement, elle concerne la dignité des détenus et de leur famille mais aussi celle de la société dans son ensemble. Deuxièmement, elle interroge en profondeur le rôle de la prison car, à moins d’être totalement insensée et inconséquente, ne doit-elle pas aussi favoriser les conditions d’un nouveau départ ? Auquel cas les cases « prison » et « départ » ne devraient jamais être dissociées. Mais voilà, cette proposition peut choquer. Elle s’écrase sur les murs carcéraux comme elle heurte la frontière des idées. Cette fameuse limite qui veut que la vie carcérale ne puisse en aucun cas apparaître plus douce que la condition la plus dure de la vie libre, selon l’incontournable (?) principe de la less eligibility : la TV dans une cellule serait un scandale dès lors qu’un sans-abri honnête n’a que ses cartons pour décor… Alors, si l’on s’en tient au principe de la less eligibility, cette vieille conviction enfouie dans l’inconscient collectif, les conditions de vie de certains citoyens sont déjà tellement déplorables à l’extérieur – et contraires à la dignité humaine –2qu’on 1 2
Les trois extraits décalés qui parcourent ce papier relèvent d’une fiction imaginée par les auteurs de ce texte. Même les CPAS avouent parfois leurs difficultés à garantir ce droit pour tous. Les transferts sociaux restent importants en Belgique. Sans eux, 41,6% de la population sombrerait sous le seuil de pauvreté qui correspond à 60 % du revenu médian. Mais
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
conçoit mal comment rehausser le statut social des détenus. Sur cette limite, l’idée se chiffonne. La réflexion semble d’ores et déjà pliée et dans ses replis s’efface inexorablement (?) l’esquisse d’une autre perspective. Mais une société construite en ce sens ne marche-t-elle pas sur la tête ? Sans aucun doute. Pourtant, il est édifiant de constater que, pour ancestrale qu’elle soit, la théorie de la « moindre éligibilité » conserve toute son actualité dans l’analyse du refus sociétal d’améliorer le sort non seulement des coupables – les détenus – , mais aussi des peu capables – les assistés sociaux. Il nous revient dès lors de rappeler le contexte d’apparition de la less eligibility, d’en interroger les fondements et la légitimité. D’en mesurer les dangers aussi, si on relie rejet du statut social du détenu, accélération de sa paupérisation et risque accru de rechute une fois libéré. Et d’inviter alors à une révolution du regard.
I. LES FONDEMENTS DE LA LESS ELIGIBILITY OU LA FROIDEUR D’UNE SPIRALE NEGATIVE
Bien que le principe « immémorial » de less eligibility traverse en filigrane tout système d’assistance ou de punition, on identifie sa première conceptualisation, lors de la Révolution française, dans les Rapports du Comité de Mendicité de la Constituante3 ; il inspirera ensuite le Poor Law Amendment Act anglais de 18344, conçu pour endiguer le nombre sans cesse croissant de demandeurs d’aide sociale auquel le pays faisait face. La less eligibility était perçue par J. Bentham, utilitariste et père du concept, comme nécessaire pour combattre, en fournissant des incitants au travail, la nature humaine « oisive et paresseuse »5. L’idée était simplement la
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malgré tout, dans notre riche pays, 15,2% de la population vit toujours sous ce seuil. Et pour cause, les allocations sociales de base sont inférieures aux 878 €/mois (1.244 €/mois pour un ménage de deux adultes et deux enfants de moins de 14 ans) qui représentent ce seuil (sources : enquête EU-SILC 2007 (Statistics on Income and Living Conditions) que la DGSEI organise chaque année auprès de plus de 6000 ménages belges). Les Procès-verbaux et rapports du Comité de mendicité de la Constituante (1790-91) mentionnent ainsi : « L’homme secouru par la Nation et qui est à sa charge doit cependant se trouver dans une condition moins bonne que s’il n’avait pas besoin de secours, et qu’il pût exister par ses propres ressources; le besoin qui naît du manque de travail dans un homme qui n’en a pas cherché, dans celui qui n’a pas pensé à s’en procurer, pénible sans doute pour un cœur humain et compatissant, est, dans un État où il y a une grande masse de travail en activité, une punition utile et d’un exemple salutaire » (cité par D. KAMINSKI, « Droits des détenus, normalisation et moindre éligibilité », Criminologie, 43, 1, 2010). Act for the Amendment and better Administration of the Laws relating to the Poor in England and Wales (4 & 5 Will IV c.76). E. W. SIEH, « Less Eligibility: The Upper Limits Of Penal Policy », Criminal Justice Policy Review, 1989, Vol. 3, n° 2, pp. 161-167.
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
suivante : en dégradant « le confort des maisons pour pauvres à un niveau tel que vraisemblablement seuls les indigents les plus désespérés y feraient appel », les autorités publiques visaient à contraindre les individus valides à exploiter leur force de travail pour gagner leur vie par leurs propres moyens6. Incontestablement, l’inactivité et la pauvreté des hommes étaient a priori imputées à leurs carences morales, à leur démérite, plutôt qu’aux structures sociales productrices d’inégalités. Autrement dit, l’obsession étatique revenait à combattre l’indolence des démunis pour arriver à bout de leur indigence. La maxime de la less eligibility, apparue dans le champ de l’assistance puis dans celui de l’enfermement des pauvres, fut naturellement transposée au régime pénitentiaire. Bernard Shaw, dans sa préface de l’étude « Prisons anglaises et gouvernement local » (1922), posa le constat suivant : « Quand nous considérons la partie la plus pauvre, la plus opprimée de notre population, nous trouvons que ses conditions d’existence sont si misérables qu’il serait impossible d’administrer une prison avec humanité sans rendre le sort du criminel plus acceptable (eligible) que celui de maints citoyens libres. Si la misère humaine n’est pas plus profonde dans la prison que dans le taudis, le taudis se videra et la prison se remplira »7. Cette proposition s’adosse à un double postulat quelque peu douteux : les couches les plus pauvres de la société sont les plus enclines à enfreindre la loi ; seule la menace de conditions plus misérables que celles qui les ont poussées vers la délinquance pourrait les dissuader de commettre leurs méfaits8. En 1933, l’Allemand Georg Rusche, de l’Ecole de Francfort, revitalise cette thématique dans son essai, repris dans l’ouvrage édifiant « Peine et structure sociale ». Il démontre que le régime des peines est déterminé par des causes qui se situent ailleurs que dans le pénal lui-même, et cet ailleurs, selon Rushe, c’est l’économie : à une phase donnée de développement économique correspond un mode spécifique de punition9. G. Rusche va préciser la notion de less eligibility, tout en la relativisant. Il rappelle d’abord que l’objectif de la peine demeure une question ouverte, qui ne peut se limiter à la dissuasion du coupable, à son amendement et à la protection de la société. Il ajoute ensuite, après avoir constaté à son tour que les 6 7
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E. SHEA, « Les paradoxes de la normalisation du travail pénitentiaire en France et en Allemagne », Déviance et Société, 2005/3, Volume 29, pp. 360-361. Sidney et Beatrice Webb sont les auteurs de l’étude publiée en 1922, « Prisons anglaises et gouvernement local », citée par Rusche, 1933, 67, traduit par Lévy, Zander, 1994, 102-103. Peine et structure sociale (Punishment and Social Structure). L’œuvre principale de Rusche, fut publiée à la veille de la Seconde Guerre mondiale aux ÉtatsUnis, non dans sa version originale mais dans une version revue et élargie par Otto Kirchheimer, lui-même membre de l’Institut für Sozialforschung. G. RUSCHE, O. KIRCHHEIMER, Peine et structure sociale, texte original (1939) présenté et établi par LEVY, R., ZANDER, H., Paris, Cerf, 1994. E. SHEA, op.cit., p. 361. Pour une analyse de la thèse de Rushe, voy. notamment Ch. VANNESTE, « Pénalité, criminalité, insécurité, … et économie » , in Délinquance et insécurité en Europe, Bruxelles, Bruylant, 2001, pp. 50 et s.
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prisons sont majoritairement peuplées de couches socio-économiquement inférieures de la population, qu’il ne fait bien sûr aucun doute « qu’une société ne peut assigner au régime des peines le but précis d’encourager le crime. Cela signifie que le régime des peines doit être ainsi conçu que les personnes qui paraissent menacées de devenir criminelles, ou dont on peut supposer qu’elles risquent d’accomplir des actes réprouvés par la société, doivent au moins n’y être pas encouragées par la perspective de se faire pincer ou punir (…). Pour ne point, dès lors, contrevenir à sa fonction, le régime des peines doit donc être conçu de telle sorte que les couches précisément les plus menacées de devenir criminelles préfèrent encore végéter dans les conditions les plus misérables en liberté plutôt que sous le joug de la peine »10. Rusche ajoutait qu’un seul jour en prison peut être hautement dissuasif pour une personne d’une classe moyenne ou aisée, alors qu’un séjour bien plus long dans le même établissement ne serait nullement déstabilisant pour la basse classe sociale. Il précisait encore que les conditions carcérales sont évaluées subjectivement par tout un chacun et qu’en réalité, elles doivent apparaître comme pires, mais pas spécialement être pires que les conditions sociales régnant à l’extérieur. Pour G. Rusche toutefois, la vigueur du principe de less eligibility surgit essentiellement lors d’une crise économique, quand « l’équilibre du marché du travail est déstabilisé par l’afflux de masses à la recherche d’emploi » et que la misère régnante provoque l’accroissement de la délinquance11. Il affirme qu’en temps de paix sociale, « la dégradation, la discipline carcérale et son ordre imposé, l’impossibilité de toute activité sexuelle normale, outre l’hostilité du personnel des établissements pénitentiaires surchargé de travail, en un mot la privation de liberté semble avoir (…) un effet dissuasif suffisant »12. Autrement dit, la prison comme peine apparaîtrait ou disparaîtrait selon la réalité sociale : plus les conditions de vie dans le monde libre sont favorables, plus l’emprisonnement en soi, indépendamment de l’abaissement du standard de vie qu’on y ferait régner, retrouverait son plein caractère sanctionnel. Loin de conforter la légitimité de la less eligibility, Rusche insiste dès lors sur la mission différente qu’endossera le régime des peines selon la mise en œuvre ou non d’une politique économique et sociale pour faire face à l’abondance – ou à la rareté – de main d’œuvre13. A la même époque, le criminologue Hermann Mannheim, dans son ouvrage The dilemma of Penal Reform publié en 1939, constate, en s’écartant du tempérament introduit par G. Rusche, l’omniprésence de l’argument de la less eligibility qu’il tient pour principal responsable des profondes difficultés à réformer les politiques
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G. RUSCHE, O. KIRCHHEIMER, Peine et structure sociale, texte original (1939) présenté et établi par LEVY R., ZANDER H., Paris, Cerf, 1994, p. 89. E. SHEA, op cit., p. 361. G. RUSCHE, O. KIRCHHEIMER, op cit., p. 113. Ch. VANNESTE, « Pénalité, criminalité, insécurité… et économie » , in Délinquance et insécurité en Europe, Bruxelles, Bruylant, 2001, p. 54.
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
pénale et pénitentiaire14. H. Mannheim consent en revanche une variante adoucie de la less eligibility par l’introduction d’un principe de « non-supériorité ». Se ralliant à l’idée que la pénologie est imprégnée de considérations économiques, il précise que « s’il faut rendre la situation de l’indigent non criminel moins favorable que celle du travailleur le plus mal payé, il est clair que le criminel ne peut exiger d’être mieux payé que le pauvre. On considérait probablement comme la limite extrême de l’indulgence le fait de substituer quelquefois au principe de less eligibility ce que j’appellerai le principe de « non-supériorité » : l’exigence que la situation du criminel purgeant sa peine ne soit en aucun cas meilleure que celle des plus basses classes de la population non délinquante »15. Ce principe a des implications pratiques. Ainsi, par le biais d’un salaire pénitentiaire dérisoire ou par la suspension de toute autre ressource (allocations, …), on empêche le prisonnier d’accumuler légitimement de la richesse pendant le séjour carcéral ; on inflige, par ailleurs, au détenu libéré l’expérience d’une réduction des opportunités, en le privant d’un soutien immédiat des institutions sociales à sa sortie de prison. Agir autrement faciliterait exagérément le sort du détenu, en comparaison avec les efforts constants d’intégration que doit consentir le citoyen libre. Le principe de non supériorité veille ainsi à ce que le stigmate de l’ex-détenu forme une impression durable sur le public16. On pourrait résumer la dynamique de la less eligibility de la sorte : la « structure sociale », pour maintenir son intégrité, doit être échafaudée de manière telle que les individus redoutent la dégradation de leurs conditions de vie. Ainsi, le statut social du détenu doit être pire que celui de l’allocataire social dans la société libre, luimême moins favorable que celui du travailleur précaire. Le maintien sur chaque échelon de la pyramide sociale serait rendu suffisamment inconfortable pour stimuler l’individu à s’en émanciper en même temps qu’il le dissuade de s’en affranchir vers le bas : concrètement, l’allocataire social doit aspirer à devenir travailleur et craindre le statut de prisonnier. En conséquence, tous les efforts de réforme pénitentiaire trouveraient leurs limites dans le sort réservé aux couches les plus défavorisées du monde libre que l’Etat souhaite détourner du crime. Mais est-il acceptable, sur le plan criminologique, de partir de la prémisse selon laquelle les classes les plus défavorisées seraient les plus enclines à la criminalité ?17 La tentation des « pauvres » à délinquer plutôt qu’à travailler, dès lors que les conditions de vie dans les prisons seraient de meilleure qualité, est-elle empiriquement vérifiée ? Et qu’en est-il de la crédibilité du postulat selon lequel les individus préféreraient se réfugier en prison que vivre « librement » dans une pauvreté extrême ? 14 15 16 17
E. SHEA, op. cit., p. 361. Cité dans G. RUSCHE, O. KIRCHHEIMER, op cit., p. 64. E. W. SIEH, « Less Eligibility: The Upper Limits Of Penal Policy », op cit., pp. 177-178. J. FEEST, « Imprisonment and Prisoners’ Work : Normalization or Less Eligibility ? », Punishment & Society, Vol. 1, n° 1, 1999, p. 100
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C’est certes une vision particulière de l’homme et de ses motivations criminelles qui étaye la less eligibility : celle d’un homme rationnel et calculateur, engagé dans la poursuite des plaisirs et l’évitement du mal, qui va mettre en balance le coût de la sanction et le bénéfice du passage à l’acte. Pour que la peine soit efficace, il convient que l’affliction du châtiment surpasse l’avantage résultant du délit, affirmait déjà Beccaria au 18e siècle, qu’il y ait donc plus à perdre qu’à gagner. Un calcul de risques tant pour le criminel potentiel que pour la société. Nous y reviendrons. C’est également une vision particulière de la peine que charrie la less eligibility, originellement conceptualisée pour garantir le caractère dissuasif de la sanction. Premièrement, la fonction de dissuasion supplante les autres desseins de l’emprisonnement, telle la réhabilitation. Deuxièmement, il est présumé et accepté comme une fatalité que la privation de liberté seule ne puisse suffire à assurer une fonction de repoussoir. Qu’il faille y adjoindre une dégradation des conditions d’existence est pour le moins interrogeant. N’est-ce pas implicitement considérer que, même à l’extérieur des murs, les conditions de vie sont tellement déplorables que les gens seraient prêts à renoncer à leur liberté pour les améliorer ou encore, qu’à défaut des moyens de son exercice, la liberté se réduit à sa plus simple expression au point de ne plus constituer une valeur à perdre ? Répondre par l’affirmative serait, plus qu’un indice, un aveu. Ce serait reconnaître que notre société inflige un traitement dégradant à une frange considérable de la population ou, à tout le moins, qu’elle ne l’assiste pas pleinement face au danger de la pauvreté. Ce serait également s’exposer au risque d’une spirale négative : si, selon la logique exposée, la pauvreté est un facteur favorisant le crime et que la prison, suivant un schéma de moindre éligibilité, l’accentue voire la radicalise, le détenu une fois libéré ne sera-t-il pas le premier à rechuter ?18 Derrière la problématique des risques de misère, et celle des risques liés à la misère, se loge une vieille question jadis qualifiée de « sociale » aux origines de laquelle il importe de revenir ici.
II. AUX
ORIGINES DE L’INTERSECTION ENTRE LES QUESTIONS SOCIALE ET D’ORDRE SOCIAL : LES LIAISONS DANGEREUSES
Rappelons d’abord, en guise de toile de fond, que fin 18e, puis au 19e siècle, les perceptions de l’occurrence du mal ou du malheur se modifient. A une métaphysique 18
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Ainsi, comme le résume Baratta par exemple, les personnes vulnérables ou blessées qui souffrent de lésions de leurs droits à caractère « faible » (droits économiques et sociaux), deviennent des agresseurs potentiels des droits « forts » (intégrité de la personne, droit de propriété, ...) des sujets socialement mieux protégés. Voy. A. BARATTA, « Droits de l’homme et politique criminelle », Déviance et Société, 23, 3, 1999, p. 243. Quant à l’appauvrissement comme facteur de déviance et de récidive, voy. également Ph. COMBESSIE, Sociologie de la prison, Ed. La Découverte, Paris, 2009, pp. 97-98. L’auteur cite quelques études en la matière.
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
du mal s’ajoute désormais une physique du mal. Cette transformation accompagne le long processus de rationalisation qui caractérise l’histoire de notre modernité. Parallèlement, la catastrophe comme signe de la fatalité, est progressivement supplantée par le risque comme produit de l’activité humaine. A la superstition comme moyen de peser sur le destin succède la croyance dans le progrès (scientifique et technique) comme outil pour maîtriser la destinée humaine. La raison probabiliste modifie quelque peu les catégories du bien et du mal, du danger et de l’accident, de la liberté et de la responsabilité, du tout et des parties. L’application du calcul de probabilité à la statistique dans la physique morale ou sociale (Quételet, 1835)19, fait apparaître des régularités (des tendances, des penchants) dans le capharnaüm des particularités individuelles. Désormais, pour mieux comprendre l’individu, il convient de faire un détour par la masse, par la collectivité. C’est à travers ce détour que les conceptions modernes de la misère et de la criminalité, bref que l’occurrence du mal(heur) dans diverses déclinaisons vont se définir. Deux « machines » vont être inventées, comme techniques permettant de maîtriser deux sortes de risque : d’une part, un diagramme disciplinaire (Foucault, 1972, 1975)20 pour répondre notamment à la question de l’ordre social ; d’autre part, un diagramme assurantiel (Ewald, 1996)21 – apparu plus tardivement (fin 19e s., début 20e s.) – pour répondre notamment à la question sociale22. En articulant Foucault et Ewald, on voit les affinités électives qui associent ces deux diagrammes23. De façon caricaturale, la prison d’un côté, la sécurité sociale de l’autre. Ainsi, appliquées à l’occurrence de l’accident, les mathématiques probabilistes rendront le risque calculable et collectif (puisque calculable précisément à l’échelle d’une population). Conséquence fondamentale en ce qui concerne la prise en charge de l’occurrence du mal, le calcul de probabilité permet à l’expert de définir l’accident, non plus tant en lien avec ses causes dans lesquelles il fallait dépister la faute (et donc la responsabilité), mais en fonction de sa régularité, quelles que soient les intentions de ses protagonistes. Ce faisant, il ne s’agit plus de confronter une victime et un fautif dans leur individualité ; mais de relier une victime au tout, au collectif. C’est ainsi que l’assurance, comme technologie du risque, a permis de socialiser les risques. Comme si, à travers elle, se dédoublait l’événement 19 20 21 22
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A. QUETELET, Sur l’homme et le développement de ses facultés ou Essai de physique sociale, Paris, Bachelier, 1835. M. FOUCAULT, Histoire de la folie à l’âge classique, Paris, Gallimard, 1972 ; M. FOUCAULT, Surveiller et punir, Paris, Gallimard, 1975. F. EWALD, Histoire de l’Etat providence, Paris, Grasset, 1996. Notre propos n’est pas ici d’aborder une approche historique et chronologique, mais bien de mettre en évidence l’élaboration de deux logiques et surtout leurs rapprochements qui sont au centre des questions relatives à la less eligibility. H.-O. HUBERT, L’Etat surveillant, les politiques belges de sécurité au regard de la sociologie du risque, Thèse de doctorat en sociologie, U.L.B., 2001.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
malheureux : d’un côté la souffrance individuelle du dommage ; de l’autre sa définition comme accident en référence à un risque collectivisé et sa traduction en valeur à travers l’indemnité puisée dans la mutualité (socialisée)24. D’après Ewald, les protections sociales libéraient ainsi la poursuite des risques essentielle au développement économique. Jusque là, par exemple, les accidents de travail opposaient en justice la responsabilité du patron à celle de l’ouvrier. L’assurance permettait désormais de sortir du régime de la faute. Technique d’indemnisation, l’assurance s’instaurait aussi en technologie morale. Il n’était plus nécessaire d’opposer l’imprévoyance des ouvriers à celle du patron. Dorénavant, l’assurance était la prévoyance : celle de ceux qui s’exposaient au risque. Ainsi étaient libérés l’engagement financier des capitaines d’entreprise et l’engagement physique des ouvriers dans le développement du machinisme et de l’industrialisation. En inversant les signes, en transformant en quelque sorte le mal en bien, le risque était libéré et, avec lui, l’accident comme fondement du modèle libéral25.
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F. EWALD précise ainsi que : « L’assurance propose une tout autre idée de la justice : à l’idée de cause succède celle de répartition d’une charge collective dont on peut fixer selon une règle quelle y sera la contribution de chacun. >…@ L’assurance propose une règle de justice qui n’a plus comme référence la nature (l’individu) mais le groupe, une règle sociale de justice que le groupe est libre de fixer. L’assurance, donc, est la pratique d’un certain type de rationalité. Elle n’a pas de domaine propre. Elle fournit un principe général d’objectivation des choses, des hommes et de leurs rapports. Elle est à la fois : une technique économique et financière […], une technologie morale […], une technique de réparation et d’indemnisation des dommages, un mode d’administration de la justice concurrent du droit » (Ewald, op cit., pp. 141-142). « Réduit à sa structure, ce schème (Main invisible de A SMITH, Fable des abeilles de Mandreville, Les harmonies de Bastiat, bref le marché) qui fait naître un ordre de la rencontre purement aléatoire d’atomes individuels peut être décrit comme schème de l’accidentalité généralisée. Il fait de l’accident, entendons de la pure liberté, de l’aléa, de la liberté primitive, sans qualité, la base même de l’ordre social » (EWALD, 1996, p. 55). Dans la philosophie libérale, l’accident s’associe à la responsabilité (prévoyance). « Dès le moment où l’homme est émancipé, l’usage de sa liberté l’expose à mille accidents. Il ne s’affranchit que sous la condition de se conduire avec sagesse, de redoubler d’effort et d’affronter des obstacles » (EWALD, 1996, pp. 52-53). Dans cette morale de la responsabilité, l’accident, comme occurrence du mal ne peut être que le résultat d’une faute individuelle. Pour la raison libérale, « la cause du mal est toujours morale » (EWALD, 1996, p. 33). L’accident libéral apparaît dès lors comme une réalité multiple. Il est d’une part, l’expression en raison, laïcisée, de la crainte de l’occurrence du mal lorsque celui-ci est expurgé de toute essence extérieure. Il est, d’autre part, une forme de traduction du mal en bien. Agrégé dans des modèles économiques, il est un élément de l’équilibre social ; articulé à la faute et au principe de responsabilité, il est facteur d’ordre, de lien social et de progrès. A la vertu de la prévoyance répondait, dans une logique entrepreneuriale, la valorisation d’un engagement de soi ou de sa propriété (capitaine d’entreprise). Le risque inconsidéré apparaît comme une faute vis-à-vis de la prévoyance ; mais, dans un
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
Cette nouvelle règle de justice, concurrente du droit de la faute, permettra notamment de refouler, mais en partie seulement et pendant un temps (durant quelques décennies du 20e siècle marquant l’apogée de l’Etat-providence), la discrimination issue de l’assistance caritative entre bons et mauvais pauvres, à l’origine du Poor Law Amendment Act anglais de 1834 évoqué plus haut26. La misère ne relève plus seulement du mauvais coup du sort, ni de la pitoyable imprévoyance du pauvre ; elle se conçoit désormais comme un risque inhérent au développement du modèle capitaliste. La sécurité sociale en s’appuyant sur le diagramme assurantiel vise précisément à gérer ce risque. Si, du côté de la question sociale, l’assurance permettait de reconsidérer le rapport entre bien et mal en traduisant ce dernier en valeur, du côté de la question criminelle, Beccaria propose une réflexion assez similaire. En effet, en 1764, dans Des délits et des peines, il considère que la peine ne doit plus être affligeante, mais utile. Plus précisément pour l’auteur, la peine se dédouble : d’une part l’affliction qui n’est pas un objectif en soi, d’autre part l’utilité qui est le but par excellence, en vue duquel l’affliction peut devenir un moyen si elle reste raisonnable, c’est-à-dire rationalisée, mesurée en relation avec la gravité du délit. « Pour que le châtiment produise l’effet voulu, il suffit qu’il surpasse l’avantage résultant du délit »27. Mais, renversant de cette façon la nuit de la procédure inquisitoire et le jour du supplice par le jour de la procédure publique et la nuit du cachot, le droit pénal classique allait faire émerger une nouvelle zone d’ombre ; l’individualisation et l’utilité de la peine ainsi que la doctrine de la responsabilité allaient soulever la question des raisons du crime. Les notions de conscience, discernement, causes, déterminismes sont appelées à la barre à côté de celles de liberté, responsabilité et culpabilité. Vient le temps des experts et les débats pour différencier le crime de la sémiologie de la maladie mentale ou, au contraire, pour en faire une catégorie particulière. « Le droit ainsi transformé fait naître ‘l’étiologie’ de la faute » (Labadie, 1995)28.
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même temps, trop de prévoyance mènerait à la couardise et à l’immobilisme incompatibles avec l’industrialisation et le progrès. C’est à cet équilibre fragile que répond l’assurance. « L’assurance, en apportant la sécurité, a puissance de transformer le négatif en positif ; elle a le pouvoir de libérer toutes les capacités économiques qu’une crainte jusqu’alors justifiée retenait, au grand préjudice de la prospérité de la nation » (EWALD, 1996, pp. 160-161). Si l’assurance permet ainsi de « libérer le risque », elle oblige aussi à la prévoyance (cotisations). Elle œuvre donc tout autant au développement économique qu’au développement moral. R. CASTEL, Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Paris, Fayard, 1995. C. BECCARIA, Des délits et des peines (1764), Paris, Flammarion, 1991, p. 124. J.-M. LABADIE, Les mots du crime. Approche épistémologique de quelques discours sur le criminel, Bruxelles, De Boeck, 1995, p. 90.
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A la métaphysique de la faute qui opposait l’expiation à la culpabilité avant d’infliger des peines utiles et tarifées comme coûts de la responsabilité au bénéfice de la liberté, s’ajoute une physique de la faute. A L’Esprit des lois s’ajoute les lois de fonctionnement du monde telles que révélées empiriquement et positivement par les sciences. A côté de la question sociale, la question criminelle emprunte dès lors elle aussi la voie de la rationalisation. La « volonté de savoir » renforce les velléités de pouvoir et le panoptique fournit les plans des machines à discipliner qui se diffuseront dans l’ensemble du champ social29. Là encore, les mathématiques probabilistes interviennent. Elles mettent en évidence des régularités dans les taux de criminalité ; ce qui en fait un phénomène globalement normal et donc un risque relativement constant30. Toutefois, la normalité du crime comme phénomène social ne postule pas pour autant la normalité du criminel en tant qu’individu. En effet, du rapprochement entre moyenne objective et moyenne arithmétique naît l’homme moyen. Dans une distribution normale, la majorité des individus se répartissent autour de cette figure abstraite. Le diagramme assurantiel opérait un mode d’individualisation particulier à partir de la masse selon une méthode probabiliste. Il en est de même en ce qui concerne la définition de la normalité. Les individus ne sont plus tant définis à partir d’eux-mêmes ou à partir du contrat social qu’à partir de la population à laquelle ils sont identifiés. L’homme est un être social et sera jugé comme tel, en référence au collectif, c’est-à-dire au type de l’homme moyen qui représente la société objectivée31. La normalité ainsi définie, il convient désormais de comprendre l’origine de l’anormalité et en particulier l’origine du mal. Et l’on songe aux travaux d’Esquirol sur la monomanie (1838), au Traité de la dégénérescence de Morel (1857) et surtout aux positivistes italiens : Lombroso (1895) qui, appliquant la statistique à l’étude phrénologique, construit le type du criminel-né qui incorpore la nature archaïque des origines humaines, la présence atavistique d’un « temps arrêté » ; Garofalo qui 29 30
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M. FOUCAULT, Surveiller et punir, Paris, Gallimard, 1975 ; M. FOUCAULT, La volonté de savoir, Paris, Gallimard, 1976. « Triste condition de l’espèce humaine ! Nous pouvons énumérer d’avance combien d’individus souilleront leurs mains du sang de leurs semblables, combien seront faussaires, combien seront empoisonneurs : à peu près comme on peut énumérer d’avance les naissances et les décès qui doivent se succéder. La société renferme en elle les germes de tous les crimes qui vont se commettre. C’est elle en quelque sorte qui les prépare et le coupable n’est que l’instrument qui les exécute » (Quételet, 1869, 96-97). En bref, l’homme moyen est une abstraction, un être fictif – puisqu’il se peut qu’en réalité aucun individu n’y corresponde exactement – auquel correspond tout de même une réalité : un type d’homme ou plus précisément le type des hommes d’une société à un moment et en un lieu donnés. Il est la société telle qu’objectivée par la méthode. « Abolissez la référence métaphysique à une nature humaine, vous ne pourrez identifier les individus, les juger scientifiquement que selon un jugement social, en référence précisément à cet homme moyen » (Ewald, 1996, 119).
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
définit le crime ou « délit naturel » comme « la lésion de cette partie du sens moral qui consiste dans les sentiments altruistes fondamentaux, la pitié et la probité >…@ non pas la partie supérieure et la plus délicate de ces sentiments, mais la mesure moyenne dans laquelle ils sont possédés par une communauté, et qui est indispensable pour l’adaptation de l’individu à la société » (Garofalo, 1895, 38) ; ou encore Ferri (1893) pour qui le crime est la résultante multifactorielle de causes anthropologiques et individuelles, géophysiques et sociales qui se combinent en une loi qu’il baptise de saturation criminelle32. Dans une perspective lamarckienne de l’évolution, le milieu est dans un premier temps évoqué comme un facteur déterminant l’hérédité et sa transmission. La perspective biologique du crime ouvrait alors la porte à l’incubation d’une approche plus sociologique du crime engagée par des auteurs tels que Manouvrier et Lacassagne. « L’important, c’est le milieu social », déclarait ce dernier en 1886. « Permettez-moi une comparaison empruntée à une théorie moderne. Le milieu social est le bouillon de culture de la criminalité; le microbe, c’est le criminel, un élément qui n’a d’importance que le jour où il trouve le bouillon qui le fait fermenter »33. « La condition sociale, l’éducation, la bonne ou la mauvaise fortune, voilà le véritable facteur de la criminalité. Le criminel se recrute surtout parmi les gens pauvres, malheureux. Pour avoir une action sur les criminels, il faut d’abord agir sur le milieu. C’est le mal de misère qui laisse son empreinte et fait ces anomalies ou ses particularités anatomiques si bien relevées par Lombroso »34. Ce n’est que progressivement que cette approche par le milieu s’affranchira de son assise biologique et évolutionniste. L’influence du milieu deviendra primordiale. Ce dernier apparaîtra comme une dimension inaliénable d’un essai de problématisation du phénomène criminel. La question sociale et la question criminelle se rapprochent parce que d’une part, résoudre la question sociale permettrait de réduire en partie les risques de criminalité et, d’autre part, parce que le schéma disciplinaire (le contrôle) maintiendrait la question sociale dans la paix civile. Une dangerosité sociale s’ajoute désormais à la dangerosité individuelle. Certains s’en saisiront pour justifier un contrôle accru sur les populations pauvres : contrôle policier et/ou contrôle moral (éducation, responsabilisation, etc.). D’autres proposeront des mesures plus 32
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Au sujet de ces auteurs, voir l’excellent ouvrage de DEBUYST et al., Histoire des savoirs sur le crime et la peine. T1. Des savoirs diffus à la notion de criminel-né et T2. La rationalité pénale et la naissance de la criminologie, Bruxelles, Larcier, 2008. A. LACASSAGNE, Archives d’anthropologie criminelle de criminologie et de psychologie normale et pathologique, 1886, pp. 182-183. A. LACASSAGNE (1890), intervention in Actes du IIe Congrès international d’anthropologie criminelle, 1889, Paris, Masson, pp. 165-167 (Lacassagne, 1890, 535).
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offensives à appliquer au milieu lui-même (assainissement, lutte contre la paupérisation, pour l’amélioration des conditions de travail et de vie, etc.). Perspectives conservatrices ou réformatrices, socialistes ou libérales, quoiqu’il en soit, les points de vue sociologiques concernant les liens entre le crime, la société industrielle et le milieu de vie constitueront un des fondements de la doctrine de défense sociale. En Belgique, Ducpétiaux et Prins représentent deux figures de proue de cette doctrine qui se déploie tant sur le versant individuel (prise en compte de l’âge des mineurs, de l’état psychique, individualisation dans le régime carcéral cellulaire) que sur le versant collectif (politique offensive concernant l’habitat, l’éducation, etc.). Prins affirmait ainsi que « […] Les défectueux deviennent dangereux pour eux-mêmes et pour autrui, quand leur insuffisance est associée à l’insuffisance du milieu social, et que, dans l’atmosphère empoisonnée et la souillure des bas-fonds, les risques de la misère et de l’abandon viennent s’ajouter aux risques de la dégénérescence »35. D’autres emprunteront une autre voie. C’est en constituant une nouvelle science permettant de comprendre plus largement la vie en société qu’ils en viennent à aborder le crime. Pour eux, ce dernier constitue un phénomène dont la nature (sociale bien qu’antisociale) permet d’analyser « à la marge » les processus mystérieux qui rassemblent des individus dans une vie collective. Bien qu’opposés sur de nombreux points théoriques, Durkheim et Tarde se rejoignent largement en ce qui concerne les conséquences de leurs travaux en matière de politique pénale. Dans L’Education morale, Durkheim propose une théorie de la sanction36. Il s’insurge contre une définition de la peine comme affliction d’une souffrance. Pour lui, celle-ci n’est pas utile car si la menace de souffrance était à ce point dissuasive, si elle permettait d’écarter le délinquant des dangers de la carrière criminelle, elle devrait de la même façon écarter les ouvriers des risques liés au machinisme. Il assimile la thèse rétributiviste (Kant, Hegel) à un retour à la loi du talion : un mal ne sera jamais compensé par un autre mal. D’après lui, utilitarisme et rétributivisme génèrent un cercle vicieux car « passé un certain degré de souffrance, toute souffrance nouvelle cesse d’être ressentie ». Cette voie est socialement la moins efficace et la plus onéreuse. Il convient donc de repenser et de réformer nos modalités de réaction sociale au crime. Cette dernière est essentielle en ce qu’elle exprime la réprobation sociale à l’égard d’un acte socialement prohibé. Le blâme permet de réaffirmer la force de la loi, sa persistance, malgré sa violation. Et ajoute Durkheim, cette fonction symbolique « garderait toute sa raison d’être, alors même 35 36
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A. PRINS (1910), La défense sociale et les transformations du droit pénal, Bruxelles, Leipzig, Misch et Thron, 1910, p. 147. Nous nous référons ici à Fr. DIGNEFFE, « Durkheim et les débats sur le crime et la peine », in Debuyst et al., Histoire des savoirs sur le crime et la peine (T2). La rationalité pénale et la naissance de la criminologie, Bruxelles, Larcier, 2008, pp. 403447 ; ainsi que Ch. DEBUYST, « L’Ecole française dite « du milieu social », in ibidem, pp. 343-402.
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
qu’elle ne serait pas sentie comme douloureuse par celui qui la subit »37. L’auteur conçoit dès lors la sanction comme une « forme de communication sociale »38. Le principe pavlovien de la punition s’applique à l’animal qu’on dresse. Pour les sociétés humaines, le stimulus négatif devrait céder la place au renforcement positif. La sanction doit s’intégrer dans un processus éducatif. C’est à partir du moment où la sanction paraîtra « respectable »39 à celui qui la subit qu’elle permettra de réaffirmer la loi et de la rendre elle-même plus respectable aux yeux de qui l’a violée. La souffrance infligée risque à cet égard d’être contreproductive et contraire à l’intériorisation de la conscience collective par le déviant et, partant, contraire à sa réintégration dans l’ensemble social. En définitive, pour Durkheim, c’est précisément parce qu’elle est essentielle que la sanction ne devrait ni générer ni reposer sur la répulsion. Elle devrait donc se libérer de la souffrance. A la suite de Durkheim, Fauconnet analyse l’individualisation moderne de la responsabilité comme un moyen de « canaliser de manière toujours plus précise une responsabilité qui pourrait être assumée par la société entière »40. « Si, poursuit Fauconnet, au lieu de se défendre, la société regardait l’infracteur avec sympathie, essayait de le comprendre, elle pourrait le voir comme un être digne d’intérêt et ‘toute l’énergie qui se dépense à comprendre diminue celle qui se dépenserait à frapper’. Et il ajoute encore : ‘tout ce qui rend le coupable digne d’intérêt n’atténue pas seulement sa responsabilité, mais engage aussi la nôtre… La solidarité est aussi une forme de responsabilité’41 »42. La responsabilité se fait plus complexe « qui ne méconnaît pas la solidarité de toute une existence dans le crime d’un instant, ni la demi-complicité de tous dans le crime d’un seul » affirme Tarde43. En se référant aux communautés primitives, il relève deux formes de réactions sociales au crime. A l’égard des étrangers au groupe d’appartenance s’exercera la vendetta comme expression de l’instinct de défense ; mais à l’égard des membres du groupe, la peine s’inscrit dans le but de la réconciliation. La responsabilité collective est mise en branle en raison de l’instinct de sympathie qui s’exerce à l’égard des semblables. Or, selon Tarde, la modernité se 37
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E. DURKHEIM, L’éducation morale, (cours dispensé à la Sorbonne en 1902-1903), Paris, Félix Alcan, 1934, version électronique produite par J.-M. Tremblay, http://classiques.uqac.ca, p. 123. Fr. DIGNEFFE, op. cit., p.427. E. DURKHEIM, op. cit., p. 137. Fr. DIGNEFFE, op. cit., p. 445. P. FAUCONNET, La responsabilité. Etude de sociologie, Paris, Félix Alcan, 1928 (1ère édition 1920), version électronique produite par R. Toussaint et J.-M. Simonet, http://classiques.uqac.ca, p. 292. Fr. DIGNEFFE, op. cit., p.445. G. TARDE, Etudes pénales et sociales, Paris, Storck Masson, 1892, version électronique produite par R. TOUSSAINT, http://classiques.uqac.ca, p. 325.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
caractérise par un décloisonnement progressif des communautés d’appartenance et donc un accroissement des attachements et des devoirs collectifs, de la famille à la tribu, aux groupes élargis, à la concitoyenneté et graduellement à l’humanité. L’horizon des « semblables » s’élargissant, Tarde plaide pour un développement de la responsabilité collective et du sentiment de sympathie. C’est ainsi que la société se doit de renforcer les solidarités à l’égard des pauvres. Mais l’auteur va plus loin encore lorsqu’il affirme que la même solidarité devrait s’exercer à l’égard des fautifs. « Sans doute, la société sent-elle avoir des devoirs à l’égard des premiers [les pauvres]. Ne peut-on pas croire qu’elle en ait à l’égard des seconds [les criminels] ? Il ne suffit pas de dire que son but en les punissant doit être la diminution des délits… Elle doit avoir d’autres fins : l’amélioration du coupable si c’est possible, ou si c’est impossible et que l’élimination immédiate ne soit pas jugée nécessaire, son alimentation et son entretien… La société a le droit de se défendre, soit, mais plus qu’aucun de nous, elle est assez riche pour se payer le luxe de la bonté »44. Au courant positiviste qui ne sort que très accessoirement de l’individu pour déterminer les facteurs de crime, s’oppose donc un courant plus sociologique. Ce n’est plus tant le corps et l’âme du criminel mais la conscience collective et le corps social qui déterminent le crime et doivent aussi être traités. Avec cette double incorporation du crime, se mesurant aux limites du corps humain pour les uns, du corps social pour les autres, la justice doit se réformer et trouver sa légitimité non plus dans une métaphysique de la liberté, mais dans une physique qui détermine et maîtrise d’une part les facteurs qui conduisent au crime et d’autre part ceux qui permettent de rétablir (ou réaffirmer ?) les liens qui rattachent le criminel à la société. L’utilitarisme de Beccaria s’en trouve radicalisé. Il ne suffit plus de postuler la rationalité de l’individu capable d’agir librement en conséquence après avoir calculé le ratio entre le bien retiré de son forfait et le mal de la peine. La question de la responsabilité est avant tout sociale. La société est non seulement responsable de se défendre mais également responsable d’intégrer. Sa responsabilité est engagée à deux titres. En amont, elle a le devoir de traiter – ou de réduire – les facteurs criminogènes en améliorant les conditions matérielles et morales d’existence des individus les plus vulnérables et, en aval, elle a un devoir de solidarité à l’égard de ceux qui ont fauté et qu’il s’agit de réhabiliter. L’assistance apparaît donc comme une nécessité dans la lutte contre le crime. Elle est invoquée en amont comme moyen de prévention et en aval comme moyen de réhabilitation. C’est ici que le diagramme assurantiel et le diagramme disciplinaire se rapprochent. 44
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G. TARDE, La philosophie pénale, Paris, Cujas, 1972 (1ère édition 1890), version électronique produite par R. Toussaint, http://classiques.uqac.ca, T2 p.145.
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
Mais là où l’assistance devait améliorer le traitement de la question criminelle, dans les faits, on peut se demander si la question criminelle n’a pas dégradé l’assistance au point que l’on peut émettre l’hypothèse suivante : ce n’est pas tant l’assistance qui a été mobilisée pour faciliter l’intégration du pauvre et la réhabilitation du condamné ; mais plutôt la prison qui a été brandie pour menacer l’assisté d’une dégradation de ses conditions d’existence s’il ne se tenait pas à carreau. C’est ainsi que s’établit – selon les termes de Garland – un continuum pénal : « normalisation – éducation ou correction – ségrégation (prison ou bannissement) », comme gradation de la menace et du contrôle, ainsi que dégradation de la liberté et des conditions de vie (privation de gratifications sociales). En brossant le trait : à une extrémité, la sécurité sociale ; à l’autre, la prison. « Le secteur de la ségrégation opère comme le terminus coercitif du continuum pénal ; de la même manière que le secteur pénal dans son ensemble fournit l’horizon coercitif au service des institutions des affaires sociales »45. En quelque sorte, la discipline devient l’assurance ultime de la normalité. Ph. Mary exposera ainsi que, « pour Garland par exemple, les stratégies pénales modernes visent à renforcer les normes de conduite qui conditionnent l’accès aux prestations sociales et ce, de manière négative en sanctionnant les individus qui ne s’y plient pas. Comme auxiliaire des institutions de socialisation, elles ne se limiteront plus à l’intimidation, mais soumettront ces individus à une série d’institutions pour ensuite les renvoyer dans la société ou les en exclure définitivement »46. Aujourd’hui, le compromis garant de la paix sociale est remis en cause. Ses trois composantes – services publics, fiscalité, protection sociale – sont en effet mises à mal : une privatisation des services publics ; une fiscalité qui, moins qu’hier, réduit les inégalités ; un Etat social actif, éclipsant l’Etat-providence, comme retour de la discrimination entre pauvres « méritants ou non » qui, paradoxalement, en voulant forcer l’intégration par l’activation en vient à exclure ceux qui ne se conforment pas à la norme de l’employabilité flexible. Le diagramme assurantiel se rétrécit dangereusement. En effet, si les préoccupations de l’employabilité et l’incitation au travail ont de tout temps traversé l’assistance sociale, avec le jugement moral y adossé, le diktat s’est récemment renforcé : c’est maintenant au tour de l’assurance chômage de se transformer graduellement par l’imposition de nouveaux devoirs pour ses bénéficiaires47. On le constate en Europe, avec l’élargissement de la ‘disponibilité 45 46 47
D. GARLAND, Punishment and welfare. A history of penal strategies, Alderschot, Gower, 1985, p. 234. Ph. MARY, « Pénalité et gestion des risques : vers une justice « actuarielle » en Europe ? », Déviance et Société 2001/1, Volume 25, p. 35. En France, P. Rosanvallon remarquait : « Quiconque a participé à une commission locale d’insertion qui décide de la prorogation ou de la cessation du RMI ne peut manquer d’en être frappé : on semble parfois transporté au XIXème siècle dans
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au travail’, la remise en cause de l’ ‘emploi convenable’ et l’exigence accrue, imposée aux chômeurs, de participer à diverses activités (formation, aide à la recherche d’emploi, etc.)48. Dans la logique de l’Etat social actif, la période de chômage n’est plus un moment de garantie, d’assurance, mais bien de surveillance – la traque aux abus et à la fraude – et de filtrage par les services d’aide aux chômeurs, de culpabilité pour l’allocataire « d’être retombé si bas », signant progressivement le retour d’une société fondée sur la faute individuelle plutôt que sur le risque social. Comme si celui-ci, changeant « de nature et d’échelle », parce que devenu trop généralisé – chômage massif, structurel et de longue durée – était désormais « inassurable »49. Quant au niveau de l’allocation octroyée, l’obsession consiste à préserver l’incitation au travail des personnes jugées employables par un traitement des allocataires de moindre qualité que celui des salariés : le principe de less eligibility, dont la normativité n’a jamais disparu mais qui retrouve dans l’Etat social actif sa pleine vigueur, conduit ainsi à maintenir les transferts d’assistance sociale à un montant inférieur au salaire minimum, avec pour conséquence des prestations trop souvent en deçà des seuils de pauvreté50. En matière sociale, la less eligibility adosse subtilement sa légitimité sur deux registres. Celui de l’efficacité économique, en ce qu’il s’agit de convaincre les individus, perçus à nouveau comme amoraux et calculateurs, de contribuer aux richesses par leur mise à l’emploi plutôt que de ponctionner ces dernières en qualité d’assistés. Et celui de la justice – rétributive – en récompensant, par le sort plus enviable qui leur est réservé, le mérite de ceux qui font l’effort de travailler51. Chr. Trombert précise ainsi que la less eligibility, facilitant la « conduite des conduites », tend à influencer « le comportement des individus assistés (fonction interne d’incitation au travail en rendant l’assistance inconfortable, punition du non travail, stigmatisation) », mais aussi celui « des non assistés, des individus normaux (fonction externe) ». « Dans ce cas, la less eligibility dissuade le travailleur de devenir assisté en lui assurant un meilleur statut, il préserve aussi la croyance en une juste
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l’enceinte d’un bureau de bienfaisance, lorsqu’il s’agissait de distinguer les bons et les mauvais pauvres ». Voy. P. Rosanvallon, La nouvelle question sociale. Repenser l’Etatprovidence, Paris, Seuil, 1995, p. 211. S. MOREL, « De l’assurance chômage à l’assistance chômage : la dégradation des statuts », Revue de l’IRES, n° 30 - 1999/2. F. OST, Le temps du droit, Ed. Odile Jacob, Paris, 1999, p. 269. S. MOREL, « La transformation des obligations de travail pour les mères touchant l’assistance sociale : quels enseignements tirer pour les féministes ? », Lien social et Politiques, n° 47, 2002, p. 173. L’auteur fait explicitement référence au principe de less eligibility. Chr. TROMBERT, « Less eligibility et activation : une mise en perspective de l’activation des politiques sociales par l’étude des principes antérieurs d’articulation du travail et de la protection », 2008, in Coordination des intermittents et précaires, Le gouvernement des individus, Université ouverte (2007-2008), http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=3738.
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
hiérarchie sociale, reposant sur une infériorité sociale contrôlée de ceux qui ne travaillent pas par rapport à ceux qui travaillent. (…) En faisant de l’assisté et de l’assistance une figure repoussoir et dégradante, on incite ceux qui travaillent à rester sur le marché de l’emploi et à supporter leur sort en acceptant des conditions de travail dégradées. La less eligibility rend difficile le partage entre droits et devoirs du pauvre, entre aide, punition et contrôle. La suspicion sur la volonté de travail, la crainte d’aider trop, conduisent à des aides ciblées, conditionnelles et minimales, produisent un risque de ne pas aider assez et une stigmatisation inévitable. Le principe implique une forme d’exclusion justifiée puisque cette règle normative exprime aussi une sanction, une infériorité juste du revenu de l’assisté par rapport à ceux qui travaillent. Il indique une limite à la solidarité, ou à l’idée que le secours pourrait se fonder seulement sur un « droit à des conditions convenables d’existence » »52. Sous les trapézistes du cirque social, deux filets. Lorsque les mailles du premier, tressées à la solidarité, se distendent, certains, dans leur chute, passent au travers et s’écrasent plus bas, tels des insectes désorientés dans la toile d’araignée aux mailles resserrées du filet pénal53. A défaut de lutter contre les inégalités ou de couvrir suffisamment les risques de paupérisation, il reste à gérer les conséquences de l’exclusion et à garantir l’ordre social. « La misère de l’Etat social sur fond de dérégulation suscite et nécessite la grandeur de l’Etat pénal », avance alors L. Wacquant suivant une analyse aujourd’hui bien connue54.
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Chr. TROMBERT, op cit., p. 2. Il est intéressant de citer ici, Ch. Vanneste, se référant aux chercheurs Western, Beckett et Harding : « Partant ensuite du contraste entre le taux de chômage traditionnellement peu élevé aux Etats- Unis et celui, fort et persistant, des pays européens, les auteurs démontrent que le faible taux observé aux Etats-Unis dans les années 1990 est un artefact du taux élevé d’incarcération. Ainsi, l’emprisonnement massif, de 5 à 10 fois supérieur aux taux constatés dans les autres pays de l’OCDE, soustrait aux statistiques de chômage une masse nombreuse d’adultes en âge de travailler (1.7 million d’adultes dans les prisons américaines en 1998), et masque de ce fait un potentiel de chômage important. Procédant au calcul d’un « taux de chômage corrigé » dans lequel ils intègrent la population incarcérée parmi les sans-emplois, ils observent qu’entre 1976 et 1994, le chômage américain dépasse le chômage européen durant 17 des 18 années observées. Avec cette correction, le taux européen ne surpasserait le taux américain que durant l’année 1994. L’emprise pénale atteint ainsi un niveau tel qu’elle peut prétendre jouer un rôle effectif de variable d’ajustement du marché du travail. Le modèle américain fondé sur une idéologie de marché cacherait en réalité un interventionnisme massif de l’Etat sur le marché du travail, par l’intermédiaire de la politique pénale». Ch. VANNESTE, « Pénalité, criminalité, insécurité… et économie », in Délinquance et insécurité en Europe, Bruxelles, Bruylant, 2001, pp. 73-74. Voy. notamment son dernier ouvrage : L. WACQUANT, Punir les pauvres. Le nouveau gouvernement de l’insécurité sociale, Marseille, Agone, 2004.
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« Araignée du matin : chagrin. Araignée du ‘grand soir’ : bonsoir ! », songe Guy en suivant au plafond la cavale d’une bestiole poilue. A la table de jeu, il décroche. De toute façon il doit passer son tour. Son regard se perd à travers les grillages. Dans le ciel plombé, les jets platine menacent de s’écraser ; mais les parachutes dorés permettront à d’aucuns de se poser en douceur sur le toit des gratte-ciel où, pour le commun des mortels, l’ascenseur social est hors service et les issues de secours paraissent branlantes. L’aspirateur social, lui, fonctionne comme il faut, à plein, ravalant dans son ventre carcéral, les violents, turbulents et autres exclus. Si fort qu’entre les murs on ne s’entend même plus.
III. PERTINENCE ET CRITIQUE DE LA LESS ELIGIBILITY COMME FREIN ACTUEL A LA PROTECTION SOCIALE DES DETENUS
La boucle historique bouclée et le décor planté, quel rôle peut-on raisonnablement accorder, en ce début de 21e siècle, au principe de less eligibility dans la configuration de la (double) peine qu’est l’emprisonnement sans statut social pour le détenu ? On pourrait, classiquement, avancer ceci : il ne fait pas de doute qu’alors que le principe de « normalisation » devrait entraîner l’égalisation des conditions sociales et du statut juridique entre le citoyen libre et le prisonnier55, la less eligibility conserve, auprès d’une partie au moins de l’opinion publique et politique, une efficacité redoutable apte à geler tout progrès social attendu dans l’univers pénitentiaire56/57. Si la normalisation ambitionne, par la bonification du statut du détenu, une réinsertion réussie comme meilleur rempart contre la récidive, la less elegibility en revanche, met en exergue, comme nous l’avons déjà souligné, les fonctions de dissuasion et de sanction de mise à l’écart de la peine, par la dégradation des conditions de vie régnant dans la prison : la préoccupation dominante revient à ce que le détenu rétribue « par la souffrance un mal commis à
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Voy., sur ce principe de normalisation, la contribution dans le présent recueil de V. VAN PLANCKE et G. VAN LIMBERGHEN : « ‘La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons’. Le (non) droit des détenus à la sécurité sociale en Belgique ». Voy. en ce sens notamment D. KAMINSKI, « Droits des détenus, normalisation et moindre éligibilité », Criminologie, 43, 1, 2010 ; S. SNACKEN, « Normalisation » dans les prisons : concepts et défis. L’exemple de l’Avant-projet de loi pénitentiaire belge », in D. KAMINSKI et O. DE SCHUTTER (dir.), L’institution du droit pénitentiaire – Enjeux de la reconnaissance de droits aux détenus, Bruxelles, Bruylant, L.G.D.J., 2002, p. 136 ; R. Badinter, La prison républicaine, Paris, Ed. Fayard, 1992, p. 274. Le 29 août 2008, lors d’une visite à la prison de Metz-Queuleu, Rachida Dati a répondu avec une étonnante désinvolture à un détenu qui se plaignait du manque d’intimité en cellule où ils vivaient à plusieurs dans un espace insalubre et exigu : « Tenez-vous à carreau et vous serez chez vous, libre, avec une chambre et des toilettes séparées. La prison ce n’est pas l’hôtel ». Voy. Meurtre en prison, Le Monde, 13 septembre 2008.
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Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
autrui »58, et que par là, il soit dissuadé de recommencer. D. Kaminski observe ainsi que l’on considère encore implicitement à notre époque « que la prison n’est pas en soi la peine, mais que les conditions de vie doivent reproduire sans cesse une relation sanctionnelle entre l’administration et le détenu ». Il ajoute que « la fonction sanctionnatrice de la vie carcérale exige l’arbitraire, l’injustice même justifiée. Dès qu’on s’écarte de cela, il y a retour du discours de la ‘ moindre éligibilité’, y compris dans la littérature scientifique, et les conditions matérielles sont assimilées à des droits… indûs »59. On assiste dès lors à la coexistence de deux logiques théoriquement contraires, tout l’enjeu revenant à éviter que la less eligibility absorbe totalement l’ambition de la normalisation. Mais, pratiquement, cette contradiction conceptuelle doit être sérieusement relativisée aujourd’hui : vu le contexte de banalisation de la less eligibility dans la sphère sociale, et sa consécration renouvelée dans l’Etat social actif, la normalisation est-elle encore véritablement en mesure de tenir ses promesses d’émancipation dans l’univers pénitentiaire ? Autrement dit, la dynamique de la normalisation, par la porosité à laquelle elle invite entre l’extérieur et l’intérieur de la prison, ne tendrait-elle pas de nos jours à reproduire logiquement intra muros, et de façon plus corrosive encore, la less eligibility qui règne extra muros ?60 L’inclusion des détenus dans la sécurité sociale, à l’instar de la reconnaissance de tout autre droit conduisant à une démocratisation accrue de la vie carcérale, est d’autant plus hypothéquée qu’elle risquerait de mettre en péril la survie de la peine, par l’ « estompement de toute différence entre l’extérieur et l’intérieur »61. Mais si l’efficacité de l’institution carcérale dépend, en grande partie, du degré de rupture par rapport à l’univers familier, comment entretenir cette rupture dès lors que, comme l’ont démontré de nombreux auteurs, les expériences de vie des détenus rencontrés sont le plus souvent exprimées en termes de chute : « rupture familiale et décrochage scolaire précoces, précarité matérielle et dénuement affectif, absence de perspectives d’emploi »62. En d’autres termes, précisent les criminologues, 58 59
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Y. CARTUYVELS, « Le dilemme des prisons », in D. KAMINSKI et O. DE SCHUTTER (dir.), op cit., p. 115. D. KAMINSKI, « Les droits des détenus au Canada et en Angleterre : entre révolution normative et légitimation de la prison » in D. KAMINSKI et O. DE SCHUTTER (dir.), op cit., p. 111. Voy. en ce sens D. KAMINSKI, « Droits des détenus, normalisation et moindre éligibilité », Criminologie, 43, 1, 2010. Nous remercions très vivement l’auteur d’avoir enrichi nos réflexions par la transmission de son papier avant publication. F. BATHOLEYNS J. BEGHIN, PH. BELLIS, PH. MARY, « Le droit pénitentiaire en Belgique : limite aux contraintes carcérales ? », in D. KAMINSKI et O. DE SCHUTTER (dir.), op cit., p. 160. Voy. Ph. MARY, F. BATHOLEYNS, J. BEGHIN, « La prison en Belgique : de l’institution totale aux droits des détenus ? », Déviance et Société, 2006, vol. 30, n°3, p. 395, et les études citées par les auteurs.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
« l’ampleur prise par le chômage et l’affaiblissement des liens socio-affectifs alimentent la zone de désaffiliation sociale de manière telle que la rupture se consomme avant l’incarcération »63. Dans ce contexte, consolider le statut social des détenus diminuerait encore l’impact punitif et dissuasif de la privation de liberté puisque tant les conditions carcérales que l’identité sociale qui découle de l’enfermement ne seraient plus à craindre pour un individu déjà « trop » marginalisé, voire irréversiblement infériorisé : au vu des expériences préalables vécues par le « délinquant », un séjour en prison perdrait son « potentiel traumatique »... à moins d’en dégrader considérablement le contexte de vie64. Si, en matière sociale, la less eligibility puise sa justification dans le double registre de l’efficacité (économique) et de la justice, le même phénomène se produit en matière pénale. Parallèlement à son optique de sanction-rétribution et de dissuasion (l’efficacité de la peine), le principe de less eligibility cherche ainsi à asseoir et accroître sa légitimation en se revendiquant d’une certaine idée de « justice sociale », selon le « sens commun » du juste d’une communauté en repli majoritaire. Ainsi, aux Pays-Bas, dans les années 90, le principe d’un détenu par cellule fut remis en question, lui préférant le retour à l’encellulement à deux ou trois, en invoquant le fait que dans les homes de personnes âgées, les retraités devaient se partager la chambre, ce qui, par comparaison, semblait socialement injuste65/66. A sa façon, la position renforcée des victimes dans le processus pénal justifie une « moindre éligibilité décomplexée » lorsqu’elles prétendent être injustement privées de privilèges accordés aux détenus67. Le citoyen ‘honnête’, le gardien de prison, la victime, tous ne peuvent souffrir ‘l’injustice’ qui reviendrait à aligner la condition – juridique et sociale – du détenu sur la leur ou, pire encore, à se voir – ou simplement se croire – dépassés dans leur niveau de vie68. 63 64
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PH. MARY, F. BATHOLEYNS, J. BEGHIN, op cit., p. 396. Ph. COMBESSIE a déjà pu relever que certains détenus sont tellement miséreux que, paradoxalement, la prison leur est secourable, sur le plan sanitaire (abri et soins de santé « garantis » dans la prison), par exemple. Ph. COMBESSIE, Sociologie de la prison, Paris, Ed. La Découverte, 2009. J. FEEST, « Imprisonment and Prisoners’ Work : Normalization or Less Eligibility ? », Punishment & Society, Vol. 1, n° 1, 1999, p. 100. Tout en attestant de l’actualité du principe nuisible de less eligibility, Ph. COMBESSIE signale néanmoins que, selon lui, ce principe n’opère pas toujours pleinement dès lors que dans de nombreux pays occidentaux, les foyers d’accueil des plus démunis n’offriraient pas le même panel d’activités que celles proposées aux détenus. Voy. Ph. COMBESSIE, Sociologie de la prison, Ed. La Découverte, Paris, 2009, p. 62. D. KAMINSKI, « Droits des détenus, normalisation et moindre éligibilité », Criminologie, 43, 1, 2010. Ainsi les gardiens de prison ont tendance à se plaindre que leur statut est inférieur à celui des détenus lorsque le système de privilège ou leur statut hiérarchique est menacé par des changements institutionnels. Des rappels « passionnels » du principe de less eligibility sont inévitablement souvent énoncés pendant les périodes de récession économique. Voy. E. W. SIEH, « Less Eligibility : The Upper Limits Of Penal Policy », Criminal Justice Policy Review, 1989, Vol. 3, n° 2, p. 160.
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
Ainsi, comment comprendre l’exclusion des détenus d’une majeure partie des protections sociales ? La motivation ne peut résider exclusivement dans la dissuasion des populations à risque ou le durcissement de la sanction puisque, comme nous venons de l’exposer, de nombreux détenus sont déjà passés à travers les mailles du filet de la sécurité sociale avant leur incarcération. En fait, une raison connexe est vraisemblablement liée à la volonté affichée de ne pas ponctionner, pour des personnes « qui ne le méritent pas »69, les ressources limitées de la tirelire commune ; « le préjudice ainsi créé est alors compris comme inhérent à la peine »70. Les détenus ne sont pas jugés dignes – « éligible » - de l’effort social nécessaire71, et ce d’autant plus que la moindre éligibilité frappe déjà durement dans la société libre. En ce sens, l’idée selon laquelle le principe de less eligibility paralyse effectivement les meilleurs projets de réforme conserve toute sa pertinence72.
*** L’historique que nous avons succinctement dressé de la less eligibility indique qu’elle émane d’une époque où la condamnation morale des victimes de la pauvreté était répandue. Une époque marquée par le peu de compréhension quant à l’impact de la structure sociale et du système économique comme source de pauvreté avec, dans le chef des autorités publiques, une détermination à décourager l’individu de dépendre de l’Etat pour résoudre son indigence. Or, force est de constater aujourd’hui le spectre d’un nouveau consensus sur les fondements individuels de la justice sociale et pénale avec, au centre, les idées de responsabilité individuelle et de mérite73, la méritocratie étant ce « système fluide qui promeut et rétrograde les gens en permanence »74. La désagrégation de l’Etat social, moins capable de saisir des catégories collectives, entraîne une analyse et un traitement toujours plus 69
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J. FEEST précisait que des experts en sécurité sociale ont indiqué que le coût de l’incorporation des détenus dans le système de sécurité sociale serait compensé, dans une large mesure, par l’épargne accomplie en termes d’allocations versées à la famille des détenus (on ne dispose toutefois pas de chiffres exacts). Les obstacles à cette réforme ne seraient donc pas économiques et budgétaires mais politiques et légaux, tenant compte notamment du fait que d’autres groupes, tel des étudiants par exemple, ne pourraient bénéficier d’un traitement similaire. Voy. J. FEEST, op cit., p. 103 . E. SHEA, « Les paradoxes de la normalisation du travail pénitentiaire en France et en Allemagne », Déviance et Société, 2005/3, Volume 29, p. 362. E. SHEA, op cit., p. 362 Dans le même sens : E. W. SIEH, « Less Eligibility : The Upper Limits Of Penal Policy », Criminal Justice Policy Review, 1989, Vol. 3, n° 2, p. 169. Sur la question du mérite très largement débattue dans les pays anglo-saxons, voy. notamment les deux ouvrages critiques récents : M. DURU-BELLAT, Le mérite contre la justice, Paris, Sciences-Po, 2009, et entre autres, pp. 124 et s. ; Y. MICHAUD, Qu’est-ce que le mérite, Paris, Bourin Editeur, 2009, 294 p. E. SULEIMAN, Schizophrénies françaises, Paris, Grasset, 2008, p. 149.
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individualisé de l’exclusion, de la marginalité et de la déviance75 : un terreau propice à la vitalité du principe de « moindre éligibilité » qui privilégie, dans la société libre comme dans la prison, l’exigence de rétribution à celle de justice distributive. En réfléchissant « à moyens égaux », on ne peut alors certes orienter sa pensée que dans le sens de la descente, de la dégradation des conditions d’existence, c’est-à-dire d’une compression de la dignité. Et l’on considérera – comme le préconisent certains auteurs – qu’à salaire minimum égal, il convient de ne pas trop augmenter les revenus de remplacement pour éviter les pièges à l’emploi ; et tant pis s’ils se situent sous le seuil de pauvreté. Dans cette logique, on concevra naturellement que les privations des détenus doivent être pires encore. Il nous apparaît pourtant avec évidence que l’idée de less eligibility, par son ciblage catégoriel, est nuisible à la cohésion d’une société puisqu’elle trace entre le détenu et la population non-criminelle, mais aussi entre l’allocataire social et le travailleur, un lien ténu et négatif. Il faut dès lors trouver une alternative discursive positive au principe de less eligibility, une alternative qui, à l’intérieur de la politique sociale, voit dans ce principe, la négation de cette dernière : en effet, « les solidarités transversales ne peuvent être créées en opposant les groupes, fussent-ils des ‘exclus’. La transformation requise aujourd’hui doit donc aller dans le sens de la requalification des statuts économiques de la majorité des citoyens »76. La question revient ainsi à savoir jusqu’où la dignité est-elle compressible. Et jusqu’où sa compression reste compatible avec la reconnaissance de leur humanité aux détenus. Car, à moins, en effet, qu’à force d’accentuer les traits de la monstruosité, on dénie jusqu’à cette humanité, la question de la dignité se pose, incontournable. Il est temps de postuler l’incompressibilité de la dignité humaine et de revaloriser les conditions d’existence les plus basses en remontant le courant d’une sorte de more eligibility jusqu’aux bas salaires, dès lors qu’en rehaussant les minima sociaux, c’est toute la structure salariale qui est en cause. Il n’en va pas seulement de la défense de la dignité des détenus, et plus largement de celle de notre société dans son ensemble, mais aussi du renforcement du sens et de l’efficacité de la lutte contre la criminalité. Tout d’abord, il est possible que, valorisant ainsi les conditions de vie hors de la prison, la crainte de la perte de liberté, à elle seule, constituerait un repoussoir suffisant. Nous y croyons peu et ce n’est finalement pas l’essentiel. Car on sait par ailleurs que cette crainte n’est qu’un facteur minime et très instable de dissuasion77, que ce n’est pas la peur de la sanction qui fournit la meilleure garantie de conformité à l’ordre social. C’est l’adhésion à cet 75 76 77
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F. OST, op cit., p. 269. S. MOREL, « De l’assurance chômage à l’assistance chômage : la dégradation des statuts », Revue de l’IRES, n° 30 - 1999/2. Sur le peu d’efficacité de la fonction dissuasive de la sanction d’emprisonnement, voy. Ph. COMBESSIE, Sociologie de la prison, Paris, Ed. La Découverte, 2009, p. 19.
Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility
ordre social, à savoir la légitimité qu’on lui accorde qui est déterminante. Or la légalité seule ne fait pas la légitimité. Le droit, en soi, ne garantit pas la justice. La question fondamentale n’est donc pas tant « comment accroître la peur de la sanction ? » que « comment rendre l’ordre social (plus) respectable et partant plus tolérable, souhaitable, enviable, désirable, voire aimable ? ». Le respect des lois dépend principalement de la conviction que l’on a de leur légitimité et cette dernière s’effrite lorsque l’ordre social qu’elles incarnent est perçu et vécu comme structurellement injuste en raison des disparités et des exclusions qu’il génère. En ce sens, contribuer au renforcement de la justice sociale, à la réduction des inégalités, ne relève pas seulement d’un idéal – d’une douce utopie un peu surannée diront certains – mais aussi du pragmatisme. Ce n’est pas seulement une question de principe, mais aussi d’intérêt. Octroyer un revenu de base au moins équivalent au seuil de pauvreté, pour combattre plutôt que gérer cette pauvreté ou en soulager les effets, ne rendrait-il pas l’ordre social plus respectable ? Abandonner l’idée selon laquelle la privation de liberté seule ne constitue pas une peine suffisante et qu’il faut dégrader les conditions de détention à un niveau plus exécrable encore que les conditions d’existence déjà indignes des plus miséreux à l’extérieur des murs, ne le rendrait-il pas plus respectable ? Maintenir la solidarité collective comme lien matériel et symbolique avec les personnes – y compris les personnes détenues –, quel(s) que soi(en)t leur(s) mérite(s) ou leur(s) faute(s), ne serait-ce pas plus respectable ? Ne serait-ce pas réaffirmer avec force à ceux qui se sont écartés de la loi que la peine n’efface pas pour autant le lien ? Ne serait-ce pas redonner foi à ceux qui sont sans loi parce que sans foi ; sans foi en la légitimité d’une organisation sociale qui semble ne laisser aucune place ni à la faiblesse, ni à la faute, qui semble traquer la moindre défaillance pour exclure ? Faire face aux insécurités, c’est combattre, à parité, l’insécurité civile et l’insécurité sociale. Il existe aujourd’hui un très large consensus sur le fait que, pour assurer la sécurité civile (la sécurité des biens et des personnes), une forte présence de l’Etat est requise : il faut défendre l’Etat de droit. Il devrait en aller de même pour lutter contre l’insécurité sociale : il faudrait sauver l’Etat social. En effet, il ne peut exister de ‘société d’individus’, sauf à ce qu’ils se retrouvent clivés ou atomisés, sans que des systèmes publics de régulation n’imposent, au nom de la cohésion sociale, la prééminence d’un garant de l’intérêt général sur la concurrence entre les intérêts privés. (Castel, 2003)78.
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R. CASTEL, L’insécurité sociale. Qu’est-ce qu’être protégé ?, Paris, Seuil, La République des Idées, 2003.
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Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
Il faudra sans doute du temps pour remiser le Monopoly au placard et lui préférer des jeux de coopération ou de co-construction ; certainement du temps aussi pour y supprimer la case « prison » ; mais il est urgent de modifier les règle du jeu et de réaffirmer avec force le lien irréductible entre les cases « prison » et « départ ». Exclure au maximum l’exclusion de notre champ d’action, et renforcer la dignité des détenus, c’est consolider celle de l’ordre social et, partant, sa légitimité et sa respectabilité. Fortifier la sécurité – y compris sociale – des détenus, c’est renforcer – et non déforcer – celle de la société. « Hé, c’est à toi, tu peux jouer maintenant ! ». Guy est rappelé à l’ordre par ses compagnons qui s’impatientent. « Oh, ça va, ça va ! Les immeubles de l’avenue Louise ne vont pas s’envoler, hein ?! Je rêvais
… C’est pas interdit tout de même ! »
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SOCIALE ZEKERHEID VOOR GEDETINEERDEN – ALGEMENE CONCLUSIES
door Sonja SNACKEN Vakgroep Criminologie Vrije Universiteit Brussel
Deze studiedag heeft twee werelden bij elkaar gebracht die op het eerste zicht meestal los van elkaar functioneren: het sociaal beleid en het penaal beleid. Nochtans weten we uit onderzoek dat beide werelden op verschillende vlakken in interactie treden. In deze algemene conclusies wil ik het dan ook over deze interacties hebben, over hun politieke implicaties en over de legitimiteit van bepaalde beleidskeuzes.
I. INTERACTIES TUSSEN SOCIAAL EN PENAAL BELEID Onderzoek van 32 staten in de Verenigde Staten (Becket & Western, 2001) heeft aangetoond dat er een omgekeerde correlatie bestaat tussen het investeren in sociaal beleid door een bepaalde staat en de omvang van de gevangenispopulatie: hoe meer een overheid investeert in sociale voorzieningen (huisvesting, werkloosheiduitkeringen, onderwijs, gezondheidszorg, enz.) hoe lager de gevangenispopulatie in die staat is, en omgekeerd. De auteurs stelden bovendien een invloed vast van de aanwezigheid van etnische minderheden in die staat (hoe meer Afro-Americans en Hispanics in een staat, hoe hoger de gevangenispopulatie) en van de politieke verdeling (hoe meer Republikeins een staat is, hoe hoger de gevangenispopulatie). Dit bracht Becket en Western tot de conclusie dat sociale voorzieningen en vrijheidsberoving kunnen beschouwd worden als ‘two ways of dealing with social marginality’: beide beleidsvormen zijn prioritair gericht op sociaal kwetsbare groepen, maar hanteren hiervoor verschillende middelen (2001: 46). Deze correlatie is behoorlijk sterker eind jaren negentig dan in de jaren zeventig of tachtig, wat er op wijst dat er een groeiende kloof is tussen beide beleidskeuzes. Een gelijkaardige oefening werd verricht in Europa door Downes & Hansen (2006), met dezelfde resultaten, en ook hier is de correlatie opmerkelijk sterker in 1998 dan in 1988. Dit heeft Cavadino & Dignan (2006) ertoe gebracht om de Europese landen in drie categorieën in te delen. In navolging van Esping-Andersen (1990) worden er immers doorgaans drie soorten ‘welfare models’ onderscheiden: het Scandinavische model, dat het meest omvattend is, het Angelsaksische model, dat het meest neoliberaal is en het Continentaal Europese model, dat een middenvorm kent. De Scandinavische landen, gekenmerkt door ‘social democrat corporatism’ met uitgebreide welzijnsvoorzieningen, algemene sociale rechten en eerder linkse politieke koers, kennen de laagste sociale ongelijkheid en ook de laagste gevangenispopulaties in West-Europa (65-70 gedetineerden per 100.000 inwoners). De Angelsaksische landen, omschreven als ‘neoliberal’, met hun beperktere welzijnsvoorzieningen, beperkte sociale rechten en eerder rechtse politieke koers, kennen de hoogste sociale ongelijkheid en de hoogste gevangenispopulaties in West Europa (140/100.000 inwoners). De Continentaal Europese landen, omschreven als ‘conservative corporatism’, vormen op al deze vlakken een middencategorie, zowel qua welzijnsvoorzieningen, sociale rechten, politieke koers, sociale ongelijkheid als gevangenispopulaties (95-100/100.000 inwoners). België behoort volgens deze omschrijving eveneens tot deze laatste categorie.
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
Hoe kunnen we deze correlaties verklaren? We weten uit talloze onderzoeken dat deze correlaties los staan van de gepleegde criminaliteit in een land (Zimring & Hawkins, 1991; Snacken, Beyens & Tubex, 1995; Lappi-Seppällä, 2007). We willen hier drie elementen bendrukken in deze correlaties, die van bijzonder belang zijn voor onze discussies vandaag: de relatie tussen sociaal versus penaal beleid en de politieke legitimiteit van een overheid, de selectiviteit van de strafrechtsbedeling in het opleggen van vrijheidsberoving, en het belang van een sociaal beleid in het doorbreken van de vicieuze cirkel waar exgedetineerden dreigen in terecht komen.
A. SOCIAAL VERSUS PENAAL BELEID EN POLITIEKE LEGITIMITEIT In zijn vergelijkende studie van 25 Westerse en Europese landen, komt LappiSeppällä (2007) tot de vaststelling dat de Scandinavische landen, met hun hoogste welzijnsvoorzieningen en hun laagste gevangenispopulaties, gekenmerkt worden door een hoger vertrouwen van het publiek in de overheidsinstellingen en in hun medeburgers en in lagere onveiligheidsgevoelens. Hypothese is dan dat de legitimiteit van de overheid hier steunt op het sterk ontwikkelde sociaal beleid, waardoor er minder behoefte is aan een punitief discours en een repressief penaal beleid. In neoliberale landen, waar de staat de greep verloren heeft op de economie en het sociaal beleid sterk afgebouwd heeft, moet de overheid een nieuwe legitimiteit zoeken, en vindt die in een ‘harde aanpak’ van criminaliteit en onveiligheidsgevoelens, met een punitief discours en een repressief penaal beleid tot gevolg. Ondanks dit repressieve beleid, dat tot hogere gevangenispopulaties leidt, blijft het vertrouwen van het publiek in de overheid beduidend lager dan in de Scandinavische landen.
B. DE SELECTIVITEIT VAN DE STRAFRECHTSBEDELING IN HET OPLEGGEN VAN VRIJHEIDSBEROVING
Onderzoek naar besluitvorming van magistraten toont aan dat, naast de objectieve ernst van het misdrijf en het gerechtelijke verleden van de verdachte, ook de sociale kwetsbaarheid van een verdachte meespeelt in een beslissing om al dan niet een vrijheidsberoving op te leggen, zowel bij een voorlopige hechtenis als bij het vonnis (Vanhamme & Beyens, 2007). Werkeloosheid, de afwezigheid van sociale of familiale banden, financiële problemen worden gezien als extra risicofactoren op criminaliteit die een vrijheidsberoving rechtvaardigen. Hierdoor komen ook etnische minderheden (De Pauw, 1999) en bepaalde categorieën vreemdelingen (Snacken, 2007) sneller in de gevangenis terecht. Dit heeft als gevolg dat de gevangenispopulatie een zwakker socio-economisch profiel vertoont dan de doorsnee bevolking. De vrijheidsberoving versterkt dan nog eens deze kwetsbaarheid, aangezien zowel de detentie op zich als het stigma dat daar mee gepaard gaat, het in stand houden van familiale of sociale banden en het vinden van tewerkstelling na de invrijheidstelling bemoeilijken. Dit kan dan weer de mogelijkheden tot sociale re-integratie en dus het toekennen van een vervroegde 246
Sociale zekerheid voor gedetineerden - Algemene conclusies
invrijheidstelling vertragen, waardoor gedetineerden langer in de gevangenis blijven. Een sterk uitgebouwd sociaal beleid kan dus een positieve invloed uitoefenen op de mogelijkheden tot het vermijden van vrijheidsberoving, zowel bij de straftoemeting als bij de strafuitvoering.
C. SOCIAAL BELEID EN DE POSITIE VAN EX-GEDETINEERDEN Onderzoek naar risicofactoren voor recidive heeft het belang aangetoond van zowel ‘statische’ factoren (d.w.z. waar geen invloed kan op uitgeoefend worden), zoals leeftijd, type misdrijf en gerechtelijk verleden, als ‘dynamische’ factoren (waar wel kan rond gewerkt worden), zoals tewerkstelling, sociale netwerken en middelenmisbruik (Goethals & De Bie, 2000). De recente ‘desistance’ literatuur toont dan weer aan dat het stoppen met het plegen van criminaliteit gerelateerd is aan het opbouwen van een meer positieve identiteit en sociale rol, een proces waarin zowel persoonlijke als sociaal-economische factoren een rol spelen, zoals het vinden van vaste en voldoening verschaffende tewerkstelling, het aangaan van stabiele relaties (partner, huwelijk, ouderschap), het ontwikkelen van humaan kapitaal (individuele vaardigheden, kennis) en van sociaal kapitaal (sociale relaties en banden, vertrouwen, maatschappelijke betrokkenheid), het ontwikkelen van ‘generativity’ (de wens en de mogelijkheid om verantwoordelijkheid op te nemen voor de volgende generaties) (Maruna & Immarigeon, 2004; Aertsen, Goethals & Clonen, 2009). Hier is eveneens een maatschappelijke component aan verbonden, met name het sociale kapitaal dat in de samenleving aanwezig is en de bereidheid van die samenleving om een (ex-)gedetineerde (opnieuw) kansen te geven tot het uitbouwen van humaan en sociaal kapitaal (Farrall, 2004). Deze bereidheid moet reeds aanwezig zijn tijdens de detentie en verder gezet worden na de invrijheidstelling. Dit wijst op het belang van het politieke niveau, waarin beslist wordt om sociale voorzieningen, zoals o.a. sociale zekerheid, al dan niet toe te passen op (ex-)gedetineerden.
II. MENSENRECHTEN EN POLITIEKE BESLUITVORMING De Basiswet Gevangeniswezen en Rechtspositie van Gedetineerden van 12 januari 2005 is er gekomen via een consensus van alle democratische partijen, over meerderheid en oppositie heen. In de Parlementaire discussies werd er hierbij verwezen naar het belang van het verdedigen van mensenrechten als een morele plicht voor politici, ook als een deel van de bevolking dit niet zou ondersteunen (Kamer, 2004). De Europese context is hier belangrijk in geweest: bij het schrijven van de teksten binnen de Commissie Dupont werd expliciet rekening gehouden met de rechtsspraak van het Europees Hof voor de Rechten van de Mens (EHRM) en de standaarden en verslagen van het Europees Comité voor de Preventie van Foltering (CPT). Niettemin zijn een aantal bepalingen gesneuveld in het Parlement, doorgaans omdat ze te ver af stonden van de huidige realiteit, zoals het principe van één persoon per cel, of wegens de budgettaire implicaties, zoals het opnemen van de gedetineerden in het sociale zekerheidstelsel. Hiertoe was voorgesteld om de 247
Les limitations au droit à la sécurité sociale des détenus : une double peine ?
verplichte gevangenisarbeid af te schaffen en de gedetineerden een normaal loon toe te kennen, dat ze, na aftrek van kost en inwoon, zouden kunnen gebruiken voor het verwezenlijken van de in de Basiswet vastgelegde doelstellingen van de strafuitvoering: beperking van de detentieschade (steun aan familie), herstel aan het slachtoffer (schadevergoeding), rehabilitatie en voorbereiding van de re-integratie (normalisering van tewerkstelling en loon in vergelijking met de buitenwereld). De vrijwillige arbeid werd door het Parlement aanvaard (art. 81), het normale loon niet. Nochtans was dit voor België niets nieuws: na de Tweede Wereldoorlog werden de incivieken die tewerkgesteld werden in de mijnen in Limburg op dat vlak gelijkgeschakeld met de andere mijnwerkers, ook zij kregen een normaal loon en werden opgenomen in de sociale zekerheid (Ghistelinck, 2001). De discussie tijdens deze studiedag betreffende de heffing van bijdragen voor de sociale zekerheid bij gedetineerden krijgt uiteraard een totaal andere dimensie als men over een normaal loon spreekt of over een maximale vergoeding van +/- 1 euro per uur. De gevraagde bijdragen moeten proportioneel zijn met de draagkracht van de betrokkenen, maar ook met wat ze daarvoor verkrijgen. Wat betekent in dat verband ‘kost en inwoon’? Moeten gedetineerden betalen voor de in sommige Belgische gevangenissen nog steeds aanwezige combinatie van overbevolking, gebrek aan activiteiten en gebrek aan sanitaire voorzieningen, die door het CPT omschreven is als ‘onmenselijke en vernederende behandeling’ (CPT 1994, § 85)? Houdt ‘normalisering’ van het loon het risico in dat gedetineerden, zoals in sommige Amerikaanse privé gevangenissen, dan extra zouden moeten betalen voor alle aangeboden activiteiten, bezoek of telefoon? Anderzijds kunnen we enkel toejuichen dat de Belgische wetgever het belang van mensenrechten voor de legitimiteit van een beleid heeft erkend. Gedetineerden krijgen in de media en bij het ruimere publiek immers dikwijls slechts aandacht als er iets misloopt, hetzij tijdens de detentie (ontsnappingen, opstand) hetzij na de invrijheidstelling (ophefmakende recidive gevallen). Gevangenissen roepen derhalve eerder negatieve emoties op, waarbij periodes waarin er geroepen wordt om vergelding en afschrikking via strengere regimes (‘less eligibility’: omstandigheden in gevangenissen moeten slechter zijn dan de situatie van de armste personen in de buitenwereld) afgewisseld worden met periodes van ‘sociale amnesie’ of onverschilligheid (Chantraine, 2004). Een democratie wordt echter minder gekenmerkt door het overwicht van de wil van de meerderheid ten koste van de minderheid (wat De Tocqueville reeds ‘tyranny of the majority’ noemde’), dan wel door een beleid dat het algemeen belang nastreeft, inclusief het belang van een (onpopulaire) minderheid. In een representatieve democratie zijn het de politici die een beleid nastreven in het algemene belang, waarvoor zij dan verantwoording moeten afleggen ten opzichte van hun kiezers. In een rechtstaat wordt eenieder, inclusief de beleidsmakers, gestuurd door rationele en onpersoonlijke wetten en principes. Dit betekent dat politici weliswaar moeten luisteren naar vragen, emoties en bekommernissen van ‘het publiek’, maar dat zij een rationeel beleid moeten voeren dat in het algemeen belang noodzakelijk is en dat ook aan ‘het publiek’ moeten verantwoorden. Dergelijke representatieve democratie staat tegenover het 248
Sociale zekerheid voor gedetineerden - Algemene conclusies
‘populisme’, dat gekenmerkt wordt door een onmiddellijke, ongemedieerde invloed op het beleid van wat politici denken dat ‘het publiek’ wil, los van de reële effecten op het algemeen belang, en door een negatieve houding ten opzichte van de visies van experten uit praktijk en wetenschap (Taggert, 2000). Wat het strafbeleid betreft, heeft dit tot het begrip ‘populist punitiveness’ geleid (Bottoms, 1995), waarbij politici kiezen voor repressieve en punitieve opties vanuit de veronderstelling dat dit de voorkeur van ‘het publiek’ wegdraagt en dus hun kansen op herverkiezing vergroot. Onderzoek heeft evenwel aangetoond dat ‘de publieke opinie’ niet bestaat, dat de antwoorden betreffende bestraffing die respondenten in surveys geven afhankelijk zijn van hun achtergrond en van de informatie die ze krijgen, en dat er groot gebrek aan kennis is over de realiteit van criminaliteit en bestraffing (Roberts, Stalans, Indermauer & Hough, 2003). Bovendien lijken respondenten ogenschijnlijk tegengestelde visies te hebben, waarbij zij zowel strengere straffen vragen als steun betonen voor meer alternatieven voor de gevangenis (67% van de respondenten in de laatste Justitiemonitor) (Hoge Raad voor Justitie, 2008), zowel vergelding als reintegratie van veroordeelden belangrijk vinden. Deze aandacht voor mensenrechten als bron voor politieke legitimiteit wordt als een typisch kenmerk van de Europese identiteit beschouwd (Snacken, 2006). Denken we maar aan de verschillende houding in Europa en de Verenigde Staten ten aanzien van de doodstraf, waarbij deze straf in de VS gelegitimeerd wordt door de steun bij de publieke opinie, terwijl het verbod op toemeten of uitvoeren van de doodstraf in het Europese Charter of Fundamental Rights van de EU (2000) gesteund wordt op de menselijke waardigheid (zie Titel I, art. 2). Het concept ‘menselijke waardigheid’ is weliswaar complex. Het EHRM heeft aldus herhaaldelijk gesteld dat elke vrijheidsberoving een ‘inherent element of humiliation’ inhoudt, dat moet overschreden zijn om als een schending van art. 3 EVRM te kunnen beschouwd worden (voor een overzicht, zie van Zyl Smit & Snacken, 2009). Het Hof heeft echter nooit gedefinieerd wat dan dit ‘inherent element of humiliation’ is. In navolging van de bekende Vlaamse filosoof Leo Apostel zou ik ‘menselijke waardigheid’ willen omschrijven als ‘de erkenning van de individuele en sociale identiteit, de mogelijkheid om autonoom te beslissen, te kiezen en te handelen’ (Apostel, 1993). Geen enkele gevangenis, hoe open of liberaal ook, kan een regime aanbieden dat de volledige erkenning van die individuele en sociale identiteit en die volledige keuzevrijheid garandeert. Detentie is voor mij dan ook per definitie strijdig met de menselijke waardigheid, maar hoe meer gedetineerden hun individuele en sociale rechten kunnen uitoefenen, hoe meer zij in hun menselijke waardigheid erkend worden (van Zyl Smit & Snacken, 2009). Sociale zekerheid maakt in onze samenleving integraal deel uit van die menselijke waardigheid. Artikel 23 van de Gecoördineerde Grondwet van 1994 stelt immers dat eenieder het recht heeft een menswaardig bestaan te leiden. Wanneer we dit artikel grondig lezen, bemerken we dat dit artikel het recht op een menswaardig bestaan concretiseert naar vijf terreinen, zijnde (1) arbeid, (2) sociale zekerheid en bescherming van de gezondheid, (3) huisvesting, (4) bescherming van een gezond 249
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leefmilieu en (5) culturele en maatschappelijke ontplooiing. Er is geen enkele legitieme reden om gedetineerden daarvan uit te sluiten. De Basiswet stelt in art. 5 dat de vrijheidsberoving moet worden ten uitvoer gelegd in psychosociale, fysieke en materiële omstandigheden die de menselijke waardigheid eerbiedigen; art. 6 stelt, in navolging van het internationaal erkende principe van ‘imprisonment as punishment not for punishment’, dat de gedetineerde aan geen andere beperkingen van zijn rechten mag onderworpen worden dan diegenen die voortvloeien uit de veroordeling of uit de vrijheidsbeneming zelf of uit een wet; en art. 9 stelt dat, wat veroordeelden betreft, het strafkarakter van de vrijheidstraf uitsluitend bestaat in het geheel of gedeeltelijk verlies van de vrijheid van komen en gaan en de daarmee onlosmakelijk verbonden vrijheidsbeperkingen, en dat de strafuitvoering moet gericht zijn op o.a. de re-integratie van de veroordeelde. In navolging van BouverneDe Bie en Roose (2000), definiëren wij de notie ‘sociale (re-)integratie’ als een sociaal grondrecht dat eenieder de mogelijkheid geeft om een menswaardig bestaan te leiden. Waardoor we in onze verzorgingsstaat terug bij de Grondwet en de sociale grondrechten, inclusief sociale zekerheid, uitkomen. Maar leven we nog wel in een verzorgingsstaat? Volgens sommigen zijn we ook in Europa, zoals in de US en de UK, steeds meer op weg naar een neo-liberale ‘penale staat’ ter vervanging van de verzorgingsstaat (Wacquant, 2006). Volgens anderen leven we eerder in een ‘état social sécuritaire’ (Cartuyvels, Mary & Rea, 2000), waar we nog steeds veel investeren in sociale voorzieningen, maar waar de vergrijzing in onze samenleving het accent doet verschuiven naar pensioenen en gezondheidszorg ten koste van steun bij werkloosheid, die vooral de jongvolwassenen treft, die we dan eerder penaal aanpakken (Mary & Naegels, forthc.). Het feit dat deze studiedag over sociale zekerheid van gedetineerden doorgaat in het Huis der Parlementariërs zou ik als symbolisch willen aanzien. De behandelde thema’s houden immers belangrijke politieke keuzes in betreffende de vraag in welke samenleving we willen leven, één gebaseerd op sociale uitsluiting of op sociale insluiting. Dit laatste houdt in dat we zo weinig mogelijk mensen straffen door hen van hun vrijheid te beroven, en dat als dit echt niet anders kan, dit gebeurt met erkenning van hun rechten op een menswaardig bestaan. Op beide terreinen is er nog veel werk, maar de talrijke opkomst op deze studiedag toont aan dat wij niet alleen staan met deze wensen.
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VAN
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Sociale zekerheid voor gedetineerden - Algemene conclusies
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TABLE DES MATIERES Remerciements ......................................................................................................................... 7 Présentation........................................................................................................................... 11 Social et pénal......................................................................................................................... 12 Un regard positif ..................................................................................................................... 13 Un début de réparation............................................................................................................ 14 Het mensenrecht op sociale zekerheid voor gedetineerden : sprokkels en principes ...... 17 I. Het recht op sociale zekerheid............................................................................................. 19 A. Rechtsbronnen ............................................................................................................. 20 B. Internationaalrechtelijke betekenis............................................................................... 21 1. Internationaal Verdrag inzake economische, sociale en culturele rechten.............. 21 2. (Herzien) Europees Sociaal Handvest .................................................................... 24 a) Recht op sociale zekerheid (art. 12 (H)ESH) ................................................... 25 b) Recht op sociale en medische bijstand............................................................. 28 c) Recht op het genot van sociale welvaartsdiensten............................................ 30 3. Internationaal verdrag inzake burgerlijke en politieke rechten............................... 31 4. EVRM .................................................................................................................... 32 5. Samenvatting.......................................................................................................... 33 C. Betekenis in de Belgische rechtsorde........................................................................... 33 II. Het recht op sociale zekerheid voor gedetineerden ............................................................ 34 A. Specifieke bepalingen 34 1. Verenigde Naties .................................................................................................... 34 a) Internationaal Verdrag inzake Economische, Sociale en Culturele Rechten.... 34 b) IAO-verdragen................................................................................................. 35 c) Standaard minimumregels voor de behandeling van gevangenen.................... 35 2. Raad van Europa .................................................................................................... 36 a) (Herzien) Europees Sociaal Handvest.............................................................. 36 b) (Herzien) Europees Wetboek voor Sociale Zekerheid ..................................... 36 c) Europese gevangenisregels .............................................................................. 37 d) Europese Regels voor minderjarige overtreders die aan sancties of maatregelen onderworpen worden ........................................................................................ 37 e) Commissaris voor de mensenrechten ............................................................... 38 B. Algemene principes ..................................................................................................... 38 III. Elementen van toetsing van de Belgische situatie aan het mensenrecht op sociale zekerheid .......................................................................................................................... 44 IV. Besluit............................................................................................................................... 46 « La justice sociale ne saurait s’arrêter à la porte des prisons » Le (non) droit des détenus à la sécurité sociale en Belgique.............................................. 47 I. Introduction ......................................................................................................................... 49 II. Suspension des allocations de sécurité sociale ................................................................... 54 A. Question critique quant au choix politique .................................................................. 54 B. Critique de la mise en œuvre du choix politique.......................................................... 57 1. Nécessité d’une meilleure réglementation.............................................................. 57 2. Nécessité de cohérence........................................................................................... 59
a) Règles de suspension et dispositions interdisant le cumul................................60 b) Règles de suspension et prestations sociales assistancielles .............................61 c) Règles de suspension et prestations sociales assurantielles ..............................65 3. Nécessité d’une meilleure harmonisation avec le statut juridique externe des détenus.....................................................................................................................68 4. Nécessité d’une meilleure harmonisation avec le statut juridique « interne » des détenus.....................................................................................................................69 a) Plus de respect pour les droits sociaux fondamentaux des détenus...................70 b) Plus d’attention pour les droits des détenus à leur libération............................70 c) Plus d’attention pour la situation familiale des détenus....................................72 5. Nécessité d’une meilleure harmonisation avec les garanties essentielles du droit pénal ........................................................................................................................75 a) La présomption d’innocence.............................................................................75 b) Conséquence automatique de la peine..............................................................78 C. Contribution dans les frais d’entretien et d’hébergement comme alternative à la suspension...................................................................................................................78 1. L’option du prélèvement d’une contribution dans les coûts d’entretien et de séjour en meilleure conformité avec les droits sociaux fondamentaux des détenus ...........81 2. Cohérence avec la législation sociale......................................................................84 3. Une meilleure harmonisation avec les garanties pénales ........................................85 III. Travail pénitentiaire ..........................................................................................................87 A. Travail pénitentiaire comme source de droits à la sécurité sociale...............................88 B. Travail pénitentiaire comme obstacle aux droits à la sécurité sociale ..........................90 IV. Conclusion ........................................................................................................................92 Sociale gerechtigheid mag geen halt houden aan de gevangenispoort Het (niet erkend) recht op sociale zekerheid van gedetineerden in België........................99 I. Inleiding.............................................................................................................................101 II. Schorsing van socialezekerheidsuitkeringen.....................................................................106 A. Kritische vragen bij de beleidskeuze..........................................................................107 B. Kritiek op de implementatie van de beleidskeuze ......................................................109 1. Nood aan een betere regelgeving ..........................................................................110 2. Nood aan consistentie en coherentie .....................................................................111 a) Schorsingsregels en cumulatiebepalingen ......................................................112 b) Schorsing van socialebijstandsuitkeringen .....................................................113 c) Schorsing van socialeverzekeringsprestaties ..................................................117 3. Nood aan een betere afstemming op de externe rechtspositie van gedetineerden .120 4. Nood aan een betere afstemming op de interne rechtspositie van gedetineerden..121 a) Meer eerbied voor de sociale grondrechten van gedetineerden ......................121 b) Meer aandacht voor de rechten van de gedetineerde na de vrijlating .............122 c) Meer aandacht voor de gezinssituatie van de gedetineerde ............................123 5. Nood aan een betere afstemming op de essentiële waarborgen van het strafrecht ..........................................................................................................127 a) Vermoeden van onschuld ...............................................................................127 b) Automatisch gevolg van de straf ....................................................................129 c) Bijdrage in de kosten van onderhoud en verblijf als alternatief voor de schorsing .........................................................................................................130 III. Gevangenisarbeid ............................................................................................................138 A. Gevangenisarbeid als bron van socialezekerheidsrechten ..........................................139
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Sociale zekerheid voor gedetineerden - Algemene conclusies
B. Gevangenisarbeid als hinderpaal voor sociale-zekerheidsrechten.............................. 142 IV. Conclusie ........................................................................................................................ 144 Dagelijkse ervaringen van de psychosociale diensten van de strafinrichtingen met sociale zekerheid/sociale bijstand............................................................................... 151 I. Inleiding ...................................................................................................................... 153 II. Voorstelling en situering van de psychosociale diensten van de gevangenissen........ 154 III. Waarom is sociale zekerheid en sociale bijstand voor de gedetineerde en zijn gezinsleden zo een belangrijk aandachtspunt/werkpunt tijdens de detentie?............... 155 IV. Praktijken, bedenkingen en knelpunten.................................................................... 156 A. Het normaliseringbeginsel (Basiswet art. 6, § 1) ................................................. 156 B. Detentieschade voorkomen voor gedetineerde en zijn familie (Basiswet art. 6, § 2) ............................................................................................. 157 1. Sociale zekerheidstoestand ‘aanpassen’ aan detentietoestand ........................ 158 2. Sociale zekerheidstoestand in orde houden .................................................... 158 3. Uitwerken van reclasseringen met oog op psychosociale re-integratie of ter voorkoming van recidive (artikel 48 van wet 17 mei 2006)............................ 160 V. Structurele problemen................................................................................................ 162 A. Onuitvoerbaarheid van sociale zekerheidsregelgeving binnen de complexiteit van de gevangenis........................................................................................................ 162 B. Kenmerken van thuislozenpopulatie staat haaks op administratieve rationaliteit van sociale zekerheidsinstellingen ............................................................................... 162 C. Onbekendheid en/of onwil van sociale zekerheidsinstellingen met het sociaal statuut van (ex-)gedetineerden .............................................................................. 162 VI. Besluit ...................................................................................................................... 163 Le regard des détenus sur le droit à la sécurité sociale...................................................... 99 I. Durant la détention...................................................................................................... 168 II. La préparation de la sortie.......................................................................................... 172 III. En guise de conclusion ............................................................................................. 174 De gevangenis als alternatief voor de sociale zekerheid Berichten uit de Noordelijke Nederlanden ....................................................................... 175 I. Inleiding ...................................................................................................................... 177 II. De rechtsgrond van de uitsluiting .............................................................................. 179 III. Vormgeving van het uitsluitingscriterium ................................................................ 181 IV. De rechterlijke toets.................................................................................................. 183 V. Conclusie ................................................................................................................... 185 Une approche juridique comparée du travail pénitentiaire dans quelques pays européens ........................................................................................... 187 I. Introduction................................................................................................................. 189 II. L’influence du modèle salarial « extérieur ».............................................................. 193 A. Rémunération du travail : un principe… et des minima inférieurs ................... 193 B. Temps de travail : une référence générale aux normes « extra muros »............ 197 C. Santé et sécurité au travail : une identité (théorique) de protection .................. 198 D. Travail et protection sociale : l’absence ou non de lien révélatrice .................. 200 III. La prégnance du modèle sécuritaire intérieur ........................................................... 202 A. Modalités d’accès au travail : le choix majoritaire de l’incertitude .................. 202 B. Discipline professionnelle : l’ordre carcéral phagocytaire................................ 204
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C. Expression individuelle et collective : la négation tacite ou explicite ...............206 D. Arrêt du travail : la loi dominante de l’informel ..................................................209 1. La suspension de l’activité..............................................................................209 2. L’extinction de la relation...............................................................................210 IV. Conclusion ................................................................................................................212 Peine et sécurité sociale : le jeu de la less eligibility ..........................................................217 I. Les fondements de la less eligibility ou la froideur d’une spirale négative..................220 II. Aux origines de l’intersection entre les questions sociale et d’ordre social : les liaisons dangereuses ............................................................................................224 III. Pertinence et critique de la less eligibility comme frein actuel à la protection sociale des détenus................................................................................................................236 Sociale zekerheid voor gedetineerden – Algemene conclusies .........................................243 I. Interacties tussen sociaal en penaal beleid ...................................................................245 A. Sociaal versus penaal beleid en politieke legitimiteit...........................................246 B. De selectiviteit van de strafrechtsbedeling in het opleggen van vrijheidsberoving ...................................................................................................246 C. Sociaal beleid en de positie van ex-gedetineerden ...............................................247 II. Mensenrechten en politieke besluitvorming ...............................................................247 Bibliografie .....................................................................................................................251 Table des matières...............................................................................................................255
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